J’ai l’impression qu’on nous prend pour des robots. Même dans les cauchemars les plus fous de ceux qui craignaient le taylorisme poussé à l’extrême, on ne trouve pas de jobs aussi répétitifs que ceux qu’on nous propose en agence - DR : Les temps Modernes Raf
La semaine dernière, je m’indignais que d’aucuns proposent des jobs à 1400 € par mois.
Alors bien entendu, certains lecteurs, tout en nuances et en retenue, m’ont accusée d’être un suppôt de Nuit Debout, incapable de me remettre en question, assistée et fainéante.
L’inénarrable Rick Sailor (l’ami de Tonton Dom qu’il a) a même été (je cite) « effaré par cette vision d'assistanat permanent qu'attendent les entrants de la profession ».
Il y a quelques mois, on me soupçonnait d’être à la solde du MEDEF et je ne sais pas ce qui me fait rire le plus !
Monsieur Rick (qui paye des auto-entrepreneurs 3 500 €/mois, soit 27% de plus que le plafond légal) devrait savoir que 3 500 € de revenus d’auto-entrepreneur, ça fait à peu près 2 000 € nets par mois. Et bien figurez-vous que je gagne bien davantage… Je suis assez heureuse de gagner correctement ma vie et de payer des impôts.
En qualité de célibataire et sans enfant, je te promets que je paye bonbon.
Bref, la question n’est pas quel salaire on « mérite », mais « pourquoi se lève-t-on le matin ? ». Moi, je suis une connasse de bobo parisienne, égoïste, fêtarde et consommatrice.
Je n’aurais jamais accès à la propriété. En plus, quand j’analyse ma capacité à gérer ma vie amoureuse, il est peu probable que j’assure la pérennité de l’espèce, donc je ne peux compter que sur moi (s’il me restait des fans, je les ai définitivement perdus).
Alors bien entendu, certains lecteurs, tout en nuances et en retenue, m’ont accusée d’être un suppôt de Nuit Debout, incapable de me remettre en question, assistée et fainéante.
L’inénarrable Rick Sailor (l’ami de Tonton Dom qu’il a) a même été (je cite) « effaré par cette vision d'assistanat permanent qu'attendent les entrants de la profession ».
Il y a quelques mois, on me soupçonnait d’être à la solde du MEDEF et je ne sais pas ce qui me fait rire le plus !
Monsieur Rick (qui paye des auto-entrepreneurs 3 500 €/mois, soit 27% de plus que le plafond légal) devrait savoir que 3 500 € de revenus d’auto-entrepreneur, ça fait à peu près 2 000 € nets par mois. Et bien figurez-vous que je gagne bien davantage… Je suis assez heureuse de gagner correctement ma vie et de payer des impôts.
En qualité de célibataire et sans enfant, je te promets que je paye bonbon.
Bref, la question n’est pas quel salaire on « mérite », mais « pourquoi se lève-t-on le matin ? ». Moi, je suis une connasse de bobo parisienne, égoïste, fêtarde et consommatrice.
Je n’aurais jamais accès à la propriété. En plus, quand j’analyse ma capacité à gérer ma vie amoureuse, il est peu probable que j’assure la pérennité de l’espèce, donc je ne peux compter que sur moi (s’il me restait des fans, je les ai définitivement perdus).
Je suis plutôt heureuse dans mon job
L’argent n’est pas une fin, mais juste un moyen de claquer et de me faire plaisir. Ne me juge pas : accepte la différence…
Quand j’ai embrassé ma carrière d’agent de voyages blonde, on m’avait promis un job varié, des voyages d’études, des primes sur mes ventes et une ambiance de travail jeune et dynamique.
Dès mon premier job (une boite qui vendait des voyages en promo dégriffés de dernière minute, tu vois ?), j’ai eu ça.
Et, en plus, mes boss étaient jeunes et sexys et on travaillait dans une ambiance dite de start-up. C’était funky.
Au risque de passer pour une fayote, j’ai encore tout ça chez Big-Boss Voyages (même si Big Boss n’a pas l’œil bleu et la mèche rebelle des deux associés de la start-up de mes débuts).
Aujourd’hui, je me tue à la tâche et j’encadre 5 personnes, mais je gagne dans les 36 à 40 K€ bruts par an, je travaille dans un environnement de rêve avec des collègues que j’adore, je suis soutenue par un boss que j’admire, je fais au moins 3 voyages par an et j’en apprends tous les jours.
