Futuroscopie - Croisières musicales : « Alors on danse ! » [ABO]

Il y a peu, quand je m’embarquais sur une croisière, j’étais classée parmi les jeunes.

Aujourd’hui, pas de doute, quand je mets les pieds sur un paquebot affichant des tarifs abordables, je fais partie des vieux !

Illusion ou réalité ? Non. Il n’y a pas d’effet d’optique. D’ailleurs, la dernière grande étude de la CLIA en convient : « l’avenir de la croisière, c’est la jeune génération ».

On estime en effet que 36% de la clientèle a moins de 40 ans et que l’âge moyen d’un passager se situe à 46 ans.

C’est dire comme les seniors endimanchés engoncés dans leur smoking et les aînées croulant sous les colliers de perles et les paillettes n’ont plus lieu d’incarner le passager type des paquebots « monstres », fortement décriés par une grande partie de la presse.

Une époque s’achève. On le sait. Une autre a commencé. Mais, il faut du temps aux imaginaires pour s’adapter à une nouvelle réalité !

Et, il faudra tout autant de temps pour que le « cruise bashing » caricaturant la « croisière qui s’amuse » s’efface totalement des représentations collectives ! (Cela dit, si la croisière s’amuse, c’est tant mieux !)

Si l’on commence par des données irréfutables, voici les statistiques au niveau mondial indiquant bel et bien un rajeunissement de la clientèle et la ferme intention des jeunes générations de répéter leur première expérience de croisiériste.

Segmentation du marché des croisiéristes par âge

- Traditionnalistes : 10%
- Baby boomers : 24%
- Génération X : 24%
- Millenials (Y): 22%
- Génération Z : 14%
- Génération alpha : 6%

Proportion des « repeaters » intentionnels

- Traditionnalistes : 74%
- Baby boomers : 84%
- Génération X : 84%
- Millenials (Y): 81%
- Génération Z : 74%

Si l’on se base ensuite sur l’expérience que nous avons vécue et le spectacle que nous a offert la clientèle du Costa Toscana, voici ce que nous avons observé.

Au bar Heineken servant généreusement de la bière, le « look » de la clientèle n’a pas de quoi surprendre : les jeunes hommes portent sneakers, jeans, tee-shirts et chemises cintrées alors que les filles arborent des jupes très mini et des talons aiguilles. Qu’elles soient italiennes, françaises ou espagnoles, la mode est la même.

Plus loin, sur le dernier pont surplombant magnifiquement la mer, une troupe de garçons et filles d’une vingtaine d’années jouent au basket, ping-pong, ou s’ébattent dans la piscine, à grands cris… Ils déferleront peu après dans les bars où on leur servira des cocktails sans ou avec alcool et danseront au son des hits des années 2020.

Reprenant en chœur le tube de Stromae, « Alors on danse », les jeunes surtout français ont clairement moins de 30 ans !



Plus tard, après un repas plus ou moins rapide, ils assisteront au concert star de la soirée, celui du célébrissime DJ italien Gigi D’Agostino, qui fera salle comble plus tard dans la nuit et cela jusqu’aux aurores.

Mais le lendemain matin, ils seront sans doute peu nombreux à assister à la conférence d’un journaliste du magazine Rolling Stone, venu raconter l’histoire des DJ, celle de la musique folk ou encore celle récente de l’incroyable festival Tomorrowland.

En tant que partenaire de cette croisière musicale programmée par les équipes d’animation de Costa, la présence de Rolling Stone constitue une garantie de sérieux et par la même occasion un atout important pour un croisiériste cherchant depuis plusieurs années à dynamiser son image et sa clientèle.

Autre atout, la programmation autour du Festival de la chanson de San Remo retransmise à bord tous les soirs, jusqu’à la finale.

Si les Français ont tendance à l’oublier, imaginant que l’Eurovision est le plus célèbre et plus ancien concours de chansons, ce n’est pas le cas des Italiens qui pendant 4 jours se passionnent pour le festival de San Remo qui fêtait la semaine dernière sa 75e édition.

