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Les agences ne veulent pas entendre parler de révolution écologique !

Sérieusement secouée par la crise la Distribution s'enferme-t-elle dans une vision courtermiste ?


Depuis 20 ans, tout le monde annonce la mort des agences de voyages. La chute n'a jamais eu lieu. Même la crise sanitaire n'a pas eu raison du nombre de points de vente. Entre les avoirs et le chômage partiel, les professionnels du tourisme ont dû faire face à une relation client pas toujours évidente. Globalement les agences physiques sortent grandies de cette expérience. Malgré tout, après les belles paroles du 1er confinement, le virage pour un tourisme plus durable et écologique attendra... Un discours difficilement défendable à l'heure où le GIEC tire la sonnette d'alarme.


Rédigé par le Vendredi 8 Octobre 2021

Les agences de voyages ne semblent pas prêtes pour la révolution écologique - Depositphotos.com
Les agences de voyages ne semblent pas prêtes pour la révolution écologique - Depositphotos.com
Il y a 5 ans, Renaud revenait sur le devant de la scène médiatique avec une nouvelle chanson qui pourrait illustrer assez bien la pensée des agences de voyages.

"Toujours vivant, rassurez-vous, toujours la banane, toujours debout..." Après 19 mois d'une crise historique et sanitaire, la profession a tenu, bien aidée par les pouvoirs publics.

Les frontières fermées, les agences closes, les tour-opérateurs à l'arrêt et les réceptifs sans voyageur, toute l'industrie a eu (très) peur. Alors que les Etats-Unis refont surface sur la carte touristique mondiale, la profession retrouve des couleurs depuis quelques semaines.

"Est-ce que cette crise a changé des choses ? Oui, bien sûr. Les contacts se sont digitalisés avec Zoom et autres réunions faites par téléphone.

Nous sommes sûrs que ça va repartir, mais pas sur les mêmes bases. Il faut changer d'état d'esprit pour réenchanter les agences et les clients. Nous devons les faire revenir,
" insiste Adriana Minchella, la présidente du Cediv.

Une reprise qui s'annonce loin de l'idéologie du grand soir. En somme l'industrie prône une continuité sans rupture. Les belles paroles du premier confinement en mars 2020 semblaient très/trop lointaines sur cet IFTM Top Resa...

"Pour moi le monde d'après sera comme le monde d'avant," selon Laurent Abitbol

Souvenez-vous en mars 2020 alors que la France s'arrête que les visioconférences se multiplient, que le tourisme lutte, mais réfléchit aussi à son avenir, des envies d'un monde nouveau apparaissent.

Les patrons parlent de voyages plus authentiques, moins loin, moins polluants... Emportée par la vague verte qui déferle sur la France, l'industrie prend conscience de son rôle dans la transition écologique.

Puis 19 mois se sont écoulés, les visios ont tourné à l'indigestion, les réflexions se sont amenuisées alors que le secteur pouvait souffler pour sa survie.

"Il y a eu "0" faillite pour Selectour. L'Etat nous a aidés, des agences ont même mieux gagné leur vie avec le plan de soutien qu'en période classique. Il faut le reconnaitre.

L'APLD a peu servi, car nous travaillons comme des fous. Pour moi le monde d'après sera comme le monde d'avant," lâche un Laurent Abitbol décomplexé.

A bien y regarder, il est tout de même un peu différent.

"Nous avons su rembourser à un rythme plus rapide que les entreprises digitales et les compagnies aériennes, elles n'ont pas su prendre soin de leurs clients.

Le bilan de cette crise est une magnifique opportunité pour nous :
nous devons savoir comment valoriser tout ce que nous avons fait,
" analyse Christophe Jacquet, le patron de Havas Voyages.

Le loisir est reparti de façon soutenue, mais le voyage semble suivre aussi la même dynamique selon le réseau lyonnais. Dans le même temps, les rangs de la profession se sont clairsemés.

"Le métier a changé, car ne restent que les passionnés. Nous avons un boulevard devant nous pour faire revenir les personnes dans nos agences," explique Jean-Charles Franchomme.

"Il faut augmenter les prix pour que tout le monde vive," plaide Laurent Abitbol

D'ailleurs chez Havas Voyages, tout comme dans d'autres réseaux, de nouveaux clients se présentent dans les agences physiques : les déçus d'internet.

