Après avoir soutenu le plan de sauvetage d'Air France, l'Etat est invité à en faire de même pour l'ensemble du pavillon français - Crédit photo : Depositphotos @Brasilnut
En fin de semaine dernière, Benjamin Smith, le patron canadien d'Air France, pouvait pousser un ouf de soulagement.
La compagnie nationale avait confirmation du soutien de l'Etat français, via son rôle de caution à hauteur de 90% de ses futurs emprunts, qui pourraient atteindre 7 milliards d'euros.
Une annonce qui n'en est pas vraiment une pour Jean-Pierre Sauvage, le président du Board of Airlines Representatives (BAR).
"C'était écrit. Plus aucun transporteur en Europe n'est en mesure d'honorer une quelconque facture dans l'immédiat, mais aussi sans doute dans un futur proche."
Avec une chute du trafic passagers estimée à 55% sur l'ensemble de l'année 2020 par l'Association internationale du transport aérien (IATA), comparée à l'exercice précédent, il était urgent d'agir, mais pas n'importe comment.
"La Direction ne voulait absolument pas de la nationalisation qui était alors vue comme la dernière des solutions possibles," précise un pilote d'Air France, ayant échangé avec l'état-major de la compagnie.
Si certains pestaient contre l'intervention du gouvernement pour une entreprise qui a déjà bénéficié de nombreuses aides, cette fois-ci, le soutien ne s'est pas fait directement dans les caisses du transporteur.
La compagnie nationale avait confirmation du soutien de l'Etat français, via son rôle de caution à hauteur de 90% de ses futurs emprunts, qui pourraient atteindre 7 milliards d'euros.
Une annonce qui n'en est pas vraiment une pour Jean-Pierre Sauvage, le président du Board of Airlines Representatives (BAR).
"C'était écrit. Plus aucun transporteur en Europe n'est en mesure d'honorer une quelconque facture dans l'immédiat, mais aussi sans doute dans un futur proche."
Avec une chute du trafic passagers estimée à 55% sur l'ensemble de l'année 2020 par l'Association internationale du transport aérien (IATA), comparée à l'exercice précédent, il était urgent d'agir, mais pas n'importe comment.
"La Direction ne voulait absolument pas de la nationalisation qui était alors vue comme la dernière des solutions possibles," précise un pilote d'Air France, ayant échangé avec l'état-major de la compagnie.
Si certains pestaient contre l'intervention du gouvernement pour une entreprise qui a déjà bénéficié de nombreuses aides, cette fois-ci, le soutien ne s'est pas fait directement dans les caisses du transporteur.
Vers une hécatombe à la fin de l'année 2020 ?
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"C'est un cadeau a minima.
En quelque sorte, le ministre dit à la compagnie : endettez-vous et nous vous aiderons dans cette action," précise Jean-Louis Baroux, l'ancien président d'APG (Air Promotion Group).
Etant donné le montant, le ver pourrait être dans le fruit, mais l'urgence de la situation nécessitait des sommes élevées, alors que chaque jour 25 millions d'euros partent en fumée.
Si les besoins ont été fixés, reste encore à la Direction à convaincre les établissements bancaires, surtout que les prochains mois ne s'annoncent pas des plus réjouissants...
"Le problème de trésorerie n'est pas tant maintenant que sur la fin de l'année, car les charges vont courir avec des recettes moindres puisque toutes les routes ne vont pas rouvrir," prédit Jean-Louis Baroux.
Observateur attentif de l'industrie aéronautique, il prédit un dernier trimestre 2020 extrêmement difficile pour le secteur, pour ne pas dire plus...
Un discours qui trouve aussi un écho particulier du côté du BAR. "Nous ne parlons pas d'une crise qui va s'étaler sur un mois ou deux, mais sans doute une année ou plus.
D'ailleurs, Benjamin Smith a bien dit qu'il ne verra pas un retour à la normale avant le printemps 2021."
Un laps de temps pendant lequel les entreprises du secteur vont devoir se serrer la ceinture, pour affronter une tempête qui s'annonce historique, avec en tête de liste : Air France.
En quelque sorte, le ministre dit à la compagnie : endettez-vous et nous vous aiderons dans cette action," précise Jean-Louis Baroux, l'ancien président d'APG (Air Promotion Group).
Etant donné le montant, le ver pourrait être dans le fruit, mais l'urgence de la situation nécessitait des sommes élevées, alors que chaque jour 25 millions d'euros partent en fumée.
