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Tourisme durable : en Malaisie, l’engagement du mythique Datai Langkawi

Un hôtel niché au cœur d’une forêt tropicale primaire vieille de dix millions d’années


En 2019, l'établissement Datai Langkawi a été la première organisation au monde à recevoir le certificat EarthCheck ECO (Argent) pour le tourisme terrestre. Sous la houlette de son directeur général, l'Aveyronnais Arnaud Girodon, cet hôtel de légende multiplie les initiatives en matière de respect de l'environnement, de durabilité et d’écotourisme.


Rédigé par le Mercredi 4 Janvier 2023

Les villas de luxe avec piscine privée du Datai Langkawi sont nichées au cœur d’une forêt tropicale primaire vieille de dix millions d’années ( © Eric Martin/Datai Langkawi)
Les villas de luxe avec piscine privée du Datai Langkawi sont nichées au cœur d’une forêt tropicale primaire vieille de dix millions d’années ( © Eric Martin/Datai Langkawi)
Elu à deux reprises "meilleur hôtel du monde" par les lecteurs du prestigieux magazine anglais de voyage de luxe « Condé Nast Traveller », le Datai est un hôtel de légende dans l’univers mondial du luxe.

Il figure d'ailleurs de nouveau dans la « gold list » des plus beaux hôtels du monde du Condé Nast Traveller.

Ouvert depuis 1993, il est niché au cœur d’une forêt tropicale primaire vieille de dix millions d’années. Elle borde une des plus belles plages du monde, sur l'île principale de l'archipel de Langkawi, situé à la pointe nord-est de la Malaisie, au large de la Thaïlande.

Cet établissement qui compte désormais 52 chambres, 13 suites et 57 villas - dont 15 de très grand luxe - perdues dans la végétation, pratique des tarifs "encore abordables" compte tenu du luxe déployé : 600 euros la nuit pour une chambre, 1 200 euros pour une villa, mais, bien sûr, 1 8000 euros pour la plus grande de ses villas de luxe.

N'empêche, dès l'origine, son ADN a tenu en une phrase choc : « l'homme et la nature en parfaite harmonie ». L'intégration du resort dans son exceptionnel environnement a, en effet, été particulièrement soigné.


Au cœur d'une forêt primaire...

Pour laisser intacte la plage au bord de la mer d'Adaman, ce complexe hôtelier qui est organisé autour d'une grande piscine centrale au beau milieu de la jungle - un grand escalier mène au spa et aux villas - a été construit à 300 mètres du rivage. Et s'il se trouve bel et bien en pleine forêt, les grands arbres ont été préservés.

Se voulant pionnier dans le domaine de l'écologie, le Datai Langkawi avait aussi chargé, dès le départ, un naturaliste de faire découvrir aux clients la nature qui l'environne.

Depuis qu'il a pris la direction de cet hôtel de luxe, il y a huit ans, l'Aveyronnais Arnaud Girodon a mis les bouchées doubles, jusqu'à faire de l'engagement en matière de respect de l'environnement, de durabilité et d’écotourisme la nouvelle marque de fabrique de cet hôtel qui a rouvert en 2018, après un an et soixante millions d'euros de travaux de rénovation.

Pour mener à bien cette opération et ranimer l'âme de l'hôtel qui s'était un peu dégradé au fil du temps, Arnaud Girodon a fait appel au designer français Didier Lefort. Celui-ci connaissait bien l'hôtel puisque l’architecte australien Kerry Hill avait déjà fait appel à lui en 1993.

Pour sa deuxième intervention au Datai, Didier Lefort a été secondé par son fils Quentin. Bien sûr, il n’était pas question de tout changer, seulement de retrouver l’ADN d’origine.

Ainsi, les chambres ont été totalement repensées et redécorées dans des matériaux et des tons plus modernes tandis que, dans les salles de bains, la pierre composite a remplacé le marbre blanc de Langkawi dont les carrières sont aujourd’hui fermées.

Les "quatre piliers" du "Data pledge"

Les singes à lunettes font partie des espèces que les clients du Datai peuvent croiser dans la forêt ( © Eric Martin/ Datai Langkawi)
Les singes à lunettes font partie des espèces que les clients du Datai peuvent croiser dans la forêt ( © Eric Martin/ Datai Langkawi)
En parallèle, Arnaud Girodon a voulu amplifier les contacts des clients avec la nature. Trois guides naturalistes les accompagnent désormais lors de randonnées dans la mangrove et dans la forêt jusqu'à un spectaculaire pont-passerelle suspendu à quinze mètres au-dessus de la rivière.

