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À la suite de ma chronique "Le Transport aérien en longue maladie", j’ai été l’invité de Jean-François Cadet [Radio-France International (RFI) (20h15 - le 07/09/03)], émission au cours de laquelle j’ai répondu essentiellement à des questions relatives au rapprochement entre Air France et KLM.
Ce sujet ayant également retenu l’attention de plusieurs de mes lecteurs, il fait donc l’objet de ma chronique de ce mois, qui répond aux principales questions posées.
Pourquoi des rapprochements entre compagnies ?
Le cheminement est long et j’ai eu l’occasion de le tracer, à plusieurs reprises, dans mes différents écrits. En résumé : Après la "deregulation Carter", disparition de centaines de petites compagnies, absorbées par une oligarchie de méga-compagnies, de plus en plus puissantes et occupant des positions monopolistiques géographiques, protégées par des barrières à l’entrée infranchissables (a).
La fragilité et la sensibilité du système du transport aérien à de très nombreux facteurs exogènes et endogènes (décrits dans ma précédente chronique) ont conduit les compagnies a coopérer en vue d'optimiser leur fonction de production par une réduction des coûts et une augmentation de la productivité.
Résultat : des vagues d’accords de coopération sur le plan technique et commercial, suivi de la "globalisation" (prises de participations croisées entre compagnies).
La phase suivante a été l’émergence des alliances [dont SkyTeam (b)], au sujet desquelles j’ai déjà consacré une chronique détaillant les objectifs et avantages qui en découlaient, aussi bien pour les compagnies participantes que pour les passagers, consommateurs de transport aérien (c).
Le rapprochement AIR FRANCE - KLM
Tout d’abord, j’apporte la réponse à une autre question de savoir pourquoi les discussions ont été aussi longues dans ce rapprochement ? Pour la simple et bonne raison qu’il ne s’agit pas d’un coup de foudre, mais d’un mariage raisonné et que toutes les précautions doivent être prises pendant cette période de "fiançailles", avant le passage des bagues aux doigts.
En effet, il ne s’agit pas simplement d’une entrée dans un hyper-groupe (duquel on peut sortir, si cela s’avère un mauvais choix), mais d’une fusion. Alors, chaque partenaire doit être conscient qu’il fait désormais partie d’une entité pour laquelle il doit mettre tous ses moyens en oeuvre afin d’assurer la pérennité de l’ensemble, grâce à un développement le plus harmonieux possible.
L’objectif déclaré est clair et net : "Création du premier groupe aérien européen, démarche s’inscrivant dans un processus de consolidation des alliances qui permettra à Air France d’assurer son développement et sa rentabilité dans le futur".
Ce nouveau groupe deviendra un leader au niveau mondial : 1er en terme de chiffre d’affaires (19 milliards d’euros), 3ième pour le trafic, avec une flotte de 556 avions et un effectif (actuel) de 106.000 personnes.
Qu’y a-t-il dans la corbeille des mariés ?
Tout d’abord, un atout complémentaire significatif : leurs deux plate-formes aéroportuaires de correspondances (hubs) - Roissy et Schiphol - qui sont deux des quatre plus grandes en Europe (d).
Pour les passagers, il est annoncé 93 destinations nouvelles pour ceux de KLM et 48 pour ceux d’Air France.Dans le transport de fret, les deux compagnies - étant déjà des acteurs de premier plan au niveau mondial - la complémentarité jouera sur le développement de leurs spécialisations respectives : Air France avec les produits express et KLM avec les produits périssables.
Ainsi, pour le cargo, le nouveau groupe sera le premier, non seulement en Europe, mais au monde.Cela étant, pour ce qui concerne la dote de KLM, la bourse est vide, et même trouée, la compagnie rencontrant d’importantes difficultés financières (un déficit de 482,2 millions d'euros pour le premier trimestre 2003) et un passif non négligeable.
