"Cette pandémie, nous a fait gagner 15 ou 20 ans. Les entreprises se sont intéressées à la qualité de vie au travail en 2008, après la vague de suicide chez Renault et France Télécom. Il est grave d'attendre d'en arriver là, pour réagir," selon Gaël Chatelain-Berry, spécialiste du management
TourMaG.com - Pourriez-vous définir votre concept de management et d'entreprise bienveillant ? Un concept qui a sans doute été rudement mis à l'épreuve par la crise sanitaire.
Gaël Chatelain-Berry : Au contraire, ça fait 7 ou 8 ans que j'ai créé ce concept de management bienveillant et d'entreprise bienveillante.
Au début, les gens pensaient que ce n'était qu'une mode, dans le sillage de mes livres, puis avec la pandémie cela devient une évidence. Une entreprise qui n'est pas bienveillante, ne recrutera pas.
La bienveillance correspond à mettre l'humain au coeur de tout. Aujourd'hui avec la pandémie, nous nous rendons compte que sans être humain, l'entreprise n'est rien.
Prenez le cas des agents de caisse que nous regardions à peine avant la pandémie, ils sont passés du stade de héros à leur métier est fondamental. Au contraire la bienveillance est devenue un impératif.
Vous le voyez dans le tourisme, notamment dans l'hôtellerie et restauration. Actuellement, une entreprise qui n'est pas bienveillante, elle n'arrive pas à recruter. Et comme nous avons un chômage en recul et en même temps des tensions sur certains secteurs, le pouvoir s'inverse.
Les salariés réfléchissent de la manière suivante : si tu n'es pas bienveillant je pars.
Gaël Chatelain-Berry : Au contraire, ça fait 7 ou 8 ans que j'ai créé ce concept de management bienveillant et d'entreprise bienveillante.
Au début, les gens pensaient que ce n'était qu'une mode, dans le sillage de mes livres, puis avec la pandémie cela devient une évidence. Une entreprise qui n'est pas bienveillante, ne recrutera pas.
La bienveillance correspond à mettre l'humain au coeur de tout. Aujourd'hui avec la pandémie, nous nous rendons compte que sans être humain, l'entreprise n'est rien.
Prenez le cas des agents de caisse que nous regardions à peine avant la pandémie, ils sont passés du stade de héros à leur métier est fondamental. Au contraire la bienveillance est devenue un impératif.
Vous le voyez dans le tourisme, notamment dans l'hôtellerie et restauration. Actuellement, une entreprise qui n'est pas bienveillante, elle n'arrive pas à recruter. Et comme nous avons un chômage en recul et en même temps des tensions sur certains secteurs, le pouvoir s'inverse.
Les salariés réfléchissent de la manière suivante : si tu n'es pas bienveillant je pars.
"La pandémie, dans le milieu de l'entreprise, a été une opportunité extraordinaire"
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TourMaG.com - N'est ce pas seulement un point de vue générationnel qui n'a rien à voir avec la crise sanitaire ?
Gaël Chatelain-Berry : Ce n'est pas vraiment générationnel.
Je suis rentré dans le monde du travail avec l'image que mes parents avaient de l'entreprise, celle des 30 glorieuses, sans chômage.
J'ai été diplômé en 1992 et je suis tombé dans une société qui étouffait dans le chômage de masse et des entreprises assez peu sympathiques, la généralisation des burn-out, etc.
La défiance est générationnelle, mais c'est aussi partagé par la génération de leurs parents qui pensent que les entreprises ne peuvent pas tout se permettre.
Avant la pandémie, la France était bonne dernière en Europe, si ce n'est mondial au niveau du télétravail, il aura fallu une pandémie pour que le bien-être au travail soit important.
TourMaG.com - Face aux difficultés et angoisses générées par la pandémie, faut-il un traitement individualisé des problématiques ?
Gaël Chatelain-Berry : Complètement, la pandémie a démontré qu'il n'était pas possible de gérer les problèmes de ses salariés de la même manière.
Ce n'est pas la même chose d'avoir vécu son confinement dans une maison avec jardin que dans un petit appartement, avec un enfant. Les cas sont très différents.
Les managers doivent faire attention à chaque salarié, mais surtout s'intéresser aux personnes. Nous avons le sentiment de découvrir cela, mais ce sont des sujets qui ont été évoqués bien avant la pandémie.
Cette pandémie, nous a fait gagner 15 ou 20 ans. Les entreprises se sont intéressées à la qualité de vie au travail en 2008, après la vague de suicides chez Renault et France Télécom.
