C’est là que nous naviguons en pleine absurdité : le site du tourisme vénitien tout à la joie d’être consulté, n’émet pas la moindre alerte sur les risques sanitaires courus par ses visiteurs - DR : DepositPhotos, sergioz
Premier point, j’ai toujours préféré aux réactions spontanées et aux écrits enflammés les analyses à froid basées sur une mise en perspective du passé, du présent et du futur, le tout sur un mode global.
Mais, aujourd’hui, bien que mon expérience n’ait aucune valeur statistique et ne constitue à ce stade qu’un témoignage de plus sur l’incohérence du monde dans lequel on vit et sur la schizophrénie à laquelle nous sommes réduits, je prends le risque de conter mes mésaventures de touriste lambda ayant décidé de séjourner quelques jours à Venise en cette fin de semaine du mois de mars 2020.
Ce qui veut dire qu’à l’époque désormais ancienne où le monde était serein et où les plus privilégiés pouvaient remplir leurs besaces de billets d’avion bon marché, j’ai acheté deux billets A/R vers la Sérénissime sur une compagnie low cost via un comparateur.
Je ne les citerai ni l’un ni l’autre, mais tout le monde devinera de qui il s’agit.
Mais, aujourd’hui, bien que mon expérience n’ait aucune valeur statistique et ne constitue à ce stade qu’un témoignage de plus sur l’incohérence du monde dans lequel on vit et sur la schizophrénie à laquelle nous sommes réduits, je prends le risque de conter mes mésaventures de touriste lambda ayant décidé de séjourner quelques jours à Venise en cette fin de semaine du mois de mars 2020.
Ce qui veut dire qu’à l’époque désormais ancienne où le monde était serein et où les plus privilégiés pouvaient remplir leurs besaces de billets d’avion bon marché, j’ai acheté deux billets A/R vers la Sérénissime sur une compagnie low cost via un comparateur.
Je ne les citerai ni l’un ni l’autre, mais tout le monde devinera de qui il s’agit.
Comme si rien n’affectait la vie de la Sérénissime...
Depuis 15 jours, les alertes se faisant de plus en plus pressantes et notre belle Italie commençant à montrer de sérieux signes de contagion, j’ai pensé qu’il était plus sage de renoncer à m’offrir le plaisir d’arpenter les ruelles vides de la destination la plus saturée du monde.
Notre compagnie ayant aussi annoncé annuler ses vols ou les rembourser, nous étions en phase. J’allais récupérer quelques euros ou pouvoir choisir une autre destination…
Eh bien non ! Tout cela aurait été trop facile, trop cohérent, trop professionnel !
Après des centaines de minutes d’attente sur un standard saturé vous renvoyant sur des sites Internet où vous passez d’autres interminables minutes à tenter de remplir un formulaire maladroit (ou malhonnête) qui prétend vous rembourser des taxes d’aéroport mais n’en fait rien ou « bugue », comme beaucoup de mes compagnons d’infortune, je renonce.
Dépitée, fatiguée et d’autant plus exaspérée que, plusieurs fois par jour sur ma boîte email, un robot très, très sot, pourtant dopé à l’Intelligence artificielle, m’envoie inlassablement des offres promotionnelles m’invitant à louer une voiture au meilleur prix, m’acheter un city pass, m’offrir un palace à un tarif exceptionnel…
Mieux, à l’heure où j’écris, le même petit robot me propose l’affaire de la journée « des vols pour Venise à 30 euros ! » Et m’invite à rajouter une valise dans mes bagages ! Comme si rien, vraiment rien n’affectait la vie de la Sérénissime !
Notre compagnie ayant aussi annoncé annuler ses vols ou les rembourser, nous étions en phase. J’allais récupérer quelques euros ou pouvoir choisir une autre destination…
Eh bien non ! Tout cela aurait été trop facile, trop cohérent, trop professionnel !
Après des centaines de minutes d’attente sur un standard saturé vous renvoyant sur des sites Internet où vous passez d’autres interminables minutes à tenter de remplir un formulaire maladroit (ou malhonnête) qui prétend vous rembourser des taxes d’aéroport mais n’en fait rien ou « bugue », comme beaucoup de mes compagnons d’infortune, je renonce.
