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Retournement : le client redevient l’objet des préoccupations des compagnies

La chronique de Jean-Louis Baroux


Jean-Louis Baroux, expert aérien, note un changement de discours de la part des compagnies européennes, low cost ou régulières, sur ces deux dernières années. Un discours axé davantage sur la qualité du produit, et suivi par des actes. Après le recours au Yield Management à l’excès et des avions dépouillés à l’extrême, les compagnies ont décidé de replacer le client au centre de leurs préoccupations, de le choyer pour le garder.


Rédigé par Jean-Louis BAROUX le Vendredi 12 Décembre 2014

Gageons que les améliorations apportées par les compagnies aériennes ne s’arrêteront pas là. On commence juste à explorer les facilités que les nouvelles technologies peuvent apporter - DR : photo-libre.fr
Gageons que les améliorations apportées par les compagnies aériennes ne s’arrêteront pas là. On commence juste à explorer les facilités que les nouvelles technologies peuvent apporter - DR : photo-libre.fr
Depuis disons 2 ans, nous assistons à un retournement dans le transport aérien.

Finies les dérives vers des économies réalisées sur le compte des clients en diminuant la qualité du produit, finies les baisses de tarifs inconsidérées. La stratégie est en train de changer.

Il faut dire qu’on était arrivé bien bas. Le « Yield Management » employé à l’excès a fait des ravages considérables.

Aller chercher le dernier siège libre pour le vendre à n’importe quel prix a conduit les compagnies à une baisse constante de leur prix de vente,qu’elles ont compensé par une baisse également conséquente de leur qualité de service et à la suppression des commissions aux agents de voyages.

En fait, elles ont fait supporter à leurs clients et à leurs distributeurs les économies qu’elles n’ont pas été capables de réaliser dans leurs propres entreprises.

Les effets pervers du yield management ne sont pas terminés

Les effets pervers du « Yield Management » ne sont d’ailleurs pas terminés. J’ai pu voir sur Amadeus plus de 100 tarifs et règles tarifaires différents sur un même vol de la compagnie Air Austral entre Paris et la Réunion !

Comment voulez-vous, avec une telle pratique, que les clients puissent ne pas être frustrés puisque le prix est déconnecté du produit qu’on leur vend ?

Dans le même temps, on a vu l’arrivée des « low costs ».

Ceux-ci, pour se tailler une place dans un marché à priori saturé, ont mis en place une politique tarifaire des plus simples : « plus vous réservez tôt et moins ce sera cher, et mes tarifs sont imbattables et valables aussi bien en allers simples qu’en aller-retours ».

Mais pour justifier ces tarifs si bas, les « low costs » ont créé un produit volontairement dépouillé.

Cela leur permettait d’ailleurs de générer un complément de recettes non négligeable en faisant payer toutes les annexes au produit principal y compris l’utilisation des cartes de crédit pourtant seul moyen de paiement.

Le client redevient l’objet des préoccupations

Bref, on avait touché le fond. Les produits courts, moyens et long-courriers étaient dépouillés à l’extrême, les avions densifiés plus que raisonnablement et les services aéroportuaires proches de l’indigence.

Et les passagers devaient s’en contenter car de nouvelles couches de clientèle voulaient accéder à ce mode de transport, le tout largement encouragé par les constructeurs d’avion qui ont besoin de cette croissance pour maintenir leur « business modèle ».

Et puis, insensiblement les choses ont changé. Les aéroports ont réagi en premier. C’est assez normal car ils doivent faire preuve d’une anticipation bien supérieure à celle des compagnies.

Il faut dire que les clients européens se sont mis à voyager, en particulier en Asie, où ils ont pu expérimenter l’énorme différence de qualité entre les grandes plateformes asiatiques et les européennes.

Donc les Européens ont dû se mettre au diapason. Ils en sont encore très loin, mais le pli est pris.

Le client est devenu l’objet de leurs préoccupations, en fait le passager, je dirais l’usager est devenu un vrai client qu’il convient de choyer si on veut le garder.

Une stratégie axée davantage sur la qualité du produit

Les compagnies traditionnelles européennes ont également changé leur modèle.

On assiste depuis au moins deux ans, d’abord à des discours différents, axés davantage sur la qualité du produit, et ces discours sont suivis par des actes.