Juteuse opération pour les actionnaires ?
Il est prévu que cette opération sera génératrice de valeur, en particulier grâce aux synergies que pourra générer le nouvel ensemble. Les actionnaires d’Air France vont devenir des actionnaires du groupe "Air France - KLM".
À l’issue de l’OPE (Offre Publique d’Echange) proposée aux actionnaires de KLM (e), il en résultera que la part de l’Etat français passera de 54% à 43,78% ; celle des ex-actionnaires de KLM sera de 19%.
Du fait que KLM soit déjà cotée sur le marché américain, l’action Air France le sera également. Cela étant dit, la plupart des analystes financiers pensent qu’à court-terme, il existe un doute sur la concrétisation des synergies annoncées et que l’action ne s’"envolera" qu’à plus long terme.
Privatisation d’Air France
Cette nouvelle alliance entraînera - sans aucune cession des actions détenues par l'Etat - la privatisation d’Air France, étant donné que la part du capital détenu par l’Etat français passera de 54% à 43,78 %. De plus, l’Etat français n’a pas caché son intention de réduire, dès que possible et significativement, sa participation dans le capital d’Air France (jusqu’à moins de 20 %), le calendrier restant dépendant des conditions du marché.
La réaction des personnels ne s’est pas faite attendre. C’est ainsi que la majorité des 9 syndicats membres du Comité Central d'Entreprise (CCE) d'Air France ont réaffirmé leur opposition à la privatisation de la compagnie française, qui doit intervenir avant la fin de l'année, qu'elle s'accompagne ou non d'une alliance avec la compagnie néerlandaise KLM.
Raison invoquée : "l'Etat veut renflouer une petite partie de son déficit public. La loi de privatisation d'Air France (1er avril 2003) repose sur des considérations idéologiques et non sur un véritable projet industriel, alors que le transport aérien est devenu une activité extrêmement vulnérable".
On ne peut écarter, également, la crainte de la disparition des avantages acquis et dans le remplacement du statut actuel des personnels par un accord d’entreprise (qui verra le jour dans les deux ans).
Son contenu risque de conduire à "une instabilité sociale et à une démotivation des personnels", telle est la crainte exprimée par les syndicats représentatifs en France.
Et maintenant ?
"Air France", devenue le "Groupe Air France", va subir une deuxième mutation, en devenant une "Holding", à savoir : une oligarchie restreinte de financiers n’ayant essentiellement comme objectif que celui de maximiser les résultats de leurs multiples sous-ensembles.
Force est de constater que les intérêts des régions concernées et des emplois ne font pas partie de leurs préoccupations premières. Il suffit pour s’en convaincre de lister les comportements adoptés par toutes les multinationales, et ce, depuis des années.
Il reste - et ce n’est pas une mince affaire - à mettre en place le système de coopération et de coordination qui sera en mesure de concrétiser les synergies, lesquelles sont évaluées à 400 millions d'euros, sur cinq ans. Malgré les garanties sur le très court terme, comment être certain que l’emploi sera protégé dans une structure, dont le fonctionnement dépendra d’une holding ?
D’ailleurs KLM n’a-t-elle déjà pas annoncé la suppression de 4.500 emplois ? Alitalia (f), qui avait frappé à la porte, avait annoncé, quant à elle, la suppression de 3.000 postes. Comment Air France - ayant perdu son statut de compagnie nationale et impliquée dans ce regroupement d’activités - pourrait ne pas être conduite à des réorganisations tenant compte des doublons résultant de la nouvelle structure ?
En effet, dans la mise en place de standards communs, il reste à savoir comment s’intégreront les différentes cultures d’entreprises et comment seront harmonisées les conditions sociales ? Comment croire que la guillotine des célèbres "plans conjoncturels d'assainissement" restera au placard, dans une économie ultra-libérale ?
