Jean-Pierre Mas : "Christine Crispin est une présidente très dynamique, très impliquée, avec un style nouveau, assez cash, que j'aime bien" - DR : EDV
TourMaG - Vous venez de participer à la Convention des Entreprises du Voyage (EDV) Méditerranée, durant laquelle il a été question des difficultés de recrutement dans le secteur. Une majorité d'agences de voyages s'accordent à dire qu'elles travaillent à flux tendu depuis la reprise. De votre côté, vous êtes revenu sur les difficiles négociations salariales avec les syndicats de la branche...
Jean-Pierre Mas : Le recrutement est un problème majeur, qui dépend en partie de l'attractivité de nos métiers.
Et là -dessus, l'attitude des syndicats lors des dernières négociations annuelles obligatoires (NAO) fait désormais perdre de l'argent tous les mois à l'ensemble des salariés.
Je suis sidéré par cette situation. Ils ont fait de la décorrélation de la prime d'ancienneté un blocage absurde parce que, en supposant que cette prime n'augmente pas du tout pendant dix ans - ce qui serait énorme - malgré tout, la perte occasionnée serait bien inférieure aux gains qu'ils auraient eu en acceptant notre proposition immédiate d'augmentation salariale.
Jean-Pierre Mas : Le recrutement est un problème majeur, qui dépend en partie de l'attractivité de nos métiers.
Et là -dessus, l'attitude des syndicats lors des dernières négociations annuelles obligatoires (NAO) fait désormais perdre de l'argent tous les mois à l'ensemble des salariés.
Je suis sidéré par cette situation. Ils ont fait de la décorrélation de la prime d'ancienneté un blocage absurde parce que, en supposant que cette prime n'augmente pas du tout pendant dix ans - ce qui serait énorme - malgré tout, la perte occasionnée serait bien inférieure aux gains qu'ils auraient eu en acceptant notre proposition immédiate d'augmentation salariale.
TourMaG - Avec la nouvelle revalorisation du SMIC au 1er mai 2023, les négociations vont-elles reprendre ?
Jean-Pierre Mas : Face à des syndicats bornés, je peux être très têtu. Il n'y aura aucune négociation ouverte en 2023, on ne reparlera qu'en 2024. Nous avons bien averti les syndicats de cela.
Aujourd'hui, nous sommes à front renversé, avec un patronat qui a une attitude sociale et des syndicats qui ont une attitude réactionnaire.
TourMaG - Vous menez depuis plusieurs mois un autre combat face au comportement de certaines compagnies aériennes. Il y a un mois, les EDV leur ont à nouveau adressé un courrier pour leur rappeler leurs obligations (assistance, reroutage, flexibilité, etc.), en cas d'annulation de vols. Où en êtes-vous aujourd'hui ?
Jean-Pierre Mas : Certaines compagnies aériennes se comportent mal : elles annulent des vols, elles délaissent les clients et elles ne prennent pas en charge les conséquences qu'a l'annulation du vol sur la réalisation du forfait.
Aux EDV, nous menons une action de concert avec le Syndicat des Entreprises du Tour Operating (SETO) et le Cercle économique des Agences Groupistes (CEAG) pour dire à nos adhérents que, tout d'abord, il faut informer les compagnies aériennes que derrière une réservation, il y a aussi des prestations terrestres, ce n'est pas un vol sec.
Cela permet d'engager la responsabilité de la compagnie aérienne si les modifications de programme perturbent la réalisation des prestations terrestres. Par exemple, un départ en croisière : si le vol part le lendemain, on ne rattrape pas la croisière en cours de route.
Deuxièmement, les EDV, toujours en collaboration avec le SETO et le CEAG, vont devenir le point d'entrée unique afin d'être informé de chaque situation anormale.
Nous allons centraliser tous les signalements de nos adhérents pour, ensuite, intervenir auprès de la compagnie aérienne en question.
Nous allons aussi faire remonter l'information auprès de la Direction générale de l'aviation civile (DGAC), qui a les moyens de sanctionner les compagnies aériennes, avec des amendes qui vont inciter la compagnie à bien se comporter.
La DGAC le fait déjà , mais elle ne reçoit pas suffisamment de dossiers. Beaucoup d'entre eux s'arrêtent en cours de route.
