La dernière campagne pour Eurostar moquant le transport aérien et accusant celui-ci d’être pollueur a provoqué l’exaspération de certains acteurs du transport aérien contre la SNCF - DR : CH
Sur un fond noir, une affirmation : « Bien sûr que les compagnies aériennes sont vertes », et en dessous entre parenthèses : « de jalousie ».
En bas de page, l’affirmation que pour un Paris-Londres votre empreinte carbone équivaut à 14 trajets en Eurostar.
C’est la pub de trop !
La dernière campagne pour Eurostar moquant le transport aérien et accusant celui-ci d’être pollueur a provoqué l’exaspération de certains acteurs du transport aérien contre la SNCF.
Une véritable explosion de colère autour d’une dernière table ronde : « Quel transport aérien pour les territoires français ? » en conclusion du Paris Air Forum.
En bas de page, l’affirmation que pour un Paris-Londres votre empreinte carbone équivaut à 14 trajets en Eurostar.
C’est la pub de trop !
La dernière campagne pour Eurostar moquant le transport aérien et accusant celui-ci d’être pollueur a provoqué l’exaspération de certains acteurs du transport aérien contre la SNCF.
Une véritable explosion de colère autour d’une dernière table ronde : « Quel transport aérien pour les territoires français ? » en conclusion du Paris Air Forum.
La pub de trop
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Est-ce également l’horaire de la réunion, en fin de journée, quand on est un peu fatigué qui a amplifié ce gros coup de gueule ?
Toujours est-il que ce qui devait être une réflexion au sujet du transport aérien pour les territoires s’est transformé en une charge très violente contre la SNCF.
A la demande de Frédéric Beniada, le modérateur (tâche ardue en la circonstance), qui voulait faire réagir les participants au sujet de cette nouvelle campagne de pub, c’est Alain Battisti, Président de la Fédération Nationale de l’Aviation Marchande, qui a ouvert le bal des amabilités en se demandant s’il s’agissait de « bêtise ou de provocation. »
« Quand on est dans une situation comme la SNCF avec une concurrence nouvelle qui ridiculise l’entreprise sur une liaison historique, la première ligne de TGV française Paris-Lyon, on ferait mieux de jouer avec ses trains électriques plutôt que de s’intéresser à une concurrence qui n’est pas directe ! »
Le ton était donné et la suite fut à l’avenant.
Toujours est-il que ce qui devait être une réflexion au sujet du transport aérien pour les territoires s’est transformé en une charge très violente contre la SNCF.
A la demande de Frédéric Beniada, le modérateur (tâche ardue en la circonstance), qui voulait faire réagir les participants au sujet de cette nouvelle campagne de pub, c’est Alain Battisti, Président de la Fédération Nationale de l’Aviation Marchande, qui a ouvert le bal des amabilités en se demandant s’il s’agissait de « bêtise ou de provocation. »
« Quand on est dans une situation comme la SNCF avec une concurrence nouvelle qui ridiculise l’entreprise sur une liaison historique, la première ligne de TGV française Paris-Lyon, on ferait mieux de jouer avec ses trains électriques plutôt que de s’intéresser à une concurrence qui n’est pas directe ! »
Le ton était donné et la suite fut à l’avenant.
La SNCF, la vache sacrée que l’on n’attaque pas
Inacceptable également aux yeux du Directeur d’Air Caraïbes, la connectivité des TGV dans la grande gare d’interconnexions de Massy Palaiseau (Essonne), le grand pôle multimodal de la région parisienne - DR : CH
Marc Rochet, Directeur général d’Air Caraïbes, en faisant référence à la chanteuse Desireless dont le tube « Voyage, voyage » résonne dans une nouvelle campagne de communication de la SNCF pour cet été, saluait la chanteuse des années 80 et raillait les publicitaires du rail en expliquant « qu’elle avait plus de talent qu’ils n’en ont ».
« Je n’attends pas de l’humour quand la SNCF coûte à l’Etat français tous les ans 16,7 milliards », allusion à une étude du site « Fipeco » parue en janvier 2022 (Etude Fipeco ). « J’attends plutôt de la rigueur ».
Et d’ajouter sur un ton encore plus acerbe : « la SNCF vit aujourd’hui un évènement grave, c’est le procès de Brétigny*. Heureusement que son ancien Président Monsieur Pépy a eu des mots respectueux et courageux le premier jour de l’audience. L’humour pratiqué par ces personnes du marketing n’est pas du tout à la hauteur. »
Pascal de Izaguirre, Président-directeur général de Corsair, lui aussi très en colère, s’est interrogé sur le vrai bilan énergétique de la SNCF « qu’on nous présente comme un modèle de vertu ».
