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"La mission a souhaité établir un état des lieux objectif. Expliquer ce qui va bien pour rassurer, mais souligner ce qui doit encore évoluer, pour informer, rassurer encore plus, en dégageant des solutions. Elle a voulu adopter une démarche positive, ni alarmiste, ni angélique, car la situation n’est ni catastrophique, ni idyllique", tel est l’objectif défini dans l’avant-propos de la Présidente (a).
La difficulté de la tâche était évidente. Elle impliquait de prendre connaissance de l'ensemble des composantes de l'industrie, afin d'être en mesure de localiser les domaines sur lesquels des dispositions correctives étaient susceptibles d'être suggérées. Or, le champ des investigations est effectivement vaste.
Il englobe la construction des avions ; leur exploitation ; leur maintenance ; le trafic aérien ; le comportement des différents intervenants ; sans oublier la formation et les conditions de travail des équipages. De plus, il était essentiel de ne pas prendre uniquement en compte la situation actuelle en France, mais également de tenir compte des dispositions prises par les organismes européens et internationaux.
Pour relever ce défi, pendant quatre mois, les parlementaires (la plupart ayant déjà une très bonne connaissance de l'aérien) ont entendu plus de 150 personnes, à l’occasion de 17 réunions, dont 9 tables rondes et plusieurs déplacements à Toulouse, Bruxelles, Washington et Montréal.
Deux satisfecit doivent être décernés :
- Le premier est justifié par la rapidité avec laquelle ladite Commission a diligenté ses travaux. Alors qu’elle a débuté ses investigations début février, son rapport a été déposé à l’Assemblée Nationale - seulement 5 mois après - le 7 juillet 2004. (b)
- Le second concerne la période à laquelle cette décision de se préoccuper de la sécurité aérienne a été prise. En effet, constat est généralement fait que les réactions des autorités ne se manifestent que lorsque la situation s’est fortement dégradée.
Dans de très nombreux cas bien connus, il faut attendre la survenance de l’accident grave (routier, ferroviaire, maritime, industriel, ...) pour qu’une mesure corrective soit prise. Or, ici, certes, la décision a été prise 10 jours après l’accident de Charm-el-Check, mais ce qui est essentiel a relever, c’est que cette préoccupation a pris forme alors que la sécurité s’améliore depuis déjà quelques années.
La niveau de sécurité s’améliore
Alors que le taux de croissance du trafic passagers (c) continue à augmenter (d), le niveau de sécurité s’améliore depuis 1994, puisque pendant la période écoulée, le nombre d’accidents (toutes catégories de vols confondues et pour tous les types d’appareils) a baissé de plus de 50 %, d’après les relevés de l’OACI. (e)
Quant au nombre d'accidents ayant provoqué la mort de passagers sur des vols réguliers (avions de plus de 2.250 kg), il est tombé de 33 à 6, soit une baisse de 82 %. Le nombre de passagers tués est passé de 864 à 334, après avoir atteint un pic de 1.170 en 1994.
Finalement, en 2003, le nombre d'accidents mortels sur vols réguliers est le plus bas enregistré depuis 1945, tandis que le nombre de passagers tués est le plus faible depuis 1984. L'année 2003 constitue donc une année record en terme de sécurité dans le transport aérien (f).
Si, effectivement, "Les statistiques ne consolent pas", il n’en reste pas moins vrai que de tels constats - alors que le trafic mondial a augmenté de 52% en dix ans - est rassurant. Il résulte des efforts engagés par tous les principaux participants (Administrations, constructeurs, exploitants, équipages, organismes représentatifs des personnels,....), ce qui a été confirmé par le Rapporteur de la Mission (g) "...le premier constat s'est rapidement imposé à notre mission : la sécurité est une préoccupation constante de la plupart des acteurs de transport aérien".
Cela étant dit, ces encourageants résultats ne doivent pas occulter le fait qu’il existe une dégradation du niveau de sécurité sur certains vols charters (hors Europe) et dans certaines zones géographiques. C'est ainsi qu’en 2003, le nombre d'accidents mortels pour 100.000 départs s'est élevé à 4,20 en Afrique, contre 0,35 en Europe et 0,36 en Amérique du Nord.
Quarante propositions
Il est impossible de présenter et commenter ces 40 propositions (h) émises par la Mission. Résumons en notant que les propositions de 1 à 7 concernent le niveau international (celui de l’OACI) ; celles de 8 à 25 concernent l’Europe et celles de 26 à 40 concernent la France.
- Ces propositions portent sur des renforcement des réglementations actuelles, tout d’abord, celles internationales, considérées comme étant actuellement des normes "a minima", inégalement mises en application dans le monde.