Or, si le porte parole de KLM a déclaré que "les employés étaient prêts à affronter les risques sociaux d’un rapprochement, car ayant mesuré le danger de l’immobilisme, ils considèrent que leur compagnie, seule sur un marché étroit, n’a aucune garantie de viabilité", il n’en est - bien évidemment - pas de même pour les employés d’Air France, ce qui explique leurs légitimes inquiétudes.
In memoriam
Notre compagnie nationale, telle que des milliers d’employés et de passagers l’ont connue, va disparaître. Comment ne pas être fier en écoutant le panégyrique qui, le jour de ses obsèques, retracera son merveilleux parcours et ses multiples réalisations :- défrichage de la presque totalité des lignes des réseaux internationaux,- adaptation à l'évolution du progrès technique, en assimilant tous les types d'avion, du Junkers 52 au Super-Constellation et du Vickers-Viscount au Concorde,- formation des milliers de spécialistes répartis à travers le monde,- établissement pour les personnels, d’un "statut" qui pouvait servir de référence aux autres industries,- amélioration, au fil des ans, de la sécurité,- assurance d’un service public, avec l'objectif premier de "transporter, en sécurité, des passagers".
Même si le relais est correctement passé et si la course continue sous d’autres couleurs, il n’en reste pas moins que l’on prépare les obsèques de notre compagnie nationale Air France. Il faut en faire notre deuil.
Mais, pour éviter qu’il y ait confusion entre ce qu’a été la compagnie Air France et ce quelle deviendra dans ce monde où la priorité est donnée aux profits - au détriment des aspirations sociales et relations humaines - le moment n’est-il pas propice à un changement de nom, me suggère un de mes lecteurs ?
Puisse l’ambition du Président Spinetta "Faire d’Air France une compagnie leader pour construire la meilleure alliance mondiale" se réaliser et que le social ne soit pas le parent pauvre de ce beau mariage.
(a) - Hub ; Installations privées sur les aéroports ; Systèmes de réservation électronique ; Yeld Management ; large surface financière ; économies d’échelle,...
(b).- Créé en 2000, Skyteam s’est élargi au fil des mois, contribuant ainsi à placer Air France sur le podium des principaux transporteurs mondiaux, grâce à son Hub de Roissy et à une augmentation croissante de ses parts de marché, ce qui lui a permis de dégager des résultas annuels positifs et d’augmenter la taille de sa flotte.
(c) Actuellement, les trois plus importantes alliances sont :
* Star Alliance (création en mai 1997) : Air Canada - Air New Zealand - ANA - Asiana AL - Austrian AL - BMI British Midland - Lauda - Lufthansa - Mexicana - SAS - Singapore AL - Spanair - Thai -Tyrolean - United - Varig.* Oneworld (création en février 1999) : Aer Lingus - American AL - British AW - Cathay Pacific - Finnair - Iberia - Lan Chile - Quantas.* Skyteam (création en juin 2000) : Aeromexico - Air France - Alitatlia - Czech AL - Delta AL - Korean Air.
(d) - Roissy-CDG : 48 millions de passagers (3ième rang en Europe) - 4 pistes - 1er aéroport européen en mouvements d’avions.Amsterdam Schiphol : 40 millions de passagers (4ième rang en Europe) - 5 pistes - 4ième aéroport européen en mouvements d’avions.
(e) - L’OPE porte sur 100% des actions ordinaires de KLM.. Ses actionnaires échangeront leurs actions contre des actions nouvelles et des bons de souscription (BSA) Air France, laquelle, en conséquence, augmentera son capital.
(f) - En avril 2000, KLM ayant décidé unilatéralement de rompre l’alliance stratégique engagée avec Alitalia, cette dernière, pour sortir de son isolement, avait rejoint SkyTeam en juillet 2001. Avec Air France, Alitalia développe un système "multi-hub" sur Roisy, Milan Malpensa et Rome Fiumicino. Puis, ce partenariat a été renforcé par un échange d’actions à concurrence de 2% du capital, finalisé en 2003.
