Les rencontres eTourisme de Pau ont ouvert sur un débat de Paul Arseneault sur le fameux monde d'après, mauvaise nouvelle il n'aura pas lieu, mais bonne nouvelle, les choses changent... ou presque - Crédit photo : RP
Chacun a vécu la pandémie comme il a pu.
Pour certains cela a été un épisode plus ou moins confortable, sans surcharge sociale, pour d'autres comme Paul Arseneault, le vice-président Innovation du MT Lab, la crise a été plus que troublante.
"J'ai et nous avons ressenti beaucoup de choses, comme de l'angoisse et de l'inquiétude et même un sentiment d'injustice," introduit cet observateur éclairé du tourisme canadien et français.
Les acteurs du secteur ont pu partager aussi cela, alors que les frontières sont restées durablement fermées et que le tourisme a été pointé du doigt. Cet arrêt forcé a poussé l'industrie à se rassembler et se regarder, pour réfléchir aux conséquences du coronavirus.
Si des réflexions ont été menés et des questions posées, pour Paul Arseneault, c'est un peu comme si 2020 et 2021 n'avaient rien changé. La révolution attendra ou n'aura pas lieu.
"Il n'y a pas de monde d'après, mais un monde qui continue, avec des améliorations ou des ajustements. Je ne pense pas qu'il faille tout réinventer, mais trouver de nouveaux moyens de répondre aux attentes," poursuit Sophie Lacour, DG d'Advanced Tourism.
Pour certains cela a été un épisode plus ou moins confortable, sans surcharge sociale, pour d'autres comme Paul Arseneault, le vice-président Innovation du MT Lab, la crise a été plus que troublante.
"J'ai et nous avons ressenti beaucoup de choses, comme de l'angoisse et de l'inquiétude et même un sentiment d'injustice," introduit cet observateur éclairé du tourisme canadien et français.
Les acteurs du secteur ont pu partager aussi cela, alors que les frontières sont restées durablement fermées et que le tourisme a été pointé du doigt. Cet arrêt forcé a poussé l'industrie à se rassembler et se regarder, pour réfléchir aux conséquences du coronavirus.
Si des réflexions ont été menés et des questions posées, pour Paul Arseneault, c'est un peu comme si 2020 et 2021 n'avaient rien changé. La révolution attendra ou n'aura pas lieu.
"Il n'y a pas de monde d'après, mais un monde qui continue, avec des améliorations ou des ajustements. Je ne pense pas qu'il faille tout réinventer, mais trouver de nouveaux moyens de répondre aux attentes," poursuit Sophie Lacour, DG d'Advanced Tourism.
Tourisme : "nous repartons comme avant, sauf que ce n'est pas l'enjeu"
Durant tous ces mois, où les agences ont baissé le rideau, les avions sont bloqués sur les tarmacs faute de clients, le voyage n'a jamais été autant dénigré.
"Il a été accusé de tous les maux, j'ai même refusé des interviews à la télévision pour éviter le tourisme bashing," dévoile la chercheuse française.
Et pourtant "j'ai déjà dénoncé par le passé le fait que le tourisme de masse est une invention médiatico-politique." Se sentant acculés, et comme s'il fallait se racheter une virginité, les professionnels ont pensé que le 1er confinement c'était le Grand Soir.
Malheureusement, le monde d'après n'est pas pour maintenant, il suffit de voir les chiffres des agences de voyages et des tour-opérateurs depuis quelques jours.
D'ailleurs Rémy Knafou, professeur à la Sorbonne et auteur de "Réinventer le tourisme. Sauver nos vacances sans détruire le monde" craignait exactement ce qu'il se passe.
"J'ai écrit ce livre justement parce que j'avais peur que nous repartions comme si de rien n'était. Nous repartons comme avant, sauf que l'enjeu est de ne pas repartir comme avant, pour éviter d'aller dans le mur," explique le géographe spécialiste du tourisme.
Si l'industrie ne prend pas le virage de sa durabilité qu'elle avait si bien analysé en mars 2020, la question de sa survie risque de vite se poser.
Sauf qu'au final "les personnes (les professionnels du tourisme, ndlr) ont pris leurs fantasmes pour des réalités. La conclusion était que le tourisme de masse est terminé, pour laisser place au tourisme de sens" pense Paul Arseneault
Le dernier IFTM Top Resa est venu nous le rappeler. Que ce soit le tourisme ou l'économie, aucun des deux n'est devenu plus vertueux.
"Dans le même temps, si vous regardez l'explosion des ventes d'Amazon, nous ne sommes pas entrés dans une économie circulaire ou plus vertueuse.
Ce sont des fantasmes" poursuit le professeur canadien.
