TourMaG.com - Monsieur Labbé, qui êtes-vous ?
Michel-Yves Labbé : Comme vous posez cette question systématiquement, j’ai été obligé de me pencher sur moi-même, ce que je n’avais pas fait depuis un bon moment !
J’aimerais bien vous dire que je suis un mec extraordinaire, avec des valeurs morales et spirituelles extrêmement élevées, mais finalement je me suis rendu compte que je suis un mec curieux, dans le sens de la curiosité.
De plus, je suis doté d’une mémoire quasi phénoménale. Et la conjonction des deux fait que, de temps en temps, j’ai pu donner l’impression d’être intelligent, cultivé…
Mais la question est intéressante, en ce sens que c’est le principe même de la philosophie : connais-toi toi-même, cette phrase de Socrate gravée sur le fronton de Delphes.
C’est un peu le principe de l’humanisme et j’aimerais qu’un jour, lorsque j’aurai disparu, qu'on dise de moi « c’était un humaniste » ! Je ne suis pas sûr que cela soit exactement le cas, mais au moins j’aurais essayé.
Et pour résumer, je suis essentiellement un garçon curieux. C’est ma principale qualité. D’ailleurs, lorsque j’ai embauché des gens, lorsqu’ils me confiaient qu’ils étaient curieux, je les engageais immédiatement.
Même s’ils ne possédaient pas les compétences requises. Il suffisait de me dire « je suis curieux » pour que j’embauche.
TourMaG.com - Vous en avez embauché beaucoup ?
MYL : Des curieux ? Sans doute. Vous savez, dans ma vie, j’ai embauché beaucoup de monde. Mais je crois que ceux qui n’étaient pas curieux, je ne les ai pas gardés très longtemps. Et les curieux ne m’ont jamais déçu.
Vous savez, un curieux va, dans la vie, trouver son intérêt. J’ai la réputation d’avoir été un garçon « toujours en avance » dans ce métier, d’avoir essayé de trouver des idées différentes.
Donc les gens qui étaient curieux, c’était formidable pour eux : chez Directours, je ne payais pas mieux que les autres, mais ces collaborateurs avaient conscience d’être dans une sorte de laboratoire d’idées. Et cela les sublimait un peu. Sans doute restaient-ils pour cette raison.
Mais il fallait aussi les surprendre sans arrêt, sortir du train-train…
Michel-Yves Labbé : Comme vous posez cette question systématiquement, j’ai été obligé de me pencher sur moi-même, ce que je n’avais pas fait depuis un bon moment !
J’aimerais bien vous dire que je suis un mec extraordinaire, avec des valeurs morales et spirituelles extrêmement élevées, mais finalement je me suis rendu compte que je suis un mec curieux, dans le sens de la curiosité.
De plus, je suis doté d’une mémoire quasi phénoménale. Et la conjonction des deux fait que, de temps en temps, j’ai pu donner l’impression d’être intelligent, cultivé…
Mais la question est intéressante, en ce sens que c’est le principe même de la philosophie : connais-toi toi-même, cette phrase de Socrate gravée sur le fronton de Delphes.
C’est un peu le principe de l’humanisme et j’aimerais qu’un jour, lorsque j’aurai disparu, qu'on dise de moi « c’était un humaniste » ! Je ne suis pas sûr que cela soit exactement le cas, mais au moins j’aurais essayé.
Et pour résumer, je suis essentiellement un garçon curieux. C’est ma principale qualité. D’ailleurs, lorsque j’ai embauché des gens, lorsqu’ils me confiaient qu’ils étaient curieux, je les engageais immédiatement.
Même s’ils ne possédaient pas les compétences requises. Il suffisait de me dire « je suis curieux » pour que j’embauche.
TourMaG.com - Vous en avez embauché beaucoup ?
MYL : Des curieux ? Sans doute. Vous savez, dans ma vie, j’ai embauché beaucoup de monde. Mais je crois que ceux qui n’étaient pas curieux, je ne les ai pas gardés très longtemps. Et les curieux ne m’ont jamais déçu.
Vous savez, un curieux va, dans la vie, trouver son intérêt. J’ai la réputation d’avoir été un garçon « toujours en avance » dans ce métier, d’avoir essayé de trouver des idées différentes.
Donc les gens qui étaient curieux, c’était formidable pour eux : chez Directours, je ne payais pas mieux que les autres, mais ces collaborateurs avaient conscience d’être dans une sorte de laboratoire d’idées. Et cela les sublimait un peu. Sans doute restaient-ils pour cette raison.
Mais il fallait aussi les surprendre sans arrêt, sortir du train-train…
J'ai fait... beatnik !
TourMaG.com - Justement, le voyage, ça vous est venu comment ?
MYL : Le voyage, je suis tombé dedans quand j’étais petit : mon père était un expatrié au Cambodge. Il travaillait sur le chantier de Sihanouk Ville et j’ai vécu une partie de mon enfance/adolescence au Cambodge. Ainsi qu’au Vietnam, à Saigon.
Malheureusement, ma mère est morte là-bas, de maladie et nous sommes rentrés en France. Là, on m’a collé en Bretagne !
Imaginez le fils d’un « expat » qui avait une vie dorée au Cambodge et qui débarque à Guingamp, en internat ! Dur.
Depuis la Bretagne, ce n’est pas vraiment mon « trip ». En même temps, je milite pour la Bretagne parce que plus les gens vont en Bretagne, moins ils viennent dans le Var.
J’ai donc voyagé très tôt et vers 15 ans, je suis parti… En Solex, en Europe et au Cap Nord !
TourMaG.com - C’est loin et c’est long !
MYL : Oui, mais il n’y a pas d’exploit : il y avait un mec qui arrivait de Mongolie à vélo ! Tout est relatif.
TourMaG.com - Et donc…
MYL : Je me suis trouvé assez rapidement seul. J’ai quitté la maison à l’âge de 17 ans et là, j’ai eu une vie pas facile, j’ai « fait » beatnik ».
Attention, faut pas confondre avec le « hippie ». Le beatnik, lui, voyageait et travaillait. Et j’ai eu tout un tas de petits boulots, à travers toute l’Europe, jusqu’en Turquie.
J’ai été plongeur, moi Français, dans un restaurant chinois à Copenhague, j’ai fait les foins, j’ai castré les maïs, c’est très dur de castrer les maïs, j’ai été DJ en Suède…
Ça a duré trois ans, j’ai eu un souci de santé et je me suis retrouvé sur la Côte d’Azur.