Il est grave d'attendre d'en arriver là, pour réagir.
Gaël Chatelain-Berry : Ce n'est pas vraiment générationnel.
Je suis rentré dans le monde du travail avec l'image que mes parents avaient de l'entreprise, celle des 30 glorieuses, sans chômage.
J'ai été diplômé en 1992 et je suis tombé dans une société qui étouffait dans le chômage de masse et des entreprises assez peu sympathiques, la généralisation des burn-out, etc.
La défiance est générationnelle, mais c'est aussi partagé par la génération de leurs parents qui pensent que les entreprises ne peuvent pas tout se permettre.
Avant la pandémie, la France était bonne dernière en Europe, si ce n'est mondial au niveau du télétravail, il aura fallu une pandémie pour que le bien-être au travail soit important.
TourMaG.com - Face aux difficultés et angoisses générées par la pandémie, faut-il un traitement individualisé des problématiques ?
Gaël Chatelain-Berry : Complètement, la pandémie a démontré qu'il n'était pas possible de gérer les problèmes de ses salariés de la même manière.
Ce n'est pas la même chose d'avoir vécu son confinement dans une maison avec jardin que dans un petit appartement, avec un enfant. Les cas sont très différents.
Les managers doivent faire attention à chaque salarié, mais surtout s'intéresser aux personnes. Nous avons le sentiment de découvrir cela, mais ce sont des sujets qui ont été évoqués bien avant la pandémie.
Cette pandémie, nous a fait gagner 15 ou 20 ans. Les entreprises se sont intéressées à la qualité de vie au travail en 2008, après la vague de suicides chez Renault et France Télécom.
Il est grave d'attendre d'en arriver là, pour réagir.
"Maintenant la pression est sur les entreprises et elle est énorme"
TourMaG.com - Qu'avait de mauvais ce "monde d'avant" la pandémie dans les entreprises ?
Gaël Chatelain-Berry : La France avait une triste 2e place européenne pour le burn-out au travail, et toujours cette même place pour l'absentéisme. Seulement 6% des employés se déclaraient engagés dans leur travail.
Que ce monde ait disparu, cela me va très bien.
Maintenant la pression est sur les entreprises et elle est énorme. Nous le voyons très bien dans le recrutement. Quand vous voyez les patrons de bars, de restaurants ou encore d'hôtels qui se plaignent qu'ils n'arrivent pas à recruter.
Les raisons sont simples : les salariés sont mal payés et mal traités. Tous les paradigmes sont en train de changer, c'est une bonne chose. Pour recruter, les patrons sont obligés de faire des efforts et de mieux payer, ils n'ont plus le choix.
TourMaG.com - Les choix sont possibles, car certains secteurs recrutent, mais en cas de remontée du chômage, cette dynamique vertueuse est-elle possible ?
Gaël Chatelain-Berry : Le travail ne se fait pas plus rare, c'est tout le paradoxe.
Le logiciel de la France est axé sur le fait que le chômage est énorme, alors que nous sommes revenus au taux d'avant la pandémie. Pôle Emploi a dévoilé récemment que plus d'un million d'offres sont toujours vacantes.
Il y a une crise de l'emploi, avec le chômage de longue durée, des séniors, etc... mais la réalité, c'est que les entreprises ont une grande pression pour recruter. J'attends ça depuis 30 ans, la pression n'est plus sur les salariés.
TourMaG.com - Dans cette même veine, la France est souvent décriée pour son management déficient...
Gaël Chatelain-Berry : Le management en France est pourri.
Il n'y a pas de formation et nous ne formons pas au management. En France, les managers ne sont pas choisis en fonction de leurs qualités, mais en fonction des résultats. Le meilleur vendeur ne sera pas toujours le meilleur manager.
Avec la pandémie cela change. Les entreprises se sont rendu compte, que les managers ont un rôle essentiel, dans la motivation des salariés au quotidien.
Imaginez un peu, selon une étude à la sortie du 3e confinement, 45% des salariés sont en détresse psychologique. Les entreprises comprennent enfin et forment les managers.
Il y a eu une prise de conscience radicale et violente avec la pandémie : il est impossible de se passer d'un bon manager. Une entreprise sans humain, ça ne fonctionne pas.
Gaël Chatelain-Berry : La France avait une triste 2e place européenne pour le burn-out au travail, et toujours cette même place pour l'absentéisme. Seulement 6% des employés se déclaraient engagés dans leur travail.
Que ce monde ait disparu, cela me va très bien.