"Il a été accusé de tous les maux, j'ai même refusé des interviews à la télévision pour éviter le tourisme bashing," dévoile la chercheuse française.
Et pourtant "j'ai déjà dénoncé par le passé le fait que le tourisme de masse est une invention médiatico-politique." Se sentant acculés, et comme s'il fallait se racheter une virginité, les professionnels ont pensé que le 1er confinement c'était le Grand Soir.
Malheureusement, le monde d'après n'est pas pour maintenant, il suffit de voir les chiffres des agences de voyages et des tour-opérateurs depuis quelques jours.
D'ailleurs Rémy Knafou, professeur à la Sorbonne et auteur de "Réinventer le tourisme. Sauver nos vacances sans détruire le monde" craignait exactement ce qu'il se passe.
"J'ai écrit ce livre justement parce que j'avais peur que nous repartions comme si de rien n'était. Nous repartons comme avant, sauf que l'enjeu est de ne pas repartir comme avant, pour éviter d'aller dans le mur," explique le géographe spécialiste du tourisme.
Si l'industrie ne prend pas le virage de sa durabilité qu'elle avait si bien analysé en mars 2020, la question de sa survie risque de vite se poser.
Sauf qu'au final "les personnes (les professionnels du tourisme, ndlr) ont pris leurs fantasmes pour des réalités. La conclusion était que le tourisme de masse est terminé, pour laisser place au tourisme de sens" pense Paul Arseneault
Le dernier IFTM Top Resa est venu nous le rappeler. Que ce soit le tourisme ou l'économie, aucun des deux n'est devenu plus vertueux.
"Dans le même temps, si vous regardez l'explosion des ventes d'Amazon, nous ne sommes pas entrés dans une économie circulaire ou plus vertueuse.
Ce sont des fantasmes" poursuit le professeur canadien.
"Les acteurs historiques ont beaucoup de mal à intégrer la notion de développement durable"
Malgré tout, le monde n'est pas revenu comme avant. Les masques ont fait leur apparition, le gel hydroalcoolique s'est imposé, bref la sécurité est devenue une norme, sans doute durable, dans le tourisme.
A bien y regarder, un petit quelque chose à changé
"Nous sommes passés d'un tourisme de masse à un tourisme de masque," lance non sans humour le professeur.
Une phrase non sans double sens, puisque de nombreuses innovations ont enfin trouvé leurs usages.
D'un outil pour calculer le risque de propagation du coronavirus à des technologies dans le but de désinfecter les surfaces, ou encore les objets sans contact, autant de choses que la crise a légitimées.
"Dans le même temps, l'environnement a été un vrai enjeu pour le tourisme, alors que seulement 3% de la planète est écologiquement intacte" affirme Sophie Lacour.
C'est devenu un vrai sujet durant les grands enfermements que nous avons tous connus. Un désir de durabilité s'est installé.
"Les acteurs historiques du tourisme ont beaucoup de mal à intégrer cette notion de développement durable, alors que c'est quelque chose que les populations désirent.
Il faut aller au-devant des besoins de vos clients," alerte Sophie Lacour.
Bien que cela ne touche pas toujours la branche outgoing, cette année de nombreuses initiatives ont été développées pour une permettre une plus grande durabilité à l'industrie.
A Amsterdam, les touristes ramassent des déchets et voient le prix de leur balade décroitre. En Espagne les mégots ramassés se transforment en pintes de bière et aux USA une groupe de voyageurs a dû passer ses vacances avec un objectif : ne pas remplir plus d'une bouteille de déchets durant leur séjour !
L'histoire du colibri, vous connaissez ?
L'enjeu des prochaines années pour les professionnels sera de décomplexer les touristes en donnant plus de sens à leurs voyages. Mauvaise nouvelle pour ceux qui ont oublié de prendre le temps de réfléchir, car la porte vient de se refermer.
"Nous avons vécu une petite parenthèse qui ne reviendra pas. Il est trop tard pour se poser des questions. Il y a une seule leçon à tirer de cette crise : le tourisme est une maximisation sous contrainte."
A bien y regarder, un petit quelque chose à changé
"Nous sommes passés d'un tourisme de masse à un tourisme de masque," lance non sans humour le professeur.
Une phrase non sans double sens, puisque de nombreuses innovations ont enfin trouvé leurs usages.
D'un outil pour calculer le risque de propagation du coronavirus à des technologies dans le but de désinfecter les surfaces, ou encore les objets sans contact, autant de choses que la crise a légitimées.
"Dans le même temps, l'environnement a été un vrai enjeu pour le tourisme, alors que seulement 3% de la planète est écologiquement intacte" affirme Sophie Lacour.
C'est devenu un vrai sujet durant les grands enfermements que nous avons tous connus. Un désir de durabilité s'est installé.