J’étais SDF, clodo… J’avais une tente sur la plage de Eze, mais j’avais déjà des goûts de luxe : ma copine avait un papa qui était chef à l’Hôtel de Paris à Monte Carlo. Donc, elle m’apportait des sandwiches au foie gras ! Que je mangeais sur mon banc, au bord de la route nationale.
Là, je n’étais pas vraiment bien, avec des godasses qui baillaient, un vieux tee-shirt pourri… Je crevais la dalle quand ma copine n’était pas là.
Du coup, je suis parti, en stop, à Angoulême, voir ma famille, bourgeoise et plutôt riche. La famille a été assez horrifiée de me voir, m’a royalement donné 500 francs (moins de 100€ actuels, ndDG) pour que je reparte tout de suite.
Agréable.
Avec ces 500 francs, je me suis « rhabillé » et je suis allé travailler : je distribuais des prospectus dans les boites aux lettres, « circular distributor ».
Mais je dois avoir un gène de chef : partout où j’ai travaillé, je suis rapidement devenu chef. Une semaine après, j’étais devenu chef d’équipe.
Puis, j’ai fait manutentionnaire, « manœuvre léger », dans un dépôt genre Amazon de l’époque et le mois suivant, j’étais chef d’équipe. Je suis devenu barman et rapidement chef des barmen, je dois avoir un truc…
MYL : Le voyage, je suis tombé dedans quand j’étais petit : mon père était un expatrié au Cambodge. Il travaillait sur le chantier de Sihanouk Ville et j’ai vécu une partie de mon enfance/adolescence au Cambodge. Ainsi qu’au Vietnam, à Saigon.
Malheureusement, ma mère est morte là-bas, de maladie et nous sommes rentrés en France. Là, on m’a collé en Bretagne !
Imaginez le fils d’un « expat » qui avait une vie dorée au Cambodge et qui débarque à Guingamp, en internat ! Dur.
Depuis la Bretagne, ce n’est pas vraiment mon « trip ». En même temps, je milite pour la Bretagne parce que plus les gens vont en Bretagne, moins ils viennent dans le Var.
J’ai donc voyagé très tôt et vers 15 ans, je suis parti… En Solex, en Europe et au Cap Nord !
TourMaG.com - C’est loin et c’est long !
MYL : Oui, mais il n’y a pas d’exploit : il y avait un mec qui arrivait de Mongolie à vélo ! Tout est relatif.
TourMaG.com - Et donc…
MYL : Je me suis trouvé assez rapidement seul. J’ai quitté la maison à l’âge de 17 ans et là, j’ai eu une vie pas facile, j’ai « fait » beatnik ».
Attention, faut pas confondre avec le « hippie ». Le beatnik, lui, voyageait et travaillait. Et j’ai eu tout un tas de petits boulots, à travers toute l’Europe, jusqu’en Turquie.
J’ai été plongeur, moi Français, dans un restaurant chinois à Copenhague, j’ai fait les foins, j’ai castré les maïs, c’est très dur de castrer les maïs, j’ai été DJ en Suède…
Ça a duré trois ans, j’ai eu un souci de santé et je me suis retrouvé sur la Côte d’Azur.
J’étais SDF, clodo… J’avais une tente sur la plage de Eze, mais j’avais déjà des goûts de luxe : ma copine avait un papa qui était chef à l’Hôtel de Paris à Monte Carlo. Donc, elle m’apportait des sandwiches au foie gras ! Que je mangeais sur mon banc, au bord de la route nationale.
Là, je n’étais pas vraiment bien, avec des godasses qui baillaient, un vieux tee-shirt pourri… Je crevais la dalle quand ma copine n’était pas là.
Du coup, je suis parti, en stop, à Angoulême, voir ma famille, bourgeoise et plutôt riche. La famille a été assez horrifiée de me voir, m’a royalement donné 500 francs (moins de 100€ actuels, ndDG) pour que je reparte tout de suite.
Agréable.
Avec ces 500 francs, je me suis « rhabillé » et je suis allé travailler : je distribuais des prospectus dans les boites aux lettres, « circular distributor ».
Mais je dois avoir un gène de chef : partout où j’ai travaillé, je suis rapidement devenu chef. Une semaine après, j’étais devenu chef d’équipe.
Puis, j’ai fait manutentionnaire, « manœuvre léger », dans un dépôt genre Amazon de l’époque et le mois suivant, j’étais chef d’équipe. Je suis devenu barman et rapidement chef des barmen, je dois avoir un truc…
Ouverture du premier restaurant écolo
TourMaG.com - Vous avez continué à voyager ?
MYL : Oui. En fait, je me suis retrouvé chef barman dans un grand bar devant la gare à Nice. Je n’y avais que des copains et j’ai organisé des raids automobiles… dans le Grand Nord.
La première année, on est allé au Cercle Polaire sans pneus à clous, vous voyez le genre, l’année suivante, c’était le Cap Nord en plein hiver mais avec des pneus à clous et l’année d’après, nous avons traversé la Russie. C’était l’Union Soviétique de Brejnev, durant l’hiver 1972.
Une aventure incroyable, extrêmement dangereuse, des étapes de 500 ou 600 kilomètres, sur des routes moyenâgeuses.
A chaque arrêt, avec nos voitures couvertes de stickers (les Russes appelaient cela la « makina multicolore », c’était quasi l’émeute : ils ne connaissaient pas ! Nous avons eu des souvenirs extraordinaires, mais c’était vraiment dangereux : plusieurs accidents mortels autour de nous, mais on s’en est sorti et c’était passionnant.
Nous avons traversé la Russie du Nord au Sud.
Du coup, de retour à Nice, nous commencions à être connus. Et tout allait bien.
Après, j’ai eu l’idée de monter un restaurant écologique dans l’arrière-pays niçois, juste avant la frontière italienne et dont tout le monde se foutait à l’époque ! L’écologie…
TourMaG.com - Un restaurant écolo ?
MYL : C’était une auberge de montagne, au pied d’un téléski d’une station familiale et nous ne servions que des produits locaux. C’était en haut du Col de Turini.
On allait chercher des lapins dans la vallée et je peux vous garantir que le lapin, quand il était dans le coffre de la voiture et que nous le remontions en haut, il était cuit !!
C’est de là qu’est venue ma passion de la conduite sur glace : au col de Turini, haut lieu du rallye de Monte Carlo, les types venaient s’y entraîner ! Et j’ai connu tous ces pilotes, Mäkinen et autres, qui nous ont donné par la suite l’idée d’organiser des rallyes en Finlande ou en Laponie.