Jean Belotti - 28 octobre 2003
jean.belotti@wanadoo.fr
Ce sujet ayant également retenu l’attention de plusieurs de mes lecteurs, il fait donc l’objet de ma chronique de ce mois, qui répond aux principales questions posées.
Pourquoi des rapprochements entre compagnies ?
Le cheminement est long et j’ai eu l’occasion de le tracer, à plusieurs reprises, dans mes différents écrits. En résumé : Après la "deregulation Carter", disparition de centaines de petites compagnies, absorbées par une oligarchie de méga-compagnies, de plus en plus puissantes et occupant des positions monopolistiques géographiques, protégées par des barrières à l’entrée infranchissables (a).
La fragilité et la sensibilité du système du transport aérien à de très nombreux facteurs exogènes et endogènes (décrits dans ma précédente chronique) ont conduit les compagnies a coopérer en vue d'optimiser leur fonction de production par une réduction des coûts et une augmentation de la productivité.
Résultat : des vagues d’accords de coopération sur le plan technique et commercial, suivi de la "globalisation" (prises de participations croisées entre compagnies).
La phase suivante a été l’émergence des alliances [dont SkyTeam (b)], au sujet desquelles j’ai déjà consacré une chronique détaillant les objectifs et avantages qui en découlaient, aussi bien pour les compagnies participantes que pour les passagers, consommateurs de transport aérien (c).
Le rapprochement AIR FRANCE - KLM
Tout d’abord, j’apporte la réponse à une autre question de savoir pourquoi les discussions ont été aussi longues dans ce rapprochement ? Pour la simple et bonne raison qu’il ne s’agit pas d’un coup de foudre, mais d’un mariage raisonné et que toutes les précautions doivent être prises pendant cette période de "fiançailles", avant le passage des bagues aux doigts.
En effet, il ne s’agit pas simplement d’une entrée dans un hyper-groupe (duquel on peut sortir, si cela s’avère un mauvais choix), mais d’une fusion. Alors, chaque partenaire doit être conscient qu’il fait désormais partie d’une entité pour laquelle il doit mettre tous ses moyens en oeuvre afin d’assurer la pérennité de l’ensemble, grâce à un développement le plus harmonieux possible.
L’objectif déclaré est clair et net : "Création du premier groupe aérien européen, démarche s’inscrivant dans un processus de consolidation des alliances qui permettra à Air France d’assurer son développement et sa rentabilité dans le futur".
Ce nouveau groupe deviendra un leader au niveau mondial : 1er en terme de chiffre d’affaires (19 milliards d’euros), 3ième pour le trafic, avec une flotte de 556 avions et un effectif (actuel) de 106.000 personnes.
Qu’y a-t-il dans la corbeille des mariés ?
Tout d’abord, un atout complémentaire significatif : leurs deux plate-formes aéroportuaires de correspondances (hubs) - Roissy et Schiphol - qui sont deux des quatre plus grandes en Europe (d).
Pour les passagers, il est annoncé 93 destinations nouvelles pour ceux de KLM et 48 pour ceux d’Air France.Dans le transport de fret, les deux compagnies - étant déjà des acteurs de premier plan au niveau mondial - la complémentarité jouera sur le développement de leurs spécialisations respectives : Air France avec les produits express et KLM avec les produits périssables.
Ainsi, pour le cargo, le nouveau groupe sera le premier, non seulement en Europe, mais au monde.Cela étant, pour ce qui concerne la dote de KLM, la bourse est vide, et même trouée, la compagnie rencontrant d’importantes difficultés financières (un déficit de 482,2 millions d'euros pour le premier trimestre 2003) et un passif non négligeable.
Juteuse opération pour les actionnaires ?
Il est prévu que cette opération sera génératrice de valeur, en particulier grâce aux synergies que pourra générer le nouvel ensemble. Les actionnaires d’Air France vont devenir des actionnaires du groupe "Air France - KLM".