Dépitée, fatiguée et d’autant plus exaspérée que, plusieurs fois par jour sur ma boîte email, un robot très, très sot, pourtant dopé à l’Intelligence artificielle, m’envoie inlassablement des offres promotionnelles m’invitant à louer une voiture au meilleur prix, m’acheter un city pass, m’offrir un palace à un tarif exceptionnel…
Mieux, à l’heure où j’écris, le même petit robot me propose l’affaire de la journée « des vols pour Venise à 30 euros ! » Et m’invite à rajouter une valise dans mes bagages ! Comme si rien, vraiment rien n’affectait la vie de la Sérénissime !
Impuissance, exaspération…
Josette Sicsic - DR
Parlons maintenant d’hôtellerie.
Autre mésaventure : toujours à l’époque bienheureuse d’hier, celle où le monde semblait tourner rond, je reçois une invitation à loger dans un palace de Murano à un prix défiant toute concurrence. Il est 2 heures du matin. Mon smartphone vibre de la joie de m’annoncer la bonne nouvelle.
L’offre est séduisante. Je réserve, ravie d’avoir mis à profit mes insomnies pour faire de bonnes affaires. Sept heures plus tard, patatras ! La radio nous apprend que le nord de l’Italie est contaminé !
Ahurie mais prudente, j’attends quelques jours la confirmation de l’information et cherche à annuler. Booking refuse. Normal. D’autant que le paiement a été encaissé alors que j’avais demandé de payer sur place !
Le palace en question, pourtant très à cheval sur l’excellence de ses relations clients, n’est guère plus coopératif. Il refuse aussi.
Il faudra donc beaucoup de patience et de ténacité pour que, après avoir envoyé un courrier personnalisé évoquant en dernière ligne mon petit statut de journaliste, on me promette à titre exceptionnel, de rembourser ma chambre !
C’est dire combien de malheureux n’auront pas cette chance et verront s’évaporer dans les coffres d’une multinationale leur petit budget vacances. Est-ce bien normal ? Non.
Autre mésaventure : toujours à l’époque bienheureuse d’hier, celle où le monde semblait tourner rond, je reçois une invitation à loger dans un palace de Murano à un prix défiant toute concurrence. Il est 2 heures du matin. Mon smartphone vibre de la joie de m’annoncer la bonne nouvelle.
L’offre est séduisante. Je réserve, ravie d’avoir mis à profit mes insomnies pour faire de bonnes affaires. Sept heures plus tard, patatras ! La radio nous apprend que le nord de l’Italie est contaminé !
Ahurie mais prudente, j’attends quelques jours la confirmation de l’information et cherche à annuler. Booking refuse. Normal. D’autant que le paiement a été encaissé alors que j’avais demandé de payer sur place !
Le palace en question, pourtant très à cheval sur l’excellence de ses relations clients, n’est guère plus coopératif. Il refuse aussi.
Il faudra donc beaucoup de patience et de ténacité pour que, après avoir envoyé un courrier personnalisé évoquant en dernière ligne mon petit statut de journaliste, on me promette à titre exceptionnel, de rembourser ma chambre !
C’est dire combien de malheureux n’auront pas cette chance et verront s’évaporer dans les coffres d’une multinationale leur petit budget vacances. Est-ce bien normal ? Non.
Tutti a casa !
Mais, le pire c’est que, les mêmes opérateurs n’ont aucunement l’intention de désarmer devant ce petit virus qui, à l’heure où j’écris cet article, a déjà contaminé quelque 7 000 personnes, en a tué près de 400, provoqué des mutineries dans quelques prisons et mis à l’isolement toute la population de notre belle voisine.
En effet, et c’est là que nous naviguons en pleine absurdité, le site du tourisme vénitien tout à la joie d’être consulté, n’émet pas la moindre alerte sur les risques sanitaires courus par ses visiteurs.
Le site national du tourisme italien, non plus. Il nous invite au contraire à venir découvrir les vignobles de Prosecco, Parme, ville européenne de la culture en 2020, de grandes expositions alors que les musées sont fermés, la douceur de la Toscane, etc.