De leur côté et jusqu'à présent, les agences de voyages ne nous contactaient pas, elles traitaient le problème seules et se faisaient balader par la compagnie aérienne et, en bout de course, elles n'obtenaient rien.
Aujourd'hui, nous allons communiquer auprès des adhérents des EDV.
Jean-Pierre Mas : Face à des syndicats bornés, je peux être très têtu. Il n'y aura aucune négociation ouverte en 2023, on ne reparlera qu'en 2024. Nous avons bien averti les syndicats de cela.
Aujourd'hui, nous sommes à front renversé, avec un patronat qui a une attitude sociale et des syndicats qui ont une attitude réactionnaire.
TourMaG - Vous menez depuis plusieurs mois un autre combat face au comportement de certaines compagnies aériennes. Il y a un mois, les EDV leur ont à nouveau adressé un courrier pour leur rappeler leurs obligations (assistance, reroutage, flexibilité, etc.), en cas d'annulation de vols. Où en êtes-vous aujourd'hui ?
Jean-Pierre Mas : Certaines compagnies aériennes se comportent mal : elles annulent des vols, elles délaissent les clients et elles ne prennent pas en charge les conséquences qu'a l'annulation du vol sur la réalisation du forfait.
Aux EDV, nous menons une action de concert avec le Syndicat des Entreprises du Tour Operating (SETO) et le Cercle économique des Agences Groupistes (CEAG) pour dire à nos adhérents que, tout d'abord, il faut informer les compagnies aériennes que derrière une réservation, il y a aussi des prestations terrestres, ce n'est pas un vol sec.
Cela permet d'engager la responsabilité de la compagnie aérienne si les modifications de programme perturbent la réalisation des prestations terrestres. Par exemple, un départ en croisière : si le vol part le lendemain, on ne rattrape pas la croisière en cours de route.
Deuxièmement, les EDV, toujours en collaboration avec le SETO et le CEAG, vont devenir le point d'entrée unique afin d'être informé de chaque situation anormale.
Nous allons centraliser tous les signalements de nos adhérents pour, ensuite, intervenir auprès de la compagnie aérienne en question.
Nous allons aussi faire remonter l'information auprès de la Direction générale de l'aviation civile (DGAC), qui a les moyens de sanctionner les compagnies aériennes, avec des amendes qui vont inciter la compagnie à bien se comporter.
La DGAC le fait déjà , mais elle ne reçoit pas suffisamment de dossiers. Beaucoup d'entre eux s'arrêtent en cours de route.
De leur côté et jusqu'à présent, les agences de voyages ne nous contactaient pas, elles traitaient le problème seules et se faisaient balader par la compagnie aérienne et, en bout de course, elles n'obtenaient rien.
Aujourd'hui, nous allons communiquer auprès des adhérents des EDV.
TourMaG - La Convention 2023 des EDV Méditerranée est la première organisée par la nouvelle présidente Christine Crispin, qui succède à Lucien Salemi. En quelques mois, le syndicat a vu arriver trois nouvelles présidentes régionales, suite aux démissions des présidents des régions Méditerranée, Sud-Ouest et Hauts-de-France Normandie, qui ont tous déposé le bilan. Cela a été une année compliquée pour les EDV...
Jean-Pierre Mas : Cette situation est très triste pour ces trois hommes pour lesquels j'ai de l'estime, mais aussi pour leurs entreprises et leurs collaborateurs.
S'occuper du syndicat au niveau national comme régional, demande du temps et de l'organisation. Ce n'est pas simplement un poste honorifique.
C'est vraiment un investissement et cela a des conséquences sur la vie de son entreprise. Pour ma part, j'ai eu la chance que mes entreprises soient organisées pour que je puisse faire ça. La présidence du syndicat a été un boulot à plein temps et au-delà , durant la période Covid.
TourMaG - Cette situation a donc entraîné de nouvelles élections et la féminisation des présidences de région. Comment s'est passée cette première convention avec Christine Crispin ?
Jean-Pierre Mas : C'est une présidente très dynamique, très impliquée, avec un style nouveau, assez cash, que j'aime bien. Ce n'est pas protocolaire, c'est très direct, j'adore ça !