Ainsi, les clients peuvent-ils croiser une faune et d'une flore exceptionnelles, par exemple des singes à lunettes, des toucans, des papillons. "Savez-vous, interroge Arnaud Girodon, qu'ici, nous avons 535 espèces de papillons alors qu'il en existe seulement 60 en Europe ?"

Chemin faisant, les clients sont sensibilisés aux dangers pesant sur la nature.

LIRE AUSSI :
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Trois biologistes marins ont également été recrutés pour animer le "Centre de la nature" qui a été installé non loin de la plage, dans une structure en bambou : il propose des activités aussi instructives que ludiques pour adultes et enfants, par exemple une marche pédagogique sur la plage ou une pêche au plancton à l'issue desquelles le contenu de la « cueillette » est passé au microscope.

Ce centre met aussi en place des programmes de conservation en impliquant les communautés locales, notamment les pêcheurs. En effet, avec l'aide d’Irshad Mobarak, le naturaliste malaisien de l’hôtel, c'est un programme ambitieux et complet de conservation de la nature et de la vie sous-marine qui est désormais développé.

Au-delà même du resort, il concerne toute l’île et vise aussi à aider les communautés locales. Dénommé le "Datai Pledge" (l’engagement du Datai), ce programme a été élaboré en partenariat avec différentes entités locales influentes, des ONG et aussi des entreprises sociales.

Il s’articule autour de quatre piliers : "Pur pour l'avenir" (Pure For The Future), "Pêcher pour l'avenir" (Fish For The Future), "Faune sauvage pour l'avenir" (Wildlife For The Future) et "Jeunesse pour l'avenir" (Youth For The Future).

Pépinière de coraux et nurserie d'arbres locaux

Dans la pépinière de coraux ( © Eric Martin/ Datai Langkawi)
Dans la pépinière de coraux ( © Eric Martin/ Datai Langkawi)
C'est dans le cadre de ce "Datai pledge" que ce resort de luxe a créé une pépinière de coraux et reconstitué une barrière de corail. Les clients peuvent la visiter, tout comme la nurserie d'arbres locaux mise en place par ailleurs.

Au cours de leur séjour, les clients sont d'ailleurs invités à participer au reboisement ou encore à s'initier à l'apiculture grâce aux ruches installées sur le site.

En parallèle a été mis en place un programme d'éducation à l'environnement (et aussi à l'anglais) pour les enfants des écoles de Langkawi tandis que des initiatives se concrétisaient pour donner du travail - et donc des revenus - à des femmes sans ressources qui se retrouvaient seules avec des enfants à charge : elles sont invitées à donner une seconde vie au linge de toilette de l'hôtel -elles le revendent ensuite - ou à fabriquer des bougies que le Datai leur achète.

Comment est financé ce programme ? "Les revenus du Datai pledge proviennent de donations, d'activités payantes que nous mettons en place et d'un montant optionnel mais automatique sauf refus (8 euros par nuit sur place) qui est demandé aux clients pour ce projet. 90% des clients acceptent", explique Arnaud Girodon.

Vraiment "zéro déchet"

Le Lab, un laboratoire destiné à des cours sur le recyclage a été construit à l’aide de 7 968 bouteilles recyclées (@Eric Martin/Datai Langkawi)
Le Lab, un laboratoire destiné à des cours sur le recyclage a été construit à l’aide de 7 968 bouteilles recyclées (@Eric Martin/Datai Langkawi)
Chemin faisant, le Datai Langkawi s'efforce de devenir aussi exemplaire que possible dans ses pratiques hôtelières. "Le Datai est, assure Arnaud Girodon, un des seuls hôtels d'Asie à être vraiment "zéro déchet" à la décharge.

Nous avons atteint cet objectif pour la première fois, en décembre 2021
, précise-t-il. Nous recyclons tous les déchets sur place".

