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Suppression commissions, le transport aérien a dégradé sa recette de 25%

la chronique de Jean-Louis Baroux


Le transport aérien fait un chiffre d’affaires global de 680 milliards de dollars cette année en progression de 5% par an, et cela va durer encore des dizaines d’années, si on en croit les analystes et d’abord les deux grands constructeurs mondiaux que sont Boeing et Airbus. les résultats dégagés par ce secteur d’activité sont tout simplement minables : 0,6% au mieux cette année et ce n’est même pas encore sûr. Cela représente 4,08 milliards de dollars. Une misère !


Rédigé par Jean-Louis BAROUX le Lundi 29 Octobre 2012

La vérité est très simple : dans son ensemble, le transport aérien vend son produit au-dessous de son prix de revient - Photo AF Philippe Delafosse
La vérité est très simple : dans son ensemble, le transport aérien vend son produit au-dessous de son prix de revient - Photo AF Philippe Delafosse
Le volume du transport aérien doublera dans 12 ans et il va falloir alors absorber 3 milliards de passagers supplémentaires, excusez du peu.

Cela signifie également que le chiffre d’affaires des compagnies va doubler en 10 ans pour atteindre la somme faramineuse de 1,3 trilliards de dollars. Voilà qui peut donner le vertige.

Oui, mais pendant ce temps les résultats dégagés par ce secteur d’activité sont tout simplement minables : 0,6% au mieux cette année et ce n’est pas encore sûr. Cela représente 4,08 milliards de dollars. Une misère.

Et encore ce résultat n’est-il pas réparti également, loin s’en faut. On trouvera encore un profit significatif dans quelques compagnies du Golfe, d’Asie et d’Amérique du Sud, profit noyé dans l’océan de pertes des autres transporteurs traditionnels.

Les LCC (Low Costs Carriers) sont à peine mieux lotis. Sur 200 transporteurs, seuls quelques petites dizaines arrivent à tirer leur épingle du jeu, certaines très bien d’ailleurs.

Le transport aérien vend son produit au-dessous de son prix de revient

Alors les dirigeants peuvent toujours continuer à accuser la terre entière de leurs mauvais résultats.

Certes le transport aérien supporte de nombreuses taxes, mais n’est-ce pas le cas de l’hôtellerie ou des télécommunications, par exemple ? Et quel autre secteur d’activité bénéficiant de la même croissance constante sur une aussi longue période perd de l’argent ?

La vérité est très simple : dans son ensemble, le transport aérien vend son produit au-dessous de son prix de revient.

Oh, certes, il ne manque pas grand chose : à peine 5% de chiffre d’affaires sans pour autant bouger les charges.

Cela représenterait une marge suffisante pour ne pas mettre constamment les transporteurs sur la corde raide. On parlerait alors non pas de 4 petits milliards de profit global, mais de 34 milliards.

Et il n’est pas normal que cette profession n’arrive pas à dégager ce volume de résultat.

Arriver à faire payer le vrai prix au client

Il faut arriver à faire payer le vrai prix au client. Or par un paradoxe qui m’étonne, cette profession s’acharne sur les produits dérivés alors qu’elle a oublié le principal.

Elle a cherché des économies là où il ne le fallait pas, c’est-à-dire les fournisseurs de services et les intermédiaires alors que ce sont les seuls capables de faire remonter la recette.

Car il ne faut plus compter sur l’amélioration des remplissages : avec un taux supérieur à 80% en moyenne annuelle, il est clair qu’on a atteint la limite.

Alors il faut arrêter la dérive des promotions et autres offres tarifaires incohérentes qui n’ont pour but final que de mettre dans l’esprit des clients, de faux repères.

Il n’est pas normal de trouver des tarifs transatlantiques au-dessous de 1000€ en classe économique, comme il n’est d’ailleurs pas normal de trouver des tarifs proches de 4000 € pour le même service.

Au total plus personne ne veut payer un tarif jugé trop élevé et les tarifs les plus bas ne sont tout simplement pas sérieux.

Une récente étude montre que la vente moyenne réalisée par les agents de voyages rapporte 100 $ (500$ contre 400$) de plus que cette faite directement par les compagnies alors qu’elle ne coûte que 4$ de plus (25$ contre 21$).

