Jean Pinard : A quoi peuvent bien servir les pubs dans le métro ? [ABO]

Salon de l’agriculture oblige, les couloirs de métro se parent des couleurs de la province venue se montrer à Paris.

Ce salon, est une sorte de rite annuel, qui veut que toute la province monte à Paris.(sic)

Je n’ai jamais compris ce folklore, toujours surjoué, auquel se prêtent les territoires de province, qui s’obligent à venir en costume d’époque pour faire sourire les Parisiens.

Comme si la tradition et les savoir-faire régionaux ne pouvaient se parer des habits de la modernité...

Donc, il ne s’agit pas seulement de tenir le plus beau et le plus grand stand du salon de l’agriculture, mais aussi de l’annoncer aux Parisiens. Et quoi de mieux pour ça qu’une bonne campagne de pub dans le métro ?

Les couloirs du métro, c’est le temple, le Graal, le nirvana pour tout communicant en tourisme institutionnel.

Un jour, par curiosité, il faudra demander à Métrobus, la nouvelle société dédiée qui exploite la publicité sur le réseau RATP, de donner les montants cumulés de toutes les campagnes engagées par les organismes de gestion de destination, pour essayer de comprendre l’irrationalité des stratégies de communication de pas mal d’acteurs.

On nous avait pourtant promis qu'avec l’arrivée d’Internet que la « com et la pub mainstream » c’était bel et bien fini ?

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Puis il y a eu les réseaux sociaux, et là on allait vraiment personnaliser le message, là encore la pub dans le métro a résisté et résiste encore.

Alors Paris en même temps c’est le plus gros marché de la plupart des destinations de province, mais si on compare les budgets affectés par marché, je pense qu’on peut affirmer sans se tromper que le marché parisien capte environ 5 fois plus de budget par visiteurs, que tous les autres marchés.

Étonnante cette statistique, mais elle ne bouge pas. Et à poids égal, on mettra toujours beaucoup plus de budget com pour le marché parisien que pour le marché régional de proximité.

Quelle explication rationnelle peut-on apporter à cette situation qui perdure, alors que tous les étudiants en tourisme qui font un peu de marketing ont appris qu’il fallait personnaliser le message ?

La première explication, c’est une confusion entre le marketing et la communication, puis entre la communication et la publicité.

Là où toutes les grandes marques font la distinction entre un service marketing et un service communication, nous acteurs du tourisme, on préfère parler de service promotion dans lequel on mélange un peu tout.

Donc à la fin de beaucoup de stratégies marketing on finira par proposer une bonne campagne de communication, dont l’objet sera de renforcer la notoriété.

Là encore, il y a confusion entre notoriété et image de marque, et la question à laquelle on évite de répondre, « peut-on améliorer la notoriété d’une marque (de destination) qui n’existe pas aux yeux du grand public » ?

C’est pour cela que très souvent, il faudra rajouter quelques éléments qui vont permettre de situer la destination et mon best of reste cette campagne dans le métro en 2021 de la commune du Prat de Mollo « située au cœur du Haut Vallespir sur le territoire sud Canigou en pays Catalan à 60 km de Perpignan » ! 7 références géographiques, record inégalé !

"C'est inespéré." Le maire de Prats-de-Mollo, le reconnaît : jamais sa commune d'un millier d'habitants n'aurait pu se payer une telle campagne de promotion. Mais la crise sanitaire est passée par là. Les publicitaires ont beaucoup moins d'événements à annoncer : résultat, les tarifs se sont effondrés.

Que peut on rajouter à cet argumentaire ? Qu’il y a un vrai et un faux Sud ?

La seconde explication, est plus à chercher dans le statut des Offices et comités de tourisme, un statut d’organisme institutionnel qui veut qu’à la fin ce soit celui qui paye qui décide, et une campagne dans le métro c’est souvent une demande et donc une décision d’élus.

Mais il y a une double raison pour expliquer cette situation.

La troisième raison, c’est celle de la « pub de la pub », qui veut que très souvent les médias locaux se feront le relais des campagnes à Paris.

Dans le cas de Prat de Mollo, la PQR (presse quotidienne régionale) et France Bleu (ICI) n’ont pas manqué d'informer les habitants que leur destination, leur territoire était promu à Paris et que ça ce n’était pas rien.

Oui ça compte d’être vu à Paris, en tout cas on fait tout pour le faire croire, ravivant à chaque campagne la flamme de la fierté d’habiter une destination qui s’offre aux yeux des Parisiens.

Et c’est financement la quatrième raison qui emporte le tout, s’offrir à la vue des Parisiens, c’est bien, mais s’offrir à la vue de millions d’yeux de Parisiens alors là c’est la réussite. Dans le cas de Prat de Mollo, France bleu (ICI) a servi la meilleure des cautions pour justifier cette campagne : « Et les chiffres d'audience ont de quoi donner le tournis pour la commune.

Selon les estimations de MetroBus, les affiches devaient être vues chaque jour par 4.5 millions de voyageurs, qui pendant les 15 jours de la campagne, devraient chacun les voir neuf fois. Soit au total, environ 40 millions de vues ».

D’où viennent ces chiffres ? Alors là mystère et boule de gomme. Cependant, il faut noter qu’ils ne sont jamais démentis. Pour rappel 4.5 millions de voyageurs c’est presque 7% de la population française.

Quant à savoir combien de millions de voyageurs du métro sont venus en vacances à Prat de Mollo, c’est une autre histoire… qu’aucun média ne racontera !

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Président de la société de conseils Futourism :

Forestier et géographe de formation, Jean Pinard a toujours travaillé dans le secteur des sports et du tourisme.
Moniteur de kayak, chauffeur de bus, guide, gestionnaire de sites touristiques, directeur de CDT et de CRT (Auvergne et Occitanie), Jean Pinard est redevenu consultant, son premier métier à la SCET, à la fin de ses études.