En revanche, notre restau écolo, tout le monde s’en foutait et je suis reparti à Nice, après un accident de moto qui m’avait laissé une jambe pas très bien remise.
Avec cette jambe, je ne pouvais plus être barman. J’ai donc passé un diplôme, le CAPAS (diplôme de directeur de maisons de jeunes et de la culture) : je suis devenu directeur de cette maison à Nice, où l’on trouvait d’ailleurs beaucoup plus de vieux que de jeunes, surtout l’après-midi.
Et donc, j’ai décidé de les « sortir » : marché de Vintimille, puis de San Remo, puis un peu plus loin. Comme cette maison était située dans les quartiers HLM de Nice, il y avait un mélange socio-culturel très intéressant : karaté, football, etc. En créant des événements, j’avais réussi à sortir les gens de devant leurs télés.
J’avais même fait venir un cirque sur la dalle de ces HLM : un bordel, ce cirque. L’Office HLM refusait parce que l’urine d’éléphant ça pète les joints des dalles en ciment ! Il a fallu garantir l’arrosage après chaque passage d’un éléphant.
MYL : Oui. En fait, je me suis retrouvé chef barman dans un grand bar devant la gare à Nice. Je n’y avais que des copains et j’ai organisé des raids automobiles… dans le Grand Nord.
La première année, on est allé au Cercle Polaire sans pneus à clous, vous voyez le genre, l’année suivante, c’était le Cap Nord en plein hiver mais avec des pneus à clous et l’année d’après, nous avons traversé la Russie. C’était l’Union Soviétique de Brejnev, durant l’hiver 1972.
Une aventure incroyable, extrêmement dangereuse, des étapes de 500 ou 600 kilomètres, sur des routes moyenâgeuses.
A chaque arrêt, avec nos voitures couvertes de stickers (les Russes appelaient cela la « makina multicolore », c’était quasi l’émeute : ils ne connaissaient pas ! Nous avons eu des souvenirs extraordinaires, mais c’était vraiment dangereux : plusieurs accidents mortels autour de nous, mais on s’en est sorti et c’était passionnant.
Nous avons traversé la Russie du Nord au Sud.
Du coup, de retour à Nice, nous commencions à être connus. Et tout allait bien.
Après, j’ai eu l’idée de monter un restaurant écologique dans l’arrière-pays niçois, juste avant la frontière italienne et dont tout le monde se foutait à l’époque ! L’écologie…
TourMaG.com - Un restaurant écolo ?
MYL : C’était une auberge de montagne, au pied d’un téléski d’une station familiale et nous ne servions que des produits locaux. C’était en haut du Col de Turini.
On allait chercher des lapins dans la vallée et je peux vous garantir que le lapin, quand il était dans le coffre de la voiture et que nous le remontions en haut, il était cuit !!
C’est de là qu’est venue ma passion de la conduite sur glace : au col de Turini, haut lieu du rallye de Monte Carlo, les types venaient s’y entraîner ! Et j’ai connu tous ces pilotes, Mäkinen et autres, qui nous ont donné par la suite l’idée d’organiser des rallyes en Finlande ou en Laponie.
En revanche, notre restau écolo, tout le monde s’en foutait et je suis reparti à Nice, après un accident de moto qui m’avait laissé une jambe pas très bien remise.
Avec cette jambe, je ne pouvais plus être barman. J’ai donc passé un diplôme, le CAPAS (diplôme de directeur de maisons de jeunes et de la culture) : je suis devenu directeur de cette maison à Nice, où l’on trouvait d’ailleurs beaucoup plus de vieux que de jeunes, surtout l’après-midi.
Et donc, j’ai décidé de les « sortir » : marché de Vintimille, puis de San Remo, puis un peu plus loin. Comme cette maison était située dans les quartiers HLM de Nice, il y avait un mélange socio-culturel très intéressant : karaté, football, etc. En créant des événements, j’avais réussi à sortir les gens de devant leurs télés.
J’avais même fait venir un cirque sur la dalle de ces HLM : un bordel, ce cirque. L’Office HLM refusait parce que l’urine d’éléphant ça pète les joints des dalles en ciment ! Il a fallu garantir l’arrosage après chaque passage d’un éléphant.
Carole Pellicer était mon assistante
Avec sa bande de copains près de Tchernobyl, à Pripyat la ville voisine abandonnée dans l'urgence après l’explosion - MYL
TourMaG.com - Mais vous continuiez les sorties ?
MYL : A force de promener les petits vieux, nous sommes partis à Rome. Ce n’est pas très loin de Nice. Et, à cette époque, chaque mercredi, le Pape sortait sur la place Saint-Pierre. Et lorsque vous étiez sur la Place, vous receviez l’indulgence plénière pour tous vos péchés !
Donc, c’était un bon coup, ça ! Surtout à un certain âge.
TourMaG.com - Juste une digression : avec un nom pareil, Labbé, vous êtes catho ? Croyant ?
MYL : Je suis baptisé. Je suis un agnostique… mystique, comme disait Jean d’Ormesson !
Donc, on faisait du Rome, de plus en plus, et ça marchait le feu de Dieu, si je puis me permettre !
En fait, je dois toute ma carrière au Pape !
Un jour, Paul VI meurt. Je me suis dit que, pour son enterrement, il fallait « faire un coup ». Je suis allé voir l’archevêché de Nice et je leur ai proposé, moyennant de leur part une communication dans les journaux de Nice, de leur offrir deux places par bus pour leurs curés. Gratuit !
Pour l’enterrement de Paul VI, j’ai rempli quatre autocars ! Et là, j’avais monté cette opération à mon compte…
Puis vint le couronnement du Pape suivant, Jean-Paul 1er. On refait la même opération avec l’Archevêché, très belle organisation, c’était magnifique.
Ironie du sort, trois semaines après, le Pape meurt. J’ai reconduit l’opération de l’enterrement… et le couronnement du suivant, Jean-Paul II.
Et du coup, je me suis retrouvé avec un paquet de pognon. J’étais lancé dans le tour-operating, mais je dois tout au Pape.
TourMaG.com - Et donc vous vous lancez ?
MYL : En fait, je rencontre deux jeunes qui avaient une agence de voyages à Cagnes-sur-Mer et qui montaient un tour-opérateur régional. Je m’associe avec eux et nous créons Plein Vent Voyages.
Carole Pellicer était mon assistante.
TourMaG.com - Le Plein Vent actuel ?