Le bilan énergétique de la SNCF ? « Je pense que c’est biaisé et tronqué. La SNCF en France c’est une diva, la vache sacrée que l’on n’attaque pas. J’aimerais avoir la transparence sur ce bilan. Nous, transporteurs aériens, nous sommes en permanence dans le collimateur et l’éternel bouc émissaire ».
Le PDG de la SNCF en prend lui aussi pour son grade : « J’estime que quand on est président d’un grand groupe français, on devrait avoir un peu de décence et ne pas s’attaquer à ses concurrents français ou un grand groupe aérien, Air France pour ne pas le citer. Il y a un minimum de solidarité à avoir… »
« Je n’attends pas de l’humour quand la SNCF coûte à l’Etat français tous les ans 16,7 milliards », allusion à une étude du site « Fipeco » parue en janvier 2022 (Etude Fipeco ). « J’attends plutôt de la rigueur ».
Et d’ajouter sur un ton encore plus acerbe : « la SNCF vit aujourd’hui un évènement grave, c’est le procès de Brétigny*. Heureusement que son ancien Président Monsieur Pépy a eu des mots respectueux et courageux le premier jour de l’audience. L’humour pratiqué par ces personnes du marketing n’est pas du tout à la hauteur. »
Pascal de Izaguirre, Président-directeur général de Corsair, lui aussi très en colère, s’est interrogé sur le vrai bilan énergétique de la SNCF « qu’on nous présente comme un modèle de vertu ».
Le bilan énergétique de la SNCF ? « Je pense que c’est biaisé et tronqué. La SNCF en France c’est une diva, la vache sacrée que l’on n’attaque pas. J’aimerais avoir la transparence sur ce bilan. Nous, transporteurs aériens, nous sommes en permanence dans le collimateur et l’éternel bouc émissaire ».
Le PDG de la SNCF en prend lui aussi pour son grade : « J’estime que quand on est président d’un grand groupe français, on devrait avoir un peu de décence et ne pas s’attaquer à ses concurrents français ou un grand groupe aérien, Air France pour ne pas le citer. Il y a un minimum de solidarité à avoir… »
"La SNCF veut se présenter en chevalier blanc de l’écologie, ce n’est pas vrai"
Thomas Juin, Président de l’Union des Aéroports français et francophones associés, également autour de la table, a lui aussi sorti la sulfateuse en réaction aux propos du PDG de la SNCF, Jean-Pierre Farandou qui avait utilisé la formule, il y a quelques temps « honte de prendre l’avion ». « Ce n’est pas au niveau d’une entreprise publique française que de dire honte de prendre l’avion ».
« La SNCF fait face à un problème de modèle économique à bout de souffle et c’est préoccupant. On a rappelé les 16,7 milliards annuels et on peut aussi ajouter les 35 milliards annulés en termes de dettes.
Cela fait beaucoup et ca ne va pas s’arrêter là. Il y a une infrastructure que n’a pas le transport aérien, ce sont ces 30 000 kilomètres de réseau qui vont devoir être renouvelés. »
Pour Thomas Juin, la SNCF « veut faire diversion » pour demander encore plus aux collectivités en rappelant que le transport aérien ne représente que 1% du budget transport des collectivités locales en France.
Au sujet des enjeux environnementaux, le Président de l’UAF a aussi affirmé que l’entretien des milliers de kilomètres de voies avec des produits chimiques a aussi un impact sur les sols et la biodiversité. « Il n’y a pas de moyen de transport écologique aujourd’hui. La SNCF veut se présenter en chevalier blanc de l’écologie, ce n’est pas vrai », a-t-il conclu.
« La SNCF fait face à un problème de modèle économique à bout de souffle et c’est préoccupant. On a rappelé les 16,7 milliards annuels et on peut aussi ajouter les 35 milliards annulés en termes de dettes.
Cela fait beaucoup et ca ne va pas s’arrêter là. Il y a une infrastructure que n’a pas le transport aérien, ce sont ces 30 000 kilomètres de réseau qui vont devoir être renouvelés. »
Pour Thomas Juin, la SNCF « veut faire diversion » pour demander encore plus aux collectivités en rappelant que le transport aérien ne représente que 1% du budget transport des collectivités locales en France.