Pour le cofondateur du CDMV, très présent sur les réseaux sociaux et esprit novateur, l'avenir passe par le phygital. La distribution doit prendre le meilleur du digital et des agences physiques.

A en croire les acteurs invités à la table ronde de l'IFTM Top Resa la ré-intermédiation est de retour et pas seulement en BtoC.

"Avec cette crise, le grand public s'est rendu compte qu'il avait besoin des agences de voyages et que nous avions besoin des tour-opérateurs.

Un point de vente doit pouvoir proposer les mêmes produits que ceux présents sur le web et les marques qu'ils connaissent,
" estime Adriana Minchella.

En somme, la crise n'aurait rien changé : la distribution classique regagne des parts de marché, les produits proposés sont les mêmes et la bataille des prix fait de nouveau rage....

Cette dernière affirmation est moins vraie, selon le patron de Selectour.

"Les prix en France sont très très bas, le client doit payer notre service !

L'agent a besoin de 14% pour vivre, le TO 12 ou 13% et l'hôtel 10%, il faut augmenter les prix pour que tout le monde vive,
" annonce Laurent Abitbol.

Malheureusement, pendant ce temps des acteurs ne se gênent pas pour baisser leurs marges et vendre à des prix dérisoires, pour repartir à la reconquête de leurs clients.

"Quand le patron de TUI dit que tous les groupes doivent être à 400 euros ce n'est pas possible. Il achète certains produits pour 600 euros. Nous devons vendre plus cher que nous l'achetons, ce n'était pas le cas en France, ça le devient," poursuit le patron lyonnais.

Une inflation du voyage qui ne serait pas rédhibitoire, même si en ce moment les Français font face à une hausse galopante des prix. La rentabilité n'est pas la seule problématique du moment pour les agents de voyages.

Ces derniers doivent se démarquer, et l'addition, en bas du contrat n'est pas le seul argument différenciant.

"Il y a un peu plus d'écologie, mais c'est du blabla", Laurent Abitbol

Aujourd'hui, un professionnel ne doit plus se bourrer le crâne avec les 40 000 références d'une enseigne.

"Nous avons une responsabilité d'un niveau de connaissance exceptionnel sur les produits. Nous devons nettoyer l'offre, pour nous démarquer. Une agence de voyages qui maîtrise 1 000 produits ce serait déjà extraordinaire...

Or, nous voulons une offre assumée et sélectionnée,
" martèle Christophe Jacquet.

Havas se donne deux ans pour atteindre ce niveau d'excellence, mais aussi de spécialisation. Voyageurs du monde avait finalement quelques années d'avance sur le reste de l'industrie.

"C'est un peu comme un médecin, quand il fait face à une maladie complexe. Il n'a pas honte de confier son patient à un autre professionnel de santé, plus compétent.

Ce doit être pareil pour nous,
" poursuit le président de Havas Voyages. Demain l'agent doit se spécialiser et être plus curieux sur LA destination de son choix.

Alors que les employés sont moins nombreux, ils doivent avoir une connaissance plus pointue car l'offre, elle, ne changera pas nécessairement. Les belles paroles ont été remisées au placard, la transition vers un tourisme durable attendra.

"C'est du marketing, aucun client ne m'a jamais demandé la consommation de son vol. L'écologie se fait par les chercheurs, les savants, les ingénieurs, mais ce n'est pas nous. Il y a un peu plus d'écologie, mais c'est du blabla," lâche Laurent Abitbol.

Un discours très éloigné des messages véhiculés par l'urgence climatique et le dernier]i rapport du GIEC. Le tourisme aurait donc oublié sa responsabilité environnementale ?

"Je veux bien vendre des voyages verts, mais c'est quoi ? Un voyage à vélo, je n'ai pas de client. Par contre, quand je mets un charter sur la Grèce ou la Tunisie, j'ai la clientèle.

Il ne faut pas être hypocrite,
" poursuit le patron de Marietton.

"Ce n'est pas le monde d'avant mais d'avant-hier avec ce genre de discours"

Embarrassé par les réponses iconoclastes, François-Xavier Izenic, l'animateur de la table ronde, tend désespérément la main aux autres participants. Mais le message diffère peu, la transition écologique attendra.