MYL : Mais oui. Et, à l’époque, je faisais beaucoup d’accompagnement en autocars, dans toute l’Europe. Cela m’a beaucoup éduqué et j’ai appris beaucoup de choses en culture générale.
Et puis, en 1985, j’ai eu une idée géniale (j’en avais une tous les matins à l’époque, à midi elle était déjà moins géniale et le soir j’abandonnais).
Mais là, je décide de monter une ligne d’hydroglisseurs entre Monaco, Nice, Cannes et Saint-Tropez. Je loue un navire italien, j’obtiens une dérogation pour assurer la liaison, l’Europe n’étant pas encore opérationnelle à ce moment.
Le problème c’est que les marins niçois, qui n’avaient jamais pu réaliser une telle liaison, se sont émus et m’ont bloqué le bateau !
Sans compter que les marins italiens qui naviguaient sur mon bateau ont causé une panne très grave sur le moteur ! Bref, de réparations en immobilisation du bateau, sans parler d’un redressement de TVA, j’ai quasi perdu tout ce que j’avais… en trois mois.
Du coup, j’ai revendu mes parts de Plein Vent et suis parti à Paris.
MYL : A force de promener les petits vieux, nous sommes partis à Rome. Ce n’est pas très loin de Nice. Et, à cette époque, chaque mercredi, le Pape sortait sur la place Saint-Pierre. Et lorsque vous étiez sur la Place, vous receviez l’indulgence plénière pour tous vos péchés !
Donc, c’était un bon coup, ça ! Surtout à un certain âge.
TourMaG.com - Juste une digression : avec un nom pareil, Labbé, vous êtes catho ? Croyant ?
MYL : Je suis baptisé. Je suis un agnostique… mystique, comme disait Jean d’Ormesson !
Donc, on faisait du Rome, de plus en plus, et ça marchait le feu de Dieu, si je puis me permettre !
En fait, je dois toute ma carrière au Pape !
Un jour, Paul VI meurt. Je me suis dit que, pour son enterrement, il fallait « faire un coup ». Je suis allé voir l’archevêché de Nice et je leur ai proposé, moyennant de leur part une communication dans les journaux de Nice, de leur offrir deux places par bus pour leurs curés. Gratuit !
Pour l’enterrement de Paul VI, j’ai rempli quatre autocars ! Et là, j’avais monté cette opération à mon compte…
Puis vint le couronnement du Pape suivant, Jean-Paul 1er. On refait la même opération avec l’Archevêché, très belle organisation, c’était magnifique.
Ironie du sort, trois semaines après, le Pape meurt. J’ai reconduit l’opération de l’enterrement… et le couronnement du suivant, Jean-Paul II.
Et du coup, je me suis retrouvé avec un paquet de pognon. J’étais lancé dans le tour-operating, mais je dois tout au Pape.
TourMaG.com - Et donc vous vous lancez ?
MYL : En fait, je rencontre deux jeunes qui avaient une agence de voyages à Cagnes-sur-Mer et qui montaient un tour-opérateur régional. Je m’associe avec eux et nous créons Plein Vent Voyages.
Carole Pellicer était mon assistante.
TourMaG.com - Le Plein Vent actuel ?
MYL : Mais oui. Et, à l’époque, je faisais beaucoup d’accompagnement en autocars, dans toute l’Europe. Cela m’a beaucoup éduqué et j’ai appris beaucoup de choses en culture générale.
Et puis, en 1985, j’ai eu une idée géniale (j’en avais une tous les matins à l’époque, à midi elle était déjà moins géniale et le soir j’abandonnais).
Mais là, je décide de monter une ligne d’hydroglisseurs entre Monaco, Nice, Cannes et Saint-Tropez. Je loue un navire italien, j’obtiens une dérogation pour assurer la liaison, l’Europe n’étant pas encore opérationnelle à ce moment.
Le problème c’est que les marins niçois, qui n’avaient jamais pu réaliser une telle liaison, se sont émus et m’ont bloqué le bateau !
Sans compter que les marins italiens qui naviguaient sur mon bateau ont causé une panne très grave sur le moteur ! Bref, de réparations en immobilisation du bateau, sans parler d’un redressement de TVA, j’ai quasi perdu tout ce que j’avais… en trois mois.
Du coup, j’ai revendu mes parts de Plein Vent et suis parti à Paris.
Naissance du Club "All Inclusive" !
TourMaG.com - Nouveau départ ?
MYL : En quelque sorte. Chez Plein Vent, j’étais plutôt bon sur la Grèce et ça marchait bien. Je suis allé voir Monsieur Héliopoulos, patron de Cruisair qui m’a engagé et permis de vivre correctement et y faire… une nouvelle carrière.
TourMaG.com - Quand on possède, comme vous, cette curiosité, cette joie de vivre, comment prend-on ce genre de situation ?
MYL : C’était Rudyard Kipling qui disait « Tu peux en un jour voir disparaître l’œuvre de ta vie… ». Oui, c’est dur, mais j’ai eu de la chance de trouver des gens comme Héliopoulos qui m’a beaucoup aidé. J’avais aussi une valeur pour lui.
Vous savez, avec Plein Vent, on avait pris un petit village. Dans ce village, on avait pris tout ce qui était possible en logements : des hôtels deux ou trois étoiles, des chambres chez l’habitant.
On avait négocié avec les tavernes du coin tout ce qui était restauration. On donnait des « bons » à nos clients et ils allaient manger où ils voulaient. C’était extraordinaire…
TourMaG.com - Les prémices du « all inclusive » de maintenant ?
MYL : Ah non, ça, je l’ai inventé après ! Donc, je travaillais pour Cruisair, en tant que patron du développement. A l’époque, Cruisair a racheté AirTour et donc je travaillais à cheval entre les deux. C’était passionnant.
Puis Cruisair et Airtour sont devenus le Groupe Heliopoulos, a fait fusion avec Touropa et puis c’est devenu Chorus, avec Gaël de la Porte du Theil.
Moi, à cette époque, j’ai commencé à développer les Kappa Clubs, à Marrakech, en Turquie, et j’ai conçu le premier club « all inclusive » à Saint Domingue. J’étais le premier à lancer la destination sur le marché français. Personne n’y allait…
Quant au « all inclusive », ce n’est pas du tout un concept marketing. En 1986, à Saint Domingue, on ne trouvait pas un mec qui sache lire ou écrire. On ne pouvait pas dire « Monsieur Untel, il a un café à la 22 » !