- Puis, au niveau européen, on relève une demande d'entrée en vigueur anticipée de la Directive (SAFA) (i) relative aux contrôles au sol des aéronefs des pays tiers empruntant les aéroports communautaires ; l'augmentation des pouvoirs de surveillance de l'AESA (j) ; le renforcement de plans d'action déjà existants ; l'introduction de nouvelles législations, etc...
- Enfin, au niveau de la France, sont présentées de nombreuses mesures de renfort, d'amélioration de l'existant.
Toutes ces mesures confirment un renforcement inéluctable des règlements - imposé par l’émergence de "tricheurs", à la suite de la "dérégulation" Carter - renforcement pronostiqué dans mes écrits, depuis des années. Il est vrai que, dans l’esprit d’aucuns, cette ère de la "dérégulation" pouvait laisser entendre qu’il y aurait de moins en moins de règlements, comme pouvait le laisser supposer la traduction tout à fait inexacte de "dérégulation" par "déréglementation" !
Retenons qu’au delà de ces propositions, le rapport de la Mission a permis de dégager trois éléments clés du problème de la sécurité aérienne :
- Cette sécurité est fonction de l'espace juridique dans lequel les compagnies évoluent. En effet, si les espaces juridiques européens et nord-américains ont permis l'élaboration de normes de sécurité élevées, tel n'est malheureusement pas le cas dans le Reste du Monde.
- Dans chaque espace, quel que soit le niveau de la réglementation existante, le degré de sécurité est fortement dépendant de l'existence ou non d'une culture de la sécurité chez tous les intervenants, essentiellement les compagnies aériennes.
- Si les membres de la Mission ont eu rapidement le sentiment que si le souci de la sécurité était omniprésent dans la construction des aéronefs; il l'était beaucoup moins dans leur maintenance et dans leur exploitation, où ont été constatées de grandes disparités, selon les compagnies et selon les pays.
La prise en compte de ces constats devrait, logiquement, conduire à des mesures visant essentiellement le Reste du Monde, ainsi que les compagnies qui ne respectent pas les règles du jeu. Les collusions frauduleuses - préjudiciables, non seulement aux salariés, mais également à la pérennité des compagnies - sont facilement décelables ; le nombre de dénonciations d’abus et de fraudes, de pressions sur les équipages pour partir en impasse, sont également bien connus.
Cela étant posé, il convient de faire remarquer que si les règles doivent être les mêmes pour tous, il n’en reste pas moins vrai que l’excès de réglementation peut devenir inutilement pénalisant sur différents plans (financier, exploitation,...) pour des compagnies ayant une réputation de sérieux, confirmée par les autorités de tutelle, par une exploitation sans accident, ni incident grave, ni mouvement social, coûteux pour l’entreprise et pénalisant pour les passagers.
Le Directeur du BEA (k), a mis également l’accent sur l’excès de réglementation : "Nous ne pouvons promouvoir la sécurité par la contrainte ou en plaçant des gendarmes derrière chacun et ce serait d’ailleurs inefficace. Il faut conduire les acteurs à adhérer à ce souci.
Il faut convaincre tous les pilotes, tous les mécaniciens, tous les chefs d’entreprise, même lorsqu’il commencent à perdre de l’argent ou qu’il commencent à faire faillite, que la sécurité est une donnée avec laquelle on ne joue pas".
Et maintenant ?Après ce travail approfondi et sérieux réalisé par la Mission, quelle suite sera donnée à ses conclusions et propositions ?
Première réponse encourageante : Afin que le parlement puisse régulièrement faire le point sur le suivi par le gouvernement des préconisations formulées, il a été suggéré l'instauration d'une conférence parlementaire annuelle dans le domaine de la sécurité aérienne, ce qui répondrait à cette préoccupation de pérennité de l’action parlementaire.
Il reste maintenant à former deux voeux.
Le premier voeu est que ces propositions soient rapidement prises en compte et débouchent sur des textes pouvant alors être appliqués par des Administrations qui en auront, non seulement la volonté (l), mais également les moyens, comme l’a - à juste raison - rappelé le Rapporteur : "Le danger ne se situe donc pas - ou pas principalement - dans le niveau où la qualité de la réglementation - même si celle-ci peut encore être très améliorée - mais, bien davantage, dans son application effective par toutes les compagnies et, surtout, par tous les pays".
Le deuxième voeu complète celui de la réalisation du souhait du Rapporteur : "Ces différentes propositions contribueront à la réflexion qu'il faut mener sans relâche dans ce domaine pour que la sécurité - jamais définitivement acquise - demeure une priorité pour tous les acteurs du transport aérien".
Alors, pourquoi ne pas espérer qu’une généralisation de la prise de conscience des différents opérateurs les conduisent à proposer, d’eux-mêmes, toutes décisions complémentaires allant dans le sens d’une amélioration de la sécurité ? Ainsi, le déclenchement d’une réaction en chaîne devrait permettre aux compagnies - comme elles l’ont déjà fait (m) - d’innover en la matière.