"Je rejoins complètement Laurent. Nous avons un rôle dans nos entreprises, mais ce n'est pas à nous de juger ou déconseiller tels ou tels voyages.

Nous continuerons à aller à New York. Nous avons vendu ce qui faisait plaisir à NOS clients, la réalité est économique
," indique Adriana Minchella., la présidente du Cediv.

L'urgence climatique est encore une réalité... lointaine du moins pour LES clients actuels des agences de voyages. Des affirmations qui exaspèrent les plus jeunes spectateurs d'une salle faiblement garnie.

"Ce n'est pas le monde d'avant, mais d'avant-hier avec ce genre de discoursDéjà que nous avions une image ringarde, avec ces propos ça ne va pas s'améliorer," lâche un agent de voyages spectateur de la table ronde.

Malgré tout le président d'Havas a adressé une réponse plus politiquement correcte.

"Un mouvement est en cours, puisque l'offre des tour-opérateurs se renouvelle et s'enrichit de contenus plus responsables et verts.

Ce n'est pas aux agents de voyages de décider pour le client.
"

Le message est passé, la main tendue n'a jamais été saisie. Dommage.

Toujours vivante, toujours debout, la distribution post pandémie n'est pas plus "vert-ueuse" que celle d'avant. Bien sûr la reprise est vitale économiquement, cette vision courtermiste aura des effets bien plus néfastes que le coronavirus à moyen et long terme...

Romain Pommier Publié par Romain Pommier Journaliste - TourMaG.com
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Commentaires

1.Posté par Marc le 08/10/2021 08:48 | Alerter
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Décidément, la profession des agences de voyages ne changera pas. Aucune évolution en perspective alors que le voyageur, lui, évolue rapidement.
Comme dit la pub Dyson " Achetez auprès de ceux qui l'ont fabriqué" A méditer agences vs TO voir Cies/Hotels

2.Posté par SONITA le 08/10/2021 12:54 | Alerter
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Cela n'est pas représentatif de toutes les agences, nous ne partageons pas tous cette vision -
Les temps changent, notre terre est en souffrance, tous les acteurs du tourisme doivent ensemble trouver des solutions pour faire évoluer les offres et les façons de voyager -
Nature - planète et ou finance à court terme - il doit bien y avoir un juste milieu à trouver non ?
Le débat ne fait que commencer et les actions se mettent tout doucement en place -
Restons positifs et conscients de l'importance que cela à pour nos activités et nos voyageurs -

3.Posté par Christophe le 08/10/2021 13:01 | Alerter
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Merci Romain pour ce bien intéressant retour de la profession. Après tant de belles promesses et réflexions durant un an et demi, il peut être compréhensible de vouloir au plus vite renflouer ses caisses sur un model pré-Covid mais gare au retour de bâtons d'une clientèle qui n'a pas attendu la crise pour organiser différemment ses voyages. Dans la production de tours où il est nécessaire de voir au moins un an à l'avance, je suis étonné de ne pas voir plus de considération de la demande pour 2023 et 24 !

4.Posté par Adnstep le 08/10/2021 13:31 | Alerter
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Enfin des gens qui disent ce qu'ils pensent, sans céder à l'ultra moralisation écologiste.

Les professionnels du tourisme remontent dans mon estime.

5.Posté par Mr Idress le 08/10/2021 14:41 | Alerter
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Bonjour

Il est extravagant de , ne serait-ce qu'evoquer la decroissance.On peut agir à la marge ( et encore, dans une marge très etroite ) ....car, la révolution ecologique, cela signifie décroître. On pourra baisser l'emission de carbone quand les ingenieurs aeronautiques feront des progres dans la motorisation des avions ( ils en fait beaucoup deja), mais, l'ecologie dans nos metiers...c'est du marketing, du "green washing", une utopie. Les jeunes generations sont ecolos ? mais ils veulent voyager au long-cours, voyager moins cher ( pour voyager moins cher, il doit y avoir pléthore de capacités). L'ecologie est une posture....non durable.

