Le 2e épisode de la série sur l'année 2020 vécue par les agents de voyages - Crédit photo : Depositphotos @samwordley@gmail.com
A la base ce ne devait être qu'un seul et même article, regroupant les confidences d'agents de voyages sur l'année écoulée.
Puis les témoignages se sont tellement allongés, les professionnels avaient un réel besoin de se confier, que nous avons décidé d'en faire une série.
Ils se définissent comme "les grands oubliés" de la crise, car "si les journaux parlent des secteurs impactés, jamais ils ne citeront le métier d'agent de voyages. Nous n'existons pas," explique Charline, une agent de voyages ayant préféré conserver l'anonymat.
Après un premier épisode basé sur le confinement, nous vous proposons de découvrir le quotidien de Kévin, Morgane, Stéphane, Karine ou encore Jennifer lors de l'après : la sortie du blackout.
A lire : 1er épisode de la série "les grands oubliés" : le confinement ou "la claque dans la figure"
"A la sortie du confinement nous avons tous repris espoir. Nous nous sommes dits que nous allions reprendre les ventes et être fin prêts pour la reprise à l'automne," se souvient Jennifer Weber.
Ce scénario idyllique ne se déroulera jamais.
Puis les témoignages se sont tellement allongés, les professionnels avaient un réel besoin de se confier, que nous avons décidé d'en faire une série.
Ils se définissent comme "les grands oubliés" de la crise, car "si les journaux parlent des secteurs impactés, jamais ils ne citeront le métier d'agent de voyages. Nous n'existons pas," explique Charline, une agent de voyages ayant préféré conserver l'anonymat.
Après un premier épisode basé sur le confinement, nous vous proposons de découvrir le quotidien de Kévin, Morgane, Stéphane, Karine ou encore Jennifer lors de l'après : la sortie du blackout.
A lire : 1er épisode de la série "les grands oubliés" : le confinement ou "la claque dans la figure"
"A la sortie du confinement nous avons tous repris espoir. Nous nous sommes dits que nous allions reprendre les ventes et être fin prêts pour la reprise à l'automne," se souvient Jennifer Weber.
Ce scénario idyllique ne se déroulera jamais.
La reprise : "c'était une période très désagréable"
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D'autant que si des agents ont repris, d'autres ont été obligés de rester à la maison.
"Je suis au chômage depuis le 16 mars, car nous sommes en binôme sur le même pôle donc un binôme sur deux est resté actif.
Le lien a été conservé via des textos, appels, puis avec des questions de ma part pour des devoirs dans le cadre de ma formation. Nous avons pu déjeuner ensemble..." confie Morgane Beard, agent de voyages en alternance.
Malheureusement le cas de l'étudiante n'est pas isolé. Ils sont nombreux à se retrouver sans activité professionnelle, même 9 mois après le début de la crise.
Si la jeune femme a pu conserver un lien avec ses collègues, la situation n'a pas été la même pour d'autres. Pour Charline, agent de voyage dans les Hauts-de-France, le chômage se fait long trop long.
Elle n'a plus remis les pieds dans son agence depuis la mi-mars et n'a depuis plus aucune nouvelle de son responsable.
"Je me suis fait une raison. Au début je le vivais mal. Je me dis qu'il doit être très mal. Dans tout cela, ce qui me manque le plus en ce moment c'est de travailler."
Le tourisme est souvent défini comme un secteur de passion, cela permet sans doute de justifier les petits salaires, la dévotion et les journées à rallonge.
Et justement les journées de Karine Goulard, agent de voyage dans une agence intégrée TUI ont ressemblé à celles du film "Un jour sans fin", dans lequel Bill Muray revit éternellement le jour de la marmotte.
"J'ai repris à temps plein dès le 15 juillet 2020. C'était très long et anxiogène, car nous n'avions personne en boutique. Nous avons fait un report ou deux, mais rien de plus. C'était une période très désagréable," se remémore-t-elle.
Il faut dire que les points de vente ont rouvert sous la pression de la cellule de crise, afin de permettre aux agents de s'occuper de leurs clients, mais une fois géré les affaires courantes, il ne restait plus rien à faire.
Pour Kevin le responsable breton d'un point de vente, le constat est le même. Après avoir passé la première vague de la réouverture, le calme s'est installé.
"Nous avons travaillé une vingtaine d'heures par semaine pour envoyer le maximum d'offres de report en temps et en heure. J'ai très peu vendu, seulement de la billetterie."
Pour les autres le constat est similaire, la reprise n'a pas eu lieu, mais ce n'est pas une raison pour s'abandonner à la névrose.
"Je suis au chômage depuis le 16 mars, car nous sommes en binôme sur le même pôle donc un binôme sur deux est resté actif.
Le lien a été conservé via des textos, appels, puis avec des questions de ma part pour des devoirs dans le cadre de ma formation. Nous avons pu déjeuner ensemble..." confie Morgane Beard, agent de voyages en alternance.
