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Transport aérien : il est temps que l’Etat français passe la main aux professionnels...

La chronique de Jean-Louis Baroux


Pour Jean-Louis Baroux, expert aérien et ancien président d'APG, il est grand temps que l’Etat se retire du transport aérien français. Face au bilan désastreux du secteur, les décisions gouvernementales ne suffiront pas à faire changer le seul véritable arbitre qu'est désormais le client (et son portefeuille).


Rédigé par Jean-Louis BAROUX le Jeudi 7 Juin 2018

Selon J.-L. Baroux, la politique des Pouvoirs Publics a toujours été de protéger sa compagnie nationale, et c’est ce qui a rendu le plus mauvais service à ce secteur d’activité © badahos - Fotolia.com
Selon J.-L. Baroux, la politique des Pouvoirs Publics a toujours été de protéger sa compagnie nationale, et c’est ce qui a rendu le plus mauvais service à ce secteur d’activité © badahos - Fotolia.com
Le transport aérien français va mal, très mal, à tel point que les Pouvoirs Publics ont jugé nécessaire de créer des Assises pour tenter de trouver des solutions.

Le bilan est en effet affligeant. Tout d’abord remarquons qu’il perd régulièrement des parts de marché sur le territoire national, et ce, au profit de concurrents étrangers.

Et puis, il faut faire le constat de son absence de compétitivité. Si, en 2017, les résultats financiers ont été positifs, cela est dû pour l’essentiel à une conjoncture particulièrement favorable, or celle-ci ne se reproduira pas cette année.

Le pétrole retrouve petit à petit ses niveaux de 2015, la demande de transport s’essouffle sous la pression des politiques isolationnistes de certains Etats et, cerise sur le gâteau, si l’on peut dire, la France est affligée de conflits sociaux à répétition.

Depuis le début de l’année, nous avons eu 13 mouvements de grève chez Air France, 6 du contrôle aérien, en particulier dans le centre d’Aix-Marseille, et même un chez Aéroports de Paris.

Le résultat est là. Cette année sera très difficile pour le transport aérien et encore, on n’a pas commencé à compter les dégâts que ne manqueront pas de faire les « low cost » long-courriers à partir de cet été.

L’Etat tient toujours d’une main ferme le contrôle aérien

Tout cela n’est pas brillant. Or l’Etat a une énorme responsabilité dans cette situation, alors qu’il essaie de se présenter en arbitre pour expliquer aux acteurs comment améliorer les résultats.

Au fond, l’Etat ne s’est jamais résolu à abandonner la gestion de ce secteur depuis que les fondamentaux ont changé avec l’ouverture à la concurrence, laquelle s’avère féroce.

Certes, il a bien fallu l’action agissante des gouvernements lorsqu’il s’est agi de reconstruire le transport aérien français après la deuxième guerre mondiale.

Reconnaissons que leur action alors a été très positive et qu’elle a permis de construire une compagnie aérienne de taille mondiale et un contrôle aérien d’une grande fiabilité.

Mais, alors que les règles ont complètement changé, l’Etat tient toujours d’une main ferme le contrôle aérien, il impose aux transporteurs une réglementation plus contraignante que celle demandée par les autorités européennes, il détient toujours le groupe ADP, et il nomme, quoi qu’on en dise, le président d’Air France/KLM bien qu’il ne dispose que de 14% du capital.

Les Pouvoirs Publics ont toujours protégé la compagnie nationale

Au fond, la politique des Pouvoirs Publics a toujours été de protéger sa compagnie nationale, et c’est ce qui a rendu le plus mauvais service à ce secteur d’activité.

La dérive a commencé lorsque Bernard Attali a souhaité reprendre le contrôle d’Air Inter, en fin des années 1980. Il fallait pour cela racheter UTA qui, en possédant 1/3 du capital de la compagnie domestique, donnait la majorité à Air France.

L’affaire s’est traitée en catimini dans un pavillon situé au fond du jardin de l’Hôtel Matignon. Michel Rocard, alors Premier Ministre était à la manœuvre.

Le résultat a été désastreux : d’abord, Air France, qui n’avait pas les moyens financiers de racheter UTA, laquelle a été vendue au moins 2 fois à sa valeur estimée, a été obligée de « leasebacker » sa flotte, autrement de la revendre aux banques et de relouer les appareils. Cela a affaibli considérablement la compagnie.

Rappelons que dans cette transaction, Air Inter devait rester indépendante : c’était promis, craché, juré et cela n’a bien entendu duré que 2 ans.

