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Météo, l’ennemi en embuscade : la France en surchauffe, le tourisme aussi

Décryptage de Josette Sicsic, Futuroscopie


Le changement climatique n’est pas une vue d’esprits ombrageux. C’est une réalité à laquelle il faudrait réagir avant qu’il ne soit trop tard. D’ailleurs, n’est-il pas trop tard ? Les dernières prévisions de Météo France dévoilées le 1er février, font en effet état d’un Sud de la France fortement touché par des vagues de chaleur plus longues et plus intenses où, si rien n’est fait la température pourra atteindre les 50 °C en période estivale. Pire, le réchauffement atteindrait +3,9°C en 2100 si nous n'agissons pas tout de suite et ne limitons pas nos émissions de gaz à effets de serre. L’activité touristique en pâtirait surtout en ville. Alors, on fait quoi ?


Rédigé par le Mercredi 24 Février 2021

Malgré quelques lueurs d’optimisme, nous n’y échapperons pas et d’ores et déjà, il serait grand temps de tenir compte de ce futur alarmant avant d’esquisser de grands projets touristiques - Deposiphotos.com tomwang
Malgré quelques lueurs d’optimisme, nous n’y échapperons pas et d’ores et déjà, il serait grand temps de tenir compte de ce futur alarmant avant d’esquisser de grands projets touristiques - Deposiphotos.com tomwang
Ces prévisions confirment ce que l’on savait (plus ou moins déjà) à savoir que les effets du réchauffement climatique sont déjà particulièrement sensibles dans les grandes villes où les différences de températures provoquées par les îlots de chaleur urbains peuvent atteindre 8 degrés par rapport à la campagne alentour.

Une catastrophe quand l’on sait que l’urbanisation gagne du terrain
(80 % en 2018 contre 60% en 1960) et que les habitants affirment aux 2/3 ressentir les effets du changement.


Une étude sur 5 villes de la Méditerranée

Mieux, une étude réalisée sur 5 villes choisies pour leur progression démographique et leur exposition aux risques climatiques : Marseille, Montpellier, Narbonne, Nîmes, Toulouse, donne les résultats suivants :

- Les périodes de canicule sont vécues par une partie comme de véritables « épreuves », tant physiques (crises d’asthme, conjonctivites régulières, fatigue) que psychologiques (sensations d’asphyxie ou d’étouffement). Ces épisodes suscitent aussi de nombreuses inquiétudes quant aux personnes les plus fragiles : « i[Mon mari a eu des syncopes, il a perdu connaissance et c’est les pompiers qui l’ont relevé […] Ils l’ont gardé à l’hôpital, il avait commencé à délirer]i » (quartier Noailles, Marseille, femme, plus de 74 ans, retraitée).

En regard de cette situation, 56 % des enquêtés affirment déjà adapter leurs modes de vie pendant la saison d’été. Comment ? Les rythmes en particulier tendent à ralentir pour s’ajuster aux besoins vitaux. Les journées de travail sont moins intenses et l’essentiel des activités se concentre en matinée ou en soirée.

Le reste du temps est passé dans des intérieurs aérés ou climatisés. Les espaces confinés et de foule sont largement évités : rues touristiques des centres-villes, grands espaces de loisirs…

Et si 68 % continuent à trouver leur ville agréable à vivre durant l’été, 30 % envisageraient de la quitter face à la dégradation de leurs conditions d’habitabilité. Des résultats qui questionnent dès lors très directement les politiques d’urbanisation. Et les politiques touristiques. Lesquelles doivent prendre en compte ce phénomène pour conserver leur attractivité estivale.

Les Alpes du sud pourraient verdir

Autres prévisions alarmantes : les zones de montagne», selon ce nouveau rapport, seront très affectées. Dans les Alpes et les Pyrénées par exemple, certaines zones affichent une hausse de 6°C des températures moyennes à l'horizon 2100, dans le pire scénario.

Résultat, il n’y aura presque plus de neige, ni de gelées. On le savait. Mais, se dessine également une division du pays selon une diagonale sud-est/nord-ouest, « avec une différence de 1°C entre ces deux zones ». Le réchauffement est un peu moindre de la Bretagne aux Hauts-de-France.