Au sujet des enjeux environnementaux, le Président de l’UAF a aussi affirmé que l’entretien des milliers de kilomètres de voies avec des produits chimiques a aussi un impact sur les sols et la biodiversité. « Il n’y a pas de moyen de transport écologique aujourd’hui. La SNCF veut se présenter en chevalier blanc de l’écologie, ce n’est pas vrai », a-t-il conclu.
Connectivité : le tabouret et le piano
Après ce premier tour de table très particulier de par la dureté des attaques contre le rail, le sujet de l’intermodalité entre le train et l’avion proposé par le modérateur s’est lui aussi résumé en grande partie à des attaques envers la SNCF.
Malgré une tentative d’apaisement d’Alain Battisti, affirmant ne pas être contre la SNCF et croire à l’intermodalité, la boîte à claques n’a pas été refermée pour autant.
En matière de connectivité, Marc Rochet là aussi a eu la dent dure : "Qu’un pays comme le nôtre, porteur des Jeux Olympiques dans très peu de temps, ne soit pas capable d’avoir une liaison de bonne qualité entre Roissy et la gare de Nord c’est incompréhensible !"
Inacceptable également au yeux du Directeur d’Air Caraïbes, la connectivité des TGV dans la grande gare d’interconnexions de Massy Palaiseau (Essonne), le grand pôle multimodal de la région parisienne.
« Entre Massy Palaiseau et Orly il n’y a rien ! Il a fallu que Corsair, Air Caraïbes et French bee financent un bus privé dont, en plus, on a voulu déplacer l’arrêt à 800 mètres de la gare » se désole-t-il.
Pascal de Izaguirre, Président de Corsair et dont le site Internet vante les mérites de la connectivité par train avec une belle photo d’un TGV, a également exprimé une certaine exaspération concernant ce partenariat : « Quand on négocie les accords avec la SNCF, on est dans le rôle du tabouret et eux dans celui du piano ! Et on n’a pas l’impression que cela les intéresse véritablement !
Pour faire de l’intermodalité, il faut être deux. Du côté de la SNCF, ça leur apparait comme une gêne plutôt qu’autre chose ».
Déplorant comme Marc Rochet que si les compagnies aériennes n’avaient pas financé un bus, il n’y aurait pas de connectivité.
Malgré une tentative d’apaisement d’Alain Battisti, affirmant ne pas être contre la SNCF et croire à l’intermodalité, la boîte à claques n’a pas été refermée pour autant.
En matière de connectivité, Marc Rochet là aussi a eu la dent dure : "Qu’un pays comme le nôtre, porteur des Jeux Olympiques dans très peu de temps, ne soit pas capable d’avoir une liaison de bonne qualité entre Roissy et la gare de Nord c’est incompréhensible !"
Inacceptable également au yeux du Directeur d’Air Caraïbes, la connectivité des TGV dans la grande gare d’interconnexions de Massy Palaiseau (Essonne), le grand pôle multimodal de la région parisienne.
« Entre Massy Palaiseau et Orly il n’y a rien ! Il a fallu que Corsair, Air Caraïbes et French bee financent un bus privé dont, en plus, on a voulu déplacer l’arrêt à 800 mètres de la gare » se désole-t-il.
Pascal de Izaguirre, Président de Corsair et dont le site Internet vante les mérites de la connectivité par train avec une belle photo d’un TGV, a également exprimé une certaine exaspération concernant ce partenariat : « Quand on négocie les accords avec la SNCF, on est dans le rôle du tabouret et eux dans celui du piano ! Et on n’a pas l’impression que cela les intéresse véritablement !
Pour faire de l’intermodalité, il faut être deux. Du côté de la SNCF, ça leur apparait comme une gêne plutôt qu’autre chose ».
Déplorant comme Marc Rochet que si les compagnies aériennes n’avaient pas financé un bus, il n’y aurait pas de connectivité.
Vaine tentative d’apaisement
Parmi tous ces hommes très en colère, Nathalie Stubler, PDG de Transavia France, plus modérée, a tenté l’apaisement en se félicitant du projet de liaison directe par métro automatique entre le centre de Paris et Orly (Prolongement de la ligne 14 à Aéroport d’Orly, ndlr).