Souhait d’émergence d’initiativesIndépendamment des propositions pouvant être mises en oeuvre à court terme, il ne faut pas ignorer les effets à plus long terme liés à la sécurité des vols.
À cet égard, les domaines susceptibles de faire l’objet d’améliorations sont nombreux. Celui des conditions de travail n’a pas échappé au Rapporteur : "Mon souhait, face aux risques encourus est que la réglementation que nous appelons de nos voeux, ne se fasse pas à minima, au détriment des conditions de travail des personnels, mais qu'elle prenne en compte tous les éléments qui permettent d'offrir à l'équipage des meilleures conditions de travail afin d'assurer la sécurité que chacun réclame".
Abordant le sujet des temps de vol, sont cités des exemples d’incapacité des équipages survenus en plein vol. (n)
Ajoutons qu’en amont des conditions de travail, se situe la formation des équipages. Elle a également longuement été traitée.
Or, tout en rappelant que ses effets ne sont visibles qu’à plus long terme, il est inquiétant d’apprendre - alors que nul ne peut ignorer les efforts en cours pour améliorer la sécurité aérienne - qu’un des principaux syndicats de pilotes vient d’alerter la direction générale d’une grande compagnie sur l’insuffisance de la formation dispensée.
À une époque ou nous assistons, impuissants, à la disparition de dizaines de compagnies (o) ; à la délocalisation d’équipages dans des pays socialement moins coûteux ; à l’existence de plusieurs centaines de pilotes français en attente d’un emploi, il convient de s’intéresser également au "maintien des compétences".
À cet égard, parmi les innovations possibles, je n’en citerai qu’une seule dans le cadre de cette chronique. Pourquoi ne pas envisager - comme je l’ai suggéré (p) - la mise en place de mesures susceptibles d’être retenues, en ne rappelant, ici, que les titres :
1 - Encouragement du travail à temps partiel.
2 - Gestion des programmes sans heures supplémentaires.
3.- Limitation, puis suppression des équivalences, tant que le réservoir de pilote français pleinement qualifiés n’est pas vide.
4 - Utilisation des pilotes à la recherche d’un emploi pour des cours théoriques.
5 - Mise en stages au sol de ces pilotes, dans différents services : escales, hangars de fret, etc...
6 - Utilisation des pilotes en qualité d’"assistant de vol".
7 - Utilisation des pilotes dans la coopération technique.
Quant aux compétences proprement dites, il s’agirait de la création d'un "fonds d'entretien des qualifications", alimenté par les différentes entités impliquées (Etat, Administration de Tutelle, Compagnies, Constructeurs, Assureurs, etc... ) et, d'une façon générale, par tous les organismes concernés par un développement harmonieux du transport aérien, donc conscients de la nécessité d'entretenir en état le potentiel des pilotes actuels, gage indispensable à la sécurité du futur. Ce fonds devrait permettre d'assurer, à tous les pilotes, un nombre minimum d'heures de vol et de simulateur, pour maintenir en l'état leur niveau initial de connaissance et d'expérience.
Ces propositions sont-elles utopiques ou pratiquement réalisables ? Qui prendra l’initiative de déclencher ce processus qui est un investissement dont la rentabilité ne fait nul doute quant à la sécurité future du transport aérien ?
Sécurité = création continue
Tel est l’avis du Rapporteur : "Mon souhait est également que les progrès en matière de sécurité ne soient pas seulement subordonnés au traumatisme provoqué par les catastrophes aériennes. L'amélioration doit résulter d'une vigilance constante de la part des autorités responsables et des acteurs du transport aérien".
Transposant les paroles du Président Raymond Poincaré : "C’est la paix qu’il faut gagner cette fois-ci, la paix "création continue", concluons qu’effectivement, la sécurité également est une "création continue".
En effet, il est exact que la sécurité est l’affaire de tous et doit également être une création continue, laquelle doit s’appuyer sur un état d’esprit "safety oriented". Seule une véritable "culture de la sécurité" peut contribuer à résister aux pressions des performances économiques, tout en veillant aux performances sociales et humaines, donc à la sécurité.
Jean Belotti
===========
ia.- Présidente : Madame Odile SAUGUES, Député.
b.- Le rapport (N°1717) est composé de trois parties :
- Première partie : étude du contexte économique juridique et institutionnel, dans lequel s'exerce l'activité du transport aérien de voyageurs.
- Deuxième partie : analyse critique des normes et de leur application : normes techniques (construction, exploitation et maintenances, gestion du trafic aérien) ; normes humaines (formation des personnels et conditions le travail).