Le transport aérien a dégradé sa recette de 25%

Pourquoi cette vérité première n’est-elle pas comprise par des dirigeants qui sont pourtant intelligents, personne ne met cela en doute.

Et on voit la tendance au contrôle direct des ventes, se poursuivre.

Les études menées par IATA ont pour tendance forte l’élimination des intermédiaires du transport aérien.

Il faut dire, à sa décharge que IATA est sous la coupe de ses membres des plus influents qui sont en fait les grands transporteurs occidentaux en en particulier les américains.

Or ce sont eux-mêmes qui sont dans les plus grandes difficultés. Rappelons s’il était nécessaire que toutes les grandes compagnies américaines sont passées par la case du Chapter 11 autrement dit le dépôt de bilan, pour avoir justement suivi une politique folle de conquête de parts de marché à coups de rabais.

Ce n’est certainement pas en se passant des seuls intermédiaires qui ont une relation forte et parfois très personnelle avec les clients que le transport aérien retrouvera sa santé économique.

Pour avoir voulu économiser la commission des agents de voyages qui se montait à 7% ou 9% le transport aérien a dégradé sa recette de 25%.

Et c’est ce qui l’a mis dans les difficultés qu’il traverse.

Jean-Louis Baroux, est l'ancien président d'APG (Air Promotion Group) et le créateur du CAF (Cannes Airlines Forum) devenu le World Air Forum.

Grand spécialiste de l'aérien, il a signé aux éditions L'Archipel ''Compagnies Aériennes : la faillite du modèle'', un ouvrage que tous les professionnels du tourisme devraient avoir lu.

Les droits d'auteur de l'ouvrage seront reversés à une association caritative. On peut l'acquérir à cette adresse : www.editionsarchipel.com

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Tags : baroux
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Commentaires

1.Posté par Barthelemy le 31/10/2012 07:06 | Alerter
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Enfin un point de vue coherent
La course au volume et au part de marche n'a jamais fait de resultat sauf un nivellement par le Bas et du chômage dans les petites entreprises.
Le client doit payer le vrai prix du produit ou du service rendu.
Les services marketing ont casses les repères
Tiens pourquoi pas :
A quand le retour aux commissions, curieux de voir les effets sur les marges de l'ensemble des opérateurs et sur l'emploi.
Bonne journee

2.Posté par Colette VIEIRA DA SILVA PDG /CROISITOUR le 31/10/2012 09:27 | Alerter
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Le bon sens paysan reviendrait il ? la course au volume pour conquérir des parts de marché à ses concurrents a entrainé des vagues d'embauches proportionnelles au volume escompté en négligeant l'essentiel , le profit , la rentabilité de l'entreprise . Nous sommes en plein dans ce constat et en pleine crise financière internationale ,il est temps de revenir à des calculs simples de ratios construits sur la réalité économique des entreprises
Bonne journée.

3.Posté par Romain le 31/10/2012 09:28 | Alerter
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"Une récente étude montre que la vente moyenne réalisée par les agents de voyages rapporte 100 $ (500$ contre 400$) de plus que cette faite directement par les compagnies"

Que faut il comprendre ? Qu'un client demandant un Paris-Boston va payer plus cher son billet d'avion en passant par une agence (sans parler du service fee) que s'il passe en direct ? Est ce que ca veut dire que l'agence ne trouve pas le meilleur prix pour son client ?

Ou alors, c'est que les agences s'adressent à une clientèle plus business et dans ce cas rien d'étonnant à ce que le montant moyen soit plus élevé.

Il ne faut pas mélanger les deux sujets : oui il est possible que les compagnies aériennes ne vendent pas au juste prix les billets d'avion mais est ce que c'est directement au montant de la commission, rien n'est moins sur

4.Posté par biot le 31/10/2012 09:35 | Alerter
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Bravo pour cet article édifiant. Nous savons tous que les cies aériennes fonctionnent toutes de la te même façon sur un modèle obsolete et absurde... mais elles le font toutes.Espérons qu'un jour .....