Représentant un véritable rituel collectif impliquant des millions de personnes, jeunes et moins jeunes, hommes et femmes, San Remo est une institution durant laquelle les Italiens scotchés à leurs écrans de télévision (66% d’audience moyenne) peuvent non seulement assister aux concerts, mais peuvent surtout voter pour leurs candidats préférés.

Ils contribuent ainsi (avec un jury de professionnels et un autre composé d’influenceurs) à établir le palmarès de l’événement qui a couronné des chansons dont le succès a dépassé largement les frontières et incarné la culture italienne.

De Bobby Solo à Domenico Modugno (Volare) ou Toto Cutugno et Andrea Bocelli, même Dalida est passée par San Remo.

Une ville ligure de la Riviera qui pendant 4 jours attire des dizaines de milliers de fans venus tenter de côtoyer des stars, tout en applaudissant des chanteurs inconnus faisant leurs premières armes dans les rues, au cours d’un événement off. Musique et bousculades étant assurées, les jeunes générations y sont largement représentées.

Si les jeunes en groupes ou en couples sont nombreux, les familles de trentenaires et quadragénaires le sont également.

Seules ou accompagnées de familles « amies », elles sont aussi accompagnées d’une troisième génération, celle des grands-parents qui, non seulement profitent du voyage, mais profitent en même temps de leurs petits-enfants.

Lesquels sont tellement bienvenus sur les croisières Costa que, jusqu’à 18 ans, ils profitent de gratuités. Un autre atout inestimable à l’heure où le budget vacances de la majorité des Européens n’est pas au meilleur de sa forme.

Un avantage d’autant plus appréciable qu’en cas de saturation familiale, mini club et clubs ados peuvent prendre soin des plus jeunes de 8 heures à minuit, repas et goûters compris, le tout gratuitement !

Quant aux plus âgés que l’on reconnaît à leur look et surtout à leur maladresse en matière de technologie, ils sont parfois isolés dans un couple mais aussi et surtout dans des groupes d’amis amateurs d’une formule qui, selon eux, est irremplaçable : des escales variées, une vie à bord animée, des cabines confortables, un excellent centre de wellness, des prix abordables et surtout des pistes de danse où on les reconnait à leur habileté à danser en couple le rock ou le tango.

« D’ailleurs, nous on fait des croisières pour danser » m’a confié un couple de boomers fidèles aux croisières thématiques.

Il est clair que la thématique peut effectivement séduire une clientèle spécifique et que Costa fait bien de jouer cette carte.

Certes, les croisières musicales ont désormais une histoire. Inaugurées par des concerts de musique classique, invitant des interprètes exceptionnels, orchestres ou solistes, et des musicologues capables de diffuser une culture « savante » à une clientèle très élitiste, elles sont aujourd’hui plus nombreuses que par le passé.

Il faut dire que la croisière « Age tendre et tête de bois » lancée en 2008 par MSC a fait beaucoup pour la promotion de cette formule. Destinée à un public de « baby- boomers » fans de Cloclo, Richard Anthony, Adamo, Franck Alamo… cette croisière a fait des émules.

Ainsi Costa organisait à l’automne dernier avec succès une croisière Claude François qui a réuni 600 passagers. Au programme : soirée disco "Cloclo Night Fever", une "conférence - karaoké" ainsi qu’un concert live "Cloclo expérience".

Musique, danse, cocktails, piscine, jacuzzi, restaurants de qualité où les cuisiniers jonglent avec leurs spatules et leurs pâtes à pizza alliés à une préoccupation environnementale de plus en plus évidente et des tarifs accessibles à une classe moyenne qui ne demande qu’à profiter de parenthèses enchanteresses : le futur de la croisière a de beaux jours devant lui. Chez Costa comme ailleurs.

Pour aller plus loin : retrouvez notre dossier "Tourisme et musique" en cliquant ici.

Journaliste, consultante, conférencière, Josette Sicsic observe depuis plus de 25 ans, les mutations du monde afin d’en analyser les conséquences sur le secteur du tourisme.

Après avoir développé pendant plus de 20 ans le journal Touriscopie, elle est toujours sur le pont de l’actualité où elle décode le présent pour prévoir le futur. Sur le site www.tourmag.com, rubrique Futuroscopie, elle publie plusieurs fois par semaine les articles prospectifs et analytiques.

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