Si les besoins ont été fixés, reste encore à la Direction à convaincre les établissements bancaires, surtout que les prochains mois ne s'annoncent pas des plus réjouissants...
"Le problème de trésorerie n'est pas tant maintenant que sur la fin de l'année, car les charges vont courir avec des recettes moindres puisque toutes les routes ne vont pas rouvrir," prédit Jean-Louis Baroux.
Observateur attentif de l'industrie aéronautique, il prédit un dernier trimestre 2020 extrêmement difficile pour le secteur, pour ne pas dire plus...
Un discours qui trouve aussi un écho particulier du côté du BAR. "Nous ne parlons pas d'une crise qui va s'étaler sur un mois ou deux, mais sans doute une année ou plus.
D'ailleurs, Benjamin Smith a bien dit qu'il ne verra pas un retour à la normale avant le printemps 2021."
Un laps de temps pendant lequel les entreprises du secteur vont devoir se serrer la ceinture, pour affronter une tempête qui s'annonce historique, avec en tête de liste : Air France.
Une réforme inévitablement destructrice d'emplois pour Air France ?
Une réforme est dans les tuyaux. Même si les grandes lignes n'ont pas été révélées, quelques informations ont fuité et malheureusement ce qui était annoncé depuis un moment devrait se réaliser : HOP est-elle vouée à disparaître ?
"Ce n'est pas encore acté, mais il est fort probable que HOP supporte les plus gros efforts, avec à l'avenir une redistribution des lignes en faveur de Transavia," nous explique le pilote de la compagnie.
La filiale à bas coûts du groupe franco-néerlandais ressortirait alors renforcée de la crise, mais avec à sa charge le rôle de rendre rentables des lignes qui ne l'étaient pas en raison d'un coût par siège trop élevé pour HOP.
Et pour les liaisons qui ne dégageraient pas d'argent malgré le changement de pavillon, la sentence sera radicale, avec un arrêt des vols.
De plus, les rangs risquent de se clairsemer avec notamment des départs volontaires à la retraite pour éviter le coût d'éventuels licenciements, un gel des recrutements, alors que la rationalisation des avions devrait s'accélérer face à une concurrence européenne féroce, même si elle sortira grandement affaiblie par la crise, et des low cost dont le business pourrait repartir plus rapidement que les majors (dont les principaux atouts sont les destinations long-courriers).
Une réforme qui s'annonce difficile donc, mais inévitable car la voilure doit être réduite, d'une façon ou d'une autre.
"Air France est incapable d'afficher sur le marché des prix de vente conformes à ses prix de revient. Tant que la compagnie voudra jouer sur le même registre que les low cost, ça ne marchera pas," prédit Jean-Louis Baroux.
Si l'industrie se prépare à perdre quelques élèves et sans doute pas les meilleurs, l'aérien pourrait aussi retrouver son juste prix et la vraie valeur des billets d'avion, jusque-là dopés par des aides étatiques ou régionales.
D'ailleurs les infrastructures de ces dernières craignent une nouvelle fois d'être oubliées, à l'image de l'aéroport Marseille Provence qui demande au gouvernement de ne pas oublier la province.
"L'économie de la France ce n'est pas que Paris, il n'y a pas qu'ADP. Les aéroports régionaux sont vitaux", martelait vindicatif Philippe Bernand, le président du directoire de l'aéroport marseillais, la semaine dernière.
"Ce n'est pas encore acté, mais il est fort probable que HOP supporte les plus gros efforts, avec à l'avenir une redistribution des lignes en faveur de Transavia," nous explique le pilote de la compagnie.
La filiale à bas coûts du groupe franco-néerlandais ressortirait alors renforcée de la crise, mais avec à sa charge le rôle de rendre rentables des lignes qui ne l'étaient pas en raison d'un coût par siège trop élevé pour HOP.
Et pour les liaisons qui ne dégageraient pas d'argent malgré le changement de pavillon, la sentence sera radicale, avec un arrêt des vols.
De plus, les rangs risquent de se clairsemer avec notamment des départs volontaires à la retraite pour éviter le coût d'éventuels licenciements, un gel des recrutements, alors que la rationalisation des avions devrait s'accélérer face à une concurrence européenne féroce, même si elle sortira grandement affaiblie par la crise, et des low cost dont le business pourrait repartir plus rapidement que les majors (dont les principaux atouts sont les destinations long-courriers).
Une réforme qui s'annonce difficile donc, mais inévitable car la voilure doit être réduite, d'une façon ou d'une autre.
