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"Et si le tour Far West du tourisme, s'appelait... l'espace ?"

une chronique de Michel Messager


Entre les problèmes politiques, sécuritaires, sanitaires, d'entrée sur les territoires et la tourismophobie, l'espace touristique mondial tend à se rétrécir chaque année. Dans ce contexte, le nouveau "Far West" du secteur pourrait bien être l'espace, selon notre chroniqueur Michel Messager.


Rédigé par Michel MESSAGER le Jeudi 12 Octobre 2017

Selon l'ONU, "l’espace était exploré et utilisé pour le bien commun de l’Humanité, n’était pas susceptible d’appropriation et ne pouvait être l’objet de souveraineté nationale" - Photo : Fotolia.com
Selon l'ONU, "l’espace était exploré et utilisé pour le bien commun de l’Humanité, n’était pas susceptible d’appropriation et ne pouvait être l’objet de souveraineté nationale" - Photo : Fotolia.com
On a coutume de dire que l’espace touristique se réduit.

Pour s’en convaincre il n’y qu’à se rendre sur les sites du ministère des Affaires étrangères ou de l’OMS (organisation mondiale de la santé).

Et quand un pays n’est pas sur l’un de ces sites, une autre difficulté peut apparaître : les formalités d’entrée en tout genre, allant jusqu’au franchissement de murs…

Et si le nouveau Far West du tourisme s’appelait l’espace ?

Lorsqu’en 1957, l’URSS lance le premier satellite artificiel autour de la Terre, Spoutnik, s’ouvre une nouvelle ère : celle de la conquête de l’espace qui amène très rapidement à se poser des questions de nature très diverse, dont celles afférentes à la réglementation et au droit de l’espace.

L’espace utilisé pour le bien commun de l’Humanité

Dans cette optique, dès 1959, fut créé un organe spécifique au sein de l’Assemblée générale des Nations Unies : le Comité pour l’utilisation pacifique de l’espace extra-atmosphérique.

En 1963, l’Assemblée générale de l’ONU adoptait une résolution qui consacrait les principes fondamentaux relatifs à ce nouveau domaine d’activités, à savoir : « l ’espace était exploré et utilisé pour le bien commun de l’Humanité, n’était pas susceptible d’appropriation et ne pouvait être l’objet de souveraineté nationale. »

Selon ce principe, devenu règle de droit international coutumier, aucun État ne peut donc se voir imposer des restrictions ou des conditions par un autre État pour accéder à l’espace extra-atmosphérique, l’explorer et l’utiliser conformément au droit international.

En pleine Guerre Froide et pour faire face aux risques de guerre, le Traité sur l’Espace, ouvert à la signature le 27 janvier 1967, entra en vigueur le 10 octobre 1967.

Signé par plus d’une centaine d’États, il interdit l’aménagement de bases ou d’installations militaires sur les corps célestes et la mise en orbite autour de la Terre d’armes de destruction massive (dont les armes nucléaires).

Il laisse toutefois la possibilité du transit des armes à travers l’espace et des reconnaissances par satellites artificiels…

Depuis les années 70 pas de traité d’envergure voté

Depuis les années 70, faute de consensus, aucun traité d’envergure internationale n’a été voté, si ce n’est celui régissant les activités des États sur la Lune et les autres corps célestes, entré en vigueur le 11 juillet 1984.

Cet accord a été conçu pour assurer sur une base équitable une exploitation ordonnée et sans risque des ressources naturelles de la Lune. Il n’a toutefois été ratifié que par neuf États, les USA et la Russie refusant de le signer.

Pour le moment, certains pays ( en particulier les États-Unis ) légifèrent de leur côté pour encadrer les activités émergeantes.

Ainsi, en 2004, ils ont publié le Commercial Space Launch Amendments Act, un texte qui organise le tourisme spatial. Mais au niveau international, tout est bloqué.