Conclusion, il fallait que tout soit inclus, y compris les cigares et les cigarettes ! Et commercialement, ça a très bien marché, sauf que le proprio de l’hôtel où nous étions à Porto Plata n’a pas joué le jeu, ni respecté les accords. C’était devenu très tendu !
J’ai donc, étant dans ma période James Bond, déménagé le Club à la cloche de bois. C’était épique, mais nous avons porté plainte en France et nous avons gagné bien entendu !
C’était le premier club all inclusive du marché français à Saint Domingue. Ça marchait très bien, sauf que c’est devenu une catastrophe !
TourMaG.com - A l’époque, vous vendiez par le réseau des agences de voyages ?
MYL : Oui, bien sûr. On préparait la brochure en juillet pour l’année d’après, on la sortait en décembre, et en février, on avait tout vendu. S’il en restait un peu, on disait « tiens, ce n’est pas une bonne saison ». C’est fou ce que ça a changé !
MYL : En quelque sorte. Chez Plein Vent, j’étais plutôt bon sur la Grèce et ça marchait bien. Je suis allé voir Monsieur Héliopoulos, patron de Cruisair qui m’a engagé et permis de vivre correctement et y faire… une nouvelle carrière.
TourMaG.com - Quand on possède, comme vous, cette curiosité, cette joie de vivre, comment prend-on ce genre de situation ?
MYL : C’était Rudyard Kipling qui disait « Tu peux en un jour voir disparaître l’œuvre de ta vie… ». Oui, c’est dur, mais j’ai eu de la chance de trouver des gens comme Héliopoulos qui m’a beaucoup aidé. J’avais aussi une valeur pour lui.
Vous savez, avec Plein Vent, on avait pris un petit village. Dans ce village, on avait pris tout ce qui était possible en logements : des hôtels deux ou trois étoiles, des chambres chez l’habitant.
On avait négocié avec les tavernes du coin tout ce qui était restauration. On donnait des « bons » à nos clients et ils allaient manger où ils voulaient. C’était extraordinaire…
TourMaG.com - Les prémices du « all inclusive » de maintenant ?
MYL : Ah non, ça, je l’ai inventé après ! Donc, je travaillais pour Cruisair, en tant que patron du développement. A l’époque, Cruisair a racheté AirTour et donc je travaillais à cheval entre les deux. C’était passionnant.
Puis Cruisair et Airtour sont devenus le Groupe Heliopoulos, a fait fusion avec Touropa et puis c’est devenu Chorus, avec Gaël de la Porte du Theil.
Moi, à cette époque, j’ai commencé à développer les Kappa Clubs, à Marrakech, en Turquie, et j’ai conçu le premier club « all inclusive » à Saint Domingue. J’étais le premier à lancer la destination sur le marché français. Personne n’y allait…
Quant au « all inclusive », ce n’est pas du tout un concept marketing. En 1986, à Saint Domingue, on ne trouvait pas un mec qui sache lire ou écrire. On ne pouvait pas dire « Monsieur Untel, il a un café à la 22 » !
Conclusion, il fallait que tout soit inclus, y compris les cigares et les cigarettes ! Et commercialement, ça a très bien marché, sauf que le proprio de l’hôtel où nous étions à Porto Plata n’a pas joué le jeu, ni respecté les accords. C’était devenu très tendu !
J’ai donc, étant dans ma période James Bond, déménagé le Club à la cloche de bois. C’était épique, mais nous avons porté plainte en France et nous avons gagné bien entendu !
C’était le premier club all inclusive du marché français à Saint Domingue. Ça marchait très bien, sauf que c’est devenu une catastrophe !
TourMaG.com - A l’époque, vous vendiez par le réseau des agences de voyages ?
MYL : Oui, bien sûr. On préparait la brochure en juillet pour l’année d’après, on la sortait en décembre, et en février, on avait tout vendu. S’il en restait un peu, on disait « tiens, ce n’est pas une bonne saison ». C’est fou ce que ça a changé !
J'ai monté Directours sans un rond !
TourMaG.com - Donc la période beatnik, c’était fini. Et la vie de famille ?
MYL : Oui, ça c’était fini. Je me suis marié avec une danseuse et nous n’avons pas eu d’enfants. Nous n’avons pas pu mener à bien deux grossesses et à la seconde, j’ai décidé d’arrêter.
Vie de famille ? Quand on est constamment sur les routes, dans les airs… je dois dire que je lui en ai fait voir de toutes les couleurs à ma pauvre épouse. Mais j’étais comme ça, il fallait que je bouge, que j’aille au bout de mes rêves. Toujours la curiosité !
Ce qui m’intéresse dans ce métier, ce n’est pas tellement de voir des palmiers, des cocotiers ou des plages de rêve. C’est surtout de rencontrer des gens, c’est ça qui est bien dans ce métier.
Au bout d’un moment, l’avion ça t’emmerde, le voyage en lui-même ne présente pas d’intérêt. Ce qu’il y a de formidable, c’est d’arriver quelque part où tu apportes du travail très souvent et ces gens vont te donner les clés du pays.
Si, bien entendu, on prend du temps pour poser des questions, on va apprendre en une soirée ce qu’un touriste moyen va mettre 15 jours à comprendre. C’est ça qui est magnifique dans notre métier.
J’ai toujours aimé ça et lorsque j’étais chez Chorus, je voyageais 200 jours par an.
TourMaG.com - Mais vous avez quitté Chorus ?
MYL : Après la fusion avec Jet tours, alors que personne ne voulait me virer, bien au contraire.
Vous savez, à l’époque, Chorus était détenu à moitié par TUI, à moitié par Havas. Moi, je me battais sur les prix et Havas - c’était Christophe Charpentier - se gavait sur les commissions.
En fait, j’étais plus proche des Allemands. Contrairement à leur image de « gros balourds », ils savaient travailler et ils sont très bons. Ils m’ont beaucoup appris.
Et c’est là que je me suis dit qu’il fallait commercialiser directement.
TourMaG.com - Cependant, vous avez décidé de quitter le « confort » pour fonder une nouvelle entreprise ?
MYL : Oui, en 1993, alors que tout allait mal : chômage, économie déficiente, c’était tout noir. Mais j’ai pris ma décision et du jour où je l’ai prise, je me suis retrouvé avec un calme olympien dans la tête. Incroyable.
J’avais le choix : monter un TO vers la Grèce… ou en collaboration avec Emirates, créer Emirates Holidays. C’était long et comme vous le savez, si vous disparaissez du marché, vous êtes vite oublié. J’ai décidé de monter Directours.
