"En juin 2021, le fonds de solidarité est plafonné à 20% du CA, c'est juste horrible !" selon Laurent Menanteau, agent de voyage et vice-president de l'association AAVM - Crédit photo : Depositphotos @Peus
TourMaG.com - Pendant que les patrons des tour-opérateurs et réseaux de distribution se lancent dans une guéguerre des chiffres sur la reprise, vous avez un discours radicalement différent. Pouvez-vous nous expliquer ?
Laurent Menanteau : En lisant les interviews de ci et de là, avec des patrons se vantant de repasser au-dessus des chiffres de 2019. Ils donnent l'impression que tout va bien, mais non... tout ne va pas bien !
Je suis un peu choqué par ce qui se dit dans la presse, mais surtout c'est contreproductif. A force de propager ce discours, cela va inciter le gouvernement à réduire drastiquement les aides.
Le "Partez tous en France" que proclame l'exécutif a la vertu de faire partir les Français dans notre pays, sauf que moi je suis situé dans le sud-est, ils n'ont pas besoin de moi pour partir sur la côte. Je ne travaille pas.
TourMaG.com - Actuellement à quoi ressemble votre niveau d'activité ?
Laurent Menanteau : Au niveau des départs de juin 2021, j'ai fait moins 53% par rapport à 2019.
En juillet, alors que le mois n'est pas terminé, je suis déjà à moins 30%.
Le pass sanitaire (même si j'y suis complètement favorable), les clients n'ont pas envie de s'embêter avec les procédures. C'est clairement un frein à la vente, et il faut le prendre en compte.
Je suis un agent mandataire et vice-président de l'Association des Agences de Voyages Mandataires, nous sommes rémunérés seulement quand le voyageur est parti.
Donc les dossiers réservés en avril 2021, pour certains je ne toucherai que ma commission en mars 2022. En attendant, comment faisons-nous au niveau de la trésorerie ?
Laurent Menanteau : En lisant les interviews de ci et de là, avec des patrons se vantant de repasser au-dessus des chiffres de 2019. Ils donnent l'impression que tout va bien, mais non... tout ne va pas bien !
Je suis un peu choqué par ce qui se dit dans la presse, mais surtout c'est contreproductif. A force de propager ce discours, cela va inciter le gouvernement à réduire drastiquement les aides.
Le "Partez tous en France" que proclame l'exécutif a la vertu de faire partir les Français dans notre pays, sauf que moi je suis situé dans le sud-est, ils n'ont pas besoin de moi pour partir sur la côte. Je ne travaille pas.
TourMaG.com - Actuellement à quoi ressemble votre niveau d'activité ?
Laurent Menanteau : Au niveau des départs de juin 2021, j'ai fait moins 53% par rapport à 2019.
En juillet, alors que le mois n'est pas terminé, je suis déjà à moins 30%.
Le pass sanitaire (même si j'y suis complètement favorable), les clients n'ont pas envie de s'embêter avec les procédures. C'est clairement un frein à la vente, et il faut le prendre en compte.
Je suis un agent mandataire et vice-président de l'Association des Agences de Voyages Mandataires, nous sommes rémunérés seulement quand le voyageur est parti.
Donc les dossiers réservés en avril 2021, pour certains je ne toucherai que ma commission en mars 2022. En attendant, comment faisons-nous au niveau de la trésorerie ?
"En juin 2021, le fonds de solidarité est plafonné à 20% du CA, c'est juste horrible !"
Autres articles
TourMaG.com - Vous êtes loin des tendances actuelles qui font croire donc que la reprise est bien réelle...
Laurent Menanteau : Il y a un bémol dans mes propos, car je ressens une grande envie de voyager avec des réservations de dernière minute. Il y a un ras-le-bol, c'est évident.
Nous ne sommes pas à l'abri d'un rebond positif, mais il faut tempérer les déclarations actuelles.
Un autre sujet très important, voire primordial concerne le fonds de solidarité, ça ne va pas du tout.
TourMaG.com - Pourquoi cela ?
Laurent Menanteau : Au mois de juin 2021, le fonds de solidarité est équivalent à 40% des pertes, plafonné à 20% du chiffre d'affaires, c'est juste horrible.
Prenons un exemple. En juin 2019, une agence mandataire (donc seulement la commission de l'agent, ndlr) a fait 10 000 euros de recettes, puis 2 000 euros en juin 2021, la perte est de 8 000 euros.
Si vous prenez le montant du fonds de solidarité calculé sur 40% des pertes donc 3 200 euros, mais avec le plafonnement à 20%, l'agence n'a touché que 2 000 euros.
La vraie perte nette est de 60%.
Nous faisons actuellement un recensement auprès de nos adhérents, pour estimer la perte brute, l'écart de chiffre d'affaires entre 2019 et 2012, puis la perte nette comprenant le fonds de solidarité.