Bref, je suis plutôt heureuse dans mon job.
Quand j’ai embrassé ma carrière d’agent de voyages blonde, on m’avait promis un job varié, des voyages d’études, des primes sur mes ventes et une ambiance de travail jeune et dynamique.
Dès mon premier job (une boite qui vendait des voyages en promo dégriffés de dernière minute, tu vois ?), j’ai eu ça.
Et, en plus, mes boss étaient jeunes et sexys et on travaillait dans une ambiance dite de start-up. C’était funky.
Au risque de passer pour une fayote, j’ai encore tout ça chez Big-Boss Voyages (même si Big Boss n’a pas l’œil bleu et la mèche rebelle des deux associés de la start-up de mes débuts).
Aujourd’hui, je me tue à la tâche et j’encadre 5 personnes, mais je gagne dans les 36 à 40 K€ bruts par an, je travaille dans un environnement de rêve avec des collègues que j’adore, je suis soutenue par un boss que j’admire, je fais au moins 3 voyages par an et j’en apprends tous les jours.
Bref, je suis plutôt heureuse dans mon job.
Ne jamais savoir en arrivant de quoi sera faite ma journée
Contrairement à ce que peuvent dire quelques esprits chagrins, je ne me sens pas faire partie des meubles chez Big-Boss Voyages et je ne pense pas que je vendrai des voyages derrière un joli comptoir toute ma vie.
J’ai été vendeuse à la serpe au téléphone dans le call center d’une usine à promo de vacances dégriffées sur le web, puis multi-tâches chez Big-Boss Voyages saison 1 ; je suis désormais chef du chic chez Big-Boss Voyages saison 2, mais je reconnais volontiers que certains jours, je ferais bien autre chose…
Alors je tâte le terrain de la reconversion. Comme je ne suis pas complètement tartouille, j’écoute, j’observe, je m’intéresse… je teste.
Ben oui : piger parfois pour TourMaG, relire de temps en temps une communication pondue par un service marketing qui ne sait pas ce qu’est un client, être sollicitée pour intervenir dans une classe de BTS Tourisme, ça donne des idées d’orientation de ma carrière future.
Et comme je ne suis pas une assistée, je cumule mon CDI avec ce petit statut d’auto-entrepreneuse qui me permet de mettre du beurre dans mes épinards bio de bobo (et du sucre de canne dans mes mojitos)
Ce que j’aime le plus dans mon métier ? Ne jamais savoir le matin en arrivant de quoi sera faite ma journée.
J’ai été vendeuse à la serpe au téléphone dans le call center d’une usine à promo de vacances dégriffées sur le web, puis multi-tâches chez Big-Boss Voyages saison 1 ; je suis désormais chef du chic chez Big-Boss Voyages saison 2, mais je reconnais volontiers que certains jours, je ferais bien autre chose…
Alors je tâte le terrain de la reconversion. Comme je ne suis pas complètement tartouille, j’écoute, j’observe, je m’intéresse… je teste.
Ben oui : piger parfois pour TourMaG, relire de temps en temps une communication pondue par un service marketing qui ne sait pas ce qu’est un client, être sollicitée pour intervenir dans une classe de BTS Tourisme, ça donne des idées d’orientation de ma carrière future.
Et comme je ne suis pas une assistée, je cumule mon CDI avec ce petit statut d’auto-entrepreneuse qui me permet de mettre du beurre dans mes épinards bio de bobo (et du sucre de canne dans mes mojitos)
Ce que j’aime le plus dans mon métier ? Ne jamais savoir le matin en arrivant de quoi sera faite ma journée.
En agence aujourd'hui, on trouve de nombreux jobs répétitifs
Dans le monde merveilleux des agences de voyages, je sais que je suis une privilégiée. Il suffit de regarder les offres d’emploi qui passent actuellement pour que je m’en persuade : J’ai l’impression qu’on nous prend pour des robots.
Même dans les cauchemars les plus fous de ceux qui craignaient le taylorisme poussé à l’extrême, on ne trouve pas de jobs aussi répétitifs que ceux qu’on nous propose en agence.
Je ne sais pas qui a eu l’idée moisie (dans le but d’améliorer la productivité, sans doute) d’inventer le partage du travail entre ceux qui bossent en « front-office » (ceux qui parlent aux clients, les « vendeurs ») et le back-office (les petites mains qui remplissent des formulaires et tritouillent du papier), mais cette idée est cruelle.