Quant aux OTA, à peine les avez-vous effleurées pour parfaire votre enquête, qu’elles cherchent à vous vendre toujours aussi allègrement tous les billets que vous souhaitez et ne souhaitez pas acquérir… pour Milan, Venise, Rome et autre Bologne.
Le plus souvent sans la moindre mention du virus qui fait trembler l’économie et la tranquillité de la planète !
Idem d’ailleurs du côté de nombreux sites touristiques à l’exception du Japon, de la Corée du Sud (et sans doute d’autres) qui prennent la précaution d’évoquer la pandémie et la position adoptée par la destination par rapport aux risques qui la menacent.
En effet, et c’est là que nous naviguons en pleine absurdité, le site du tourisme vénitien tout à la joie d’être consulté, n’émet pas la moindre alerte sur les risques sanitaires courus par ses visiteurs.
Le site national du tourisme italien, non plus. Il nous invite au contraire à venir découvrir les vignobles de Prosecco, Parme, ville européenne de la culture en 2020, de grandes expositions alors que les musées sont fermés, la douceur de la Toscane, etc.
Quant aux OTA, à peine les avez-vous effleurées pour parfaire votre enquête, qu’elles cherchent à vous vendre toujours aussi allègrement tous les billets que vous souhaitez et ne souhaitez pas acquérir… pour Milan, Venise, Rome et autre Bologne.
Le plus souvent sans la moindre mention du virus qui fait trembler l’économie et la tranquillité de la planète !
Idem d’ailleurs du côté de nombreux sites touristiques à l’exception du Japon, de la Corée du Sud (et sans doute d’autres) qui prennent la précaution d’évoquer la pandémie et la position adoptée par la destination par rapport aux risques qui la menacent.
Déni, intox, impuissance
Au royaume d’Ubu, il y a pire. Dans la seule revue de presse italienne du 9 mars, les articles consacrés à la situation italienne ne manquent pas d’alarmer l’opinion sur une situation incontrôlée et incontrôlable. Alors (soyons brefs), de trois choses l’une :
- d'une part, l’industrie touristique s’effondre, mais une partie des opérateurs veulent continuer de faire bonne figure, et donner l’impression que tout va bien pour ne pas dissuader un voyageur inquiet. C’est ce que l’on appelle le déni.
- d'autre part, la presse en fait trop, satisfaite d’avoir trouvé un sujet aussi inépuisable, alarmiste et spectaculaire… c’est ce que l’on appelle de l’intox.
- enfin, troisième solution, nul (surtout pas les politiques) ne sait où va notre tout petit monde et chacun poursuit son chemin en fonction de ses intérêts. Et nous, petits touristes mortels, nous ne savons pas à quelle absence totale de saints nous vouer. Le ciel est vide. La science est trop lente. La gouvernance planétaire perd les pédales, l’économie s’affole… Quant aux collapsologues, ils se frottent les mains.
Dernier point, je voudrais ajouter que si « tous ne meurent pas, tous sont touchés »… par l’absurdité des moments que nous aurions préféré ne pas vivre !
- d'une part, l’industrie touristique s’effondre, mais une partie des opérateurs veulent continuer de faire bonne figure, et donner l’impression que tout va bien pour ne pas dissuader un voyageur inquiet. C’est ce que l’on appelle le déni.
- d'autre part, la presse en fait trop, satisfaite d’avoir trouvé un sujet aussi inépuisable, alarmiste et spectaculaire… c’est ce que l’on appelle de l’intox.
- enfin, troisième solution, nul (surtout pas les politiques) ne sait où va notre tout petit monde et chacun poursuit son chemin en fonction de ses intérêts. Et nous, petits touristes mortels, nous ne savons pas à quelle absence totale de saints nous vouer. Le ciel est vide. La science est trop lente. La gouvernance planétaire perd les pédales, l’économie s’affole… Quant aux collapsologues, ils se frottent les mains.
Dernier point, je voudrais ajouter que si « tous ne meurent pas, tous sont touchés »… par l’absurdité des moments que nous aurions préféré ne pas vivre !
Les décryptages et analyses de TOURISCOPIE sur TourMaG.com
Retrouvez les décryptages et les analyses de TOURISCOPIE par Josette SICSIC sur TourMaG.com.
Contact : touriscopie@gmail.com
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