Nous nous dirigeons vers une perte nette qui s'échelonne entre un tiers et 50%.
Laurent Menanteau : Il y a un bémol dans mes propos, car je ressens une grande envie de voyager avec des réservations de dernière minute. Il y a un ras-le-bol, c'est évident.
Nous ne sommes pas à l'abri d'un rebond positif, mais il faut tempérer les déclarations actuelles.
Un autre sujet très important, voire primordial concerne le fonds de solidarité, ça ne va pas du tout.
TourMaG.com - Pourquoi cela ?
Laurent Menanteau : Au mois de juin 2021, le fonds de solidarité est équivalent à 40% des pertes, plafonné à 20% du chiffre d'affaires, c'est juste horrible.
Prenons un exemple. En juin 2019, une agence mandataire (donc seulement la commission de l'agent, ndlr) a fait 10 000 euros de recettes, puis 2 000 euros en juin 2021, la perte est de 8 000 euros.
Si vous prenez le montant du fonds de solidarité calculé sur 40% des pertes donc 3 200 euros, mais avec le plafonnement à 20%, l'agence n'a touché que 2 000 euros.
La vraie perte nette est de 60%.
Nous faisons actuellement un recensement auprès de nos adhérents, pour estimer la perte brute, l'écart de chiffre d'affaires entre 2019 et 2012, puis la perte nette comprenant le fonds de solidarité.
Nous nous dirigeons vers une perte nette qui s'échelonne entre un tiers et 50%.
Fonds de solidarité : "le gouvernement doit revenir immédiatement sur son mode de calcul"
TourMaG.com - Dans quel état se trouvent les agences que vous connaissez ?
Laurent Menanteau : Elles vont se retrouver en difficulté très rapidement.
Pendant ce temps les charges continuent de courir, nous n'avons plus aucune aide sur les loyers. Certains ont même un fonds de solidarité inférieur à celui que nous avions en tout début de crise, soit 1 500 euros.
La situation est difficile.
Dans le même temps, les clients ont tendance à se projeter dans le temps, car les conditions pour voyager ne sont pas optimales, dans l'immédiat. Et quand les clients réservent pour des vacances en novembre ou avril 2022, nous ne touchons rien. C'est la double peine.
Voilà pourquoi je suis vraiment choqué quand je lis la presse et que je compare avec la réalité. Certes il y a une envie de partir, mais les chiffres ne sont pas non plus exceptionnels.
TourMaG.com - Que demandez-vous au gouvernement ?
Laurent Menanteau : Nous demandons que le gouvernement revienne immédiatement sur la méthode de calcul et d'aide du fonds de solidarité.
Nous aimerions que soient pris en compte les situations comme les nôtres, à savoir les TPE et les mandataires. Il y a urgence d'avancer sur le front des mandataires et les dossiers sur lesquels nous avons échangé.
Je lance un appel aux mandants pour savoir lequel sera précurseur pour mettre en place une économie un peu plus solidaire.
Laurent Menanteau : Elles vont se retrouver en difficulté très rapidement.
Pendant ce temps les charges continuent de courir, nous n'avons plus aucune aide sur les loyers. Certains ont même un fonds de solidarité inférieur à celui que nous avions en tout début de crise, soit 1 500 euros.
La situation est difficile.
Dans le même temps, les clients ont tendance à se projeter dans le temps, car les conditions pour voyager ne sont pas optimales, dans l'immédiat. Et quand les clients réservent pour des vacances en novembre ou avril 2022, nous ne touchons rien. C'est la double peine.
Voilà pourquoi je suis vraiment choqué quand je lis la presse et que je compare avec la réalité. Certes il y a une envie de partir, mais les chiffres ne sont pas non plus exceptionnels.
TourMaG.com - Que demandez-vous au gouvernement ?
Laurent Menanteau : Nous demandons que le gouvernement revienne immédiatement sur la méthode de calcul et d'aide du fonds de solidarité.
Nous aimerions que soient pris en compte les situations comme les nôtres, à savoir les TPE et les mandataires. Il y a urgence d'avancer sur le front des mandataires et les dossiers sur lesquels nous avons échangé.
Je lance un appel aux mandants pour savoir lequel sera précurseur pour mettre en place une économie un peu plus solidaire.
"Nous sommes en train de perdre l'équilibre. Nous sommes en danger !"
"Avec le fonds de solidarité calculé sur 40% des pertes en juin, 30% en juillet et 20% en août, je peux vous dire que nous sommes en train de perdre l'équilibre. Nous sommes en danger et il faut nous aider" selon Laurent Menanteau - DR
TourMaG.com - Avez-vous un peu l'impression que le Gouvernement lâche le secteur trop tôt ?