- Troisième partie : développement de la question du contrôle qui est au coeur de la problématique des pays tiers et celle du "retour d'expérience" qui est un enjeu essentiel de prévention et de progrès, y compris dans les États où le souci de sécurité est déjà exemplaire.
c.- Les taux de croissance annuel du trafic passagers sont exprimés soit à PKT (Passager Kilomètre Transporté) ou en RPK (Revenu Passager Transporté).
d.- Dans les dix dernières années qui viennent de s'écouler, le trafic de passagers a augmenté en moyenne de presque 3 % en nombre de passagers et en nombre de vols. Au niveau européen le nombre de passagers a augmenté d'environ 5,5 % contre seulement 1,8 % aux États-Unis.
En 2003, les statistiques de l’OACI indiquaient 1,7 milliard de passagers transportés sur les compagnies régulières des 188 Etats concernés et 99 millions sur des vols dits "non réguliers"
e.- OACI - "Organisation Aviation Civile Internationale". Créée le 7 décembre 1944 par la Convention de Chicago. Objectif : organiser les conditions du transport aérien mondial.
Nombre de membres : 188 États. Publie des "Normes" et des "Recommandations". La Convention comporte 18 annexes. C'est l'annexe nº 13 qui traite des "enquêtes accidents".
f.- La Mission fait remarquer - à titre de comparaison - que, "pour notre seul pays, le nombre d'accidents corporels sur la route s'est élevé en 2003 à 90.220, causant la mort de 5.731 personnes", auxquelles il convient d'ajouter les milliers de blessés graves, dont ceux handicapés à vie.
g.- Rapporteur : Monsieur François-Michel GONNOT, Député.
h.- Ce rapport est en vente au Kiosque de l’Assemblée Nationale - 4, rue Aristide Briand 75007 Paris (Tél : 01 40 63 61 21). Il est lisible sur le site www.assemblee-nationale.fr
i.- SAFA - "Safery Assessment Of Foreign Aircraft" - "Évaluation de la sécurité des aéronefs étrangers". Il s'agit d'un programme de la CEAC ("Conférence Européenne de l'Aviation Civile") lancé en 1996.
j.- AESA - "Agence Européenne de la Sécurité aérienne". Créée en septembre 2003, elle a pour mission d'établir et de maintenir un niveau élevé et uniforme de sécurité de l'aviation civile dans les pays de l'Union Européenne.
k.- (Page 81). Paul-Louis ARSLANIAN, Directeur du BEA ("Bureau Enquête Accidents" devenu "Bureau d’Enquêtes et d’Analyses pour la sécurité de l’aviation civile") est, actuellement, la personne qui a amassé le plus d’expérience en ce qui concerne les accidents et incidents aériens.
l.- Nicolas LOUKAKOS (Commandant de bord - juriste spécialisé en droit aérien - auteur) a noté (page 401) le cas où, à la suite de la disparition d'une compagnie aérienne, le directeur de cabinet du ministre des transports de l'époque avait répondu (déposition devant une Commission d’enquête parlementaire) : "Nous savions que cette compagnie ne répondait pas aux conditions techniques, n'entretenait pas ses avions, mais nous avons laissé faire".
m.- L’initiative d’Air France de créer un Service d’analyse systématique des vols en est un exemple. Etant, à l’époque chargé des relations extérieures de la Direction des Opérations Aériennes, j’avais organisé des présentations du fonctionnement et des objectifs de ce Service, à des sociétés de transport, fortement intéressées, dont la SNCF.
J’avais également, élaboré un système de "retour d'expérience" respectant l’anonymat qui n’a pas été officialisé, le "management"’ de l’époque n’ayant pas encore pris conscience qu’il s’agissait "d’un enjeu essentiel de prévention et de progrès", comme cela a été rappelé par la Mission.
n.- Jean-Claude BÜCK. : Commandant de bord - Polytechnicien - ancien examinateur à l’Organisme de Contrôle en Vol. Vice-président de l’Académie nationale de l’air et de l’espace. (Page 164).
o. - Liste (non exhaustive) des compagnies françaises disparues, en seulement 5 années :Aeris - AeroLyon - Aeropostale - Air Saint-Martin - Air St-Barthélemy - Air Liberté - Air Bretagne - Air Littoral - Air Poitou - Air Centre - Air Provence - Air Charter - Air Normandie - Air limoges - Air Atlantique - Air Open Sky - AirJet - AirLib - AirWest - AOM - ATP - Belair - Britanny Air - CAE - City Bird - Crossair Europe - Eurojet - Eurojet.- Fairlines - Finist’Air - Helicap - Kyrnair - L-Air - Occitania - Prest’Affair - Publi-Air - R’Lines - TAT - Virgin Express France - Wanair - Westair.
p.- Voir mes chroniques "Les pilotes de demain" et "Toujours ou pas assez de pilote" dans "Chroniques aéronautiques"- Editions VARIO - 1034, rue Henri Poincaré - 83340 Le Luc en Provence - www.aviation-publications.com
Jean BELOTTI - [jean.belotti@wanadoo.fr
La difficulté de la tâche était évidente. Elle impliquait de prendre connaissance de l'ensemble des composantes de l'industrie, afin d'être en mesure de localiser les domaines sur lesquels des dispositions correctives étaient susceptibles d'être suggérées. Or, le champ des investigations est effectivement vaste.