Les déchets organiques sont compostés pour être réutilisés dans des potagers en permaculture, mais le complexe hôtelier qui a proscrit l'usage des plastique à usage unique, s'est également équipé de déchiqueteuses de bois et d'une machine de fabrication malaisienne pour transformer les déchets plastiques et solides en cendres inoffensives sans pollution de pyrolyse.

Même si la Malaisie ne manque pas d'eau, le Datai collecte aussi l'eau de pluie, recycle les eaux qu'il utilise. Il s'efforce d'acheter local autant que possible pour fournir ses restaurants, même si, la Malaisie n'étant pas un grand producteur agricole, il n'est pas aisé de ne pas recourir aux importations. "Mais, on y travaille", assure Arnaud Girodon.

Sur le front de l'énergie, il lui est un peu plus compliqué de devenir vertueux. Certes, depuis sa rénovation, le Datai a mis, partout des leds. En revanche, il est impossible d'installer dans la forêt où se niche l'hôtel des panneaux solaires ou des éoliennes.

"Il y a trop d'ombre et il nous faudrait un espace que nous n'avons pas. De toute façon, ce serait débile de détruire la forêt pour cela", s'exclame Arnaud Girodon, fier de voir le Datai Langkawi être la première organisation au monde à recevoir le certificat EarthCheck ECO (Silver) pour le tourisme terrestre en 2019. Cette certification a été renouvelée, après un nouvel audit, en décembre 2021.

La "love story" va continuer

Ce natif de l'Aubrac aveyronnais vit depuis 17 ans une histoire d'amour avec l'Asie  ( © Eric Martin / Datai Langkawi)
Ce natif de l'Aubrac aveyronnais vit depuis 17 ans une histoire d'amour avec l'Asie ( © Eric Martin / Datai Langkawi)
"Les clients viennent chez nous parce qu'on est dans cette jungle. Ils sont de plus en plus sensibles à la protection de l'environnement", insiste Arnaud Girodon. Même si, convient-il, "la protection de l'environnement n'est peut-être pas encore leur motivation principale.

Vous savez, poursuit-il, les clients savent maintenant très bien pourquoi les orages très violents se multiplient ou pourquoi les marées sont désormais si hautes qu'elles couvrent presque toute la plage près de l'hôtel".

LIRE AUSSI : La fabuleuse nature malaisienne

Avant la Covid, 60 à 70% des clients du Datai venaient d'Europe, en majorité du Royaume-Uni, mais là aussi, les choses changent.

Lorsqu'après plusieurs mois de fermeture imposés pour lutter contre la pandémie, le Datai a pu rouvrir en 2020, Arnaud Girodon s'est démené pour prospecter la clientèle malaisienne jusque-là très minoritaire. "La jungle leur faisait un petit peu peur mais ils sont venus et désormais, ils reviennent", se réjouit le directeur général du Datai.

Originaire d'Argences-en-Aubrac, en Aveyron, diplômé de l'école hôtelière de Saint-Quentin-en-Yvelines près de Paris, Arnaud Girodon, 48 ans, a commencé son parcours à l'international par l'Angleterre, avec le groupe Accor, avant de passer par Dubaï aux Émirats et de s'engager il y a dix-sept ans dans une véritable histoire d'amour avec l'Asie.

C'est après avoir géré pendant sept ans un hôtel en Thaïlande et, pendant deux ans, un établissement au Vietnam, que la direction du Datai lui a été proposée. "C'est un hôtel de légende. Une proposition pareille ne se refuse pas, se souvient-il.

C'est fabuleux, la love story continue. Je viens de signer un contrat pour trois ans supplémentaires, ]b s'enthousiasme ce père de trois enfants qui partage son temps entre le Datai qui fêtera ses 30 ans en 2023 et Kuala Lumpur.

C'est en effet dans la capitale de la Malaisie que siège le conglomérat d'Etat auquel appartient - tout comme la compagnie Malaysian Airlines - le Datai Langkawi. Dans ce cadre, Arnaud Girodon s'emploie à développer de nouveaux projets hôteliers sur l'île de Langkawi, à Kuala Lumpur, sur d'autres sites en Malaisie, et également en Indonésie.

Cependant, il est particulièrement fier de son action à la tête du Datai Langkawi : "Ici, dit-il, nous sommes tellement tributaires de la nature et des communautés locales que si nous ne faisions rien pour les protéger, c'est que nous n'aurions rien compris !"

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