À l’issue de l’OPE (Offre Publique d’Echange) proposée aux actionnaires de KLM (e), il en résultera que la part de l’Etat français passera de 54% à 43,78% ; celle des ex-actionnaires de KLM sera de 19%.
Du fait que KLM soit déjà cotée sur le marché américain, l’action Air France le sera également. Cela étant dit, la plupart des analystes financiers pensent qu’à court-terme, il existe un doute sur la concrétisation des synergies annoncées et que l’action ne s’"envolera" qu’à plus long terme.
Privatisation d’Air France
Cette nouvelle alliance entraînera - sans aucune cession des actions détenues par l'Etat - la privatisation d’Air France, étant donné que la part du capital détenu par l’Etat français passera de 54% à 43,78 %. De plus, l’Etat français n’a pas caché son intention de réduire, dès que possible et significativement, sa participation dans le capital d’Air France (jusqu’à moins de 20 %), le calendrier restant dépendant des conditions du marché.
La réaction des personnels ne s’est pas faite attendre. C’est ainsi que la majorité des 9 syndicats membres du Comité Central d'Entreprise (CCE) d'Air France ont réaffirmé leur opposition à la privatisation de la compagnie française, qui doit intervenir avant la fin de l'année, qu'elle s'accompagne ou non d'une alliance avec la compagnie néerlandaise KLM.
Raison invoquée : "l'Etat veut renflouer une petite partie de son déficit public. La loi de privatisation d'Air France (1er avril 2003) repose sur des considérations idéologiques et non sur un véritable projet industriel, alors que le transport aérien est devenu une activité extrêmement vulnérable".
On ne peut écarter, également, la crainte de la disparition des avantages acquis et dans le remplacement du statut actuel des personnels par un accord d’entreprise (qui verra le jour dans les deux ans).
Son contenu risque de conduire à "une instabilité sociale et à une démotivation des personnels", telle est la crainte exprimée par les syndicats représentatifs en France.
Et maintenant ?
"Air France", devenue le "Groupe Air France", va subir une deuxième mutation, en devenant une "Holding", à savoir : une oligarchie restreinte de financiers n’ayant essentiellement comme objectif que celui de maximiser les résultats de leurs multiples sous-ensembles.
Force est de constater que les intérêts des régions concernées et des emplois ne font pas partie de leurs préoccupations premières. Il suffit pour s’en convaincre de lister les comportements adoptés par toutes les multinationales, et ce, depuis des années.
Il reste - et ce n’est pas une mince affaire - à mettre en place le système de coopération et de coordination qui sera en mesure de concrétiser les synergies, lesquelles sont évaluées à 400 millions d'euros, sur cinq ans. Malgré les garanties sur le très court terme, comment être certain que l’emploi sera protégé dans une structure, dont le fonctionnement dépendra d’une holding ?
D’ailleurs KLM n’a-t-elle déjà pas annoncé la suppression de 4.500 emplois ? Alitalia (f), qui avait frappé à la porte, avait annoncé, quant à elle, la suppression de 3.000 postes. Comment Air France - ayant perdu son statut de compagnie nationale et impliquée dans ce regroupement d’activités - pourrait ne pas être conduite à des réorganisations tenant compte des doublons résultant de la nouvelle structure ?
En effet, dans la mise en place de standards communs, il reste à savoir comment s’intégreront les différentes cultures d’entreprises et comment seront harmonisées les conditions sociales ? Comment croire que la guillotine des célèbres "plans conjoncturels d'assainissement" restera au placard, dans une économie ultra-libérale ?
Or, si le porte parole de KLM a déclaré que "les employés étaient prêts à affronter les risques sociaux d’un rapprochement, car ayant mesuré le danger de l’immobilisme, ils considèrent que leur compagnie, seule sur un marché étroit, n’a aucune garantie de viabilité", il n’en est - bien évidemment - pas de même pour les employés d’Air France, ce qui explique leurs légitimes inquiétudes.