Les cabines sont en voie de restructuration, les sièges sont changés, la norme du siège inclinable à 180° est en train de s’imposer pour toutes les classes Affaires, de nouveaux sièges en classe Economie font leur apparition, ils sont à la fois plus légers et plus confortables et le service à bord est en voie d’amélioration, lente, certes, mais c’est une tendance de fond.

Et les « low costs » font également une évolution dans le même sens. Finies la recherche de la simplification du produit, place aux nouvelles facilités.

C’est le cas pour le choix des sièges à la réservation, l’allocation des sièges à l’embarquement ce qui évite des bousculades désagréables pour tout le monde, et de nouveaux services proposés à une clientèle affaires maintenant considérée comme stratégique par ces transporteurs.

Cela les a d’ailleurs conduits à utiliser les grandes plateformes au détriment des aéroports éloignés que certains avaient privilégiés jusque-là.

Gageons que les améliorations ne s’arrêteront pas là. On commence juste à explorer les facilités que les nouvelles technologies peuvent apporter.

Beaucoup ont commencé à les utiliser, ne serait-ce que pour obtenir sa carte d’embarquement sur son smartphone. Mais ce n’est qu’un début. IATA l’a d’ailleurs bien compris en lançant son concept NDC (New Distribution Capability).

Reste à vendre le bon produit à un prix convenable qui permettre aux compagnies de prospérer.

Il y va de l’intérêt général, y compris celui des consommateurs. Pour cela, les gestionnaires du transport aérien devront apprendre à maîtriser les techniques de la concurrence. Et ils ont encore du chemin à faire.

Retournement : le client redevient l’objet des préoccupations des compagnies
Jean-Louis Baroux, est l'ancien président d'APG (Air Promotion Group) et le créateur du CAF (Cannes Airlines Forum) devenu le World Air Forum.

Grand spécialiste de l'aérien, il a signé aux éditions L'Archipel ''Compagnies Aériennes : la faillite du modèle'', un ouvrage que tous les professionnels du tourisme devraient avoir lu.

Les droits d'auteur de l'ouvrage seront reversés à une association caritative. On peut l'acquérir à cette adresse : www.editionsarchipel.com..

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Tags : baroux
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Commentaires

1.Posté par Ricordel le 12/12/2014 07:04 | Alerter
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Le yield a atteint ses limites certes, mais garde quand même son intérêt, ce sont ses dérives qu'il faut combattre. Quand a la place du client au centre des préoccupations, c'est un vaste chantier qui concerne nombre de métiers ( T.O., hotels, taxis...)

2.Posté par dom31 le 12/12/2014 10:24 | Alerter
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Vaste chantier : le client... D'accord avec Ricordel, c'est un travail qui devrait être entrepris par tous les métiers liés au tourisme. Mettre non pas usager mais client en-tête de tous les sujets avant rétribution, remises arrières, frais généraux, coût des plateaux, frais d'Internet ..... Et enfin, former le personnel à comprendre que le chèque qu'il reçoit en fin de mois, c'est le client qui le lui fait !
Dire que ce sont les Cies du Moyen Orient ou d'Asie qui poussent les Françaises à essayer de rattraper leur retard... "On commence juste à explorer les facilités que les nouvelles technologies peuvent apporter." Cela me fait penser au secteur de l'Automobile français qui a attendu de perdre des parts de marché avant de comprendre que le client voulait de la qualité et de l'innovation.

3.Posté par Baladi le 12/12/2014 10:40 (depuis mobile) | Alerter
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Monsieur Ricordel
Il n''est pas nécessaire d''espérer pour entreprendre ....(ad libidum )
baladi
PS JL BAROUX est constant dans ses analyses et cela est rassurant

4.Posté par RICORDEL le 12/12/2014 14:10 | Alerter
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D'accord avec BALADI, c'est pour cela qu'après 25 années comme Responsable d'Agences, je suis devenu formateur afin d'inspirer à mes pairs la notion d'expérience client.
Je crois infiniment en notre métier et dans l’humain qui en est le cœur. Le technologique doit rester un outil et le web to store un système à apprendre et à mettre en place pour que le store reste le but final du processus d'achat par le client.

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