"Air France est incapable d'afficher sur le marché des prix de vente conformes à ses prix de revient. Tant que la compagnie voudra jouer sur le même registre que les low cost, ça ne marchera pas," prédit Jean-Louis Baroux.
Si l'industrie se prépare à perdre quelques élèves et sans doute pas les meilleurs, l'aérien pourrait aussi retrouver son juste prix et la vraie valeur des billets d'avion, jusque-là dopés par des aides étatiques ou régionales.
D'ailleurs les infrastructures de ces dernières craignent une nouvelle fois d'être oubliées, à l'image de l'aéroport Marseille Provence qui demande au gouvernement de ne pas oublier la province.
"L'économie de la France ce n'est pas que Paris, il n'y a pas qu'ADP. Les aéroports régionaux sont vitaux", martelait vindicatif Philippe Bernand, le président du directoire de l'aéroport marseillais, la semaine dernière.
Les autres compagnies aériennes françaises seront-elles les oubliées de la crise ?
Avec ce soutien affiché à la compagnie nationale, le Gouvernement risque d'ouvrir dans le même temps la boîte de Pandore des Prêts Garantis par l'Etat (PGE) que peuvent légitimement réclamer aussi les concurrentes sur les tarmacs français.
"Elles sont toutes aussi éligibles aux PGE qu'Air France, en fonction de leurs besoins à savoir sur minimum deux ans, afin de se projeter sur la durée de la crise," analyse le patron du BAR.
Que ce soit Corsair, Air Caraïbes, ASL Airlines ou encore des transporteurs plus modestes comme Twin Jet ou Chalair, les syndicats demandent au gouvernement de ne pas oublier les autres transporteurs arborant le pavillon français.
Le SCARA va même plus loin en chiffrant les besoins à un milliard d'euros pour les compagnies aériennes, pour préparer l'avenir en renouvelant leurs flottes.
"L'Etat ne doit pas créer une politique particulièrement favorable à Air France parce qu'il est son actionnaire. Il y a d'autres opérateurs qu'il ne faudrait pas oublier," conseille Jean-Pierre Sauvage.
Une équité de traitement souhaitée aussi par Jean-Louis Baroux et attaquée par... Michael O’Leary, le patron de Ryanair. Ce dernier menace de poursuivre en justice toutes les compagnies ayant reçu des aides.
Une attaque acerbe qui ferait presque rire jaune l'ancien patron d'APG. "La DGCCRF (Direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes, ndlr) devrait porter plainte contre cette compagnie pour ventes à perte.
Qu'il se plaigne, il doit aussi s'imaginer qu'il peut y avoir un retour de bâton."
Au lieu de se déchirer, alors que l'opération de survie vient juste d'être lancée, le transport aérien devrait plutôt essayer d'afficher une solidarité de façade, surtout à l'heure où le déconfinement approche.
"Elles sont toutes aussi éligibles aux PGE qu'Air France, en fonction de leurs besoins à savoir sur minimum deux ans, afin de se projeter sur la durée de la crise," analyse le patron du BAR.
Que ce soit Corsair, Air Caraïbes, ASL Airlines ou encore des transporteurs plus modestes comme Twin Jet ou Chalair, les syndicats demandent au gouvernement de ne pas oublier les autres transporteurs arborant le pavillon français.
Le SCARA va même plus loin en chiffrant les besoins à un milliard d'euros pour les compagnies aériennes, pour préparer l'avenir en renouvelant leurs flottes.
"L'Etat ne doit pas créer une politique particulièrement favorable à Air France parce qu'il est son actionnaire. Il y a d'autres opérateurs qu'il ne faudrait pas oublier," conseille Jean-Pierre Sauvage.
Une équité de traitement souhaitée aussi par Jean-Louis Baroux et attaquée par... Michael O’Leary, le patron de Ryanair. Ce dernier menace de poursuivre en justice toutes les compagnies ayant reçu des aides.
Une attaque acerbe qui ferait presque rire jaune l'ancien patron d'APG. "La DGCCRF (Direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes, ndlr) devrait porter plainte contre cette compagnie pour ventes à perte.
Qu'il se plaigne, il doit aussi s'imaginer qu'il peut y avoir un retour de bâton."
Au lieu de se déchirer, alors que l'opération de survie vient juste d'être lancée, le transport aérien devrait plutôt essayer d'afficher une solidarité de façade, surtout à l'heure où le déconfinement approche.
Une reprise des vols qui tardent à se dessiner...
