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Le défi des agences de voyages est stratégique avant d’être technologique


Didier Mamma déclarait dans nos colonnes : « Les décisions technologiques doivent être prises par les directions générales et non les directions informatiques. » Cette affirmation émane du directeur Database&technologie de SAP, le leader mondial des systèmes d’information. On pourrait pourtant penser que le choix d’un logiciel de gestion devait logiquement reposer sur les compétences du directeur informatique. « Dans notre monde numérisé de plus en plus rapide les avantages concurrentiels sont déterminant et ils dépendent de la technologie qui va soutenir cette stratégie choisie. » Avantage concurrentiel et technologie sont devenus indissociables.
Nous avons interviewé Bernard Vairon, gérant du groupe Vairon Liberté Voyages, administrateur de Selectour Afat et membre de la commission cross canal, pour savoir comment le secteur du tourisme met en œuvre ce nouveau modèle économique.


Rédigé par Rémi Bain-Thouverez le Jeudi 10 Avril 2014

i-tourisme a interviewé Bernard Vairon, gérant du groupe Vairon Liberté Voyages, administrateur de Selectour Afat et membre de la commission cross canal, pour savoir comment le secteur du tourisme met en œuvre ce nouveau modèle économique. ©thierry-samue
i-tourisme a interviewé Bernard Vairon, gérant du groupe Vairon Liberté Voyages, administrateur de Selectour Afat et membre de la commission cross canal, pour savoir comment le secteur du tourisme met en œuvre ce nouveau modèle économique. ©thierry-samue
i-tourisme : Vous déclarez que l’enjeu pour les agences de voyages est stratégique et non technologique. Pourtant notre monde devient numérique et le défi des distributeurs comme des producteurs est bien celui de relever le challenge qu’imposent aujourd’hui les nouvelles technologies ?

Bernard Vairon : "Justement. Mais pour y parvenir, il faut d’abord parler de stratégie. La technologie, ce n’est qu’un moyen. "

i-tourisme : Ce n’est pas un lieu commun de le dire ?

BV : "Cela semble effectivement être le cas à partir du moment où vous savez apportez les bonnes réponses. Mais est-ce vraiment le cas partout ?

Avant de parler technologie et partenariat, prenons le temps de la réflexion stratégique et de sa cohérence. Le plus important est-il de savoir comment faire un mailing ou pourquoi je fais un mailing ?

De la même façon, savoir extraire les données clients de votre base est-il le plus déterminent ? Je dirais plutôt que c’est le traitement de l’information qui est le plus essentiel, ce que nous voulons en faire et dans quel but.

De ce travail dépendra vos choix stratégiques qui vont engager durablement la réussite de votre business. "

i-tourisme : C’est aussi radical en agence ?

BV : "En agence et pour le réseau. C’est bien pour cette raison que les décisions doivent être prises par la direction générale et non par les services fonctionnels que sont les DSI.

Pour le réseau, c’est le conseil d’administration qui doit être à l’origine des orientations stratégiques, car ce sont celles-ci qui donneront de la cohérence à l’ensemble et qui définiront le cadre commun dans lequel les agences devront évoluer.

L’organisation interne et la mise en œuvre technologique suivra. "

"Recréer une sphère économique vertueuse"

i-tourisme : Vous semblez déterminé sur ce sujet. C’est le fait d’être membre de la commission cross canal au sein du groupe Selectour Afat qui vous fait tenir ce langage ?

BV : "Entre autre. Mais également parce que je pense que nous devons aujourd’hui nous autoriser à sortir de nos schémas actuels et à réfléchir différemment.

Nous devons construire notre architecture et nos partenariats sur des modèles souples et évolutifs pour coller toujours au plus près de nos clients."

i-tourisme : Mais encore, justement à propos de cette commission ?

BV : "Cette commission a d’abord comme mérite de nous permettre de nous remettre en cause et de comprendre qu’on ne peut plus faire évoluer le réseau avec les méthodes du passé.

C’est une occasion de dégager des opportunités et elles sont riches, comme de recréer une sphère économique vertueuse afin que nos clients se sentent partout chez eux, dans nos agences, sur Facebook, au téléphone, sur internet, sur mobile, etc sans oublier de rendre cet ensemble cohérent et interactif."

i-tourisme : C’est ambitieux ?

