Des clients se déclarent prêts à porter plainte, mais que dit la loi sur l'obligation de vaccination ? Emmanuelle Llop et Marie Tarragano nous ont répondu - Crédit photo : Depositphotos @prilytskiy.mail.ru
Alors qu'en 2020, à la même période, les professionnels se questionnaient sur la possibilité de faire partir leurs clients, ils s'interrogent maintenant sur les conditions des futurs départs.
"Sur le vaccin, nous réfléchissons, mais aussi pour voir comment faire vivre les gens qui sont vaccinés et ceux qui ne le sont pas.
C'est encore trop tôt pour savoir si nous allons demander la vaccination, nous ne savons pas pour le moment," s'interrogeait début février 2021, Patrick Pourbaix de MSC Croisières.
Suite à la publication de l'interview, il s'en est ensuivi un flot de commentaires, dont certains menaçant de porter plainte si la compagnie oser instaurer un tel système "discriminatoire".
"C'est illégal d'obliger la vaccination, si vous le faites je vous attaque immédiatement, bonne journée" menaçait Hirian.
Le ton est donné.
"Sur le vaccin, nous réfléchissons, mais aussi pour voir comment faire vivre les gens qui sont vaccinés et ceux qui ne le sont pas.
C'est encore trop tôt pour savoir si nous allons demander la vaccination, nous ne savons pas pour le moment," s'interrogeait début février 2021, Patrick Pourbaix de MSC Croisières.
Suite à la publication de l'interview, il s'en est ensuivi un flot de commentaires, dont certains menaçant de porter plainte si la compagnie oser instaurer un tel système "discriminatoire".
"C'est illégal d'obliger la vaccination, si vous le faites je vous attaque immédiatement, bonne journée" menaçait Hirian.
Le ton est donné.
Une entreprise peut-elle imposer la vaccination à ses clients ?
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Pour Emmanuelle Llop la problématique des libertés individuelles n'est pas si simple.
"C'est un vaste sujet.
Je laisserais les aspects autour des libertés fondamentales aux spécialistes du droit constitutionnel ou du droit public, à propos d'une éventuelle obligation de vaccination du point de vue de la santé collective versus le fait qu'à ce jour les vaccins ne sont pas en libre accès pour tous les individus qui le souhaiteraient".
Si en France et Belgique, le croisiériste en est au stade des brainstormings avec ses équipes, Outre-Rhin la question a déjà été tranchée.
Pour le voyagiste Alltours, les voyageurs devront impérativement être vaccinés contre la covid-19, s'ils veulent se rendre dans les établissements de la marque.
Le tour-opérateur qui exploite 35 hôtels, à Majorque, aux îles Canaries et en Grèce, souhaite offrir "à tous les clients la plus haute sécurité possible afin qu'ils puissent profiter de leurs vacances de manière détendue" a expliqué Willi Verhuven, propriétaire d'Alltours sur le site du journal allemand Spiegel.
La compagnie australienne Qantas avait initié le débat, dès la fin de l'année dernière.
N'en déplaise aux détracteurs de ces mesures visant à rassurer les clients, mais aussi les populations à destination, une telle décision "ne touche pas - à mon sens - aux libertés fondamentales, car participer à une croisière n'en est pas une,", analyse la fondatrice d'Equinoxe Avocats.
Nous parlons plutôt là d'un accord commercial.
"C'est un vaste sujet.
Je laisserais les aspects autour des libertés fondamentales aux spécialistes du droit constitutionnel ou du droit public, à propos d'une éventuelle obligation de vaccination du point de vue de la santé collective versus le fait qu'à ce jour les vaccins ne sont pas en libre accès pour tous les individus qui le souhaiteraient".
Si en France et Belgique, le croisiériste en est au stade des brainstormings avec ses équipes, Outre-Rhin la question a déjà été tranchée.
Pour le voyagiste Alltours, les voyageurs devront impérativement être vaccinés contre la covid-19, s'ils veulent se rendre dans les établissements de la marque.
Le tour-opérateur qui exploite 35 hôtels, à Majorque, aux îles Canaries et en Grèce, souhaite offrir "à tous les clients la plus haute sécurité possible afin qu'ils puissent profiter de leurs vacances de manière détendue" a expliqué Willi Verhuven, propriétaire d'Alltours sur le site du journal allemand Spiegel.
La compagnie australienne Qantas avait initié le débat, dès la fin de l'année dernière.
