TourMaG.com - La semaine dernière, vous avez organisé un colloque sur la problématique des résidences secondaires en France. Pourquoi avoir organisé cet événement ?
Jean-Félix Acquaviva : Tout d'abord, car cela répond à un diagnostic partagé par différents territoires, la Corse, mais aussi la Savoie, le Pays basque ou encore la Bretagne.
Nous avons fait avec toutes ces régions, le constat d'une fracture économique et sociale très forte, liée au phénomène de résidentialisation secondaire voire même de spéculation foncière et immobilière.
Tous ces effets peuvent entraîner un rejet de la part des locaux envers les touristes.
Vous avez des communes en France, où les résidences secondaires atteignent 60, 70 ou 80% du parc immobilier. A l'échelle de la Corse, la pression de ces dernières représente 36%, contre 9% à l'échelle nationale.
Dans le même temps, cela entraîne une augmentation quasi exponentielle du foncier bâti. Ce dernier a augmenté de 138% en 10 ans en Corse, contre 65% dans le reste de la France.
A cela vous ajoutez, une population ayant un salaire moyen de 15% inférieur à la moyenne française. Nous assistons à une partie de casino. Les logements atteignent des prix devenus inaccessibles pour les habitants locaux.
Jean-Félix Acquaviva : Tout d'abord, car cela répond à un diagnostic partagé par différents territoires, la Corse, mais aussi la Savoie, le Pays basque ou encore la Bretagne.
Nous avons fait avec toutes ces régions, le constat d'une fracture économique et sociale très forte, liée au phénomène de résidentialisation secondaire voire même de spéculation foncière et immobilière.
Tous ces effets peuvent entraîner un rejet de la part des locaux envers les touristes.
Vous avez des communes en France, où les résidences secondaires atteignent 60, 70 ou 80% du parc immobilier. A l'échelle de la Corse, la pression de ces dernières représente 36%, contre 9% à l'échelle nationale.
Dans le même temps, cela entraîne une augmentation quasi exponentielle du foncier bâti. Ce dernier a augmenté de 138% en 10 ans en Corse, contre 65% dans le reste de la France.
A cela vous ajoutez, une population ayant un salaire moyen de 15% inférieur à la moyenne française. Nous assistons à une partie de casino. Les logements atteignent des prix devenus inaccessibles pour les habitants locaux.
"Nous ne voulons pas annihiler les résidences secondaires, mais les réguler"
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TourMaG.com - Vous dénoncez donc la désertification provoquée par le développement frénétique des résidences secondaires ?
Jean-Félix Acquaviva : Il y a une inaccessibilité à l'acquisition de biens par les locaux et même à la location.
Vous avez aussi des dispositifs fiscaux qui ont été détournés de leurs objectifs pour accroitre la rentabilité des résidences secondaires et surtout des meublés tourismes.
Le fait que les prix augmentent très fortement dans les zones touristiques, le phénomène se déporte et se répand dans les territoires alentour. Cela devient même viral dans les campagnes, par exemple en Corse - dossier que je maîtrise le mien - le prix a été multiplié par 3 en trois ans.
Nous devons réguler ce phénomène, nous ne voulons pas annihiler les résidences secondaires, mais de rééquilibrer leur présence sur nos territoires.
D'autant plus que cela entre en concurrence avec l'activité professionnelle touristique. En Corse, 75% des nuitées sont accaparées par le paracommercialisme.
Il existe un enjeu économique fort, en pérennisant les emplois dans le temps et sur nos territoires. L'emploi dans le tourisme ne doit pas être considéré comme un emploi cueillette, il faut le professionnaliser et le rendre durable. C'est aussi notre volonté.
Jean-Félix Acquaviva : Il y a une inaccessibilité à l'acquisition de biens par les locaux et même à la location.
Vous avez aussi des dispositifs fiscaux qui ont été détournés de leurs objectifs pour accroitre la rentabilité des résidences secondaires et surtout des meublés tourismes.
Le fait que les prix augmentent très fortement dans les zones touristiques, le phénomène se déporte et se répand dans les territoires alentour. Cela devient même viral dans les campagnes, par exemple en Corse - dossier que je maîtrise le mien - le prix a été multiplié par 3 en trois ans.
Nous devons réguler ce phénomène, nous ne voulons pas annihiler les résidences secondaires, mais de rééquilibrer leur présence sur nos territoires.
D'autant plus que cela entre en concurrence avec l'activité professionnelle touristique. En Corse, 75% des nuitées sont accaparées par le paracommercialisme.
Il existe un enjeu économique fort, en pérennisant les emplois dans le temps et sur nos territoires. L'emploi dans le tourisme ne doit pas être considéré comme un emploi cueillette, il faut le professionnaliser et le rendre durable. C'est aussi notre volonté.
Résidences secondaires : "La situation est grave"
TourMaG.com - Quelles sont les conséquences sur la Corse par exemple ?
Jean-Félix Acquaviva : Vous avez une démultiplication des lits froids.
