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La Cour des comptes passe au crible les aides de l’État au secteur Tourisme pendant la crise

Si la justification des aides est indéniable, la Cour des comptes appuie aussi sur des faiblesses regrettables


Dans un rapport fouillé et critique de 162 pages, la Cour des comptes, qui a pour mission de juger le bon emploi des fonds publics, évalue les conséquences et le bien fondé des mesures de soutien déployées par l’État et ses agences publiques en 2020 et 2021 pour aider les entreprises du tourisme à faire face à la crise.


Rédigé par le Lundi 20 Février 2023

Les magistrats sont les garants du bon usage des fonds publics (©Cour des comptes)
Les magistrats sont les garants du bon usage des fonds publics (©Cour des comptes)
Au total, ce sont 45,5 milliards d’euros qui ont été versés ou mobilisés par les différents bras financiers de l’État aux entreprises des différents secteurs du Tourisme dans le cadre des différents plans de sauvetage, pilotés par le Comité de filière, mis en place par l’ancien ministre en charge du Tourisme, Jean-Baptiste Lemoyne.

Comme l’indique le rapport (voir synthèse en pièce jointe), peu de trous dans la raquette car les mesures de soutien, révisées par un Comité qui s’est transformé en gestion de crise en temps réel, « recouvrent des activités aussi variées que les transports, l’hôtellerie, la restauration, les activités culturelles, les parcs d’attraction, les agences de voyage, l’organisation des jeux de hasard et d’argent, les compagnies aériennes, ainsi que le secteur des foires et salons ».

Les juges de la Cour des comptes souhaitent évaluer l’impact à posteriori de ces mesures, en répondant à trois questions :

- la conception et le déploiement des mesures de soutien au secteur du tourisme ont-ils permis de préserver la viabilité des entreprises ?

- les mesures d’urgence ont-elles permis un redémarrage de l’activité touristique et de répondre au retour des touristes en France à partir de l’été 2020 et en 2021 ?

- le secteur du tourisme a-t-il débuté sa transformation ?

Les réponses ne sont pas toutes positives. L’État mais aussi les entreprises du secteur en prennent parfois pour leur grade en termes mesurés mais bien argumentés.

Lire aussi : Atout France : "Les recettes internationales près des niveaux de 2019"


Un secteur très largement préservé et parfois au-delà

Source Cour des comptes
Source Cour des comptes
A la première question, la réponse est entièrement positive et ce ne sont pas les 98% d’entreprises du Tourisme qui, à un titre ou à un autre, ont bénéficié des 45,5 Md€ d’aides publiques en 2020 et 2021 qui diront le contraire.

Les chiffres sont parlants : 88 % des pertes d’excédent brut d’exploitation ont été compensées et 25,8 % de la perte de chiffre d’affaires du secteur.

Les aides ont permis de diminuer de près de 44 % les faillites d’entreprises du tourisme en 2020 et 2021 par rapport à 2019. Le niveau des effectifs du secteur du tourisme a été globalement stabilisé, avec une baisse limitée à 0,4 % entre fin 2019 et fin 2021.

Comme le montre le tableau de répartitions des aides : l’énorme majorité des fonds publics, près de 31 milliards d’euros, a été distribué en subventions pour compenser l’arrêt de l’activité : fonds de solidarité, exonération de charges, prise en charge du chômage partiel. Le second poste, à hauteur de 13,7 milliards, sont des facilités de trésorerie sous forme de PGE à rembourser sur les exercices suivants.

Il reste moins d’un milliard d’euros consacré à l’investissement sous forme de prises de participation, d’aides directes ou de prêts garantis.

Un chapitre est consacré aussi à toutes les aides « indirectes » qui sont le résultat de décisions prises par l’Etat pour permettre de transformer les dépôts des clients en avoirs, au lieu de les rembourser (1,2 milliard d’euros de trésorerie pour les entreprises), l’élargissement de l’usage des titres-restaurants pour soutenir la restauration, dispositif des colonies apprenantes, campagnes de com….

Oui le secteur a été préservé et sans doute mieux que d’autres secteurs économiques au regard de son poids dans l’économie française. Personne ne s’en plaint.