Idress

6.Posté par Brice le 08/10/2021 15:32 | Alerter
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Je suis obligé de parler de ce point de vue mais dans la réalité la clientèle des agences (50+) n'a pas l'écologie comme point de repère, peut-être sur des voyages en France mais beaucoup moins (pas ?) à l'international. Entre 1 devis à 2500€ "green" et 3 devis à 1800-2000€ "normaux" il n'y a pas photo. La perception du voyage plus vertueux n'est pas voulue comme plus chère, hors c'est souvent le cas. Tout le monde veut changer mais personne veut payer. Si demain tous les clients de Marietton se mettaient à demander des voyages sustainable ils s'adapteraient en quelques mois.

Si ton marché c'est des gens qui ont la trentaine tu as quand même beaucoup plus de chance d'avoir l'écologie comme core values de ton business, mais est-ce vraiment la clientèle principale des gros TO interrogés dans les salons ? On pourrait refaire la même table avec des agences qui ciblent les 18-35 et il y aurait un discours complètement différent sur un peu tout (produits, communication, RH, etc.).

Je trouve aussi certains passages de l'article déplacés lorsqu'on voit la place qui a été faites sur TourMag pour tout le secteur de l'aviation et surtout des croisières. En quelques clicks on passe quand même d'un "notre voyage sur le MSC XYZ était incroyable" à "non mais regardez les TO, ils veulent encore vendre des voyages qui sont pas sustainable". C'est d'ailleurs assez symptomatique je trouve de l'industrie qui sait qu'elle doit changer mais... qui doit aussi vivre économiquement.

Brice

7.Posté par ROUSSEROLE le 08/10/2021 16:20 | Alerter
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Après les attentats de 2001, la crise financière de 2008 et la pandémie de 2020 la prochaine grande catastrophe planétaire sera écologique. L'humanité sera contrainte au changement et noter secteur devra se remettre en question pour survivre. Il n'en reste pas moins que les professionnels du voyage ne peuvent pas décider seuls des choix des consommateurs. C'est à eux qu'ils appartient de décider de leur manière de voyager. Et à eux d'élire les responsables qui décideront des politiques à mener en matière de transport et de conservation du patrimoine naturel. Aujourd'hui les voyageurs internationaux ne mesurent pas l'impact de leur loisir sur l'environnement pour la bonne et simple raison qu'ils n'en paient le coût réel qui est à la charge de la collectivité. Tant qu'ils ne seront pas mis face à leur responsabilité ils ne changeront rien à leurs habitudes avant tout fondées sur l'hédonisme à n'importe quel prix.

8.Posté par Martin le 08/10/2021 22:17 | Alerter
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Il ne fait aucun doute que l’effet "green" "éco-responsable" "durable" et j’en passe est aujourd’hui une vraie tendance. Les voyageurs le vivent comme une mode car les acteurs du tourisme surfent sur cette vague d’une manière ultra-marketing. Ce marketing ne vient il pas compenser un manque de formation et de connaissances de ces derniers?

Les différences, entre tous ces termes en orbite autour du « monde d’après », sont elles clairement définies pour les voyageurs comme pour les professionnels.

Nous avons vu apparaître de nombreuses « prises de conscience » des acteurs du tourisme, mettant en place des solutions plus « vertes ». En 2019, même Voyamar annonce programmer des « circuits éco-responsables ». En 2021 il lance une nouvelle marque pour des « voyages responsables ». De son côté, le CEDIV a rejoint en 2017 ATR et en 2020 annonce sa volonté de réduire ses émissions de carbone de 50% d’ici à 2030. Malgré leurs dires, ils ont fait et font actuellement des actions. S'agit il d'une réelle prise de conscience ou d'un effet marketing ?

Sincèrement, en tant que conseiller en voyages, notre fonction est de recommander ou non une destination, des activités ou simplement un hôtel, mais en prenant en compte nos valeurs personnelles. Nous avons la possibilité d’influencer le choix de nos futurs voyageurs même si ces derniers auront toutefois le dernier mot.

« Le monde d’après sera comme avant », nous n'en doutons pas, mais surement un peu différent car ce tourisme de niche prendra une place plus ou moins importante, comme les précédents et il appartiendra à tous les acteurs du tourisme de le faire croître et perdurer.

9.Posté par Blache le 08/10/2021 23:21 | Alerter
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Ok boomer...
Existe il une video de cette table ronde? Si oui je ne la trouve pas... Merci

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