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Orléans, une destination "court séjour" à une heure de Paris

La Loire au Centre


Ancien carrefour du royaume, enrichie par le commerce fluvial, la ville d’où Jeanne d’Arc commença à « bouter les Anglais hors de France » a attendu les années 2000 pour redorer son blason. De cité grise pour voyageurs pressés, elle a retrouvé le « goût » de la Loire et s’affiche en provinciale pimpante, même si beaucoup reste à faire. A une heure de Paris, elle peut prétendre au titre de destination « court séjour ».


Rédigé par Jean-François RUST le Mardi 16 Mai 2017

Il n’est pas désagréable de profiter de la ville sans subir les contraintes d’une surfréquentation touristique - DR : J.-F.R.
Il n’est pas désagréable de profiter de la ville sans subir les contraintes d’une surfréquentation touristique - DR : J.-F.R.
150 ans. C’est à peu près le temps qu’il aura fallu à Orléans pour retrouver son lustre patrimonial.

Un siècle et demi d’endormissement, après avoir été pourtant le centre de la Gaule, une riche cité épiscopale et intellectuelle, un fief commerçant puissant - grâce à la Loire - et une cité industrielle (textile, raffinage du sucre, vinaigre).

Certes, en 14-18, Orléans avait su relancer son industrie. La ville fournissait alors des équipements textiles à l’armée.

Les années 1960-1970 ont aussi marqué un tournant, avec la création du quartier de La Source et l’émergence d’activités pharmaceutique (Servier), cosmétique (Parfums Dior, Shiseido), logistique (Amazon.fr) et électronique (IBM, Hitachi…).

Pour autant, le bâti d’Orléans et sa vie urbaine répondaient aux abonnés absents, noyés sous la grisaille des façades et l’anarchie automobile.

Epopée unique

Il a fallu, à partir de 2001, la volonté d’une municipalité pour redonner de l’allant au centre historique.

Quiconque absent de la ville depuis dix ans aura la surprise de découvrir une cité d’autant plus agréable que la communication qui aurait pu accompagner ce toilettage semble avoir été limitée à la portion congrue… Orléans, pourtant située à une heure de Paris, ne fait pas de vagues dans les magazines spécialisés.

Réhabilitation des façades, aménagement des places et des quais, piétonisation… ces travaux mettent en lumière une épopée unique.

Celle d’une ville clef dans l’histoire de France, pour une simple raison géographique : sa position sur le coude le plus au nord de la Loire, axe de passage, de négoce et de pouvoir depuis toujours.

Jugez plutôt : à l’époque des Gaulois, la cité abrite l’assemblée des druides ; les Romains font ensuite d’Aurelianorum une place forte commerciale ; Clovis réunit à Orléans les premiers conciles français ; Charles II et le Capétien Robert II y sont sacrés rois ; la première université de droit civil y est fondée en 1306 ; puis le commerce, qui remonte la Loire depuis Nantes, à partir du 17e s., élève Orléans au statut de plaque tournante ; enfin, l’industrie textile, sucrière et vinaigrière s’y développe.

Héroïque Jeanne d’Arc

Le tout s’effectue sous le fil conducteur de Jeanne d’Arc, bouteuse d’Anglais hors la ville au début du 15e s.

Ah ! La Pucelle ! Impossible d’échapper à l’icône de la résistance française.

Une maison à pan de bois reconstitue la demeure où elle fut accueillie en 1429 et retrace sa vie (près de 40 000 documents d’accès libre !).

Dans la cathédrale, des vitraux du 19e s. rappellent son épopée. Sa statue trône devant l’hôtel particulier Groslot et, en héroïne cavalière, sur la place du Martroi.

Elle apparaît en gloriette de puits, dans la cour du pavillon de la maison Colas-des-Francs. Vous la verrez aussi en blasons, apposés ici et là sur les façades de maisons.

Preuve de son influence dans le modelage de « l’identité française », les Fêtes de Jeanne d’Arc, en avril-mai, célèbrent sa mémoire, avec la désignation d’une fille de 17 ans pour l’incarner. 2017 a marqué la… 588e édition de la manifestation.

Oui, Jeanne d’Arc, libératrice d’Orléans menacée par les Anglais durant la guerre de Cent Ans, par son audace guerrière, est bien la figure tutélaire de la ville.

Ex-quartier des chanoines

A pied ou à vélo, deux à trois jours dans cet Orléans relookée révèlent ce passé singulier.

Au centre historique, la place désormais piétonne du Martroi embellit la cavalière Jeanne d’Arc et les immeubles cossus.