Si le ciel européen s'écharpe, au sol, les citoyens envisagent un lent retour à la vie normale.
"J'aimerais que nous ayons une ou des dates pour la reprise des vols, tout du moins dans le ciel français. Jean-Baptiste Djebbari, le secrétaire d'État chargé des Transports, distille des bonnes paroles, mais je ne vois pas d'action," s'agace l'ancien président d'APG.
Alors que le déconfinement approche, que les restaurateurs et les hôteliers militent pour une réouverture la plus rapide possible, les avions restent pour le moment stockés dans des hangars fermés à double tour.
"Il faut se mouiller un peu. Le gouvernement est élu pour prendre des décisions, qu'il décide !"
Une date pourrait être annoncée prochainement, selon Jean-Pierre Sauvage, puisque les ministres des Transports européens sont invités à se rencontrer virtuellement mercredi prochain, en dépit d'un "consensus jamais facile à trouver" en Europe.
Une chose est sûre, les vols long-courriers ne devraient pas reprendre du service prochainement, en raison d'une pandémie qui pourrait continuer à circuler sur bien des continents.
"Je ne m'attends pas à une réelle reprise avant l'automne 2020, ainsi de nombreux pilotes et co-pilotes vont devoir repasser au simulateur avant de revoler.
Or, les simulateurs ne sont plus utilisés pour l’instant, le temps de trouver la meilleure façon de les utiliser sans risques sanitaires?" se désole le pilote de la compagnie nationale.
En effet, pour maintenir la qualification, il est nécessaire d'avoir assuré pour les équipes de vols, trois atterrissages et trois décollages, lors des trois derniers mois, une chose impossible depuis la mi-mars.
"Nous pourrions ne plus avoir droit de revoler, surtout que dans le même temps nous ne pouvons plus passer sur les simulateurs."
Une complexité dans les cockpits qui devraient se retrouver au sol, car le secteur va devoir aussi s'adapter pour rassurer les clients quant à un risque de contamination nul.
En somme, l'aérien se retrouve avec une équation aux multiples inconnues, dont le résultat est loin d'être connu.
"Est-ce que le monde d'après sera similaire au monde d'avant ? Je n'en sais rien, mais je veux être optimiste, car le transport aérien s'est toujours relevé", prie à voix haute Jean-Pierre Sauvage.
"J'aimerais que nous ayons une ou des dates pour la reprise des vols, tout du moins dans le ciel français. Jean-Baptiste Djebbari, le secrétaire d'État chargé des Transports, distille des bonnes paroles, mais je ne vois pas d'action," s'agace l'ancien président d'APG.
Alors que le déconfinement approche, que les restaurateurs et les hôteliers militent pour une réouverture la plus rapide possible, les avions restent pour le moment stockés dans des hangars fermés à double tour.
"Il faut se mouiller un peu. Le gouvernement est élu pour prendre des décisions, qu'il décide !"
Une date pourrait être annoncée prochainement, selon Jean-Pierre Sauvage, puisque les ministres des Transports européens sont invités à se rencontrer virtuellement mercredi prochain, en dépit d'un "consensus jamais facile à trouver" en Europe.
Une chose est sûre, les vols long-courriers ne devraient pas reprendre du service prochainement, en raison d'une pandémie qui pourrait continuer à circuler sur bien des continents.
"Je ne m'attends pas à une réelle reprise avant l'automne 2020, ainsi de nombreux pilotes et co-pilotes vont devoir repasser au simulateur avant de revoler.
Or, les simulateurs ne sont plus utilisés pour l’instant, le temps de trouver la meilleure façon de les utiliser sans risques sanitaires?" se désole le pilote de la compagnie nationale.
En effet, pour maintenir la qualification, il est nécessaire d'avoir assuré pour les équipes de vols, trois atterrissages et trois décollages, lors des trois derniers mois, une chose impossible depuis la mi-mars.
"Nous pourrions ne plus avoir droit de revoler, surtout que dans le même temps nous ne pouvons plus passer sur les simulateurs."
Une complexité dans les cockpits qui devraient se retrouver au sol, car le secteur va devoir aussi s'adapter pour rassurer les clients quant à un risque de contamination nul.
En somme, l'aérien se retrouve avec une équation aux multiples inconnues, dont le résultat est loin d'être connu.
"Est-ce que le monde d'après sera similaire au monde d'avant ? Je n'en sais rien, mais je veux être optimiste, car le transport aérien s'est toujours relevé", prie à voix haute Jean-Pierre Sauvage.