Le résultat est qu’il a fallu recapitaliser en urgence la compagnie à hauteur de 22 milliards de francs et recomposer complètement son modèle, ce qui a été fait par Christian Blanc.

L’autre conséquence a été la disparition de toute alternative long-courrier avec la fin d’UTA. Quelques années après, en 1997, la tentative de reconstitution d’un pôle « privé » avec AOM s’est fracassée sur le remplacement de Marc Rochet, qui menait l’affaire tambour battant, par Alexandre Couvelaire, lequel a mené la compagnie dans le mur, le tout par la volonté de Jacques Chirac alors Président de la République.

Le seul arbitre est maintenant le client

On pourrait multiplier les exemples de l’interventionnisme de l’Etat qui, croyant bien faire en surprotégeant la compagnie nationale, a tué des initiatives pourtant bien menées, et donné un sentiment d’immunité aux salariés et même au management d’Air France.

Ainsi la compagnie nationale a décroché progressivement par rapport à ses concurrents étrangers, ne voulant pas voir que ceux-ci arriveraient inéluctablement sur son territoire. Les réformes n’ont pas été menées à temps et la note se paie maintenant.

Et pendant ce temps-là, les contrôleurs aériens qui, pourtant, ont toutes les raisons d’être satisfaits, se mettent en grève sans que l’Etat puisse maintenir le service que les compagnies aériennes sont en droit d’attendre.

Le seul arbitre est maintenant le client. Celui-ci vote avec son portefeuille et les décisions gouvernementales ne le feront pas changer.

Il est temps que l’Etat se retire de ce secteur d’activité pour permettre aux acteurs qui, dans l’ensemble, sont de grands professionnels, de montrer ce qu’ils savent faire.

Transport aérien : il est temps que l’Etat français passe la main aux professionnels...
Jean-Louis Baroux est l'ancien président d'APG (Air Promotion Group) et le créateur du CAF (Cannes Airlines Forum) devenu le World Air Forum.

Grand spécialiste de l'aérien, il a signé aux éditions L'Archipel ''Compagnies Aériennes : la faillite du modèle'', un ouvrage que tous les professionnels du tourisme devraient avoir lu.

Les droits d'auteur de l'ouvrage seront reversés à une association caritative. On peut l'acquérir à cette adresse : www.editionsarchipel.com.

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Commentaires

1.Posté par DONV le 08/06/2018 12:19 | Alerter
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Jean-Louis BAROUX : Air France à besoin de vous !!

Félicitations à Mr Baroux pour ce parcours exceptionnel et sa grande réalité sur la désastreuse actualité du transport aérien qu’il maîtrise parfaitement. Professionnel du transport aérien et véritable passionné, voilà un homme parfaitement capable de prendre la tête d’Air France, lui redonner sa compétitivité, sa culture sociale et enfin sa marque de fabrique tant attendue par celles et ceux qui feront demain d’Air France, une compagnie à la hauteur de son service : le client.

Monsieur Baroux, également professionnel passionné du transport aérien, je suis prêt à travailler à vos côtés pour redonner à une entreprise en péril sa véritable identité commerciale et industrielle.
🇫🇷🇫🇷✈️✈️🌐🌐

2.Posté par Catherinette le 08/06/2018 13:45 | Alerter
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Encore et toujours Air France, ce sujet intarissable pour M. Baroux. Il en parle sans fin mais pour quel résultat ? Ses chroniques ont sempiternellement le même thème...

3.Posté par DONV le 08/06/2018 17:11 | Alerter
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Bonjour Catherinette,

Merci pour votre échange, il est constructif et légitime.

Permettez-moi de vous dire que lorsque l’on est passionné et animé par le challenge et les enjeux capitaux que représentent le transport aérien en sa direction de l’exploitation, il est parfaitement légitime de s’offusquer sur l’ingérence complète de la compagnie Air France qui a été orientée par ses prédécesseurs dirigeants.

Pour vous exposer un exemple simple et il y en a malheureusement bien d’autres et pas des moindres, la création de la filiale «low cost » JOON qui est arrivée sur le tarmac.
Cette compagnie n’est déjà pas du tout une compagnie «low cost », elle embauche aujourd’hui de très nombreux cadres ex Air France qui sont partis lors du dernier plan social d’Air France (PDV) et qui aujourd’hui, retrouvent un nouveau poste d’encadrement chez JOON. Nous ne parlerons pas des salaires PNT Personnel Navigant Techniques qui ne sont eux, non plus pas vraiment «low cost ».