5.Posté par Pierre le 31/10/2012 10:14 | Alerter
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Ce n'est pas en augmentant les prix des billets que les clients seront plus nombreux,mais les lows cost,ont obligés les cie aeriennes a revoir leurs tarifs de plus les cies du golfe poussent a cette baisse des tarifs,donc ce n'est pas en ajoutant des commissions au prix du billet que les clients viendront en masse.
Plus la production d'avions augmentera,et avec ça l'augmentation des cies,plus,il sera difficile de tenir une ligne de tarifs convenable,neamoins a l'heure actuelle,le decalage entre les tarifs,les possibilitées financiere du grand public et les desirs des professionnels,il y a peu d'issue propice dans la periode a venir...le contraire serait exellent.

6.Posté par Twix le 31/10/2012 10:17 | Alerter
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"Pour avoir voulu économiser la commission des agents de voyages qui se montait à 7% ou 9% le transport aérien a dégradé sa recette de 25%."

La dégradation de la recette du transport aérien au cours des 10 dernières années ne serait elle pas plutôt liée à la montée en puissance des low costs et des compagnies du golfe, densifiant copieusement la pression concurrentielle ? Le boom du carburant en peu de temps freinant les efforts de productivité ? Une crise économique majeure ininterrompue depuis 4 ans changeant les habitudes notamment des voyageurs d'affaires ? Certes le transport aérien doit se remettre en question (et je crois qu'en trois ans, les majors en ont pris le chemin) et arrêter notamment la course aux capacités afin de ne pas payer aussi cher des parts de marché à faible valeur ajoutée, mais lier la dégradation de la recette à la baisse de la commission des agents de voyages, c'est un raisonnement inexact... A mon humble avis...

D'ailleurs suivant le même raisonnement, si la commission était restée en %, les revenus des agences n'auraient ils pas baissé dans ce cas de 25% ?

En revanche, bien joué pour relancer le débat!

7.Posté par FABRE Jean Claude le 31/10/2012 10:25 | Alerter
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Le transport aérien n'est pas épargné par l'obligation de compétitivité, d'autant qu'il devra s'adapter aux conditions financières des nouveaux clients issus en grande partie des zones émergentes.
Malheureusement, par sa dimension macro économique, il se complet dans un monde "tabou" sur toute la chaîne d'interventions, de la réglementation pléthorique faussement libérée, de la construction aéronautique protégée, et par la structure même des compagnies aériennes, les contraintes sont telles qu'il faut plus de personnel, notamment au sol, que de passagers pour faire voler un avion.
Il est urgent de recalibrer l'ensemble du marché ! sans se passer des réseaux de distribution. Quelle trajectoire désastreuse aggravée prendrait le secteur de l'automobile sans ses concessionnaires !!!

8.Posté par abisset le 31/10/2012 10:45 | Alerter
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RIEN A RAJOUTER A L'ANALYSE DE JEAN LOUIS BAROUX !
Comme toujours c'est pertinent et criant de vérité.
Incroyable que les Cies aériennes persistent dans leurs erreurs passées.
L'histoire ne leur apprend rien !

9.Posté par Pirate le 31/10/2012 15:28 | Alerter
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Bravo Jean Louis, c'est très clair. Mais, il y a un petit élément que j'apporte à votre moulin.
Il y a quelques années, les agv étaient commissionnées, ok donc en matière comptable, on avait un net qui entrait en recette pax. Mais que représentait ce net? ...Le prix du siège,( le plateau le salaire des pilotes, des naviguants le lease avion, le fuel), de l'apt, du personnel sol,de la distribution, etc etc) Aujourd'hui on a un net et des taxes, une multitudes de taxes, apt qui elles sont reversées aux apt, de sureté, idem aux apt et la fameuse taxe fuel, qui elle n'est reversée à personne ..., L'ensemble de ces taxes sont souvent supérieurs ...Si les cies incluaient, la surcharge pétrole...Ne serions nous pas au dessus des fameux 5% du prix de revient, dont vous parlez ?
Aujourd'hui, c'est comptabilisé comme une recette annexe, comme le duty free, pas en recette unitaire pax...

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