TourMaG.com - Encore une innovation, dans la mesure où les tarifs ne figuraient pas sur la brochure mais seulement sur Minitel… Toujours la curiosité ?
MYL : Oui. Dégriftours faisait ça avec les « invendus » des TO. Moi, j’étais un vrai voyagiste, avec des brochures : en fait, j’ai été le premier outil de Yield Management.
Les compagnies aériennes ou les hôteliers me donnaient des prix indécents et personne ne savait, comme je faisais du « package », si c’était la compagnie, l’hôtel… ou bien ils pouvaient toujours dire que c’est Labbé qui s’est gourré dans ses marges.
Donc je me suis retrouvé à être le premier outil du Yield Management. Est-ce que c’est de la curiosité ? Oui, j’avais eu la curiosité d’imaginer comment cela allait se dérouler. Parce que j’avais vu qu’aux Etats-Unis, c’était la déréglementation aérienne, la suppression des charters, les vols de point à point.
Et j’ai eu cette idée avant tous les autres… et ça marche bien.
C’était en 1994 et j’avais monté Directours sans un rond ! En fait, c’est l’APS qui m’a mis le pied à l’étrier, en me faisant racheter une agence de voyages à Versailles.
Cette agence possédait trois points de ventes, lesquels disposaient d’un système informatique particulièrement performant… mais je n’étais pas fait pour être agent de voyages.
Donc, j’ai acheté une petite boite sur les Champs-Elysées, juste pour son numéro de téléphone - 01 45 62 62 62 - et j’ai monté Directours.
TourMaG.com - Mais avec quel argent ?
MYL : Je l’ai acquise pour 1 Franc, mais j’ai pris les dettes. Et j’ai payé en 2000 ! Arrive septembre 95 et je vois, moi qui m’intéressais déjà à l’arrivée d’Internet, que s’organisait un congrès à Kansas City sur le thème Internet et le tourisme.
J’y vais. Et j’ai compris immédiatement, contrairement à beaucoup d’Américains, ce qu’était Internet : un minitel qui allait plus vite et en couleurs !
Du coup, je suis resté à la conférence et lorsque je suis revenu à Paris j’ai dit textuellement à mes collaborateurs en parlant d’Internet : « C’est Gutenberg » !
Et nous avons décidé, avec mon adjoint, de construire le premier site web du tourisme.
MYL : Oui, ça c’était fini. Je me suis marié avec une danseuse et nous n’avons pas eu d’enfants. Nous n’avons pas pu mener à bien deux grossesses et à la seconde, j’ai décidé d’arrêter.
Vie de famille ? Quand on est constamment sur les routes, dans les airs… je dois dire que je lui en ai fait voir de toutes les couleurs à ma pauvre épouse. Mais j’étais comme ça, il fallait que je bouge, que j’aille au bout de mes rêves. Toujours la curiosité !
Ce qui m’intéresse dans ce métier, ce n’est pas tellement de voir des palmiers, des cocotiers ou des plages de rêve. C’est surtout de rencontrer des gens, c’est ça qui est bien dans ce métier.
Au bout d’un moment, l’avion ça t’emmerde, le voyage en lui-même ne présente pas d’intérêt. Ce qu’il y a de formidable, c’est d’arriver quelque part où tu apportes du travail très souvent et ces gens vont te donner les clés du pays.
Si, bien entendu, on prend du temps pour poser des questions, on va apprendre en une soirée ce qu’un touriste moyen va mettre 15 jours à comprendre. C’est ça qui est magnifique dans notre métier.
J’ai toujours aimé ça et lorsque j’étais chez Chorus, je voyageais 200 jours par an.
TourMaG.com - Mais vous avez quitté Chorus ?
MYL : Après la fusion avec Jet tours, alors que personne ne voulait me virer, bien au contraire.
Vous savez, à l’époque, Chorus était détenu à moitié par TUI, à moitié par Havas. Moi, je me battais sur les prix et Havas - c’était Christophe Charpentier - se gavait sur les commissions.
En fait, j’étais plus proche des Allemands. Contrairement à leur image de « gros balourds », ils savaient travailler et ils sont très bons. Ils m’ont beaucoup appris.
Et c’est là que je me suis dit qu’il fallait commercialiser directement.
TourMaG.com - Cependant, vous avez décidé de quitter le « confort » pour fonder une nouvelle entreprise ?
MYL : Oui, en 1993, alors que tout allait mal : chômage, économie déficiente, c’était tout noir. Mais j’ai pris ma décision et du jour où je l’ai prise, je me suis retrouvé avec un calme olympien dans la tête. Incroyable.
J’avais le choix : monter un TO vers la Grèce… ou en collaboration avec Emirates, créer Emirates Holidays. C’était long et comme vous le savez, si vous disparaissez du marché, vous êtes vite oublié. J’ai décidé de monter Directours.
TourMaG.com - Encore une innovation, dans la mesure où les tarifs ne figuraient pas sur la brochure mais seulement sur Minitel… Toujours la curiosité ?
MYL : Oui. Dégriftours faisait ça avec les « invendus » des TO. Moi, j’étais un vrai voyagiste, avec des brochures : en fait, j’ai été le premier outil de Yield Management.
Les compagnies aériennes ou les hôteliers me donnaient des prix indécents et personne ne savait, comme je faisais du « package », si c’était la compagnie, l’hôtel… ou bien ils pouvaient toujours dire que c’est Labbé qui s’est gourré dans ses marges.
Donc je me suis retrouvé à être le premier outil du Yield Management. Est-ce que c’est de la curiosité ? Oui, j’avais eu la curiosité d’imaginer comment cela allait se dérouler. Parce que j’avais vu qu’aux Etats-Unis, c’était la déréglementation aérienne, la suppression des charters, les vols de point à point.
Et j’ai eu cette idée avant tous les autres… et ça marche bien.
C’était en 1994 et j’avais monté Directours sans un rond ! En fait, c’est l’APS qui m’a mis le pied à l’étrier, en me faisant racheter une agence de voyages à Versailles.
Cette agence possédait trois points de ventes, lesquels disposaient d’un système informatique particulièrement performant… mais je n’étais pas fait pour être agent de voyages.
Donc, j’ai acheté une petite boite sur les Champs-Elysées, juste pour son numéro de téléphone - 01 45 62 62 62 - et j’ai monté Directours.
TourMaG.com - Mais avec quel argent ?