Il englobe la construction des avions ; leur exploitation ; leur maintenance ; le trafic aérien ; le comportement des différents intervenants ; sans oublier la formation et les conditions de travail des équipages. De plus, il était essentiel de ne pas prendre uniquement en compte la situation actuelle en France, mais également de tenir compte des dispositions prises par les organismes européens et internationaux.
Pour relever ce défi, pendant quatre mois, les parlementaires (la plupart ayant déjà une très bonne connaissance de l'aérien) ont entendu plus de 150 personnes, à l’occasion de 17 réunions, dont 9 tables rondes et plusieurs déplacements à Toulouse, Bruxelles, Washington et Montréal.
Deux satisfecit doivent être décernés :
- Le premier est justifié par la rapidité avec laquelle ladite Commission a diligenté ses travaux. Alors qu’elle a débuté ses investigations début février, son rapport a été déposé à l’Assemblée Nationale - seulement 5 mois après - le 7 juillet 2004. (b)
- Le second concerne la période à laquelle cette décision de se préoccuper de la sécurité aérienne a été prise. En effet, constat est généralement fait que les réactions des autorités ne se manifestent que lorsque la situation s’est fortement dégradée.
Dans de très nombreux cas bien connus, il faut attendre la survenance de l’accident grave (routier, ferroviaire, maritime, industriel, ...) pour qu’une mesure corrective soit prise. Or, ici, certes, la décision a été prise 10 jours après l’accident de Charm-el-Check, mais ce qui est essentiel a relever, c’est que cette préoccupation a pris forme alors que la sécurité s’améliore depuis déjà quelques années.
La niveau de sécurité s’améliore
Alors que le taux de croissance du trafic passagers (c) continue à augmenter (d), le niveau de sécurité s’améliore depuis 1994, puisque pendant la période écoulée, le nombre d’accidents (toutes catégories de vols confondues et pour tous les types d’appareils) a baissé de plus de 50 %, d’après les relevés de l’OACI. (e)
Quant au nombre d'accidents ayant provoqué la mort de passagers sur des vols réguliers (avions de plus de 2.250 kg), il est tombé de 33 à 6, soit une baisse de 82 %. Le nombre de passagers tués est passé de 864 à 334, après avoir atteint un pic de 1.170 en 1994.
Finalement, en 2003, le nombre d'accidents mortels sur vols réguliers est le plus bas enregistré depuis 1945, tandis que le nombre de passagers tués est le plus faible depuis 1984. L'année 2003 constitue donc une année record en terme de sécurité dans le transport aérien (f).
Si, effectivement, "Les statistiques ne consolent pas", il n’en reste pas moins vrai que de tels constats - alors que le trafic mondial a augmenté de 52% en dix ans - est rassurant. Il résulte des efforts engagés par tous les principaux participants (Administrations, constructeurs, exploitants, équipages, organismes représentatifs des personnels,....), ce qui a été confirmé par le Rapporteur de la Mission (g) "...le premier constat s'est rapidement imposé à notre mission : la sécurité est une préoccupation constante de la plupart des acteurs de transport aérien".
Cela étant dit, ces encourageants résultats ne doivent pas occulter le fait qu’il existe une dégradation du niveau de sécurité sur certains vols charters (hors Europe) et dans certaines zones géographiques. C'est ainsi qu’en 2003, le nombre d'accidents mortels pour 100.000 départs s'est élevé à 4,20 en Afrique, contre 0,35 en Europe et 0,36 en Amérique du Nord.
Quarante propositions
Il est impossible de présenter et commenter ces 40 propositions (h) émises par la Mission. Résumons en notant que les propositions de 1 à 7 concernent le niveau international (celui de l’OACI) ; celles de 8 à 25 concernent l’Europe et celles de 26 à 40 concernent la France.
- Ces propositions portent sur des renforcement des réglementations actuelles, tout d’abord, celles internationales, considérées comme étant actuellement des normes "a minima", inégalement mises en application dans le monde.
- Puis, au niveau européen, on relève une demande d'entrée en vigueur anticipée de la Directive (SAFA) (i) relative aux contrôles au sol des aéronefs des pays tiers empruntant les aéroports communautaires ; l'augmentation des pouvoirs de surveillance de l'AESA (j) ; le renforcement de plans d'action déjà existants ; l'introduction de nouvelles législations, etc...