Dans certaines grosses agences parisiennes (c’est ainsi qu’on nous appelle en région), on trouve des services entiers qui s’occupent des « CP » : les contre-propositions.
J’explique en quelques mots pour ceux qui ne connaissent pas le principe : c’est un job très sympa où tu passes ta vie au téléphone à appeler des gens sur le mode « bonjour, l’hôtel que vous aviez choisi (et qui était en request) est complet.
A la place, je vous propose un hôtel tout moisi dont personne ne voulait qui en plus va vous coûter plus cher ».
Même dans les cauchemars les plus fous de ceux qui craignaient le taylorisme poussé à l’extrême, on ne trouve pas de jobs aussi répétitifs que ceux qu’on nous propose en agence.
Je ne sais pas qui a eu l’idée moisie (dans le but d’améliorer la productivité, sans doute) d’inventer le partage du travail entre ceux qui bossent en « front-office » (ceux qui parlent aux clients, les « vendeurs ») et le back-office (les petites mains qui remplissent des formulaires et tritouillent du papier), mais cette idée est cruelle.
Dans certaines grosses agences parisiennes (c’est ainsi qu’on nous appelle en région), on trouve des services entiers qui s’occupent des « CP » : les contre-propositions.
J’explique en quelques mots pour ceux qui ne connaissent pas le principe : c’est un job très sympa où tu passes ta vie au téléphone à appeler des gens sur le mode « bonjour, l’hôtel que vous aviez choisi (et qui était en request) est complet.
A la place, je vous propose un hôtel tout moisi dont personne ne voulait qui en plus va vous coûter plus cher ».
On promet des agents spécialistes ou consultant expert
Le pire, c’est quand même toutes ces boites qui pullulent sur le net, du genre pays-autrement.com, circuit-pays.fr ou voyage-au-pays.fr (à décliner en 50 pays pour la même boite).
On promet au futur voyageur un spécialiste de telle ou telle destination, natif du pays en question ou « qui y a longtemps vécu » et « le connaît comme sa poche ». Un copié-collé du pauvre du profil de « référant destination » de Voyageurs du Monde.
On va visser ce pauvre « agent spécialiste » (les plus ambitieux l’appellent « consultant expert ») à une chaise à roulettes et lui accorder une petite planche sur deux tréteaux. On va lui coller un téléphone high-tech, un casque et c’est parti !
Coups de téléphone, mails, chat… le pauvre agent spécialiste va passer sa journée à :
- vendre le même voyage « sur mesure » (laissez-moi rire : les 8 itinéraires proposés sur chaque pays sont déjà en ligne sur le site de l’agence et les devis prêts à être envoyés)
- harceler ses clients au téléphone « vous avez pris une décision ? parce que j’ai pas reçu votre inscription »,
- utiliser des stratagèmes ridicules pour leur faire peur « j’ai une option sur les vols mais elle tombe demain »,
- demander à son superviseur des accords pour des « gestes commerciaux » (il faut faire rentrer du chiffre, quitte à dégrader la marge), le tout avec l’œil rivé sur ses « matrices de pilotage ».
On promet au futur voyageur un spécialiste de telle ou telle destination, natif du pays en question ou « qui y a longtemps vécu » et « le connaît comme sa poche ». Un copié-collé du pauvre du profil de « référant destination » de Voyageurs du Monde.
On va visser ce pauvre « agent spécialiste » (les plus ambitieux l’appellent « consultant expert ») à une chaise à roulettes et lui accorder une petite planche sur deux tréteaux. On va lui coller un téléphone high-tech, un casque et c’est parti !
Coups de téléphone, mails, chat… le pauvre agent spécialiste va passer sa journée à :
- vendre le même voyage « sur mesure » (laissez-moi rire : les 8 itinéraires proposés sur chaque pays sont déjà en ligne sur le site de l’agence et les devis prêts à être envoyés)
- harceler ses clients au téléphone « vous avez pris une décision ? parce que j’ai pas reçu votre inscription »,
- utiliser des stratagèmes ridicules pour leur faire peur « j’ai une option sur les vols mais elle tombe demain »,
- demander à son superviseur des accords pour des « gestes commerciaux » (il faut faire rentrer du chiffre, quitte à dégrader la marge), le tout avec l’œil rivé sur ses « matrices de pilotage ».