Cette filiale «low cost » n’arrive-t’elle pas avec 10 ans de retard ?
Cette filiale «low cost » n’est t’elle pas un monticule de doublons de charges et taxes de toutes sortes : charges sociales et patronales, taxes et charges aéroportuaires, postes, salaires, impôts, etc... alors que vous avez en face une compagnie qui s’appelle TRANSAVIA et qui n’attend que de se développer et qui n’exploite qu’une quarantaine de machines ?

TRANSAVIA France a été créé en 1986. Face à la concurrence grandisssante des «low cost » que vous connaissez bien, n’y aurait-il pas eu besoin de développer TRANSAVIA MC moyen courrier avec une flotte 3 à 4 fois plus conséquente pour enrayer immédiatement la concurrence CDG et ORY ?
La «low cost » LC long courrier n’aurait-elle pas eu sa place ici plutôt que d’aller créer des charges, taxes et finances faramineuses pour une compagnie JOON qui après 6 mois d’activitété fête son millionième PAX passager !!

JOON n’est malheureusement pas la seule caricature, avec ses lignes dénuées de tous sens comme son existence. L’actualite LC long courrier «low cost » n’est-elle pas ailleurs avec les «level » «french bee » et autres ?
De nombreux clients ‘grand compte’ Air France reprotégés sur JOON menacent de rompre leurs contrats... JOON décide alors de revoir ses lignes. Tout ceci vous laisse imaginer le chao directoires qui règne au sein de ce conglomérat de compagnies aériennes avec tant de directeurs généraux et conseillers sans compter les remarquables cabinets extérieurs mandatés pour le bien être de la belle et vieille dame.

Là est simplement la constation d’une exploitation qui n’appartient en aucun cas à des professionnels du transport aérien et dont les anecdotes ne manquent malheureusement pas mais enchante aujourd’hui nos élites qui félicitent les deux derniers PDG pour de ce qui est de leur fonction (Pour mémoire, A De Juniac ex cabinet de Mme Lagarde et dernièrement, JM Janaillac ami de l’ex Président F Hollande).

Lorsque l’on est professionnel comme Mr Jean-Louis BAROUX et moi-même, face au potentiel d’Air France il y a de quoi s’indigner avec tout ce que la compagnie doit être en mesure de développer, de conquérir et d’innover face à cette nouvelle façon de voyager et promouvoir enfin notre savoir-faire français pour retrouver au moins notre compétitivité nationale et internationale et un jour se retrouver en tête des classements dans les entreprises Nº1 du transport aérien, surtout pour un pays qui est celui du savoir recevoir, de la gastronomie et de la culture.

Le monde du transport ne sera que performant quand les dirigeants de telles entreprises ne seront - que - des techniciens et des professionnels confirmés du transport aérien. Vous en avez simplement aujourd’hui le résultat et toutes ses conséquences sans compter la grande complaisance de l’ex 1er Ministre Mr M Valls qui avait accordé à Air France lors de son mandat, une largesse sur le paiement des charges patronales prétextant que l’entreprise était en difficultés... que le personnel s’amuse !

Chère Catherinette, de notre passion qui nous anime pour le devoir de résultat, les entreprises basées sur l’individu ont compris que la confiance pouvait être une grande source de motivation et d’évolution et que, les attentes qu’elles placent dans les personnes avec qui elles travaillent ont une influence directe sur leurs performances.

Merci et avec le plus grand plaisir de partager notre expertise et notre vision.

Très cordialement.

4.Posté par westar le 12/06/2018 16:20 | Alerter
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bonjour


je remarque la tournure d'esprit de ce monsieur, très fabianiste : d'après ce monsieur Baroux, il ne devrait pas y avoir d'intervention de l état . Mais , il a raison sur un point : les règles ont changé. Le ciel Francais a été dérégulé, permettant l’avènement des compagnies du Moyen-Orient, et de compagnies aériennes cosmopolites ( EasyJet) : nos clients qui, il y a 25 ans, voyageaient français (AF/IW/VD), voyagent Emirates ou Qatar, par exemple. Et ce monsieur Baroux s'en félicite presque !!!!!!! Cela serait risible si il n'y avait pas de chomage en France. C'est dramatique !!!! Donc, je ne félicite pas ce Monsieur Baroux qui devrait s'abstenir, par respect pour les pro. de l’aérien, de donner son avis

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