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Turquie : "Il n'y a pas de tourisme là où il n'y a pas d'agences de voyages" selon le président de TURSAB

En Turquie, le tourisme ne rapporte plus, mais l'Etat n'a pas promulgué l'avoir ou le bon à-valoir


Avec la pandémie mondiale de coronavirus, l'industrie touristique dans son ensemble a été touchée, sans distinction de continents, de pays ou de frontières. Parce que la crise s'annonce durable et profonde, nous vous proposons de prendre de la hauteur et de faire un tour du côté de nos voisins européens ou au-delà. Aujourd'hui, direction la Turquie, où TURSAB souffle le chaud et le froid sur l'industrie touristique. Rencontre avec Firuz Bağlıkaya, le président de TURSAB qui a su faire interdire Booking.com.


Rédigé par le Mardi 6 Octobre 2020

En Turquie malgré les aides étatiques, l'industrie touristique reste sinistrée et TURSAB se débat pour pousser le gouvernement à faire plus pour sauver les agents de voyages - Crédit photo : TURSAB
En Turquie malgré les aides étatiques, l'industrie touristique reste sinistrée et TURSAB se débat pour pousser le gouvernement à faire plus pour sauver les agents de voyages - Crédit photo : TURSAB
Le voyage est un intérêt, s'il faut le rappeler après être resté plus de 6 mois enfermé en France, c'est de rencontrer des personnes relativement éloignées de notre quotidien.

Et l'un de ces moments particuliers s'est produit il y a un an en Cappadoce, dans le centre de la Turquie. A cette époque, pas si lointaine croyez moi, les EDV Centre Est y tenaient leur convention.

Lors d'un repas entre deux feuilles de vigne farcies, les agents de voyages faisaient la connaissance de TURSAB. Un puissant syndicat qui a su faire mordre la poussière à l'une des plus grandes plateforme du secteur.

A lire : Turquie : qui est TURSAB, le syndicat des AGV qui a fait interdire Booking ?

Malgré que le site de Booking.com soit traduit dans 43 langues et propose plus de 29 millions d’hébergements dans plus de 145 000 destinations, réparties dans 229 pays et territoires, il existe un petit village d'irréductibles, où son existence a été rayée des lignes de code : la Turquie.

Sauf que ce coup de maitre est à reléguer dans les tableaux de chasse d'un passé radieux et qui parait bien lointain maintenant. La covid 19 est passée par là et tout comme en France, puissance et pouvoir autoritaire n'y font rien, le tourisme trépasse.

"Le nombre de visiteurs étrangers a diminué de 76%.

La perte sur le marché intérieur a également suivi une évolution similaire et la perte opérationnelle totale des agences de voyages a été enregistrée à plus de 80%,
" nous confie Firuz Bağlıkaya, le président de TURSAB.

Pas d'ordonnance, ni de bon en Turquie, mais un remboursement selon les décisions des Etats

Il faut dire que la distribution est encore forte dans le pays qui compte environ 10 000 agences. Un nombre arrêté pour rendre ses lettres de noblesse à la profession, sauf que la pandémie se moque bien des désidératas des humains.

"Nous nous sommes basés sur les licences de taxi ou celle des licences d'alcool en France. Cela confère une réelle valeur à l'immatriculation.

Un agent quand il veut revendre son agence est sûr de toucher au minimum le coût de sa licence,
" expliquait, il y a Nurten Keskin Rollier, une conseillère du syndicat.

Fragilisé par des frontières fermées et une incertitude croissante, le tissu des points de vente a été largement chahuté par des ventes en berne, mais pas seulement.

Là bas, le bon à valoir n'a pas existé, si le gouvernement a pris conscience de l'urgence de la situation, les professionnels ont dû rembourser...les clients !

En cas d'annulation de voyages à forfait comprenant le transport aérien, soit par l'agence de voyages, soit par le consommateur, une politique particulière a été mise en place.

"Il a été décidé que les remboursements des paiements de transport aérien seraient effectués par les agences de voyages dans les 14 jours, à partir de la date symbolisant les deux mois de la levée des interdictions de vols," déplore le responsable des professionnels du tourisme.

Ainsi si un pays lève ses interdictions de voyage envers les ressortissants Turcs en janvier 2021, alors l'agence devra rembourser ses clients courant mars 2021.

S'il n'existe pas de peur du mur des remboursements qui se rapproche dangereusement, cette mesure oblige les professionnels du tourisme à être branchés 24H/24 sur le site du ministère des Affaires étrangères.


