La Covid a tout changé et la demande de transport même stimulée, ne pourra pas, au moins pendant les prochaines années, occuper l’offre qui a été créée pendant la période de grand développement. - Depositphotos.com keport
Le « Yield Management » a fait la croissance du transport aérien depuis sa mise en opération en 1984 par la compagnie Delta Air Lines sous l’égide d’un certain Robert Cross.
C’était la suite logique du « Deregulation Act » signé en 1978 par le Président Carter. On était à une époque de grand développement et ce système n’y a pas été pour rien. En fait il partait du constat que la demande pouvait être stimulée presque à l’infini à condition qu’elle trouve une offre correspondante.
Faut-il rappeler que la décennie 1980 a vu la généralisation des avions gros porteurs : Boeing 747, DC 10 et Lookheed Tristars voire Airbus A300, et l’entrée en service des nouveaux bimoteurs très performants Airbus 320 et Boeing 737 de nouvelle génération. Donc l’offre pouvait devenir pléthorique.
Alors il suffisait d’ajuster la demande. Et pour cela, le transport aérien n’a rien trouvé de mieux que d’utiliser les tarifs jusqu’à vendre les derniers sièges vides à très bas prix, partant du principe qu’un siège vide ne peut pas se stocker et qu’il ne vaut dès lors quasiment plus rien. Mieux vaut alors une recette minime que rien du tout.
C’était la suite logique du « Deregulation Act » signé en 1978 par le Président Carter. On était à une époque de grand développement et ce système n’y a pas été pour rien. En fait il partait du constat que la demande pouvait être stimulée presque à l’infini à condition qu’elle trouve une offre correspondante.
Faut-il rappeler que la décennie 1980 a vu la généralisation des avions gros porteurs : Boeing 747, DC 10 et Lookheed Tristars voire Airbus A300, et l’entrée en service des nouveaux bimoteurs très performants Airbus 320 et Boeing 737 de nouvelle génération. Donc l’offre pouvait devenir pléthorique.
Alors il suffisait d’ajuster la demande. Et pour cela, le transport aérien n’a rien trouvé de mieux que d’utiliser les tarifs jusqu’à vendre les derniers sièges vides à très bas prix, partant du principe qu’un siège vide ne peut pas se stocker et qu’il ne vaut dès lors quasiment plus rien. Mieux vaut alors une recette minime que rien du tout.
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La difficulté consistait à ne pas avoir de transfert de la clientèle prête à payer cher vers les offres à bas coût. C’est tout l’art du « Revenue Management ». Celui-ci s’appuie sur des techniques sophistiquées et une analyse fine des statistiques de trafic.
En gros en se basant sur les résultats passés, en les corrigeant des différences liées aux agendas des années de références : périodes de vacances, calendriers des fêtes et même de la météo, on peut prévoir avec de bonnes chances de succès la pression de la demande de transport et par conséquent quelle chance de remplir correctement les avions.
Pour ce faire, et compte tenu du succès immédiat du système, avec 3 millions de dollars de coût, Robert Cross a par exemple rapporté 300 millions de dollars à Delta Air Lines, les compagnies ont engagé une batterie impressionnante de cerveaux.
Et on a installé dans tous les grands opérateurs des salles entières dédiées au « Yield Management ». Chaque ligne, chaque réseau a eu son personnel dédié, capable de prévoir la pression sur l’offre de la compagnie. Et plus la pression est grande et plus la compagnie peut vendre des tarifs élevés.
C’est finalement élémentaire à comprendre mais beaucoup plus difficile à réaliser. Au fil du temps les logiciels se sont sophistiqués. Les ordinateurs sont devenus plus performants et les gestionnaires de mieux en mieux formés. Et petit à petit, tous les transporteurs y compris les « low costs », se sont mis à utiliser ce qui est devenu leur unique stratégie commerciale.
En gros en se basant sur les résultats passés, en les corrigeant des différences liées aux agendas des années de références : périodes de vacances, calendriers des fêtes et même de la météo, on peut prévoir avec de bonnes chances de succès la pression de la demande de transport et par conséquent quelle chance de remplir correctement les avions.
Pour ce faire, et compte tenu du succès immédiat du système, avec 3 millions de dollars de coût, Robert Cross a par exemple rapporté 300 millions de dollars à Delta Air Lines, les compagnies ont engagé une batterie impressionnante de cerveaux.
Et on a installé dans tous les grands opérateurs des salles entières dédiées au « Yield Management ». Chaque ligne, chaque réseau a eu son personnel dédié, capable de prévoir la pression sur l’offre de la compagnie. Et plus la pression est grande et plus la compagnie peut vendre des tarifs élevés.
C’est finalement élémentaire à comprendre mais beaucoup plus difficile à réaliser. Au fil du temps les logiciels se sont sophistiqués. Les ordinateurs sont devenus plus performants et les gestionnaires de mieux en mieux formés. Et petit à petit, tous les transporteurs y compris les « low costs », se sont mis à utiliser ce qui est devenu leur unique stratégie commerciale.