Maintenant la pression est sur les entreprises et elle est énorme. Nous le voyons très bien dans le recrutement. Quand vous voyez les patrons de bars, de restaurants ou encore d'hôtels qui se plaignent qu'ils n'arrivent pas à recruter.
Les raisons sont simples : les salariés sont mal payés et mal traités. Tous les paradigmes sont en train de changer, c'est une bonne chose. Pour recruter, les patrons sont obligés de faire des efforts et de mieux payer, ils n'ont plus le choix.
TourMaG.com - Les choix sont possibles, car certains secteurs recrutent, mais en cas de remontée du chômage, cette dynamique vertueuse est-elle possible ?
Gaël Chatelain-Berry : Le travail ne se fait pas plus rare, c'est tout le paradoxe.
Le logiciel de la France est axé sur le fait que le chômage est énorme, alors que nous sommes revenus au taux d'avant la pandémie. Pôle Emploi a dévoilé récemment que plus d'un million d'offres sont toujours vacantes.
Il y a une crise de l'emploi, avec le chômage de longue durée, des séniors, etc... mais la réalité, c'est que les entreprises ont une grande pression pour recruter. J'attends ça depuis 30 ans, la pression n'est plus sur les salariés.
TourMaG.com - Dans cette même veine, la France est souvent décriée pour son management déficient...
Gaël Chatelain-Berry : Le management en France est pourri.
Il n'y a pas de formation et nous ne formons pas au management. En France, les managers ne sont pas choisis en fonction de leurs qualités, mais en fonction des résultats. Le meilleur vendeur ne sera pas toujours le meilleur manager.
Avec la pandémie cela change. Les entreprises se sont rendu compte, que les managers ont un rôle essentiel, dans la motivation des salariés au quotidien.
Imaginez un peu, selon une étude à la sortie du 3e confinement, 45% des salariés sont en détresse psychologique. Les entreprises comprennent enfin et forment les managers.
Il y a eu une prise de conscience radicale et violente avec la pandémie : il est impossible de se passer d'un bon manager. Une entreprise sans humain, ça ne fonctionne pas.
"Les gens qui attendent que le monde d'avant revienne doivent changer d'état d'esprit !"
TourMaG.com - Pour suivre au quotidien, l'industrie touristique, certains acteurs sont toujours en très grandes difficultés, après 18 mois de crise. Nous avons des témoignages désabusés et las de personnes qui ne voient plus le bout de la crise. Comment est-il possible de maintenir ses salariés concernés ?
Gaël Chatelain-Berry : Le 17 mars 2020, mes deux métiers, conférenciers et écrivains, ont disparu.
Il y avait alors deux catégories de personnes : celles qui se plaignent ou celles qui se disent, il n'y a pas le choix, comment faisons nous maintenant.
Bien sûr que pour les patrons d'agences de voyages, la crise est compliquée et j'en suis vraiment conscient, mais un moment le covid n'est pas la faute des salariés ni du gouvernement.
Le covid est une réalité, maintenant il faut se questionner pour se réinventer, pour changer de métier. Réinventer le voyage n'est pas simple, mais il est possible de proposer de nouveaux produits.
Il faut se poser la question à long terme, certaines habitudes prises ne changeront pas.
Les gens qui se disent, je dois serrer les dents jusqu'à ce que le monde d'avant revienne, ils doivent changer d'état d'esprit. Le monde d'avant ne reviendra pas et encore une fois, il ne faut pas s'en plaindre.
Le monde a changé radicalement et violemment. Si l'unique projet est de dire : nous attendons que le monde d'avant revienne, quel espoir vous donnez à vos salariés ? Il n'y en a aucun ! Le rôle d'un manager est de regarder devant, pas derrière.
Il existe plein d'opportunités. Nous devons nous adapter à ce Nouveau Monde.
Il y a une citation de Sénèque que je trouve très appropriée : "la vie ce n'est d'attendre que l'orage passe, mais d'apprendre à danser sous la pluie".
Gaël Chatelain-Berry : Le 17 mars 2020, mes deux métiers, conférenciers et écrivains, ont disparu.
Il y avait alors deux catégories de personnes : celles qui se plaignent ou celles qui se disent, il n'y a pas le choix, comment faisons nous maintenant.
Bien sûr que pour les patrons d'agences de voyages, la crise est compliquée et j'en suis vraiment conscient, mais un moment le covid n'est pas la faute des salariés ni du gouvernement.
Le covid est une réalité, maintenant il faut se questionner pour se réinventer, pour changer de métier. Réinventer le voyage n'est pas simple, mais il est possible de proposer de nouveaux produits.