Laurent Menanteau : Il ne dit pas ça bien sûr, mais dans les faits, ça pourrait un peu y ressembler.
C'est un peu comme lorsqu'un coureur cycliste lève les bras trop tôt, pensant la course gagnée et qu'il se casse la figure avant la ligne. Aujourd'hui, nous en sommes là.
Avec le fonds de solidarité calculé sur 40% des pertes en juin, 30% en juillet et 20% en août, je peux vous dire que nous sommes en train de perdre l'équilibre. Nous sommes en danger et il faut nous aider.
Je suis dans la même ligne que les Entreprises du Voyage. Le secteur est quasiment à l'arrêt depuis quelques jours. C'est inquiétant.
Si nous ratons notre été, nous ne pouvons nous permettre de louper l'hiver, sinon ce sera très problématique pour la profession.
TourMaG.com - Entre l'aide qui se raréfie et les avoirs à rembourser, vous craignez que septembre soit tendu ?
Laurent Menanteau : Je ne peux pas parler pour la profession, mais de mon côté les chiffres que me remontent les mandataires sont très inquiétants.
Si l'été continue comme ça, nous allons avoir moins d'encaissements, donc les difficultés vont vite arriver.
Avec un fonds de solidarité plafonné à hauteur de 20% des pertes, alors que pour mois elles seront au moins d'un tiers, comment allons-nous faire ? Je n'ai pas de réponse.
A lire aussi : Les Entreprises du Voyage souhaitent renégocier le fonds de solidarité et l'activité partielle
Laurent Menanteau : Il ne dit pas ça bien sûr, mais dans les faits, ça pourrait un peu y ressembler.
C'est un peu comme lorsqu'un coureur cycliste lève les bras trop tôt, pensant la course gagnée et qu'il se casse la figure avant la ligne. Aujourd'hui, nous en sommes là.
Avec le fonds de solidarité calculé sur 40% des pertes en juin, 30% en juillet et 20% en août, je peux vous dire que nous sommes en train de perdre l'équilibre. Nous sommes en danger et il faut nous aider.
Je suis dans la même ligne que les Entreprises du Voyage. Le secteur est quasiment à l'arrêt depuis quelques jours. C'est inquiétant.
Si nous ratons notre été, nous ne pouvons nous permettre de louper l'hiver, sinon ce sera très problématique pour la profession.
TourMaG.com - Entre l'aide qui se raréfie et les avoirs à rembourser, vous craignez que septembre soit tendu ?
Laurent Menanteau : Je ne peux pas parler pour la profession, mais de mon côté les chiffres que me remontent les mandataires sont très inquiétants.
Si l'été continue comme ça, nous allons avoir moins d'encaissements, donc les difficultés vont vite arriver.
Avec un fonds de solidarité plafonné à hauteur de 20% des pertes, alors que pour mois elles seront au moins d'un tiers, comment allons-nous faire ? Je n'ai pas de réponse.
A lire aussi : Les Entreprises du Voyage souhaitent renégocier le fonds de solidarité et l'activité partielle
AAMV : "nous avons redemandé une réunion avec les cabinets des ministres"
TourMaG.com -Vous réunissez l'Association prochainement ?
Laurent Menanteau : Oui mardi 27 juillet 2021, pour recadrer et structurer l'association.
Nous avons bien grossi depuis, donc nous devons mettre un peu d'ordre.
Nous avions rencontré les représentants des ministres du Tourisme et des PME et nous avions eu une très bonne écoute. Nous avons redemandé une réunion avec les cabinets des ministres pour mettre en oeuvre tout ce que nous avons proposé.
TourMaG.com - Suite à notre dernier échange, avez-vous eu des retours des enseignes ?
Laurent Menanteau : Tout le monde s'observe un peu.
Si nous mandataires, nous ne provoquons pas les choses, alors les mandants ne bougent pas. Après j'invite à une démarche responsable, ce n'est pas les uns contre les autres, mais ensemble que nous devons construire l'avenir autour de la solidarité.
Laurent Menanteau : Oui mardi 27 juillet 2021, pour recadrer et structurer l'association.
Nous avons bien grossi depuis, donc nous devons mettre un peu d'ordre.
Nous avions rencontré les représentants des ministres du Tourisme et des PME et nous avions eu une très bonne écoute. Nous avons redemandé une réunion avec les cabinets des ministres pour mettre en oeuvre tout ce que nous avons proposé.
TourMaG.com - Suite à notre dernier échange, avez-vous eu des retours des enseignes ?
Laurent Menanteau : Tout le monde s'observe un peu.
Si nous mandataires, nous ne provoquons pas les choses, alors les mandants ne bougent pas. Après j'invite à une démarche responsable, ce n'est pas les uns contre les autres, mais ensemble que nous devons construire l'avenir autour de la solidarité.