Un rapport de l'Agence d'aménagement durable, d'urbanisme et d'énergie de la Corse (AUE), sur l'évolution lors des 10 dernières années, démontre qu'une famille avec un revenir médian, ne peut plus accéder à la propriété, voire même louer, dans les communes situées à moins de 500 m d'altitude.
La situation est déjà grave !
Vous gelez du foncier, empêchant les élus locaux de développer de l'activité à l'année, des services, nous faisons face à un déséquilibre majeur à l'encontre les territoires.
Cela pose des problèmes de durabilité et de viabilité des développements de nos régions. Lors du Colloque, des élus ont fait part de leur peur de voir leurs villes se transformer en parcs d'attraction.
Le phénomène est observable dans d'autres régions en France.
TourMaG.com - Pourquoi organiser un colloque ?
Jean-Félix Acquaviva : L'objectif étant de faire une convergence entre plusieurs situations, un peu partout en France.
Nous voulions démontrer avec Xavier Roseren, député de la Haute-Savoie, que la problématique est nationale.
Nous avons fait ensuite le lien avec des élus basques, suite aux manifestations à Bayonne, puis des Bretons. Nous nous sommes dit que la spéculation foncière et immobilière est virale et qu'il fallait faire converger nos expériences.
De plus, je porte une proposition de loi que j'avais déjà portée l'année dernière. Elle avait été adoptée en commission des lois, mais elle n'a pas pu passer au vote.
Le 4 février 2022, la proposition de loi qui demande une expérimentation sur la Corse pour lutter contre la spéculation immobilière et foncière sera débattue à l'Assemblée nationale. Elle a des chances d'être adoptée en 1ère lecture.
Jean-Félix Acquaviva : Vous avez une démultiplication des lits froids.
Un rapport de l'Agence d'aménagement durable, d'urbanisme et d'énergie de la Corse (AUE), sur l'évolution lors des 10 dernières années, démontre qu'une famille avec un revenir médian, ne peut plus accéder à la propriété, voire même louer, dans les communes situées à moins de 500 m d'altitude.
La situation est déjà grave !
Vous gelez du foncier, empêchant les élus locaux de développer de l'activité à l'année, des services, nous faisons face à un déséquilibre majeur à l'encontre les territoires.
Cela pose des problèmes de durabilité et de viabilité des développements de nos régions. Lors du Colloque, des élus ont fait part de leur peur de voir leurs villes se transformer en parcs d'attraction.
Le phénomène est observable dans d'autres régions en France.
TourMaG.com - Pourquoi organiser un colloque ?
Jean-Félix Acquaviva : L'objectif étant de faire une convergence entre plusieurs situations, un peu partout en France.
Nous voulions démontrer avec Xavier Roseren, député de la Haute-Savoie, que la problématique est nationale.
Nous avons fait ensuite le lien avec des élus basques, suite aux manifestations à Bayonne, puis des Bretons. Nous nous sommes dit que la spéculation foncière et immobilière est virale et qu'il fallait faire converger nos expériences.
De plus, je porte une proposition de loi que j'avais déjà portée l'année dernière. Elle avait été adoptée en commission des lois, mais elle n'a pas pu passer au vote.
Le 4 février 2022, la proposition de loi qui demande une expérimentation sur la Corse pour lutter contre la spéculation immobilière et foncière sera débattue à l'Assemblée nationale. Elle a des chances d'être adoptée en 1ère lecture.
Corse : "Les insulaires demandent des moyens pour limiter la dépossession qu'ils subissent"
"Nous devons réguler ce phénomène, nous ne voulons pas annihiler les résidences secondaires, mais de rééquilibrer leur présence sur nos territoires" selon Jean-Félix Acquaviva, député de la Haute-Corse - DR
TourMaG.com - Que proposez-vous dans ce projet de loi ?
Jean-Félix Acquaviva : Nous voulons renforcer un droit de préemption urbain en faveur de la collectivité de Corse, aussi bien pour des motifs d'intérêts généraux, comme le logement social, l'accessibilité, l'activité économique ou de service public.
Les communes sont parfois désemparées et démunies face au pouvoir de l'argent, nous souhaitons que la région les accompagne.
La collectivité lors de vente immobilière pourrait préempter, permettant de réguler les prix d'acquisitions en sa faveur et/ou de bloquer la vente si le prix est trop élevé.
C'est aussi un message qui est envoyé à la population et aux investisseurs.
Le financement de ce droit de préemption se fera par une taxe anti-spéculation. Il y a deux modalités de taxes, sur la valeur du bien immobilier, donc les résidences secondaires.
Une autre taxe serait sur la transaction et non la valeur du bien, à partir d'un certain seuil, à définir par décret, nous taxerons la plus-value de la transaction.
TourMaG.com - Vous n'êtes pas sans savoir que les élections présidentielles approchent et que le président de la République ne veut pas entendre parler de nouvelles taxes.