- Enfin, au niveau de la France, sont présentées de nombreuses mesures de renfort, d'amélioration de l'existant.
Toutes ces mesures confirment un renforcement inéluctable des règlements - imposé par l’émergence de "tricheurs", à la suite de la "dérégulation" Carter - renforcement pronostiqué dans mes écrits, depuis des années. Il est vrai que, dans l’esprit d’aucuns, cette ère de la "dérégulation" pouvait laisser entendre qu’il y aurait de moins en moins de règlements, comme pouvait le laisser supposer la traduction tout à fait inexacte de "dérégulation" par "déréglementation" !
Retenons qu’au delà de ces propositions, le rapport de la Mission a permis de dégager trois éléments clés du problème de la sécurité aérienne :
- Cette sécurité est fonction de l'espace juridique dans lequel les compagnies évoluent. En effet, si les espaces juridiques européens et nord-américains ont permis l'élaboration de normes de sécurité élevées, tel n'est malheureusement pas le cas dans le Reste du Monde.
- Dans chaque espace, quel que soit le niveau de la réglementation existante, le degré de sécurité est fortement dépendant de l'existence ou non d'une culture de la sécurité chez tous les intervenants, essentiellement les compagnies aériennes.
- Si les membres de la Mission ont eu rapidement le sentiment que si le souci de la sécurité était omniprésent dans la construction des aéronefs; il l'était beaucoup moins dans leur maintenance et dans leur exploitation, où ont été constatées de grandes disparités, selon les compagnies et selon les pays.
La prise en compte de ces constats devrait, logiquement, conduire à des mesures visant essentiellement le Reste du Monde, ainsi que les compagnies qui ne respectent pas les règles du jeu. Les collusions frauduleuses - préjudiciables, non seulement aux salariés, mais également à la pérennité des compagnies - sont facilement décelables ; le nombre de dénonciations d’abus et de fraudes, de pressions sur les équipages pour partir en impasse, sont également bien connus.
Cela étant posé, il convient de faire remarquer que si les règles doivent être les mêmes pour tous, il n’en reste pas moins vrai que l’excès de réglementation peut devenir inutilement pénalisant sur différents plans (financier, exploitation,...) pour des compagnies ayant une réputation de sérieux, confirmée par les autorités de tutelle, par une exploitation sans accident, ni incident grave, ni mouvement social, coûteux pour l’entreprise et pénalisant pour les passagers.
Le Directeur du BEA (k), a mis également l’accent sur l’excès de réglementation : "Nous ne pouvons promouvoir la sécurité par la contrainte ou en plaçant des gendarmes derrière chacun et ce serait d’ailleurs inefficace. Il faut conduire les acteurs à adhérer à ce souci.
Il faut convaincre tous les pilotes, tous les mécaniciens, tous les chefs d’entreprise, même lorsqu’il commencent à perdre de l’argent ou qu’il commencent à faire faillite, que la sécurité est une donnée avec laquelle on ne joue pas".
Et maintenant ?Après ce travail approfondi et sérieux réalisé par la Mission, quelle suite sera donnée à ses conclusions et propositions ?
Première réponse encourageante : Afin que le parlement puisse régulièrement faire le point sur le suivi par le gouvernement des préconisations formulées, il a été suggéré l'instauration d'une conférence parlementaire annuelle dans le domaine de la sécurité aérienne, ce qui répondrait à cette préoccupation de pérennité de l’action parlementaire.
Il reste maintenant à former deux voeux.
Le premier voeu est que ces propositions soient rapidement prises en compte et débouchent sur des textes pouvant alors être appliqués par des Administrations qui en auront, non seulement la volonté (l), mais également les moyens, comme l’a - à juste raison - rappelé le Rapporteur : "Le danger ne se situe donc pas - ou pas principalement - dans le niveau où la qualité de la réglementation - même si celle-ci peut encore être très améliorée - mais, bien davantage, dans son application effective par toutes les compagnies et, surtout, par tous les pays".
Le deuxième voeu complète celui de la réalisation du souhait du Rapporteur : "Ces différentes propositions contribueront à la réflexion qu'il faut mener sans relâche dans ce domaine pour que la sécurité - jamais définitivement acquise - demeure une priorité pour tous les acteurs du transport aérien".
Alors, pourquoi ne pas espérer qu’une généralisation de la prise de conscience des différents opérateurs les conduisent à proposer, d’eux-mêmes, toutes décisions complémentaires allant dans le sens d’une amélioration de la sécurité ? Ainsi, le déclenchement d’une réaction en chaîne devrait permettre aux compagnies - comme elles l’ont déjà fait (m) - d’innover en la matière.