Le système s'est emballé
Seulement le système s’est emballé. La créativité des ingénieurs gestionnaires du « Revenue Management » est devenue illimitée et comme il fallait bien utiliser au mieux des cerveaux si bien faits, les compagnies leur ont laissé la bride sur le cou.
On a alors assisté à une inflation galopante du nombre de tarifs proposés sur un même vol et dans la même classe de service.
Il n’est pas rare de trouver plus de 100 tarifs sur un même vol, voire même dans la même partie de l’avion. Chaque tarif est bien entendu attaché à une réglementation spécifique, car il faut bien le démarquer des autres.
Le résultat a été une augmentation considérable du coefficient de remplissage. Une grande compagnie mondiale se doit d’afficher au moins 80 % de taux d’occupation sur une année complète ce qui signifie avoir plusieurs mois au-dessus de 90%.
Par voie de conséquence, les transporteurs ont eu besoin d’un tel niveau d’occupation pour rentabiliser leur exploitation et dégager un résultat net, très souvent au-dessous de 5%, ce qui reste très médiocre.
On a alors assisté à une inflation galopante du nombre de tarifs proposés sur un même vol et dans la même classe de service.
Il n’est pas rare de trouver plus de 100 tarifs sur un même vol, voire même dans la même partie de l’avion. Chaque tarif est bien entendu attaché à une réglementation spécifique, car il faut bien le démarquer des autres.
Le résultat a été une augmentation considérable du coefficient de remplissage. Une grande compagnie mondiale se doit d’afficher au moins 80 % de taux d’occupation sur une année complète ce qui signifie avoir plusieurs mois au-dessus de 90%.
Par voie de conséquence, les transporteurs ont eu besoin d’un tel niveau d’occupation pour rentabiliser leur exploitation et dégager un résultat net, très souvent au-dessous de 5%, ce qui reste très médiocre.
La Covid-19 a tout changé
Oui mais voilà, la Covid a tout changé et la demande de transport même stimulée, ne pourra pas, au moins pendant les prochaines années, occuper l’offre qui a été créée pendant la période de grand développement.
Ainsi, les transporteurs ne pourront pas, quelque soit la qualité des « Yield Manageurs » et leur performance pour créer des tarifs attractifs, ajuster la demande de manière à retrouver les coefficients de remplissage précédents. Alors il faudra faire autrement, d’autant plus qu’à cette demande déficiente, se rajoutera la pression écologique et son cortège de coûts afférents.
Le temps est peut-être venu de revenir aux fondamentaux, c’est-à-dire de rapprocher le prix du produit et du service proposés. Il faudra apprendre à rentabiliser les opérations aériennes avec des taux d’occupation proches de ceux que l’on connaissait dans les années 70, c’est-à-dire aux alentours de 70%. Les prix devront alors obligatoirement augmenter.
Peut-être va-t-on alors retrouver un mode marketing proche de celui qu’Air Inter avait en son temps créé avec les vols Bleus Blancs Rouges. Ils avaient au moins le mérite de la clarification. Et les « Yield Managers » abandonneront leur pouvoir tarifaire pour la plus grande satisfaction des commerciaux des compagnies qui retrouveront un peu de leur influence passée.
Ainsi, les transporteurs ne pourront pas, quelque soit la qualité des « Yield Manageurs » et leur performance pour créer des tarifs attractifs, ajuster la demande de manière à retrouver les coefficients de remplissage précédents. Alors il faudra faire autrement, d’autant plus qu’à cette demande déficiente, se rajoutera la pression écologique et son cortège de coûts afférents.
Le temps est peut-être venu de revenir aux fondamentaux, c’est-à-dire de rapprocher le prix du produit et du service proposés. Il faudra apprendre à rentabiliser les opérations aériennes avec des taux d’occupation proches de ceux que l’on connaissait dans les années 70, c’est-à-dire aux alentours de 70%. Les prix devront alors obligatoirement augmenter.
Peut-être va-t-on alors retrouver un mode marketing proche de celui qu’Air Inter avait en son temps créé avec les vols Bleus Blancs Rouges. Ils avaient au moins le mérite de la clarification. Et les « Yield Managers » abandonneront leur pouvoir tarifaire pour la plus grande satisfaction des commerciaux des compagnies qui retrouveront un peu de leur influence passée.
Jean-Louis Baroux est l'ancien président d'APG (Air Promotion Group) et le créateur du CAF (Cannes Airlines Forum) devenu le World Air Forum.
Grand spécialiste de l'aérien, il a signé aux éditions L'Archipel ''Compagnies Aériennes : la faillite du modèle'', un ouvrage que tous les professionnels du tourisme devraient avoir lu.
Les droits d'auteur de l'ouvrage seront reversés à une association caritative. On peut l'acquérir à cette adresse : www.editionsarchipel.com.
Grand spécialiste de l'aérien, il a signé aux éditions L'Archipel ''Compagnies Aériennes : la faillite du modèle'', un ouvrage que tous les professionnels du tourisme devraient avoir lu.
Les droits d'auteur de l'ouvrage seront reversés à une association caritative. On peut l'acquérir à cette adresse : www.editionsarchipel.com.