"Les acteurs historiques du tourisme ont beaucoup de mal à intégrer cette notion de développement durable, alors que c'est quelque chose que les populations désirent.
Il faut aller au-devant des besoins de vos clients," alerte Sophie Lacour.
Bien que cela ne touche pas toujours la branche outgoing, cette année de nombreuses initiatives ont été développées pour une permettre une plus grande durabilité à l'industrie.
A Amsterdam, les touristes ramassent des déchets et voient le prix de leur balade décroitre. En Espagne les mégots ramassés se transforment en pintes de bière et aux USA une groupe de voyageurs a dû passer ses vacances avec un objectif : ne pas remplir plus d'une bouteille de déchets durant leur séjour !
L'histoire du colibri, vous connaissez ?
L'enjeu des prochaines années pour les professionnels sera de décomplexer les touristes en donnant plus de sens à leurs voyages. Mauvaise nouvelle pour ceux qui ont oublié de prendre le temps de réfléchir, car la porte vient de se refermer.
"Nous avons vécu une petite parenthèse qui ne reviendra pas. Il est trop tard pour se poser des questions. Il y a une seule leçon à tirer de cette crise : le tourisme est une maximisation sous contrainte."
"Notre travail est un travail de proximité, c'est presque fini les missions à l'étranger"
Que ce soit le fameux rayon des 100 km, le pass sanitaire, les frontières fermées... Le touriste est capable de se débrouiller et de vivre malgré les contraintes. Il n'a pas besoin de l'industrie pour vivre ses vacances.
De quoi rendre humble n'importe quelle entreprise du secteur.
"Il a fait ça sans aucun problème. Alors vous vous demandez : quelle est notre valeur ajoutée ? Notre travail est un travail de proximité, c'est presque fini les missions à l'étranger.
Il faut revoir nos approches, nos façons de faire et se confronter à la réalité," développe Paul Arseneault.
Des sondages ont été faits en nombre sur les intentions des voyageurs, à la sortie des confinements et de la crise. C'est un peu comme de demander à des prisonniers comment ils envisagent leurs sorties, la réponse sera toujours la même : vivre comme avant, mais mille fois plus.
"Nous avons conclu que cela allait être l'ère du Revenge Travel.
Nous avons juste posé les mauvaises questions au mauvais moment. Le touriste n'attend pas ce que les institutionnels ou les professionnels vont dire, Il s'est organisé," poursuit le Canadien.
Il y a eu beaucoup d'insouciance durant ces longs mois. Entre la quête de sens et de légitimité, la réalité a mis une claque à tout le monde. Et mauvaise nouvelle, nous n'en avons pas terminé avec le coronavirus ou, du moins, d'en subir les conséquences.
"Ce n'est pas fini, nous sommes en plein coeur de la crise du covid. Il n'était pas une bonne idée de crier sous tous les toits que le tourisme est le secteur le plus touché par la crise."
En même temps, imaginez-vous à la place d'un jeune bachelier quelques secondes. Vous débordez d'ambition, de valeurs et d'envie de réussite. Il serait presque normal, voire même évident, de ne pas vouloir faire carrière dans une industrie qui souffre autant.
"Nous nous sommes flagellés durant toute cette crise et maintenant on se retrouve avec une pénurie d'emploi," analyse Paul Arseneault, professeur à l'université de Québec.
De quoi rendre humble n'importe quelle entreprise du secteur.
"Il a fait ça sans aucun problème. Alors vous vous demandez : quelle est notre valeur ajoutée ? Notre travail est un travail de proximité, c'est presque fini les missions à l'étranger.
Il faut revoir nos approches, nos façons de faire et se confronter à la réalité," développe Paul Arseneault.
Des sondages ont été faits en nombre sur les intentions des voyageurs, à la sortie des confinements et de la crise. C'est un peu comme de demander à des prisonniers comment ils envisagent leurs sorties, la réponse sera toujours la même : vivre comme avant, mais mille fois plus.
"Nous avons conclu que cela allait être l'ère du Revenge Travel.
Nous avons juste posé les mauvaises questions au mauvais moment. Le touriste n'attend pas ce que les institutionnels ou les professionnels vont dire, Il s'est organisé," poursuit le Canadien.
Il y a eu beaucoup d'insouciance durant ces longs mois. Entre la quête de sens et de légitimité, la réalité a mis une claque à tout le monde. Et mauvaise nouvelle, nous n'en avons pas terminé avec le coronavirus ou, du moins, d'en subir les conséquences.
"Ce n'est pas fini, nous sommes en plein coeur de la crise du covid. Il n'était pas une bonne idée de crier sous tous les toits que le tourisme est le secteur le plus touché par la crise."