Malheureusement le cas de l'étudiante n'est pas isolé. Ils sont nombreux à se retrouver sans activité professionnelle, même 9 mois après le début de la crise.
Si la jeune femme a pu conserver un lien avec ses collègues, la situation n'a pas été la même pour d'autres. Pour Charline, agent de voyage dans les Hauts-de-France, le chômage se fait long trop long.
Elle n'a plus remis les pieds dans son agence depuis la mi-mars et n'a depuis plus aucune nouvelle de son responsable.
"Je me suis fait une raison. Au début je le vivais mal. Je me dis qu'il doit être très mal. Dans tout cela, ce qui me manque le plus en ce moment c'est de travailler."
Le tourisme est souvent défini comme un secteur de passion, cela permet sans doute de justifier les petits salaires, la dévotion et les journées à rallonge.
Et justement les journées de Karine Goulard, agent de voyage dans une agence intégrée TUI ont ressemblé à celles du film "Un jour sans fin", dans lequel Bill Muray revit éternellement le jour de la marmotte.
"J'ai repris à temps plein dès le 15 juillet 2020. C'était très long et anxiogène, car nous n'avions personne en boutique. Nous avons fait un report ou deux, mais rien de plus. C'était une période très désagréable," se remémore-t-elle.
Il faut dire que les points de vente ont rouvert sous la pression de la cellule de crise, afin de permettre aux agents de s'occuper de leurs clients, mais une fois géré les affaires courantes, il ne restait plus rien à faire.
Pour Kevin le responsable breton d'un point de vente, le constat est le même. Après avoir passé la première vague de la réouverture, le calme s'est installé.
"Nous avons travaillé une vingtaine d'heures par semaine pour envoyer le maximum d'offres de report en temps et en heure. J'ai très peu vendu, seulement de la billetterie."
Pour les autres le constat est similaire, la reprise n'a pas eu lieu, mais ce n'est pas une raison pour s'abandonner à la névrose.
Sur tout l'été un seul groupe est parti dans le désert tunisien
"Je n'attends pas que la pandémie passe, je ne lâche rien.
Avec mes collègues nous avons fait des reports et surtout nous avons bénéficié d'une formation en communication et marketing," rapporte Jennifer Weber, créatrice de voyages pour Human Trip.
Malgré le chômage partiel, le temps disponible qui ne pouvait pas être passé à la vente ou la création de séjours a été consacré à préparer l'après-crise.
La salariée de l'agence d'Aix-en-Provence en profite aussi pour s'investir pleinement dans le groupe Facebook "Respire - Le tourisme de demain."
Autre sudiste et acteur des réseaux sociaux, Stéphane Verdier (CDMV) a vécu le déconfinement comme une renaissance de l'agence. Il est parti en conquête.
"J'ai travaillé quasiment à temps plein pour communiquer, communiquer, communiquer," explique l'agent d'Evazion à Caussade.
Dans la petite bourgade de 7 000 habitants, un léger frémissement se fait sentir dans l'unique agence de voyages. Quelques départs sont programmés, mais les groupes ne veulent pas quitter leur sud natal et préfèrent reporter.
"Habituellement, nous faisons partir les clubs d'ainés, mais entre la crainte sanitaire et les difficultés pour voyager, je n'ai réussi à faire partir qu'un seul groupe dans le désert tunisien."
Une dépense d'énergie en vain ou presque. Face à des frontières qui rouvrent et referment sans concertation, la gestion épineuse des tests PCR, l'été aura été chaotique.
D'autant que si dans certaines agences le lien avec les clients n'a jamais été rompu, comme à Caussade, ailleurs la relation a été nettement plus tumultueuse.
Les points de vente se sont transformés en bureaux des pleurs, dans le meilleur des cas le professionnel écoute le mal-être, dans le plus mauvais, il se fait agresser verbalement.
"Nous avons eu beaucoup de menaces durant la période de réouverture, c'était très difficile. Les clients n'avaient aucune empathie, ils se plaignaient et nous hurlaient dessus," se remémore Karine Goulard.
Avec mes collègues nous avons fait des reports et surtout nous avons bénéficié d'une formation en communication et marketing," rapporte Jennifer Weber, créatrice de voyages pour Human Trip.
Malgré le chômage partiel, le temps disponible qui ne pouvait pas être passé à la vente ou la création de séjours a été consacré à préparer l'après-crise.
La salariée de l'agence d'Aix-en-Provence en profite aussi pour s'investir pleinement dans le groupe Facebook "Respire - Le tourisme de demain."
Autre sudiste et acteur des réseaux sociaux, Stéphane Verdier (CDMV) a vécu le déconfinement comme une renaissance de l'agence. Il est parti en conquête.
"J'ai travaillé quasiment à temps plein pour communiquer, communiquer, communiquer," explique l'agent d'Evazion à Caussade.
Dans la petite bourgade de 7 000 habitants, un léger frémissement se fait sentir dans l'unique agence de voyages. Quelques départs sont programmés, mais les groupes ne veulent pas quitter leur sud natal et préfèrent reporter.