Si cela parait compliqué, cette décision est une victoire pour TURSAB car il permet de préserver la trésorerie des agences de voyages , mais aussi de diluer les remboursements dans le temps.

Et pour stopper l'hémorragie des dépenses, le syndicat a obtenu le report de l'impôt sur les sociétés jusqu'au début du mois de juin, mais aussi des primes d'assurance sociale, de retenue à la source et de TVA pendant 6 mois et les remboursements du principal prêt pendant 3 mois.

Malgré les aides étatiques, l'industrie touristique reste sinistrée

Une opération survie qui a permis aux agences de souffler, mais aussi d'engranger quelques contrats, puisque les turcs ont été invités, comme en France, à rester au pays durant l'été passé.

Sauf qu'avec un salaire moyen de 811 euros par mois en 2016 et des installations touristiques de luxe tournées vers la clientèle étrangère, l'Etat a dû donner un coup de pousse pour permettre la réservation de vacances.

"Le nombre de versements pour régler les voyages à forfait nationaux a été porté à 18 mois. Outre cette pratique qui facilite les paiements de nos citoyens qui souhaitent partir en vacances, des prêts vacances sont proposés par les banques d'État," se félicite Firuz Bağlıkaya.

Une initiative ayant permis d'engendrer quelques ventes, mais pas de quoi faire tenir tout l'écosystème touristique d'un pays.

"Depuis le début du mois de juin, il y a eu une activité lente au niveau du tourisme intérieur en Turquie.

Celle-ci a été boostée par la reprise du tourisme international à partir de juillet, il y a eu un afflux de touristes en provenance de grands marchés comme l'Ukraine, le Royaume-Uni, l'Allemagne et la Russie.

Cependant, le nombre de visiteurs de ces marchés est bien en deçà des niveaux des saisons estivales des années précédentes,
se désole le président de TURSAB.

Alors que les bonnes années, près de 40 millions de visiteurs se bousculent dans les ruines antiques d'Ankara, sur les berges du Bosphore à Istanbul ou encore sur le sable fin de Bodrum, ils n'étaient sur les 8e mois de l'année que 7,2 millions.

Un manque à gagner direct que nul n'a pu boucher.

Un chômage partiel qui s'arrête le 31 octobre 2020... la crainte d'une fuite des compétences

A l'orée d'un automne qui s'annonce comme meurtrier en France, dans le secteur du tourisme, à plusieurs milliers de kilomètres de chez nous, la situation n'est pas plus reluisante.

"Il n'y a pas de tourisme là où il n'y a pas d'agences de voyages.

Nous sommes confrontés à des pertes d'emplois importantes. Notre puissance humaine est la plus grande arme de notre industrie, nous ne devons pas la perdre,
" souhaite Firuz Bağlıkaya, le président de TURSAB.

Et pour sauver les fondations du tourisme, les aides pondues au début de la crise sanitaire devront très rapidement être réajustées et customisées, pour faire face à l'étendue des dégâts.

Ainsi, une allocation pour les emplois de courte durée, sorte de chômage partiel local, a été mise en place et prolongée jusqu'à la fin du mois d'octobre. De plus, les frais annuels d'adhésion 2020, qui sont tenus par la loi, ont été annulés à l'ensemble des agences de voyages.

Cela ne suffit plus, le responsable du syndicat invite le gouvernement à aller plus.

"Il est essentiel que des possibilités de prêt à long terme et facilement accessibles, des programmes d'aide à l'emploi et des subventions soient fournis, comme le montrent les exemples disponibles dans le monde entier.

En outre, la mise en place de bons de voyage pour nos citoyens soutiendrait le tourisme intérieur.
"

La crainte est non seulement de voir l'industrie connaître une hécatombe historique, mais aussi que les talents se détournent durablement d'un secteur sans avenir.

"Une baisse du personnel qualifié constitue l'un des plus grands risques pour l'avenir du secteur du tourisme.

Par conséquent, les programmes d'aide à l'emploi qui seront fournis par le gouvernement revêtent une grande importance,
" implorait presque le patron des professionnels du tourisme.

Alors qu'il y a un an TURSAB a su faire plier Booking, le syndicat fait face cette fois-ci à un autre gros morceau pour sauver ses adhérents... l'Etat turc. Et ce n'est malheureusement pas le plus tendre.

Retrouvez les autres papiers sur les syndicats des agents de voyages à travers le monde :


Romain Pommier Publié par Romain Pommier Journaliste - TourMaG.com
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