Le carroyage des rues de Bourgogne, de l’Empereur, du Poirier, Dolet, de la Charpenterie, de la Poterne, repavées, déploie ses cafés et restaurants et ses maisons à pans de bois restaurées (la plus vieille est à l’angle des rues Charpenterie-Poterne - 1394).

Rue Pothier, la salle des Thèses (15e s.) est l’ultime vestige de l’ancienne université d’Orléans, qui accueillit Calvin.

A l’est de ce périmètre, le secteur Bourgogne affiche une trame moins léchée. C’est l’ex-quartier des chanoines, en témoigne la présence des églises Saint-Aignan et Sainte-Euverte, de la collégiale Saint-Pierre le Puellier et de l’évêché.

Rues sombres et calmes, à l’habitat résidentiel brut. La rénovation du patrimoine est loin d’être achevée.

Édifices Renaissance

A l’ouest et au nord du centre historique, les hôtels particuliers 16e et 17e s. témoignent des fortunes commerciales et politiques.

L’hôtel de Groslot, du nom d’une riche famille de tanneurs, est le plus remarquable. Construit pour le bailli d’Orléans, cet édifice Renaissance en briques et pierre, fut longtemps l’hôtel de ville. Il abrite toujours la salle des mariages.

A découvrir aussi : les hôtels Colas des Francs, Cabu, des Créneaux… Les 18e et 19e s. sont remis en valeur par les transformations urbaines des rues Jeanne d’Arc (reliant la cathédrale à la place du Général de Gaulle), Royale et de la République : immeubles cossus, façades haussmanniennes et arcades se combinent harmonieusement avec le ballet des tramways, dans leur livrée « sable de Loire ».

C’est aussi à cette période que sont construits le Conservatoire de musique et d’art dramatique et le musée des Beaux Arts.

Dompter le fleuve

Grâce à la Loire, Orléans est alors à l’apogée de son rayonnement commercial.

Un environnement que les habitants redécouvrent depuis les années 2005-2010 et l’aménagement des rives.

Le fleuve est toute l’histoire de la ville. « Orléans se trouve à l’endroit où la distance est la plus courte avec la Seine. Grâce aux transbordements, elle a relié les voies maritimes et fluviales avec Paris, témoigne Anne-Marie Royer-Pantin, auteur, conférencière et spécialiste du patrimoine régional.

Dès le Moyen Age, la corporation marinière s’organise en métiers, débardeurs, tanneurs, mouliniers, lavandières… Aux 17e et 18e s, avec l’essor du commerce maritime depuis le Nouveau Monde, Orléans est une immense plaque tournante ».

Une plaque tournante qui ne se contente pas d’échanger, mais met à profit sa situation pour transformer : le sucre des colonies est raffiné, le vin du Val de Loire, quand il n’est pas buvable, est muté en vinaigre.

Cette richesse ne fut possible que par des efforts constants sur la Loire. « Il a fallu dompter un fleuve indomptable, se protéger des crues, draguer inlassablement les bancs de sable… Ce fut un travail titanesque », éclaire Anne-Marie Royer-Pantin.

Aujourd’hui, le public reprend conscience de ce passé. La place de Loire restaurée regarde le fleuve droit dans les yeux. Les quais autorisent à nouveau la balade.

A vélo, on pourra remonter jusqu’à Saint-Jean-de-Braye et, vers l’aval, pédaler le long des serres et des cultures jusqu’à la réserve naturelle Saint-Mesmin et l’embouchure du Loiret. Tous les deux ans, le Festival de Loire réconcilie la ville avec ses activités fluviales.

Saint-Marceau, ex-quartier maraîcher

En franchissant le pont George V, construit en 1740 - que les Orléanais appellent toujours Pont Royal - on se souviendra aussi que Saint-Marceau, rive gauche, fut le quartier des maraîchers, nourricier de la ville.

On pourra même embarquer sur une toue, histoire de mieux connaître l’aventure fluviale que le chemin de fer mit finalement à terre.

Sur la lancée de sa rénovation, la ville s’est dotée d’équipements contemporains. Il y a d’abord eu, en 1994, la Médiathèque, place Gambetta.

Puis, en 2000, le pont de l’Europe sur la Loire, œuvre design signée Santiago Calatrava. En 2008, la gare d’Orléans a bénéficié d’une nouvelle livrée. En 2013 enfin, est inauguré, boulevard Rocheplatte, le nouveau FRAC Centre, un bâtiment audacieux nommé... Turbulences.

Après le « faire », reste à « faire savoir » aux visiteurs qu’Orléans a changé. En attendant, il n’est pas désagréable de profiter de la ville sans subir les contraintes d’une surfréquentation.

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Tags : loire, orléans, rust
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