Il faut se poser la question à long terme, certaines habitudes prises ne changeront pas.
Les gens qui se disent, je dois serrer les dents jusqu'à ce que le monde d'avant revienne, ils doivent changer d'état d'esprit. Le monde d'avant ne reviendra pas et encore une fois, il ne faut pas s'en plaindre.
Le monde a changé radicalement et violemment. Si l'unique projet est de dire : nous attendons que le monde d'avant revienne, quel espoir vous donnez à vos salariés ? Il n'y en a aucun ! Le rôle d'un manager est de regarder devant, pas derrière.
Il existe plein d'opportunités. Nous devons nous adapter à ce Nouveau Monde.
Il y a une citation de Sénèque que je trouve très appropriée : "la vie ce n'est d'attendre que l'orage passe, mais d'apprendre à danser sous la pluie".
Transparence au travail : "un manager doit être comme un pilote d'avion"
TourMaG.com - Dans des périodes aussi difficiles, où les recettes ne sont pas toujours conformes aux attentes. Faut-il être totalement transparent même si la situation est alarmante ?
Gaël Chatelain-Berry : Elle est purement indispensable.
Je compare souvent un manager à un pilote d'avion. Parfois le commandant de bord prend le micro pour annoncer que l'avion va traverser des turbulences et nous demande de regagner nos sièges.
Nous le faisons et nous savons que cela va secouer. Le pilote sait que nous allons passer un moment mauvais et peut-être qu'il sait que ça va être une catastrophe, mais il ne nous le dit pas.
Il y a une forme de transparence. Maintenant imaginez que le commandant de bord ne dise rien, tout en traversant, cette zone de turbulences. L'avion est bien secoué et nous allons tous nous dire que nous allons tous mourir, car il n'y a personne aux commandes.
Il faut de la transparence, mais aussi être rassurant, trouver le juste milieu.
Tout comme les changements de cap, ils doivent être expliqués. Si nous atterrissons à New York alors qu'à la base nous devions atterrir à Los Angeles, vous risquez d'être un peu énervé, sans explication.
Gaël Chatelain-Berry : Elle est purement indispensable.
Je compare souvent un manager à un pilote d'avion. Parfois le commandant de bord prend le micro pour annoncer que l'avion va traverser des turbulences et nous demande de regagner nos sièges.
Nous le faisons et nous savons que cela va secouer. Le pilote sait que nous allons passer un moment mauvais et peut-être qu'il sait que ça va être une catastrophe, mais il ne nous le dit pas.
Il y a une forme de transparence. Maintenant imaginez que le commandant de bord ne dise rien, tout en traversant, cette zone de turbulences. L'avion est bien secoué et nous allons tous nous dire que nous allons tous mourir, car il n'y a personne aux commandes.
Il faut de la transparence, mais aussi être rassurant, trouver le juste milieu.
Tout comme les changements de cap, ils doivent être expliqués. Si nous atterrissons à New York alors qu'à la base nous devions atterrir à Los Angeles, vous risquez d'être un peu énervé, sans explication.
Qui est Gaël Chatelain-Berry ?
Après plus de 20 ans passées en entreprise en tant que manager d'équipes de 20 à 200 personnes, chez TF1, CANAL+, NRJ, iConcerts ou l'INA, Gaël Chatelain-Berry s'est tourné vers l'écriture et les conférences.
Son objectif est de faire évoluer le management en intégrant la notion de bienveillance dans celui-ci pour arriver au Feelgood Management !
Il est l'auteur de "Mon boss est nul, mais je le soigne" est sorti chez Hachette Marabout en 2017 et "Le bien-être pour les Nuls," dans la célèbre collection noire et jaune
Depuis, chaque année il publie 2 livres avec comme objectif de rendre le quotidien en entreprise plus agréable ! De plus Gaël Chatelain-Berry anime le podcast Happy Work pour LCI, le podcast francophone le plus écouté sur le bien-être au travail.
Son objectif est de faire évoluer le management en intégrant la notion de bienveillance dans celui-ci pour arriver au Feelgood Management !
Il est l'auteur de "Mon boss est nul, mais je le soigne" est sorti chez Hachette Marabout en 2017 et "Le bien-être pour les Nuls," dans la célèbre collection noire et jaune
Depuis, chaque année il publie 2 livres avec comme objectif de rendre le quotidien en entreprise plus agréable ! De plus Gaël Chatelain-Berry anime le podcast Happy Work pour LCI, le podcast francophone le plus écouté sur le bien-être au travail.