Au passage, les juges de la Cour des comptes montrent du doigt certaines entreprises qui ont même « profité » de la crise, comme les sociétés de remontées mécaniques dont les pertes d’exploitation ont été compensées au-delà des pertes réelles et qui en plus ont largement bénéficié des autres dispositifs de soutien.

Une reprise de l’activité dès la levée des restrictions sanitaires

A la deuxième question, la reprise a-t-elle facilité. La réponse est plus ambiguë.

D’un côté, le rapport souligne qu’en préservant les entreprises, l’Etat leur a permis d’être présentes quand le marché s’est relevé. « Grâce à l’aide massive accordée en 2020 et 2021 et au caractère adapté des mesures prises en lien avec les professionnels, le niveau de trésorerie du secteur du tourisme a augmenté de 50 % par rapport à 2019 et les entreprises étaient en capacité de répondre à la demande ».

La vraie mesure qui a relancé l’activité est surtout la levée des restrictions de circulation et la libération de la frustration accumulée par des vacanciers trop longtemps confinés.

La solidité du marché domestique est une caractéristique qui compte dans ce retournement de situation, sans doute beaucoup plus que les campagnes de promotion d’Atout France sur la dizaine de marchés cibles, même si le rapport en reconnait la pertinence.

Une occasion manquée de transformation du secteur du tourisme

Un saupoudrage qui n'a pas donné les résultats escomptés (©Deposit Photos)
Un saupoudrage qui n'a pas donné les résultats escomptés (©Deposit Photos)
Le chapitre qui mérite une véritable attention et une certaine forme de remise en cause est celui de la préparation du secteur à une nouvelle façon de travailler.

La sortie de crise était censée donner naissance à une nouvelle approche du marché plus moderne. Mais là, le résultat n’est pas à la hauteur des ambitions.

Comme le rapportent les juges de la Cour des comptes : « l’ambition de transformation du secteur du tourisme a été plusieurs fois affirmée en 2020 et 2021. Elle s’est traduite par des mesures disparates aux financements limités par rapport aux mesures d’urgence et sans cohérence réelle avec celles-ci.

L’ambition française est faible au regard de celles de ses voisins espagnol et italien, qui annonçaient durant la crise des investissements de plusieurs milliards d’euros pour financer la transformation structurelle du tourisme.

Elle a été déployée via des mesures cherchant à promouvoir l’attractivité de l’emploi touristique et à faciliter les transitions numérique (chèque numérique, diagnostic numérique) et écologique (fonds tourisme durable)» .


Résultat plus que mitigé : le « chèque numérique » de 500 €, bien que sollicité par 18 922 entreprises du tourisme, ne semble pas avoir généré d’effet de levier pour renforcer l’usage du numérique dans les entreprises.

Les dispositifs de soutien à la transition écologique ont conduit à l’amélioration énergétique de petits équipements, mais n’ont pas permis au secteur d’entamer sa transformation durable.

Peut mieux faire !

Enfin, la Cour constate que les difficultés de recrutement, liées à un problème ancien d’attractivité et de fidélisation des personnels, semblent s’être encore accrues depuis la crise sanitaire.

Même si sa lecture peut paraître fastidieuse, le rapport est une bonne analyse à postériori de la gestion de la crise par les Autorités publiques.

Le bilan est globalement très positif et les coups de griffes de conclusion devraient inciter les entreprises et le Gouvernement actuel à pousser un peu plus vers la modernité pour ne pas être à nouveau dépourvu si une nouvelle crise arrive.

Lire aussi : Olivia Grégoire installe le Comité de Filière Tourisme, new look

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Commentaires

1.Posté par Martino180 le 20/02/2023 09:08 | Alerter
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La Cour des Comptes présidé par Pierre Moscovici, ce grand - très grand !!! - Ministre des Finances sous le mandat Hollande qui a réussi à faire monter les impôts à 75% des revenus pour certains !!!!
Bref ! un génie qui nous explique qu'il faut investir en période de crise extrême avec 0 de chiffre d'affaires.
PS : Je ne suis aps sûr que ce même Moscovici ait jamais investi dans une société et que surtout il n'ait jamais été aux manettes d'une entreprise ????

Bref ! Comme disait De Gaulle "des chercheurs on en trouve... mais des trouveurs, on en cherche !"

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