N'en déplaise aux détracteurs de ces mesures visant à rassurer les clients, mais aussi les populations à destination, une telle décision "ne touche pas - à mon sens - aux libertés fondamentales, car participer à une croisière n'en est pas une,", analyse la fondatrice d'Equinoxe Avocats.
Nous parlons plutôt là d'un accord commercial.
Le refus de vente est un délit pénal !
Le voyageur pourrait-il être en mesure de faire des ennuis à un opérateur touristique sous prétexte de refus de vente ?
"Cette pratique est interdite vis-à-vis des consommateurs, sauf motif légitime : autrement dit, un professionnel ne peut pas refuser de vendre son produit ou de fournir son service à un consommateur." explique Emmanuelle Llop.
Il existe quelques motifs pour prétexter cette raison, comme la rupture de stock, le comportement du consommateur (un client éméché dans un bar), l'interdiction par la loi, etc.
Opposer un refus de vente ou d'embarquer à une personne non vaccinée, pourrait alors être qualifié de discriminatoire, d'autant qu'actuellement tout le monde ne peut pas se faire vacciner !
"La situation nouvelle causée par l'épidémie de covid-19 qui consisterait à exiger une vaccination pourtant inaccessible à tous, pour l'instant, n'aboutirait-elle pas finalement à une discrimination fondée sur l'état de santé réel ou supposé du client ?
Ne pas être vacciné constituerait-il alors un motif légitime de refus de vente ? Dans un contexte où seule la population vulnérable a accès aux vaccins, et encore, avec des "trous dans la raquette", selon l'expression à la mode, cela me semble difficile de raisonner comme cela," analyse Emmanuelle Llop.
Pour résumer l'analyse de l'avocate, à moins de sélectionner sa clientèle sur le critère que la personne soit à risques, il serait très difficile d'imposer le vaccin et d'en faire un motif légitime de refus de vente.
Pour rappel, le refus de contracter basé sur une des raisons expliquées par Emmanuelle Llop est sanctionné plus gravement, car il constitue un délit pénal.
"Cette pratique est interdite vis-à-vis des consommateurs, sauf motif légitime : autrement dit, un professionnel ne peut pas refuser de vendre son produit ou de fournir son service à un consommateur." explique Emmanuelle Llop.
Il existe quelques motifs pour prétexter cette raison, comme la rupture de stock, le comportement du consommateur (un client éméché dans un bar), l'interdiction par la loi, etc.
Opposer un refus de vente ou d'embarquer à une personne non vaccinée, pourrait alors être qualifié de discriminatoire, d'autant qu'actuellement tout le monde ne peut pas se faire vacciner !
"La situation nouvelle causée par l'épidémie de covid-19 qui consisterait à exiger une vaccination pourtant inaccessible à tous, pour l'instant, n'aboutirait-elle pas finalement à une discrimination fondée sur l'état de santé réel ou supposé du client ?
Ne pas être vacciné constituerait-il alors un motif légitime de refus de vente ? Dans un contexte où seule la population vulnérable a accès aux vaccins, et encore, avec des "trous dans la raquette", selon l'expression à la mode, cela me semble difficile de raisonner comme cela," analyse Emmanuelle Llop.
Pour résumer l'analyse de l'avocate, à moins de sélectionner sa clientèle sur le critère que la personne soit à risques, il serait très difficile d'imposer le vaccin et d'en faire un motif légitime de refus de vente.
Pour rappel, le refus de contracter basé sur une des raisons expliquées par Emmanuelle Llop est sanctionné plus gravement, car il constitue un délit pénal.
Un employeur peut-il vous imposer d'être vacciné pour retourner au bureau ?
Autres murs, autres lieux.
Alors que les acteurs ne peuvent pas discriminer un client sur le motif qu'il n'est pas vacciné, un employeur pourrait-il le faire à ses employés ? Une grande partie des acteurs de l'industrie sont passés au télétravail, avec plus ou moins de réussite.
Si pour le moment nous ne savons pas à quelle sauce le gouvernement nous cuisinera, sur un éventuellement énième reconfinement, le retour au bureau aura bien lieu... un jour ou l'autre.
"Selon l’article L3111-1 du Code de la santé publique, « la politique de vaccination est élaborée par le ministre chargé de la Santé. » Toutefois, seul le législateur peut rendre une vaccination obligatoire," nous explique Marie-Laure Tarragano.
En milieu d’entreprise, la vaccination est abordée dans le code du travail dans son article R4426-6. Il en ressort donc que la vaccination en entreprise est : soit obligatoire en vertu d’une disposition du Code de la santé publique, soit recommandée par l’employeur sur proposition du médecin du travail.