In memoriam
Notre compagnie nationale, telle que des milliers d’employés et de passagers l’ont connue, va disparaître. Comment ne pas être fier en écoutant le panégyrique qui, le jour de ses obsèques, retracera son merveilleux parcours et ses multiples réalisations :- défrichage de la presque totalité des lignes des réseaux internationaux,- adaptation à l'évolution du progrès technique, en assimilant tous les types d'avion, du Junkers 52 au Super-Constellation et du Vickers-Viscount au Concorde,- formation des milliers de spécialistes répartis à travers le monde,- établissement pour les personnels, d’un "statut" qui pouvait servir de référence aux autres industries,- amélioration, au fil des ans, de la sécurité,- assurance d’un service public, avec l'objectif premier de "transporter, en sécurité, des passagers".
Même si le relais est correctement passé et si la course continue sous d’autres couleurs, il n’en reste pas moins que l’on prépare les obsèques de notre compagnie nationale Air France. Il faut en faire notre deuil.
Mais, pour éviter qu’il y ait confusion entre ce qu’a été la compagnie Air France et ce quelle deviendra dans ce monde où la priorité est donnée aux profits - au détriment des aspirations sociales et relations humaines - le moment n’est-il pas propice à un changement de nom, me suggère un de mes lecteurs ?
Puisse l’ambition du Président Spinetta "Faire d’Air France une compagnie leader pour construire la meilleure alliance mondiale" se réaliser et que le social ne soit pas le parent pauvre de ce beau mariage.
(a) - Hub ; Installations privées sur les aéroports ; Systèmes de réservation électronique ; Yeld Management ; large surface financière ; économies d’échelle,...
(b).- Créé en 2000, Skyteam s’est élargi au fil des mois, contribuant ainsi à placer Air France sur le podium des principaux transporteurs mondiaux, grâce à son Hub de Roissy et à une augmentation croissante de ses parts de marché, ce qui lui a permis de dégager des résultas annuels positifs et d’augmenter la taille de sa flotte.
(c) Actuellement, les trois plus importantes alliances sont :
* Star Alliance (création en mai 1997) : Air Canada - Air New Zealand - ANA - Asiana AL - Austrian AL - BMI British Midland - Lauda - Lufthansa - Mexicana - SAS - Singapore AL - Spanair - Thai -Tyrolean - United - Varig.* Oneworld (création en février 1999) : Aer Lingus - American AL - British AW - Cathay Pacific - Finnair - Iberia - Lan Chile - Quantas.* Skyteam (création en juin 2000) : Aeromexico - Air France - Alitatlia - Czech AL - Delta AL - Korean Air.
(d) - Roissy-CDG : 48 millions de passagers (3ième rang en Europe) - 4 pistes - 1er aéroport européen en mouvements d’avions.Amsterdam Schiphol : 40 millions de passagers (4ième rang en Europe) - 5 pistes - 4ième aéroport européen en mouvements d’avions.
(e) - L’OPE porte sur 100% des actions ordinaires de KLM.. Ses actionnaires échangeront leurs actions contre des actions nouvelles et des bons de souscription (BSA) Air France, laquelle, en conséquence, augmentera son capital.
(f) - En avril 2000, KLM ayant décidé unilatéralement de rompre l’alliance stratégique engagée avec Alitalia, cette dernière, pour sortir de son isolement, avait rejoint SkyTeam en juillet 2001. Avec Air France, Alitalia développe un système "multi-hub" sur Roisy, Milan Malpensa et Rome Fiumicino. Puis, ce partenariat a été renforcé par un échange d’actions à concurrence de 2% du capital, finalisé en 2003.
Jean Belotti - 28 octobre 2003
jean.belotti@wanadoo.fr