Mais même ce point qu’elle a qualifié de très positif a fait naître, encore, de l’aigreur de la part du Président de Corsair, très circonspect sur la tenue des délais à ce sujet, et du Directeur d’Air Caraïbes rappelant que cela fait 50 ans qu’une telle ligne doit sortir de terre « sans compter l’expérience catastrophique du VAL qui a été planté n’importe où ! »
Cette grosse exaspération a donc éclipsé quelque peu certains sujets relatifs à la place de l’avion dans les territoires, thème de cette table ronde.
Ainsi, les liaisons inter-régionales, le rôle des aéroports de province, les obligations de service public n’ont été abordés qu’assez brièvement, mais visiblement il fallait évacuer cette rancœur née d’une énième mise en cause de l’avion "pollueur".
Mais même ce point qu’elle a qualifié de très positif a fait naître, encore, de l’aigreur de la part du Président de Corsair, très circonspect sur la tenue des délais à ce sujet, et du Directeur d’Air Caraïbes rappelant que cela fait 50 ans qu’une telle ligne doit sortir de terre « sans compter l’expérience catastrophique du VAL qui a été planté n’importe où ! »
Cette grosse exaspération a donc éclipsé quelque peu certains sujets relatifs à la place de l’avion dans les territoires, thème de cette table ronde.
Ainsi, les liaisons inter-régionales, le rôle des aéroports de province, les obligations de service public n’ont été abordés qu’assez brièvement, mais visiblement il fallait évacuer cette rancœur née d’une énième mise en cause de l’avion "pollueur".
Faut-il continuer à harceler l’avion ?
Dans sa huitième édition, il y a un an, le Paris Air Forum avait fait dialoguer Jean-Pierre Farandou et Anne Rigail sur le thème « Comment réconcilier le train et l’avion ? ».
Le débat était courtois mais force est de constater après cette table ronde (où la SNCF n’était pas là pour se défendre) qu’il reste quand même beaucoup à faire.
Faut-il, quand on est un opérateur ferroviaire, continuer à faire sa publicité en harcelant le transport aérien quant à ses rejets d'émissions polluantes ?
Avec une ambiance pareille, le défi de l’intermodalité et de la connectivité pourrait être plus difficile à relever.
Après tout, faisait remarquer un des débatteurs, le report modal s’est déjà fait sur la plupart des lignes aériennes en concurrence avec le train et il ne sert a rien de vouloir culpabiliser le transport aérien.
Et des accroches pour le train, moins hostiles mais tout aussi efficaces, les publicitaires savent en trouver.
Il y a quelques années Lyria, filiale de la SNCF qui fait rouler des trains entre la Suisse et la France affichait un slogan plutôt malin : « Genève-Paris sans escale à Roissy ! ». « Pas agressif, indubitable, pratique… Rien à redire sinon, bien joué ».
*Le 12 juillet 2013 en gare de Brétigny (Essonne), à la suite de la défaillance d'une éclisse (pièce métallique servant à raccorder entre eux deux rails consécutifs), plusieurs voitures d'un train de voyageurs Intercités reliant Paris-Austerlitz à Limoges-Bénédictins ont déraillé, entraînant la mort de sept personnes.
Le débat était courtois mais force est de constater après cette table ronde (où la SNCF n’était pas là pour se défendre) qu’il reste quand même beaucoup à faire.
Faut-il, quand on est un opérateur ferroviaire, continuer à faire sa publicité en harcelant le transport aérien quant à ses rejets d'émissions polluantes ?
Avec une ambiance pareille, le défi de l’intermodalité et de la connectivité pourrait être plus difficile à relever.
Après tout, faisait remarquer un des débatteurs, le report modal s’est déjà fait sur la plupart des lignes aériennes en concurrence avec le train et il ne sert a rien de vouloir culpabiliser le transport aérien.
Et des accroches pour le train, moins hostiles mais tout aussi efficaces, les publicitaires savent en trouver.
Il y a quelques années Lyria, filiale de la SNCF qui fait rouler des trains entre la Suisse et la France affichait un slogan plutôt malin : « Genève-Paris sans escale à Roissy ! ». « Pas agressif, indubitable, pratique… Rien à redire sinon, bien joué ».
*Le 12 juillet 2013 en gare de Brétigny (Essonne), à la suite de la défaillance d'une éclisse (pièce métallique servant à raccorder entre eux deux rails consécutifs), plusieurs voitures d'un train de voyageurs Intercités reliant Paris-Austerlitz à Limoges-Bénédictins ont déraillé, entraînant la mort de sept personnes.