Je pense qu'elle va donner une dynamique différente à cette région. Le succès de cette convention avec 70 participants est une bonne première marché de montée !
TourMaG - Et les adhérents du Sud-Est, comment les avez-vous trouvés ?
Jean-Pierre Mas : Je les ai sentis très positifs dans leur business. Les chiffres d'activité que nous observons au niveau national, on les retrouve globalement dans leurs entreprises, qui vont plutôt dans le bon sens.
Jean-Pierre Mas : Cette situation est très triste pour ces trois hommes pour lesquels j'ai de l'estime, mais aussi pour leurs entreprises et leurs collaborateurs.
S'occuper du syndicat au niveau national comme régional, demande du temps et de l'organisation. Ce n'est pas simplement un poste honorifique.
C'est vraiment un investissement et cela a des conséquences sur la vie de son entreprise. Pour ma part, j'ai eu la chance que mes entreprises soient organisées pour que je puisse faire ça. La présidence du syndicat a été un boulot à plein temps et au-delà , durant la période Covid.
TourMaG - Cette situation a donc entraîné de nouvelles élections et la féminisation des présidences de région. Comment s'est passée cette première convention avec Christine Crispin ?
Jean-Pierre Mas : C'est une présidente très dynamique, très impliquée, avec un style nouveau, assez cash, que j'aime bien. Ce n'est pas protocolaire, c'est très direct, j'adore ça !
Je pense qu'elle va donner une dynamique différente à cette région. Le succès de cette convention avec 70 participants est une bonne première marché de montée !
TourMaG - Et les adhérents du Sud-Est, comment les avez-vous trouvés ?
Jean-Pierre Mas : Je les ai sentis très positifs dans leur business. Les chiffres d'activité que nous observons au niveau national, on les retrouve globalement dans leurs entreprises, qui vont plutôt dans le bon sens.
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TourMaG - Quels sont ces chiffres d'activité ?
Jean-Pierre Mas : Sur le voyage d'affaires, l'activité se situe aujourd'hui entre 75 et 80% de ce qu'elle était en 2019 et je pense qu'il faut se faire à l'idée que nous ne retrouverons pas les niveaux de 2019. On arrivera peut-être à 85% de 2019, mais pas plus.
Cela s'explique en partie parce que durant la crise, les entreprises n'ont pas voyagé et beaucoup de secteurs d'activité ont constaté que sans voyager, ils maintenaient ou ils amélioraient leurs résultats. Alors pourquoi se remettre à voyager, augmenter les charges et donc dégrader le résultat ?
En parallèle, pendant la crise, le télétravail et la visioconférence se sont énormément développés.
Enfin, les entreprises sont aujourd'hui obligées de prendre des engagements en matière de Responsabilité sociétale des entreprises (RSE) si elles veulent continuer à répondre à des appels d'offres et à décrocher des contrats. Et l'un des engagements les plus simples à prendre, c'est de réduire sa consommation carbone et pour cela, le plus efficace est de réduire l'utilisation de l'avion.
TourMaG - Et sur le loisir ?
Jean-Pierre Mas : Sur le loisir, on a redépassé les niveaux de 2019 en termes de chiffre d'affaires (CA).
Par exemple, sur les vacances de printemps, on a un CA de +16% pour le marché France, tous opérateurs de voyage confondus. Mais le nombre de dossiers est en baisse de 10% par rapport au printemps de 2019.
Nous avons donc moins de voyageurs, qui dépensent plus pour leur voyage, car les prix ont augmenté du fait de l'inflation, mais aussi parce que ceux qui n'ont pas voyagé depuis deux ans - et qui en ont les moyens - prennent des vacances plus longues, plus lointaines et plus chères.
En même temps, nous sommes en train d'accroître la fracture sociale, avec des Français qui avaient les moyens de voyager avant la crise sanitaire et qui n'ont plus ces moyens, car ils doivent faire des arbitrages en faveur du chariot du supermarché ou du plein d'essence.
L'écart était encore plus grand pour les vacances d'hiver, il reste important pour les vacances de printemps, car il s'agit de "secondes vacances" et, pour les familles, il est plus facile de couper ces vacances-là que les "grandes vacances" estivales.
