Thomas Cook et Neckermann : mais de quel pays s’agit-il ?

Le discours de clôture de Richard Vainopoulos n’a pas été très aimable, et c’est un euphémisme, envers le groupe Thomas Cook. Dans son réquisitoire, le président de TourCom parle de « l’exemple d’autres pays européens » sans préciser lesquels.

Si dans une première lecture certains pourraient croire qu’il s’agit de la Belgique, une approche plus réfléchie des propos montre qu’il n’en est rien. Ou alors, il s’agirait de la méconnaissance habituelle du marché belge que l’on rencontre souvent en France.

Le marché belge profondément différent de celui français

Il faut toujours garder en mémoire qu’en Belgique, le marché n’est pas dominé par les réseaux d’agences mais bien par les TO. Contrairement à ce qui se passe dans l’hexagone, en Belgique, près de 80 % des forfaits commercialisés proviennent de Jetair et de VIP Selection (TUI) et des TO Thomas Cook (les ex-Sunsnacks, ex-All Seasons, Neckermann et Pégase).

Les 20 autres % provenant d’une grosse dizaine d’autres opérateurs comme Bosphorus (First Choice), Transeurope, Evasion (CIT), Best Tours, Mediterra, Indigo, etc… Quant aux réseaux d’agences, ils n’ont jamais pris l’importance stratégique qu’ils ont en France.

Deuxième différence, en Belgique, les TO sont responsables des produits qu’ils mettent sur le marché, tandis que les AGV belges ne sont garantes envers leurs clients que des conseils donnés et de la bonne fin administratives des dossiers.

Des commissionnements AGV nettement plus faibles

Troisième différence, le marché en Belgique est divisé en deux grands groupes culturels: les néerlandophones et les francophones. Avec comme conséquence que les comportements et les attentes des touristes peuvent être très différents dans un groupe par rapport à l’autre.

Quatrième différence, historiquement l’industrialisation et la démocratisation du tourisme de masse ont débuté en Belgique depuis plusieurs dizaines d’années (quasiment au début des années cinquante). Ce qui fait que, pour les Belges, passer ses vacances à l’étranger est tout à fait normal qu’ils soient chômeurs ou non.

Cinquièmement, le quasi duopole TUI / Thomas Cook sur le marché belge et les reports des responsabilités font que le niveau des commissionnements des AGV en Belgique est nettement plus faible qu’en France (en Belgique, rarement plus de 15%).

Thomas Cook : trois grandes entités fortement différenciées

Contrairement à la France, Thomas Cook est implanté en Belgique depuis des années. En 2003, le groupe se compose de trois grandes entités fortement différenciées auxquelles il faut naturellement rajouter la compagnie aérienne-maison Thomas Cook Belgium Airlines.

Les TO Thomas Cook (les ex-Sunsnacks et ex All-Seasons) présentent des produits destinés au plus grand nombre. Tandis que Pegase est le TO haut de gamme. Ces opérateurs commercialisent leur production uniquement via les AGV dites ouvertes.

L’entité Neckermann présente une offre globale et verticale: TO et AGV exclusives, ces dernières, près de nonante points de vente, ne commercialisent, sauf rares exceptions, que les produits Neckermann.
Les AGV ouvertes du groupe, les Thomas Cook Travel Shop (au nombre de 36 actuellement) commercialisent aussi bien les produits maison que les produits des autres TO belges.

En ce qui concerne les AGV de Neckermann, sauf rares exceptions, elles appartiennent au groupe et donc le personnel est salarié par Thomas Cook. Pour Thomas Cook Travel Shop, seules 2 AGV sont actuellement franchisées (les 20 AGV Mare Tours jouissant d’un accord de partenariat capitalistique différent).

Pour l’anecdote, il faut savoir qu’il arrive que des AGV Neckermann se situent dans la même rue, voire sur la même place que des AGV Thomas Cook Travel Shop et se font donc concurrence.

La centaine d’AGV TUI belges : une majorité de franchisés

Contrairement à ce qu’explique Richard Vainopoulos, si c’est de la Belgique dont il parle, Thomas Cook Belgium n’a pas une grande expérience en ce qui concerne la franchise d’agences. Tout au plus une dizaine de points de vente Travel Cook Travel Shop et Neckermann, fonctionnent dans ce cadre.
A noter cependant que le groupe a pour objectif actuellement de convaincre une cinquantaine d’AGV de passer sous contrat franchise de Thomas Cook Travel Store.

En cause, le retard pris par rapport aux TUI Travel Center dont la majorité de la centaine d’AGV sont des franchisés. Réseau qui s’est constitué lors des cinq dernières années. En d’autres mots, si c’est de la Belgique dont il parle, son analyse correspond plus exactement à TUI qu’au groupe Thomas Cook.

Neckermann : un niveau de formation permanente du personnel

Aussi bien Luc de Muinck, président du VVR (l’association des AGV flamandes) que Jan Van Steen (président de la Belgian Travel Organisation qui regroupe les grandes AGV indépendantes du royaume) reconnaissent que la vraie force de Neckermann et des AGV Thomas Cook Travel Shop se situe dans le niveau de formation permanente du personnel et non dans le niveau des commissions perçues.

Mais comme le dit exactement Jan Van Steen : « A long terme, les investissements en formation de Thomas Cook vont être plus que rentables. On peut se poser la question de savoir ce que sera, dans quelques années, la politique de commissionnement des TO.

S’ils suivent l’expérience des compagnies aériennes avec les commissions zéro, les clients exigeront un très haut niveau qualitatif des conseils proposés par les AGV. Et pour donner des conseils fiables, il faut avoir une formation de qualité ».

Michel GHESQUIERE à Bruxelles - 02 décembre 2003
michel.ghesquiere@skynet.be