Souhait d’émergence d’initiativesIndépendamment des propositions pouvant être mises en oeuvre à court terme, il ne faut pas ignorer les effets à plus long terme liés à la sécurité des vols.
À cet égard, les domaines susceptibles de faire l’objet d’améliorations sont nombreux. Celui des conditions de travail n’a pas échappé au Rapporteur : "Mon souhait, face aux risques encourus est que la réglementation que nous appelons de nos voeux, ne se fasse pas à minima, au détriment des conditions de travail des personnels, mais qu'elle prenne en compte tous les éléments qui permettent d'offrir à l'équipage des meilleures conditions de travail afin d'assurer la sécurité que chacun réclame".
Abordant le sujet des temps de vol, sont cités des exemples d’incapacité des équipages survenus en plein vol. (n)
Ajoutons qu’en amont des conditions de travail, se situe la formation des équipages. Elle a également longuement été traitée.
Or, tout en rappelant que ses effets ne sont visibles qu’à plus long terme, il est inquiétant d’apprendre - alors que nul ne peut ignorer les efforts en cours pour améliorer la sécurité aérienne - qu’un des principaux syndicats de pilotes vient d’alerter la direction générale d’une grande compagnie sur l’insuffisance de la formation dispensée.
À une époque ou nous assistons, impuissants, à la disparition de dizaines de compagnies (o) ; à la délocalisation d’équipages dans des pays socialement moins coûteux ; à l’existence de plusieurs centaines de pilotes français en attente d’un emploi, il convient de s’intéresser également au "maintien des compétences".
À cet égard, parmi les innovations possibles, je n’en citerai qu’une seule dans le cadre de cette chronique. Pourquoi ne pas envisager - comme je l’ai suggéré (p) - la mise en place de mesures susceptibles d’être retenues, en ne rappelant, ici, que les titres :
1 - Encouragement du travail à temps partiel.
2 - Gestion des programmes sans heures supplémentaires.
3.- Limitation, puis suppression des équivalences, tant que le réservoir de pilote français pleinement qualifiés n’est pas vide.
4 - Utilisation des pilotes à la recherche d’un emploi pour des cours théoriques.
5 - Mise en stages au sol de ces pilotes, dans différents services : escales, hangars de fret, etc...
6 - Utilisation des pilotes en qualité d’"assistant de vol".
7 - Utilisation des pilotes dans la coopération technique.
Quant aux compétences proprement dites, il s’agirait de la création d'un "fonds d'entretien des qualifications", alimenté par les différentes entités impliquées (Etat, Administration de Tutelle, Compagnies, Constructeurs, Assureurs, etc... ) et, d'une façon générale, par tous les organismes concernés par un développement harmonieux du transport aérien, donc conscients de la nécessité d'entretenir en état le potentiel des pilotes actuels, gage indispensable à la sécurité du futur. Ce fonds devrait permettre d'assurer, à tous les pilotes, un nombre minimum d'heures de vol et de simulateur, pour maintenir en l'état leur niveau initial de connaissance et d'expérience.
Ces propositions sont-elles utopiques ou pratiquement réalisables ? Qui prendra l’initiative de déclencher ce processus qui est un investissement dont la rentabilité ne fait nul doute quant à la sécurité future du transport aérien ?
Sécurité = création continue
Tel est l’avis du Rapporteur : "Mon souhait est également que les progrès en matière de sécurité ne soient pas seulement subordonnés au traumatisme provoqué par les catastrophes aériennes. L'amélioration doit résulter d'une vigilance constante de la part des autorités responsables et des acteurs du transport aérien".
Transposant les paroles du Président Raymond Poincaré : "C’est la paix qu’il faut gagner cette fois-ci, la paix "création continue", concluons qu’effectivement, la sécurité également est une "création continue".
En effet, il est exact que la sécurité est l’affaire de tous et doit également être une création continue, laquelle doit s’appuyer sur un état d’esprit "safety oriented". Seule une véritable "culture de la sécurité" peut contribuer à résister aux pressions des performances économiques, tout en veillant aux performances sociales et humaines, donc à la sécurité.
Jean Belotti
===========
ia.- Présidente : Madame Odile SAUGUES, Député.
b.- Le rapport (N°1717) est composé de trois parties :
- Première partie : étude du contexte économique juridique et institutionnel, dans lequel s'exerce l'activité du transport aérien de voyageurs.
- Deuxième partie : analyse critique des normes et de leur application : normes techniques (construction, exploitation et maintenances, gestion du trafic aérien) ; normes humaines (formation des personnels et conditions le travail).