Une multiplication des événements extrêmes est aussi au programme, avec une hausse des vagues de chaleur et du nombre de jours qui les subiront.

Prévues dans tous les scénarios, les épisodes de canicules et de « nuits tropicales », quand la température ne descend pas au dessous de 20°, se multiplieraient jusqu'à dix fois dans le pire des scénarios en termes d'émissions de GES.

« Cette évolution est exacerbée dans les régions actuelles les plus chaudes, notamment l'arc méditerranéen, le couloir rhodanien et la vallée de la Garonne. Sur ces régions, les vagues de chaleur et journées caniculaires pourront s'étaler sur des périodes supérieures à un ou deux mois en été », précise le rapport. Et les épisodes de sécheresse pourraient enregistrer en fin de siècle « une augmentation de 30 à 50% », avertissent les chercheurs.

Un problème majeur pour le développement touristique

Le réchauffement climatique va aussi s’attaquer aux forêts qui, d’ores et déjà en 2019, ont vu brûler un nombre d’hectares supérieurs aux 10 dernières années.

Il faudra donc s’équiper mieux qu’on ne l’est, s’inquiètent des élus…

En fait, malgré quelques lueurs d’optimisme, nous n’y échapperons pas et d’ores et déjà, il serait grand temps de tenir compte de ce futur alarmant avant d’esquisser de grands projets touristiques. Un expert climat est en effet indispensable.

Quant aux observatoires du climat disponibles en région, ils doivent être mieux utilisés.

Les mesurettes sont insuffisantes

Toutes sortes d’autres études confirmeraient bien évidemment cette angoisse par rapport aux menaces climatiques futures ou présentes. Car, il ne s’agit pas d’un futur lointain, il s’agit du présent.

Certes, pour le moment, les villes du monde entier adoptent des stratégies de résilience. Végétalisation des espaces urbains pour former « oasis et villes forêts », optimisation énergétique des bâtiments ou encore régulation en temps réel de certaines activités selon des indices de pollution.

Avec parfois des mesures peut-être plus anecdotiques, comme l’arrosage des espaces publics et le blanchiment des toits. Ces actions sont très souvent accompagnées de dispositifs de « sensibilisation » à l’adoption de comportements dits écoresponsables, du point de vue des pratiques de déplacement, de la consommation ou du recyclage.

Alerter à temps est aussi un moyen indiscutable de lutter contre les risques. Mais, ne convient-il pas de composer de nouveaux horaires pour l’ouverture des commerces, musées, espaces de divertissement ? Les villes ne doivent-elles pas aussi être en mesure de proposer à la population la plus exposée des destinations de villégiature, proches et accessibles ? (les forêts autour de Paris, par exemple).

Ne convient-il pas aussi d’alerter sur les sites web des destinations touristiques, comme le font d’ores et déjà certaines villes américaines du Texas, Colorado, Californie ? Car qui dit canicules dit aussi risques d’incendies ?

A moins de faire comme les Chinois qui ont fait savoir il y a peu, qu'ils comptaient déployer leur programme d’ensemencement des nuages, jusqu’alors utilisé de façon très ciblée pour contrôler la météo, sur plus de la moitié de leur territoire ?

D’ici 2025, il s'agirait autrement dit de faire tomber de la pluie sur commande sur une zone de 5,5 millions de km2 !

Et si l’on parlait de l’opinion…

A l’heure où le projet de loi « climat et résilience » va être discuté à l’Assemblée nationale, ces questions ne peuvent plus être éludées et les solutions à apporter non plus.

Mais, si tout ce qui touche au climat est aujourd’hui à l’ordre du jour, en a-t-il toujours été de même ? La sensibilité au climat est-elle dictée par la crainte des catastrophes climatiques qui sont bel et bien là et bouleversent la vie de région entières lors d’inondations ou de tempêtes ?

A moins que d’autres raisons très contemporaines soient au cœur de ces nouvelles psychoses ? La suite à demain.


A lire aussi : Le climat a-t-il réellement une influence sur la nature de l’être humain et la société ?

Rédigé par Josette Sicsic. Directrice de Futuroscopie (anciennement Touriscopie) que vous retrouvez régulièrement sur le portail de Tourmag.com. Journaliste, consultante, conférencière, spécialiste de prospective.

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