D'ailleurs, si l'on regarde les perspectives pour l'été, à fin mars, le niveau des réservations était en croissance de 35% par rapport à 2019 et le nombre de dossiers à +8%. Ce qui signifie que le panier moyen est en hausse de +25%, dû à l'inflation et au fait que l'on dépense un peu plus pour voyager.
Globalement, étant donné que notre rémunération est liée à notre chiffre d'affaires, cette tendance est positive. Mais il y a quand même une alerte qui est la réduction du nombre de voyageurs.
A long terme, il faut y faire attention, car le voyage est le résultat de luttes et de conquêtes sociales. Le droit aux vacance ne s'est pas imposé naturellement. Tout phénomène de retrait peut être dangereux et cette fracture sociale qui s'élargit peut créer des conflits sociaux dont nous n'avons aucun intérêt et qui peuvent nuire à l'intérêt de notre profession.
Nous n'avons pas intérêt à avoir une France en conflit.
Jean-Pierre Mas : Sur le voyage d'affaires, l'activité se situe aujourd'hui entre 75 et 80% de ce qu'elle était en 2019 et je pense qu'il faut se faire à l'idée que nous ne retrouverons pas les niveaux de 2019. On arrivera peut-être à 85% de 2019, mais pas plus.
Cela s'explique en partie parce que durant la crise, les entreprises n'ont pas voyagé et beaucoup de secteurs d'activité ont constaté que sans voyager, ils maintenaient ou ils amélioraient leurs résultats. Alors pourquoi se remettre à voyager, augmenter les charges et donc dégrader le résultat ?
En parallèle, pendant la crise, le télétravail et la visioconférence se sont énormément développés.
Enfin, les entreprises sont aujourd'hui obligées de prendre des engagements en matière de Responsabilité sociétale des entreprises (RSE) si elles veulent continuer à répondre à des appels d'offres et à décrocher des contrats. Et l'un des engagements les plus simples à prendre, c'est de réduire sa consommation carbone et pour cela, le plus efficace est de réduire l'utilisation de l'avion.
TourMaG - Et sur le loisir ?
Jean-Pierre Mas : Sur le loisir, on a redépassé les niveaux de 2019 en termes de chiffre d'affaires (CA).
Par exemple, sur les vacances de printemps, on a un CA de +16% pour le marché France, tous opérateurs de voyage confondus. Mais le nombre de dossiers est en baisse de 10% par rapport au printemps de 2019.
Nous avons donc moins de voyageurs, qui dépensent plus pour leur voyage, car les prix ont augmenté du fait de l'inflation, mais aussi parce que ceux qui n'ont pas voyagé depuis deux ans - et qui en ont les moyens - prennent des vacances plus longues, plus lointaines et plus chères.
En même temps, nous sommes en train d'accroître la fracture sociale, avec des Français qui avaient les moyens de voyager avant la crise sanitaire et qui n'ont plus ces moyens, car ils doivent faire des arbitrages en faveur du chariot du supermarché ou du plein d'essence.
L'écart était encore plus grand pour les vacances d'hiver, il reste important pour les vacances de printemps, car il s'agit de "secondes vacances" et, pour les familles, il est plus facile de couper ces vacances-là que les "grandes vacances" estivales.
D'ailleurs, si l'on regarde les perspectives pour l'été, à fin mars, le niveau des réservations était en croissance de 35% par rapport à 2019 et le nombre de dossiers à +8%. Ce qui signifie que le panier moyen est en hausse de +25%, dû à l'inflation et au fait que l'on dépense un peu plus pour voyager.
Globalement, étant donné que notre rémunération est liée à notre chiffre d'affaires, cette tendance est positive. Mais il y a quand même une alerte qui est la réduction du nombre de voyageurs.
A long terme, il faut y faire attention, car le voyage est le résultat de luttes et de conquêtes sociales. Le droit aux vacance ne s'est pas imposé naturellement. Tout phénomène de retrait peut être dangereux et cette fracture sociale qui s'élargit peut créer des conflits sociaux dont nous n'avons aucun intérêt et qui peuvent nuire à l'intérêt de notre profession.
Nous n'avons pas intérêt à avoir une France en conflit.