Jean-Félix Acquaviva : Le temps législatif est long, puis nous proposons une expérimentation dans un premier temps en Corse.
Je propose aussi deux autres mesures, dont l'une est d'élargir à toutes les communes de Corse, la capacité à pouvoir réglementer les locations saisonnières, à l'image de ce que font Paris, Lyon ou encore Marseille.
Dernier point, dans le Plan d'aménagement et de développement durable de la Corse (PADDUC) nous aimerions ajouter un 2e niveau d'espace stratégique économique et social.
Ces quatre mesures-là pourraient être expérimentées en Corse, avant une généralisation à d'autres territoires.
Après d'autres dispositifs pourraient être inscrits dans la Consitution, comme la création d'un statut de résident ou encore sur les droits de succession, pour éviter d'alimenter la bulle spéculative.
Jean-Félix Acquaviva : Nous voulons renforcer un droit de préemption urbain en faveur de la collectivité de Corse, aussi bien pour des motifs d'intérêts généraux, comme le logement social, l'accessibilité, l'activité économique ou de service public.
Les communes sont parfois désemparées et démunies face au pouvoir de l'argent, nous souhaitons que la région les accompagne.
La collectivité lors de vente immobilière pourrait préempter, permettant de réguler les prix d'acquisitions en sa faveur et/ou de bloquer la vente si le prix est trop élevé.
C'est aussi un message qui est envoyé à la population et aux investisseurs.
Le financement de ce droit de préemption se fera par une taxe anti-spéculation. Il y a deux modalités de taxes, sur la valeur du bien immobilier, donc les résidences secondaires.
Une autre taxe serait sur la transaction et non la valeur du bien, à partir d'un certain seuil, à définir par décret, nous taxerons la plus-value de la transaction.
TourMaG.com - Vous n'êtes pas sans savoir que les élections présidentielles approchent et que le président de la République ne veut pas entendre parler de nouvelles taxes.
Jean-Félix Acquaviva : Le temps législatif est long, puis nous proposons une expérimentation dans un premier temps en Corse.
Je propose aussi deux autres mesures, dont l'une est d'élargir à toutes les communes de Corse, la capacité à pouvoir réglementer les locations saisonnières, à l'image de ce que font Paris, Lyon ou encore Marseille.
Dernier point, dans le Plan d'aménagement et de développement durable de la Corse (PADDUC) nous aimerions ajouter un 2e niveau d'espace stratégique économique et social.
Ces quatre mesures-là pourraient être expérimentées en Corse, avant une généralisation à d'autres territoires.
Après d'autres dispositifs pourraient être inscrits dans la Consitution, comme la création d'un statut de résident ou encore sur les droits de succession, pour éviter d'alimenter la bulle spéculative.
"Les Insulaires demandent des moyens pour limiter la dépossession qu'ils subissent"
TourMaG.com - Vous avez l'air optimiste concernant le vote...
Jean-Félix Acquaviva : Je le suis plutôt, car elle a été adoptée en Commission des lois, par un large spectre de groupes comme le Modem, LREM ou encore les communistes.
Le projet a été voté contre l'avis même du gouvernement. S'il est voté dans les mêmes termes, alors il rentrera dans le champ d'application législatif, puis il sera inscrit au Sénat d'ici la fin de l'année 2022.
Je fais partie de la majorité politique de Gilles Simeoni, le président du Conseil exécutif de Corse.
Le gouvernement sait très bien que la lutte contre la spéculation foncière et immobilière fait partie de ce pour quoi nous avons été élus. Il n'est pas possible de toujours dire non, il est indispensable d'agir.
Au-delà de la majorité politique à laquelle j'appartiens, les forces d'opposition de la Collectivité de Corse sont sur la même base. Dans l'ensemble, les Insulaires demandent des moyens pour limiter la dépossession qu'ils subissent.
Dans certaines zones nous sommes passés au-delà du supportable, ce n'est même plus rouge, mais rouge incandescent.
Jean-Félix Acquaviva : Je le suis plutôt, car elle a été adoptée en Commission des lois, par un large spectre de groupes comme le Modem, LREM ou encore les communistes.
Le projet a été voté contre l'avis même du gouvernement. S'il est voté dans les mêmes termes, alors il rentrera dans le champ d'application législatif, puis il sera inscrit au Sénat d'ici la fin de l'année 2022.
Je fais partie de la majorité politique de Gilles Simeoni, le président du Conseil exécutif de Corse.
Le gouvernement sait très bien que la lutte contre la spéculation foncière et immobilière fait partie de ce pour quoi nous avons été élus. Il n'est pas possible de toujours dire non, il est indispensable d'agir.
Au-delà de la majorité politique à laquelle j'appartiens, les forces d'opposition de la Collectivité de Corse sont sur la même base. Dans l'ensemble, les Insulaires demandent des moyens pour limiter la dépossession qu'ils subissent.
Dans certaines zones nous sommes passés au-delà du supportable, ce n'est même plus rouge, mais rouge incandescent.