En redressement judiciaire, quel avenir pour TourisTra ?

TourMaG.com - Nous avons appris que TourisTra connaissait quelques difficultés. L'entreprise a été placée en redressement judiciaire, avec une date de cessation des paiements fixée le 4 septembre 2023. Quelle est la situation de TourisTra ?

Pierre Touchet : Elle est simple et similaire à beaucoup d'acteurs du tourisme.

Après deux années de covid, nous rencontrons des difficultés de trésorerie.

Par précaution, nous avons fait appel à la prévention des difficultés d'une entreprise, en nous mettant sous la protection du Tribunal de Commerce de Paris, dans le cadre de la procédure dite de redressement judiciaire.

Celle-ci est en cours, elle va permettre d'élaborer un plan de continuation de l'activité, pour retrouver les équilibres économiques afin de faire face à nos difficultés, en étalant les dettes.

TourMaG.com - Un redressement qui fait suite à une procédure de sauvegarde en 2018...

Pierre Touchet : L'entreprise est sortie de cette période avec un plan de continuation, tout à fait réaliste et crédible.

Derrière nous avons été frappés de plein fouet par la pandémie. Nos activités ont été totalement stoppées. Nous avons bénéficié d'un certain nombre d'aides de l'Etat, mais qui n'étaient pas suffisantes pour offrir un bol d'air à notre trésoreries.

TourMaG.com - Vous pensez pouvoir sortir de ce redressement de façon positive ?

Pierre Touchet : Quand on sollicite un redressement judiciaire, c'est forcément pour trouver une solution.

Après le Tribunal de Commerce aurait très bien pu prononcer immédiatement la liquidation judiciaire, s'il pensait qu'il n'y avait aucune solution. La première période d'observation se termine fin mars et peut être renouvelée de 6 mois jusque fin septembre 2024.

Je ne peux pas préjuger de l'issue de la procédure. Quand ils auront bâti les éléments de la restructuration et négocié les dettes avec les créanciers, alors je pense que nous ressortirons avec un plan de continuation.

Les créanciers n'ont pas trop le choix, d'accepter les étalements qui leur seront proposés, sinon cela pourrait passer par la liquidation, une situation où ils risqueraient de tout perdre.

TourMaG.com - L'entreprise est ressortie de la crise sanitaire avec les mêmes contours ?

Pierre Touchet : Le nombre de villages vacances est resté inchangé.

Tous les salariés sont sur le pont. L'activité se poursuit et nous nous préparons à accueillir nos voyageurs. Nous ouvrirons tous nos villages cet hiver le 23 décembre 2023.

TourMaG.com - Au début du mois d'octobre, le parti Communiste appelait l'APST à jouer "pleinement son rôle de garantie financière auprès notamment du secteur du tourisme social dont Touristra est un acteur majeur". Malheureusement l'APST a suspendu sa garantie le 17 octobre 2023 ce qui vous empêche de vendre des circuits...

Pierre Touchet : Pas exactement, cette suspension de garantie est imputée pour une période donnée par le redressement judiciaire. L'APST nous a demandé des contre-garanties.

Nous sommes en train de répondre favorablement aux exigences de la caisse de garantie, donc nous devrions recouvrer notre garantie dans les 10 jours.

Depuis le dépôt de bilan de Thomas Cook, l'APST a imposé des conditions plus drastiques, pour obtenir ou maintenir la garantie financière à une entreprise. Cela dépend de l'analyse des risques qu'ils font et en fonction, ils demandent des contre-garanties.

L'APST a rajouté de la difficulté à la difficulté, mais nous allons répondre favorablement à sa demande. Cette opération pour apporter la contre-garantie a été réalisée sous l'égide des administrateurs judiciaires, ils l'ont validée.

Malheureusement l'affaire a pris un peu plus de temps qu'espéré, d'où la cessation de garantie.

TourMaG.com - Cette dette est-elle liée à la souscription d'un PGE ?

Pierre Touchet : Nous étions au début de la crise sanitaire en situation de sauvegarde, donc nous n'avions pas pu bénéficier de cette aide. Les lois européennes s'appliquaient sur ce genre de soutien étatique.

Ceux qui n'avaient pas besoin de PGE ont pu en bénéficier, mais par contre ceux qui en avaient besoin n'ont pas pu souscrire de prêt garanti par l'Etat.

Si nous avions eu un PGE, à hauteur de 30 ou 50% de notre chiffre d'affaires, comme d'autres acteurs du tourisme, nous ne serions pas en redressement judiciaire. Nous pourrions alors faire face à nos difficultés actuelles.

C'est un peu le cumul des peines.

TourMaG.com - En 2022, TourisTra sortait d'un bon exercice ?

Pierre Touchet : Nous avons presque totalement retrouvé sur nos villages-vacances basés en France, le chiffre d'affaires de 2019. Après nous avons subi la hausse des prix en tout genre, de l'énergie ou encore de l'alimentaire, qui vient altérer notre bilan.

Par contre sur les activités à l'international, ce n'est pas le cas, avec des pays entiers fermés.

TourMaG.com - Êtes-vous à la recherche de capitaux ?

Pierre Touchet : Ce n'est pas à l'ordre du jour.

Aujourd'hui, nous en sommes là, mais pour être en contact avec beaucoup d'autres acteurs du tourisme social, la situation n'est pas vraiment reluisante un peu partout.

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Etant en redressement, notre situation est publiquement connue, mais j'ai bien peur que d'autres nous rejoignent.

TourMaG.com - Le tourisme social a grandement souffert de la crise sanitaire en raison de son essence même. Les acteurs ont des trésoreries bien moins robustes que d'autres entreprises du secteur...

Pierre Touchet : Je ne sais pas si je dirais ça, je vous invite à regarder le cas de Pierre & Vacances.

L'entreprise a du bénéficier d'un PGE de 480 millions d'euros, donc les fonds propres n'ont pas vraiment permis de faire face à la situation.