MYL : Je l’ai acquise pour 1 Franc, mais j’ai pris les dettes. Et j’ai payé en 2000 ! Arrive septembre 95 et je vois, moi qui m’intéressais déjà à l’arrivée d’Internet, que s’organisait un congrès à Kansas City sur le thème Internet et le tourisme.
J’y vais. Et j’ai compris immédiatement, contrairement à beaucoup d’Américains, ce qu’était Internet : un minitel qui allait plus vite et en couleurs !
Du coup, je suis resté à la conférence et lorsque je suis revenu à Paris j’ai dit textuellement à mes collaborateurs en parlant d’Internet : « C’est Gutenberg » !
Et nous avons décidé, avec mon adjoint, de construire le premier site web du tourisme.
A une époque, je sentais le souffre...
TourMaG.com - Mais pourtant, vers les années 2000, vous avez eu quelques soucis...
MYL : Effectivement, alors que tout marchait bien, un groupe, Happy Travel, a voulu nous racheter… 45 millions à l’époque, une aubaine.
Seulement cela ne s’est pas tout à fait bien passé, d’autant que la « bulle Internet » s’est crevée, ajoutez le 11 septembre 2001 et, finalement, j’ai préféré racheter ma boite en 2002, en y associant mes collaborateurs.
TourMaG.com - Changement aussi de stratégie ?
MYL : Un peu : je me suis tourné vers le luxe, toujours sur Internet. Et nous avons réussi à établir Directours comme une « marque de confiance » sur Internet.
Et là, j’ai revendu en 2008.
TourMaG.com - Vous avez une plume particulièrement acérée et pleine d’humour, très souvent décalé…
MYL : Oui, toujours. C’est parfois même assez corrosif. Mais c’était aussi le ton que je voulais donner à Directours.
En fait j’ai un problème : j’ai un esprit à trouver des conneries et j’ai l’âge de Finkielkraut ! Lui, il pense toujours à des choses intéressantes, pas moi.
Quand je vois quelque chose, j’ai quasi spontanément l’envie de le tourner en dérision… ou de trouver le bon mot.
Je crois que j’aurais été bon dans la pub, pour trouver des slogans… Par exemple, j’envoie souvent des notifications dans le cadre de Partir Demain, du genre « Et si vous alliez vous faire voir chez les Grecs… pour 390€ ! » C’est terrible, j’ai un peu cet esprit « Almanach Vermot ». Parfois, je me fais rigoler tout seul.
TourMaG.com - Finalement, dans la profession, vous êtes un peu un OVNI ?
MYL : Non, plus maintenant. A l’époque, oui, je sentais le souffre. Mais plus maintenant. Avec l’âge j’ai gagné en respectabilité.
Pendant longtemps, j’ai senti le souffre, j’étais disrupteur comme on dit maintenant. Mais je l’ai toujours été, je n’ai jamais aimé aller dans le même sens que les autres.
Vous savez, si on ne fait pas un truc différent, on ne bouge pas…
MYL : Effectivement, alors que tout marchait bien, un groupe, Happy Travel, a voulu nous racheter… 45 millions à l’époque, une aubaine.
Seulement cela ne s’est pas tout à fait bien passé, d’autant que la « bulle Internet » s’est crevée, ajoutez le 11 septembre 2001 et, finalement, j’ai préféré racheter ma boite en 2002, en y associant mes collaborateurs.
TourMaG.com - Changement aussi de stratégie ?
MYL : Un peu : je me suis tourné vers le luxe, toujours sur Internet. Et nous avons réussi à établir Directours comme une « marque de confiance » sur Internet.
Et là, j’ai revendu en 2008.
TourMaG.com - Vous avez une plume particulièrement acérée et pleine d’humour, très souvent décalé…
MYL : Oui, toujours. C’est parfois même assez corrosif. Mais c’était aussi le ton que je voulais donner à Directours.
En fait j’ai un problème : j’ai un esprit à trouver des conneries et j’ai l’âge de Finkielkraut ! Lui, il pense toujours à des choses intéressantes, pas moi.
Quand je vois quelque chose, j’ai quasi spontanément l’envie de le tourner en dérision… ou de trouver le bon mot.
Je crois que j’aurais été bon dans la pub, pour trouver des slogans… Par exemple, j’envoie souvent des notifications dans le cadre de Partir Demain, du genre « Et si vous alliez vous faire voir chez les Grecs… pour 390€ ! » C’est terrible, j’ai un peu cet esprit « Almanach Vermot ». Parfois, je me fais rigoler tout seul.
TourMaG.com - Finalement, dans la profession, vous êtes un peu un OVNI ?
MYL : Non, plus maintenant. A l’époque, oui, je sentais le souffre. Mais plus maintenant. Avec l’âge j’ai gagné en respectabilité.
Pendant longtemps, j’ai senti le souffre, j’étais disrupteur comme on dit maintenant. Mais je l’ai toujours été, je n’ai jamais aimé aller dans le même sens que les autres.
Vous savez, si on ne fait pas un truc différent, on ne bouge pas…
Les pouvoirs publics ? Nullissimes !
TourMaG.com - Beaucoup, dans votre profession, parlent toujours de « différenciant ». Et pourtant, c’est toujours la même chose…
MYL : J’ai beaucoup de respect pour la jeune génération qui est aux manettes aujourd’hui. Ils sont beaucoup plus sains que nous l’étions nous.
Ma génération, c’étaient surtout des individualistes, un peu débrouillards qui pensaient qu’ils étaient plus malins que les autres. Chacun tirait dans son coin, même au Seto.
Aujourd’hui, c’est très différent : ils sont très concurrentiels, mais ils sont francs et il y a beaucoup de camaraderie entre eux. Je trouve que c’est sain.
En revanche, ce sont des marketeux, il n’y a plus beaucoup de mecs de produits !
Ça a beaucoup changé : maintenant, cela a plus d’importance de « promettre » plutôt que de réaliser.
Ainsi va la vie…
En ce qui me concerne et au risque de passer pour un vieux con, je m’accroche à la qualité !
TourMaG.com - Avant de conclure, quel est votre regard sur nos instances professionnelles ou les pouvoirs publics ?
MYL : Je trouve que Mas, (président des EdV, ndDG) est un bon. Je ne ferai pas des affaires avec lui parce que je ne suis pas sûr de gagner. Mais c’est un bon.
L’APST, c’est vachement bien, Alix Philipon est très bien et c’est quand même un truc formidable.