Force est donc de constater, que pendant des années, le droit a pris du retard sur la réalité de l’activité spatiale et notamment en regard du développement attendu du tourisme spatial.

Le tourisme spatial bientôt une réalité

Pourtant, il y a urgence : bientôt le tourisme spatial va devenir une réalité et donc de plus en plus de vaisseaux vont emmener des particuliers dans l’espace.

Les contentieux impliquant les consommateurs vont inévitablement se multiplier. Sans règlement international, juger de ces affaires sera un vrai casse-tête. Pour trancher, les juges ne sauront pas s’il faut appliquer la législation française, russe, américaine...

C’est pourquoi, depuis la déclaration de l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI) en mars 2016, les choses semblent s’accélérer en matière de vols.

« L’OACI reconnaît que les vols suborbitaux et spatiaux vont encourager de nouveaux marchés pour le tourisme et le transport », a indiqué dans un communiqué Olumuyiwa Benard Aliu, président du Conseil de l’OACI, se disant « très enthousiaste de voir que le rêve des vols spatiaux normalisés devient maintenant une réalité tangible : un ensemble de règlements devant encadrer d’ici à 2021 le transport spatial, secteur auparavant réservé à une poignée d’États mais désormais convoité par des acteurs privés. »

Il était temps, car sans réaction, il y avait de fortes chances que la législation américaine prenne le lead et devienne la norme.

Le droit a du mal à rattraper les progrès de la science…

Au fond, il y a deux façons de voir les choses. Certains regretteront que l’on cherche par des textes à reproduire dans l’espace ce que nous avons fait sur
Terre, c’est-à-dire la volonté de créer des frontières
, de tout rendre marchand.

D’autres y verront, en revanche, le moyen de pouvoir poursuivre l’aventure, en donnant des garanties aux sociétés détenues par ces milliardaires passionnés par le rêve spatial et qui aujourd’hui investissent dans l’espace.

Il faudrait donc pour cela que le droit international évolue pour permettre de poursuivre cette aventure, mais de manière encadrée et négociée à l’échelle internationale.

Généralement, le droit suit les progrès de la science avec un trop grand retard. Le droit de l’espace n’y déroge pas.

Mais à ce jour l’espace, comme le stipule toujours depuis 1963 l’assemblée générale de l’ONU, reste un espace sans frontières, puisque « l’espace vide n’appartient à personne et les corps célestes sont à tout le monde ».

Aussi, s’il reste un endroit encore libre de toutes contraintes c’est bien l’ESPACE.

"Et si le tour Far West du tourisme, s'appelait... l'espace ?"
Michel MESSAGER est directeur associé de Consul Tours, société de conseil travaillant pour une clientèle privée et institutionnelle dans les secteurs du tourisme.

Après avoir occupé les postes de Secrétaire Général du Tourisme Français, puis de Directeur Commercial de Touropa et Directeur du pôle tourisme du Groupe Verney , il rejoint en 1997 l’APST (Association Professionnelle de Solidarité du Tourisme) en qualité de Secrétaire Général jusqu’à fin 2007, période à laquelle, encore jeune retraité, il décide de réactiver sa société de Conseils créée au début des années 90.

Nommé par le Ministre chargé du tourisme en 2005, puis en 2012, il siège au Conseil National du Tourisme en qualité de Président Délégué de la section économie touristique et fonde avec plusieurs personnalités du tourisme l’AFST (Association Française des Seniors du Tourisme) dont il assure la Présidence.

Il est l’auteur d’un livre sur le Tourisme Spatial publié à la documentation française et de plusieurs articles sur le sujet.

Il est considéré actuellement comme un de spécialistes en la matière. Il intervient fréquemment sur ce sujet à la radio et à la télévision, ainsi qu’au travers de conférences dans de nombreux pays, notamment au Canada où il réside quelques mois par an.

Retrouvez cet article et l'ensemble de notre magazine 2017, intitulé "Nouvelles frontières, nouveaux défis", en ligne en cliquant sur ce lien.

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