"Habituellement, nous faisons partir les clubs d'ainés, mais entre la crainte sanitaire et les difficultés pour voyager, je n'ai réussi à faire partir qu'un seul groupe dans le désert tunisien."
Une dépense d'énergie en vain ou presque. Face à des frontières qui rouvrent et referment sans concertation, la gestion épineuse des tests PCR, l'été aura été chaotique.
D'autant que si dans certaines agences le lien avec les clients n'a jamais été rompu, comme à Caussade, ailleurs la relation a été nettement plus tumultueuse.
Les points de vente se sont transformés en bureaux des pleurs, dans le meilleur des cas le professionnel écoute le mal-être, dans le plus mauvais, il se fait agresser verbalement.
"Nous avons eu beaucoup de menaces durant la période de réouverture, c'était très difficile. Les clients n'avaient aucune empathie, ils se plaignaient et nous hurlaient dessus," se remémore Karine Goulard.
De l'agence de voyages à l'usine
L'écho est le même, mais à un degré nettement moindre pour Jennifer Weber.
"Les clients n'ont pas très bien accueilli l'ordonnance, mais c'est comme cela, nous avons composé avec," déplore la jeune femme.
Fort heureusement, ce ressenti ne sera pas le même partout. Pour Stéphane à condition d'être "pédagogue, l'ordonnance est bien passée dans 95% des cas."
Une fois le chaos affronté vient le temps long.
La créatrice de voyages d'Aix-en-Provence aura passé 75% de l'année à son domicile, jonglant entre la formation, le groupe Respire, sa vie personnelle et ses enfants.
Pour certains professionnels, il est venu le temps de s'éloigner du tourisme, en s'engageant dans des associations pour s'occuper et surtout se sentir utile. Pour Kevin, l'occupation aura été tout autre.
"J'ai pris un contrat d'intérim en septembre.
Pendant trois mois, j'ai travaillé dans une usine, à mettre des bouchons sur des bouteilles. Je travaillais dans une entreprise de rhum arrangé, ça reste dans l'exotisme" explique un brun espiègle le breton.
Il n'est pas le seul. D'autres ont travaillé comme serveur ou ont décidé de quitter le secteur, par manque de perspective.
"Avec un manque à gagner de 500 euros par mois, je n'ai pas eu d'autres choix que de prendre un job alimentaire. Ce n'était pas super intéressant, mais il y avait une super ambiance, dans une entreprise familiale."
De l'argent qui servira pour les fêtes de fin d'année et combler les trous dans la raquette.
Ailleurs, à mesure que l'année 2020 s'écoule, les heures travaillées se font moins nombreuses dans le planning, le chômage n'est plus partiel.
"La 1ère vague a mis une claque à tout le monde. Il y a eu la réouverture, puis à la fin de l'été le moral a baissé, car nous nous nous sommes rendu compte que nous ne vendrons rien pour l'hiver. En septembre, ils ont perdu tout moral," analyse Jennifer Weber.
C'était avant la deuxième claque... confinement. La suite dans le prochain épisode.
"Les clients n'ont pas très bien accueilli l'ordonnance, mais c'est comme cela, nous avons composé avec," déplore la jeune femme.
Fort heureusement, ce ressenti ne sera pas le même partout. Pour Stéphane à condition d'être "pédagogue, l'ordonnance est bien passée dans 95% des cas."
Une fois le chaos affronté vient le temps long.
La créatrice de voyages d'Aix-en-Provence aura passé 75% de l'année à son domicile, jonglant entre la formation, le groupe Respire, sa vie personnelle et ses enfants.
Pour certains professionnels, il est venu le temps de s'éloigner du tourisme, en s'engageant dans des associations pour s'occuper et surtout se sentir utile. Pour Kevin, l'occupation aura été tout autre.
"J'ai pris un contrat d'intérim en septembre.
Pendant trois mois, j'ai travaillé dans une usine, à mettre des bouchons sur des bouteilles. Je travaillais dans une entreprise de rhum arrangé, ça reste dans l'exotisme" explique un brun espiègle le breton.
Il n'est pas le seul. D'autres ont travaillé comme serveur ou ont décidé de quitter le secteur, par manque de perspective.
"Avec un manque à gagner de 500 euros par mois, je n'ai pas eu d'autres choix que de prendre un job alimentaire. Ce n'était pas super intéressant, mais il y avait une super ambiance, dans une entreprise familiale."
De l'argent qui servira pour les fêtes de fin d'année et combler les trous dans la raquette.
Ailleurs, à mesure que l'année 2020 s'écoule, les heures travaillées se font moins nombreuses dans le planning, le chômage n'est plus partiel.
"La 1ère vague a mis une claque à tout le monde. Il y a eu la réouverture, puis à la fin de l'été le moral a baissé, car nous nous nous sommes rendu compte que nous ne vendrons rien pour l'hiver. En septembre, ils ont perdu tout moral," analyse Jennifer Weber.
C'était avant la deuxième claque... confinement. La suite dans le prochain épisode.