Dans ces boites, rencontrer un client en face-à-face, c’est une perte de temps
Parce que oui : en plus, le pauvre agent spécialiste a peur de ne pas atteindre son objectif, celui qui va lui permettre d’obtenir la fameuse prime sur CA de 100 € s’il réussit à facturer 100 000 ou 150 000 € dans le mois (ça dépend des boites).
Cette prime qui peut « grossir très vite » s’il explose son objectif de vente. Sans ce bonus, il devra se contenter de 1 790 € par mois pour 39 heures par semaine.
Des voyages d’études ? S'il te reste des vacances à prendre ! (mais bon, tu sais… si tu pars en voyage, tu feras moins de chiffre puisque tu ne seras pas à l’agence).
Et là, le conseiller spécialiste préfère suivre vite fait un e-learning pour obtenir une « certification » et se scléroser un peu plus dans sa spécialisation.
Dans ce type de boites, tu te dis que rencontrer un client en face-à-face, c’est une perte de temps (parce que forcément, il va s’installer… alors qu’au téléphone, tu peux réciter ton script rapido).
Alors, le client, tu ne le reçois pas « à l’agence » : tu lui proposes un rendez-vous « au show-room ». (je vous promets, je n’invente rien) .
Cette prime qui peut « grossir très vite » s’il explose son objectif de vente. Sans ce bonus, il devra se contenter de 1 790 € par mois pour 39 heures par semaine.
Des voyages d’études ? S'il te reste des vacances à prendre ! (mais bon, tu sais… si tu pars en voyage, tu feras moins de chiffre puisque tu ne seras pas à l’agence).
Et là, le conseiller spécialiste préfère suivre vite fait un e-learning pour obtenir une « certification » et se scléroser un peu plus dans sa spécialisation.
Dans ce type de boites, tu te dis que rencontrer un client en face-à-face, c’est une perte de temps (parce que forcément, il va s’installer… alors qu’au téléphone, tu peux réciter ton script rapido).
Alors, le client, tu ne le reçois pas « à l’agence » : tu lui proposes un rendez-vous « au show-room ». (je vous promets, je n’invente rien) .
Le pire, c'est d'être cantonné à une seule destination
Mais le pire, c’est que ces agents de voyages sont le plus souvent cantonnés à travailler sur une seule destination.
Sur les annonces cette semaine, on nous propose (comme d’habitude) des postes de spécialistes de l’Italie, d’experts des Etats-Unis, des champions de l’Australie…
Si j’ai bien compris, c’est sur ces trois destinations que tu peux faire carrière… et négocier 50€ de plus en passant d’un employeur un peu rat à un autre aux abois parce qu'il lui manque un « spécialiste ».
Quand tu travailles chez Asia, je comprends qu’on puisse te demander de travailler sur l’Asie…
Mais pourquoi s’obliger quand on travaille dans une « grosse agence », se limiter à travailler toute l’année sur un seul pays ? Quelle tristesse, quel manque d’ouverture !
Ce que j’aime dans mon métier, c’est de passer en une demi-journée, d’un autotour aux Etats-Unis à une croisière expédition, en passant par un safari et un city break dans une capitale européenne… de chercher des photos, rédiger un texte, me battre avec excel, manipuler le CRM de Big Boss, recevoir un commercial, bref… vivre.
Utiliser mes poumons, mon cœur et mon cerveau. Parce que si tu marches avec une seule jambe, tu boîtes… non ?
Sur les annonces cette semaine, on nous propose (comme d’habitude) des postes de spécialistes de l’Italie, d’experts des Etats-Unis, des champions de l’Australie…
Si j’ai bien compris, c’est sur ces trois destinations que tu peux faire carrière… et négocier 50€ de plus en passant d’un employeur un peu rat à un autre aux abois parce qu'il lui manque un « spécialiste ».
Quand tu travailles chez Asia, je comprends qu’on puisse te demander de travailler sur l’Asie…
Mais pourquoi s’obliger quand on travaille dans une « grosse agence », se limiter à travailler toute l’année sur un seul pays ? Quelle tristesse, quel manque d’ouverture !
Ce que j’aime dans mon métier, c’est de passer en une demi-journée, d’un autotour aux Etats-Unis à une croisière expédition, en passant par un safari et un city break dans une capitale européenne… de chercher des photos, rédiger un texte, me battre avec excel, manipuler le CRM de Big Boss, recevoir un commercial, bref… vivre.
Utiliser mes poumons, mon cœur et mon cerveau. Parce que si tu marches avec une seule jambe, tu boîtes… non ?