- Troisième partie : développement de la question du contrôle qui est au coeur de la problématique des pays tiers et celle du "retour d'expérience" qui est un enjeu essentiel de prévention et de progrès, y compris dans les États où le souci de sécurité est déjà exemplaire.
c.- Les taux de croissance annuel du trafic passagers sont exprimés soit à PKT (Passager Kilomètre Transporté) ou en RPK (Revenu Passager Transporté).
d.- Dans les dix dernières années qui viennent de s'écouler, le trafic de passagers a augmenté en moyenne de presque 3 % en nombre de passagers et en nombre de vols. Au niveau européen le nombre de passagers a augmenté d'environ 5,5 % contre seulement 1,8 % aux États-Unis.
En 2003, les statistiques de l’OACI indiquaient 1,7 milliard de passagers transportés sur les compagnies régulières des 188 Etats concernés et 99 millions sur des vols dits "non réguliers"
e.- OACI - "Organisation Aviation Civile Internationale". Créée le 7 décembre 1944 par la Convention de Chicago. Objectif : organiser les conditions du transport aérien mondial.
Nombre de membres : 188 États. Publie des "Normes" et des "Recommandations". La Convention comporte 18 annexes. C'est l'annexe nº 13 qui traite des "enquêtes accidents".
f.- La Mission fait remarquer - à titre de comparaison - que, "pour notre seul pays, le nombre d'accidents corporels sur la route s'est élevé en 2003 à 90.220, causant la mort de 5.731 personnes", auxquelles il convient d'ajouter les milliers de blessés graves, dont ceux handicapés à vie.
g.- Rapporteur : Monsieur François-Michel GONNOT, Député.
h.- Ce rapport est en vente au Kiosque de l’Assemblée Nationale - 4, rue Aristide Briand 75007 Paris (Tél : 01 40 63 61 21). Il est lisible sur le site www.assemblee-nationale.fr
i.- SAFA - "Safery Assessment Of Foreign Aircraft" - "Évaluation de la sécurité des aéronefs étrangers". Il s'agit d'un programme de la CEAC ("Conférence Européenne de l'Aviation Civile") lancé en 1996.
j.- AESA - "Agence Européenne de la Sécurité aérienne". Créée en septembre 2003, elle a pour mission d'établir et de maintenir un niveau élevé et uniforme de sécurité de l'aviation civile dans les pays de l'Union Européenne.
k.- (Page 81). Paul-Louis ARSLANIAN, Directeur du BEA ("Bureau Enquête Accidents" devenu "Bureau d’Enquêtes et d’Analyses pour la sécurité de l’aviation civile") est, actuellement, la personne qui a amassé le plus d’expérience en ce qui concerne les accidents et incidents aériens.
l.- Nicolas LOUKAKOS (Commandant de bord - juriste spécialisé en droit aérien - auteur) a noté (page 401) le cas où, à la suite de la disparition d'une compagnie aérienne, le directeur de cabinet du ministre des transports de l'époque avait répondu (déposition devant une Commission d’enquête parlementaire) : "Nous savions que cette compagnie ne répondait pas aux conditions techniques, n'entretenait pas ses avions, mais nous avons laissé faire".
m.- L’initiative d’Air France de créer un Service d’analyse systématique des vols en est un exemple. Etant, à l’époque chargé des relations extérieures de la Direction des Opérations Aériennes, j’avais organisé des présentations du fonctionnement et des objectifs de ce Service, à des sociétés de transport, fortement intéressées, dont la SNCF.
J’avais également, élaboré un système de "retour d'expérience" respectant l’anonymat qui n’a pas été officialisé, le "management"’ de l’époque n’ayant pas encore pris conscience qu’il s’agissait "d’un enjeu essentiel de prévention et de progrès", comme cela a été rappelé par la Mission.
n.- Jean-Claude BÜCK. : Commandant de bord - Polytechnicien - ancien examinateur à l’Organisme de Contrôle en Vol. Vice-président de l’Académie nationale de l’air et de l’espace. (Page 164).
o. - Liste (non exhaustive) des compagnies françaises disparues, en seulement 5 années :Aeris - AeroLyon - Aeropostale - Air Saint-Martin - Air St-Barthélemy - Air Liberté - Air Bretagne - Air Littoral - Air Poitou - Air Centre - Air Provence - Air Charter - Air Normandie - Air limoges - Air Atlantique - Air Open Sky - AirJet - AirLib - AirWest - AOM - ATP - Belair - Britanny Air - CAE - City Bird - Crossair Europe - Eurojet - Eurojet.- Fairlines - Finist’Air - Helicap - Kyrnair - L-Air - Occitania - Prest’Affair - Publi-Air - R’Lines - TAT - Virgin Express France - Wanair - Westair.
p.- Voir mes chroniques "Les pilotes de demain" et "Toujours ou pas assez de pilote" dans "Chroniques aéronautiques"- Editions VARIO - 1034, rue Henri Poincaré - 83340 Le Luc en Provence - www.aviation-publications.com
Jean BELOTTI - [jean.belotti@wanadoo.fr