Le problème des instances professionnelles, du moins du temps de ma génération, c’est que l’on n’a jamais su défendre ce métier.
On n’a jamais su expliquer que nous n’étions pas que des intermédiaires profiteurs. On n’a jamais su expliquer que nous avions des collaborateurs d’une extrême qualité, qui prennent à cœur leur métier ! Nous n’avons de valeur que grâce à nos collaborateurs.
Mais nous n’avons jamais su valoriser notre métier !
Il y a eu trop de mecs qui ont couru après la rosette au lieu de défendre la profession.
Quant aux pouvoirs publics, c’est tout simplement nullissime. Et j’en ai vu des ministres du tourisme dans ma vie, dans tous les pays : ils ont tous des incompétents et ils s’en foutent.
Leur but, c’est d’être réélu. Ils sont tous mauvais et vous ne pouvez absolument pas avoir confiance.
Nous sommes, nous professionnels, les laissés pour compte de la politique. C’est catastrophique.
Je vote, en désespoir de cause et pour celui que j’espère le moins mauvais. En fait, je suis pour une « tyrannie éclairée », pour Monaco (rire) !
MYL : J’ai beaucoup de respect pour la jeune génération qui est aux manettes aujourd’hui. Ils sont beaucoup plus sains que nous l’étions nous.
Ma génération, c’étaient surtout des individualistes, un peu débrouillards qui pensaient qu’ils étaient plus malins que les autres. Chacun tirait dans son coin, même au Seto.
Aujourd’hui, c’est très différent : ils sont très concurrentiels, mais ils sont francs et il y a beaucoup de camaraderie entre eux. Je trouve que c’est sain.
En revanche, ce sont des marketeux, il n’y a plus beaucoup de mecs de produits !
Ça a beaucoup changé : maintenant, cela a plus d’importance de « promettre » plutôt que de réaliser.
Ainsi va la vie…
En ce qui me concerne et au risque de passer pour un vieux con, je m’accroche à la qualité !
TourMaG.com - Avant de conclure, quel est votre regard sur nos instances professionnelles ou les pouvoirs publics ?
MYL : Je trouve que Mas, (président des EdV, ndDG) est un bon. Je ne ferai pas des affaires avec lui parce que je ne suis pas sûr de gagner. Mais c’est un bon.
L’APST, c’est vachement bien, Alix Philipon est très bien et c’est quand même un truc formidable.
Le problème des instances professionnelles, du moins du temps de ma génération, c’est que l’on n’a jamais su défendre ce métier.
On n’a jamais su expliquer que nous n’étions pas que des intermédiaires profiteurs. On n’a jamais su expliquer que nous avions des collaborateurs d’une extrême qualité, qui prennent à cœur leur métier ! Nous n’avons de valeur que grâce à nos collaborateurs.
Mais nous n’avons jamais su valoriser notre métier !
Il y a eu trop de mecs qui ont couru après la rosette au lieu de défendre la profession.
Quant aux pouvoirs publics, c’est tout simplement nullissime. Et j’en ai vu des ministres du tourisme dans ma vie, dans tous les pays : ils ont tous des incompétents et ils s’en foutent.
Leur but, c’est d’être réélu. Ils sont tous mauvais et vous ne pouvez absolument pas avoir confiance.
Nous sommes, nous professionnels, les laissés pour compte de la politique. C’est catastrophique.
Je vote, en désespoir de cause et pour celui que j’espère le moins mauvais. En fait, je suis pour une « tyrannie éclairée », pour Monaco (rire) !
Je révais d'être journaliste...
TourMaG.com - Si vous aviez la possibilité de changer quelque chose…
MYL : Je serais journaliste. Mon rêve serait d’être journaliste, mais je trouve que les journalistes ne sont pas assez curieux. Et parfois, quand ils sont curieux, ils sont malsains. Il faut être curieux avec esprit.
Je suis d’ailleurs maintenant (l’épisode danseuse c’est fini) marié avec une journaliste.
Mais je n’ai pas de regrets, aucun. J’ai eu une vie formidable, j’ai eu la santé…
C’est un bonheur !
C’est Jacques Brel qui chantait une chanson peu connue qui s’appelle L’aventure : « l’aventure passe à l’aurore, à l’aurore de chaque matin, l’aventure passe alors que le soleil nous lave les mains » !
Pour moi, c’est un leitmotiv, un truc de vie. Tu prends le matin qui vient comme un cadeau…
TourMaG.com - Un point que nous n’avons pas abordé ?
MYL : Oui, une chose qui me tient à cœur : les œuvres d’art.
Je suis très attaché à la peinture, à la musique, à la littérature. Pour moi, c’est très important. Malraux disait « Seul l’art sublime l’homme ». Voilà en quoi je crois, plus qu’en Dieu.
Penser que trois siècles auparavant, un mec a écrit une musique et qu’aujourd’hui cette musique vous donne encore le frisson, c’est extraordinaire.
Avoir des émotions devant un tableau ou une architecture, c’est magique.
Je crois que dans l’art, il y a quelque chose de plus que dans l’humain, quelque chose… de divin.
MYL : Je serais journaliste. Mon rêve serait d’être journaliste, mais je trouve que les journalistes ne sont pas assez curieux. Et parfois, quand ils sont curieux, ils sont malsains. Il faut être curieux avec esprit.
Je suis d’ailleurs maintenant (l’épisode danseuse c’est fini) marié avec une journaliste.
Mais je n’ai pas de regrets, aucun. J’ai eu une vie formidable, j’ai eu la santé…
C’est un bonheur !
C’est Jacques Brel qui chantait une chanson peu connue qui s’appelle L’aventure : « l’aventure passe à l’aurore, à l’aurore de chaque matin, l’aventure passe alors que le soleil nous lave les mains » !
Pour moi, c’est un leitmotiv, un truc de vie. Tu prends le matin qui vient comme un cadeau…
TourMaG.com - Un point que nous n’avons pas abordé ?
MYL : Oui, une chose qui me tient à cœur : les œuvres d’art.
Je suis très attaché à la peinture, à la musique, à la littérature. Pour moi, c’est très important. Malraux disait « Seul l’art sublime l’homme ». Voilà en quoi je crois, plus qu’en Dieu.
Penser que trois siècles auparavant, un mec a écrit une musique et qu’aujourd’hui cette musique vous donne encore le frisson, c’est extraordinaire.
Avoir des émotions devant un tableau ou une architecture, c’est magique.
Je crois que dans l’art, il y a quelque chose de plus que dans l’humain, quelque chose… de divin.
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