BV : "Ambitieux et exigeant. Il ne faut oublier aucun élément que ce soit technologique, marketing, commercial, sur le web et sur le point de vente. Si un élément vient à manquer, il y a rupture, le cercle ne fonctionne plus et la promesse client ne pourra pas être tenue."

"Un gros travail de pédagogie"

i-tourisme : Comment travaillez-vous pour y parvenir ?

BV : " Je ne vous cache pas qu’il y un gros travail de pédagogie. On demande aux agences du réseau de faire le grand écart.

Nous sommes indépendant et en même temps nous devons parfois accepter des restrictions personnelles pour des raisons collectives, d’image, de positionnement et de services client.

« Etre indépendant dans l’interdépendance » pour reprendre une expression indispensable à toute bonne coopérative.

i-tourisme : Là, il nous faut des explications que voulez-vous dire ?

BV : "Il n’y a pas de technologie universelle. Quand vous proposez une solution, ce doit être pour l’intérêt du réseau collectivement et stratégiquement.

Une agence ou une autre peut très bien prendre des options différentes. C’est pour cela que je parle de grand écart. C’est un équilibre entre restriction et acceptation.

Je vais vous donner un exemple. Pour le voyage d’affaires, nous avons proposé à tous un outils SBT mutualisé. D’une certaine façon, nous avons organisé la restriction pour que le plus grand nombre puisse rester compétitif sur le marché. Les réticences furent grandes.

Mais les agences qui ont refusé ces choix aujourd’hui sont en difficulté car disqualifiées par le client avant même d’avoir pu parler de leur service.

Nous devons donc accepter nous approprier ces choix stratégiques le plus rapidement possible.

i-tourisme : Concrètement, comment la notion de cross-canal s’intègre dans votre réseau ?

BV : " Le premier stade était de rendre notre site plus accessible et plus visible pour les internautes. Sur ce plan, les évolutions ont été immenses.

Vous pouvez le constater vous-même : priorité a été donnée à une ergonomie plus fluide, plus accessible et plus humaine.

Le parcours est grandement facilité ce qui nous a permis de faire pointer l’internaute vers l’agence de voyages la plus proche de son domicile et d’avoir un accès direct à l’expertise des vendeurs.

Et ça marche. La deuxième étape sera de créer le lien et la cohérence entre les services en agence, sur internet et sur mobile."

"Nous devons être partout"

i-tourisme : Et comment les convaincre de venir sur le point de vente?

BV : " Il ne faut pas se voiler la face, c’est sur la promesse du et des services que nous allons conquérir ou reconquérir nos clients. Vous le constatez vous-même, la notion de prix est moins "clivante" que par le passé. Je ne veux pas dire que le prix n’a pas son importance, mais il n’est plus suffisant pour emporter une vente.

Pour ce qui concerne les produits nous avons accès à tout comme le client d’ailleurs. Aussi nous devons donc mieux connaître ces derniers afin de mieux les servir. Nous devons être partout où il va et enfin lui permettre d’interagir avec nous quand et comme il le souhaite.

C’est la notion d’écosystème cross-canal et de big data sur lesquelles nous travaillons. De cette relation nouvelle vont dépendre nos succès de demain."

i-tourisme : C’est en marche ?

BV : "Avec la difficulté de convaincre 600 patrons d’agences du bien-fondé de cette stratégie et d’engager un vaste chantier pour que cette démarche soit intégrée à chaque niveau métier : loisir, affaire, marketing, communication, point de vente, technologie…

Et tenir compte des spécificités des mono-points de vente et des mini-réseaux, et ensuite organiser les passerelles entre chacun d’entre eux."

i-tourisme : Vaste chantier ! Vous êtes confiant ?

BV : "Autant qu’on peut l’être quand on a conscience que notre modèle doit évoluer. Nous ne surestimons pas l’ampleur des chantiers qui sont devant nous, mais aujourd’hui, nous savons dans quelle direction aller.

Ce n’est pas pour autant que ce soit facile, mais dans tous les cas savoir ou se diriger est une motivation pour avancer avec détermination.

Pour conclure, je vous dirais qu’au niveau du réseau notre plus grand défi reste que cela se construise dans une cohésion partagée et acceptée par chaque adhérent.

C’est cela la Coopérative et c’est uniquement en cela que nous serons fort.

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