"Autrement dit, tant que la vaccination contre la Covid-19 n’est pas rendue obligatoire par le Code de santé publique, l’employeur ne peut pas l’imposer à ses salariés," nous explique l'avocate du Cabinet Tarragano-Avocats.
En somme que ce soit pour travailler dans un hôtel, un restaurant, un bateau de croisières ou retourner au bureau, votre employeur ne pourra pas vous imposer de vous faire vacciner.
Toutes les réponses aux questions sont limpides, il reste toutefois la question des libertés individuelles et fondamentales à régler...
Alors que les acteurs ne peuvent pas discriminer un client sur le motif qu'il n'est pas vacciné, un employeur pourrait-il le faire à ses employés ? Une grande partie des acteurs de l'industrie sont passés au télétravail, avec plus ou moins de réussite.
Si pour le moment nous ne savons pas à quelle sauce le gouvernement nous cuisinera, sur un éventuellement énième reconfinement, le retour au bureau aura bien lieu... un jour ou l'autre.
"Selon l’article L3111-1 du Code de la santé publique, « la politique de vaccination est élaborée par le ministre chargé de la Santé. » Toutefois, seul le législateur peut rendre une vaccination obligatoire," nous explique Marie-Laure Tarragano.
En milieu d’entreprise, la vaccination est abordée dans le code du travail dans son article R4426-6. Il en ressort donc que la vaccination en entreprise est : soit obligatoire en vertu d’une disposition du Code de la santé publique, soit recommandée par l’employeur sur proposition du médecin du travail.
"Autrement dit, tant que la vaccination contre la Covid-19 n’est pas rendue obligatoire par le Code de santé publique, l’employeur ne peut pas l’imposer à ses salariés," nous explique l'avocate du Cabinet Tarragano-Avocats.
En somme que ce soit pour travailler dans un hôtel, un restaurant, un bateau de croisières ou retourner au bureau, votre employeur ne pourra pas vous imposer de vous faire vacciner.
Toutes les réponses aux questions sont limpides, il reste toutefois la question des libertés individuelles et fondamentales à régler...
Pour Gaspard Koenig philosophe et président du Génération libre :
"Tout dépend d’une donnée encore incertaine scientifiquement : les vaccins protègent-ils seulement le vacciné, ou empêchent-ils la transmission du virus ?
Dans le premier cas, il est clair que le choix de la vaccination doit rester l’affaire de chacun à titre privé. Nul n’est légitime à protéger l’individu contre lui-même.
Dans le deuxième, la situation devient plus complexe.
Pour les services publics (fac, administrations…) ou les régulations sociales (droit du travail), l’Etat / la société devra très clairement assumer une part de risque pour respecter les choix privés, au nom des libertés fondamentales que vous mentionnez. Donc pas question que l’Etat impose un passeport sanitaire pour entrer dans les bars, par exemple.
Ppour le secteur privé, il ne me paraîtrait pas absurde de laisser jouer librement la concurrence, entre les entreprises / compagnies de transport qui imposent le vaccin et les autres .
Si les clients ne sont pas contents, il se tourneront vers d’autres acteurs. Comme ça devrait être le cas dans les bars pour la cigarette : chaque établissement signale sa politique, et le consommateur choisit.
Mais encore une fois, la question me semble prématurée en l’absence de réponse claire sur le plan scientifique," nous a répondu le philosophe Gaspare Koenig au sujet de la vaccination.
Dans le premier cas, il est clair que le choix de la vaccination doit rester l’affaire de chacun à titre privé. Nul n’est légitime à protéger l’individu contre lui-même.
Dans le deuxième, la situation devient plus complexe.
Pour les services publics (fac, administrations…) ou les régulations sociales (droit du travail), l’Etat / la société devra très clairement assumer une part de risque pour respecter les choix privés, au nom des libertés fondamentales que vous mentionnez. Donc pas question que l’Etat impose un passeport sanitaire pour entrer dans les bars, par exemple.
Ppour le secteur privé, il ne me paraîtrait pas absurde de laisser jouer librement la concurrence, entre les entreprises / compagnies de transport qui imposent le vaccin et les autres .
Si les clients ne sont pas contents, il se tourneront vers d’autres acteurs. Comme ça devrait être le cas dans les bars pour la cigarette : chaque établissement signale sa politique, et le consommateur choisit.
Mais encore une fois, la question me semble prématurée en l’absence de réponse claire sur le plan scientifique," nous a répondu le philosophe Gaspare Koenig au sujet de la vaccination.