En même temps, imaginez-vous à la place d'un jeune bachelier quelques secondes. Vous débordez d'ambition, de valeurs et d'envie de réussite. Il serait presque normal, voire même évident, de ne pas vouloir faire carrière dans une industrie qui souffre autant.
"Nous nous sommes flagellés durant toute cette crise et maintenant on se retrouve avec une pénurie d'emploi," analyse Paul Arseneault, professeur à l'université de Québec.
"il ne faut pas faire des incantations, ne pas réinventer le tourisme post pandémie"
Si le tableau est assez sombre, il devrait s'assombrir encore dans les prochains mois, avec l'arrêt des aides et le retour à la vie normale. Un autre problème pointe le bout de son nez.
Alors que les effectifs des entreprises du secteur se réduisaient, Amazon et d'autres embauchaient à tour de bras, avec parfois des salaires bien plus élevés que dans le tourisme, notamment au Canada.
Les salariés dont le membre éminent des GAFA a besoin sont souvent peu ou pas qualifiés, soit autant de personnes qui ne rejoindront pas le secteur du tourisme.
Si notre industrie ne se réforme pas ou ne fait pas sa révolution RH, alors l'avenir risque de devenir très sombre.
"Il y aura des nouvelles pratiques sociales et de travail qui impliqueront des nouveaux modèles d'affaires. Je vous invite à réfléchir, il ne faut pas faire des incantations, ne pas réinventer le tourisme post pandémie, il faut réfléchir aux changements, aux nouvelles approches," affirme le vice-président Innovation du MT Lab.
Pour les plus pessimistes au bord de la rupture en lisant cet article, une note d'espoir a été apportée par Sophie Lacour. Notre existence va être contrainte dans les prochaines décennies, en raison du dérèglement et/ou urgence climatique.
Qu'à cela ne tienne, nous pouvons en faire une opportunité.
"Nous nous rendons compte qu'en sociologie, les modes se créent non pas en raison des désirs, mais parfois en raison des contraintes. Le Staycation est apparu au Royaume-Uni lors de la crise économique de 2007, le coronavirus est son avènement," révèle la docteur dans les sciences de la communication.
Ce n'est pas tout, elle a aussi créé un nouveau segment de touristes, avec les télétravailleurs. Un point déjà soulevé par Sophie Lacour, lors de l'IFTM Top Resa.
"Le futur sera au tout sécurisé, à l'abri des virus et devra être durable. Les gens veulent vraiment du développement durable, ce n'est pas une tendance.
La déconnexion est aussi l'une des nouvelles normes," conclut Sophie Lacour.
Et si le futur pouvait tout simplement être de vivre des vacances comme un moment hors du temps, sans connexion, sans peur et sans animosité...
Alors que les effectifs des entreprises du secteur se réduisaient, Amazon et d'autres embauchaient à tour de bras, avec parfois des salaires bien plus élevés que dans le tourisme, notamment au Canada.
Les salariés dont le membre éminent des GAFA a besoin sont souvent peu ou pas qualifiés, soit autant de personnes qui ne rejoindront pas le secteur du tourisme.
Si notre industrie ne se réforme pas ou ne fait pas sa révolution RH, alors l'avenir risque de devenir très sombre.
"Il y aura des nouvelles pratiques sociales et de travail qui impliqueront des nouveaux modèles d'affaires. Je vous invite à réfléchir, il ne faut pas faire des incantations, ne pas réinventer le tourisme post pandémie, il faut réfléchir aux changements, aux nouvelles approches," affirme le vice-président Innovation du MT Lab.
Pour les plus pessimistes au bord de la rupture en lisant cet article, une note d'espoir a été apportée par Sophie Lacour. Notre existence va être contrainte dans les prochaines décennies, en raison du dérèglement et/ou urgence climatique.
Qu'à cela ne tienne, nous pouvons en faire une opportunité.
"Nous nous rendons compte qu'en sociologie, les modes se créent non pas en raison des désirs, mais parfois en raison des contraintes. Le Staycation est apparu au Royaume-Uni lors de la crise économique de 2007, le coronavirus est son avènement," révèle la docteur dans les sciences de la communication.
Ce n'est pas tout, elle a aussi créé un nouveau segment de touristes, avec les télétravailleurs. Un point déjà soulevé par Sophie Lacour, lors de l'IFTM Top Resa.
"Le futur sera au tout sécurisé, à l'abri des virus et devra être durable. Les gens veulent vraiment du développement durable, ce n'est pas une tendance.
La déconnexion est aussi l'une des nouvelles normes," conclut Sophie Lacour.
Et si le futur pouvait tout simplement être de vivre des vacances comme un moment hors du temps, sans connexion, sans peur et sans animosité...