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Le voyage à pied : Une "rusticité" qui séduit les CSP+

À l’encontre des idées reçues


Marcher 6 à 7 heures par jour, faire ses besoins dans la nature, manger à même le sol… Voilà qui ne donne guère envie de voyager à pied. Les non-initiés pourraient même ajouter : « Mais ce sont des vacances de Pauvres ! ». Eh bien, pas du tout !


Rédigé par Yves BARRAUD le Mercredi 17 Février 2010

Sahara - DR - Allibert
Sahara - DR - Allibert
« Qui n’a pas un jour tenté l’expérience ne sait pas ce qu’il perd ! ». C’est en ces termes que Roland, la soixantaine gaillarde, évoque son long parcours de randonneur, de trekkeur, de baroudeur à travers le monde.

Sur ces deux jambes et dans ses grosses godasses, « il a fait » la Patagonie, l’ascension du Kilimandjaro, le Népal, la Namibie, le Désert blanc d’Égypte… mais aussi Madère, l’Islande, les Alpes…

Trois à quatre voyages par an, depuis 35 ans, en compagnie de son épouse parfois. Entre 100 et 120 destinations visitées. Un palmarès impressionnant !

Routard et bourlingueur pendant ses vacances, mais Directeur marketing pendant l’année… à 8.000 € de salaire mensuel. Tel est souvent le pedigree du voyageur marcheur.

Le "Français moyen" n’aime pas marcher

À 1.000 € la semaine ou 2.000 € les 15 jours, on pourrait penser, comme ça à l’instinct, que le voyage à pied, le vrai, celui où l’on crapahute toute la journée, où l’on partage sa tente avec un inconnu (une option « tente individuelle » est aussi proposée), où on se contente d’un en-cas à midi, où on dort à la dure ou à la belle étoile, s’adresse à une clientèle désargentée ou « modeste ». Pas du tout. Bien au contraire !

Sur les treks Allibert ou Terres d’Aventure (entre autres spécialistes), on rencontre rarement des « Français moyens », mais le plus souvent des cadres sup’, des professions libérales (beaucoup de médecins), des universitaires et même des chefs d’entreprises.

Les CSP+ (catégories socioprofessionnelles supérieures) sont sur-représentées dans les groupes de marcheurs, constitués à 50% de quinquagénaires et de sexagénaires.

Et malgré des contraintes (toilettes sommaires, absence de lieux d’aisance, proximité d’une nature parfois hostile, comme ces vilaines petites bébêtes que sont les scorpions et les serpents), les marcheurs sont majoritairement des MARCHEUSES !

"Pour moi, c'est l'essence même du voyage !"

« Une déconnexion complète avec mon quotidien. Un retour aux sources. Une immersion totale au cœur d’une destination. Le plaisir de l’effort et la camaraderie : Voilà ce que je recherche », argumente Chrystelle, élégante cadre commerciale lyonnaise dans la vie quotidienne, qui se passera pourtant de tout confort moderne pendant près de 15 jours de marche dans le sud marocain.

« L’authenticité du contact avec nos accompagnateurs (guide, muletiers, chameliers) et avec les populations locales (bergers et paysans berbères, enfants…) constitue pour moi la fibre du voyage, sa substance, son essence. Et cela n’a pas de prix ! », renchérit Adeline, Chercheuse au CNRS dans « le civil ».

Et il y en a qui paie pour vivre ça ?

Pourtant, quand on y réfléchit bien, quelles drôles de « vacances » !

Six à sept heures de marche par jour, qu’il vente, qu’il pleuve ou sous un soleil implacable. Des petits bobos inévitables (ampoules, courbatures…). Des nuits souvent frisquettes dans des sacs de couchage pouvant résister à des températures négatives. Sous une tente qu’il faudra monter soi-même et démonter au petit matin, à la fraîche et à l’humidité. Ou à la belle étoile quand la météo s’y prête. Une toilette sommaire « à la lingette »… Tel est le programme des réjouissances.

Pour les besoins, ce n’est pas dans la cabane au fond du jardin que ça se passe, mais entre deux cailloux, sous un acacias ou planqué derrière une dune, de jour comme de nuit (parfois à 4h00 du mat’ quand l’envie se fait pressante).

Et prière de ne pas oublier son briquet pour brûler le papier hygiénique. Faute de quoi, dans le désert, il mettra des années à se décomposer.

Et la « frontale »… Indispensable « frontale » ! Cette lampe qu’on fixe sur sa tête et qui vous accompagnera dès la tombée de la nuit (vers 17h30 en hiver) jusqu’au lendemain matin. Sans elle, vous êtes aveugle, incapable de voir ce que vous avez dans votre assiette à l’heure du dîner, incapable de retrouver votre tente au bivouac, de vous glisser dans votre sac de couchage.

Indispensables aussi les « Micropur », ces pastilles qui purifieront l’eau de votre gourde puisée dans des puits creusés au milieu de nulle part. Précaution essentielle, vitale même pour ne pas attraper la turista, la diarrhée du voyageur, qui peut transformer un trek anodin en « inconfortable » Chemin de Croix. Doux euphémisme !

Le voyage à pied ne connaît pas la crise !

Mis bout à bout, ces « obligations » et autres désagréments avérés ou potentiels pourraient en détourner plus d’un et, surtout, plus d’une.

Eh bien non ! Cette formule de voyage ne connaît pas la crise, comme en attestent les prévisions de Voyageurs du Monde (1). Elle est dans l’air du temps, souvent respectueuse des pays visités, de leurs populations et des écosystèmes fragiles. Écolo-compatible et responsable, comme on dit (2).

Comme quoi, dans notre société éprise de sécurité sanitaire et de confort high-tech, certaines et certains trouvent dans ces vacances un peu « rustiques » un authentique épanouissement… au rapport qualité/prix parfois exceptionnel. Ce qui compte aussi.

(1) Voyageurs du Monde annonce une reprise de l'activité

(2) Dernièrement, Terres d’Aventure a été certifié "Tourisme Responsable" par l’Afnor Certification.

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