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MICE : "tous les salons et événements deviendront-ils numériques ?"

François Bitouzet, le PDG de PublicisLive, la branche MICE de l'agence de communication


En début de semaine, Paul Arseneault est venu rappeler que les acteurs du tourisme devaient arrêter de se flageller. Un conseil que François Bitouzet, le PDG de PublicisLive, a bien écouté. Alors que les événements professionnels (MICE) reprennent (presque) comme si de rien n'était, l'invité spécial des Rencontres Etourisme de Pau n'est pas venu pour se lamenter. Le patron de la branche événementielle du Groupe a plutôt fait part des mutations, comme le digital ou le durable qui impacteront son industrie. Alors demain, tous les salons et événements seront-ils numériques ?


Rédigé par le Mercredi 13 Octobre 2021

"L'expérience à distance ne doit pas être dévaluée, mais pensée comme quelque chose de différent. Regardez les matchs de foot, en stade l'ambiance est géniale, par contre vous ne verrez jamais les replays et les actions de près, alors que dans votre salon, la vision est incroyable. Nous devons penser l'hybridation comme ça, pour éviter de nous planter," explique François Bitouzet, le PDG de PublicisLive - Crédit photo : Depositphotos @tarik_vision
"L'expérience à distance ne doit pas être dévaluée, mais pensée comme quelque chose de différent. Regardez les matchs de foot, en stade l'ambiance est géniale, par contre vous ne verrez jamais les replays et les actions de près, alors que dans votre salon, la vision est incroyable. Nous devons penser l'hybridation comme ça, pour éviter de nous planter," explique François Bitouzet, le PDG de PublicisLive - Crédit photo : Depositphotos @tarik_vision
L'année dernière, Charles-Edouard Girard le grand témoin des Rencontres eTourisme de Pau, cette année, c'est aussi un tisseur de liens qui s'est avancé sur le devant de la scène.

Ancien responsable de la communication de Voyages-SNCF, François Bitouzet est revenu dans la capitale du Béarn avec une nouvelle casquette, celui de PDG de PublicisLive.

"Quand les organisateurs ont échangé avec moi pour me proposer d'intervenir, je leur ai dit que je ne faisais plus du tourisme, mais de la communication.

Pourtant l'événementiel fait bien partie du tourisme d'affaires, il est intéressant de noter que nous ne nous projetons pas dans ce secteur.
"

Avec 120 000 visiteurs en présentiel avant la crise sanitaire, VivaTech est une formidable opportunité pour remplir les hôtels parisiens, les restaurants, animer les bars et mettre en lumière la Ville lumière.

Malheureusement, la lumière s'est éteinte sur le secteur.

"Avant la crise, globalement, ça se passait plutôt très bien pour la France, avec des perspectives de croissance, même si ce n'était plus l'âge d'or. Paris n'étant plus la 1ère destination européenne," contextualise le PDG de PublicisLive.

"Avant le collectif était source d'émulation, aujourd'hui il est source d'angoisse"

A cette époque en France, le MICE représentait 40 milliards d'euros de chiffres d'affaires. Depuis les recettes se sont effondrées...

"Evidemment, 2020 a été un tsunami. Sans les aides de l'Etat le marché ne s'en serait probablement jamais remis." Un constat sans rondeur, ni concession.

Si les salons reprennent, les conséquences de la pandémie seront durables, de quoi pousser les acteurs à réfléchir sur son impact.

"La question que nous nous posons tous aujourd'hui : est-ce que cette crise conjoncturelle, n'est-elle pas en train de s'installer de manière structurelle ?

Se la poser, c'est malheureusement déjà y répondre
," en déduit-il.

Face à la montée en puissance des outils digitaux, des frontières durablement fermées comme l'Asie, la crise du secteur n'est pas encore derrière lui. La semaine dernière le Salon Automobile de Genève a été annulé pour mars 2022, en raison de la pandémie.

Tout comme la distribution et la production, les professionnels de l'événementiel ont eu le temps de réfléchir sur leur secteur. Et tout comme eux, il n'y aura pas de monde d'après.

"Avant le collectif était source d'émulation dans les entreprises, aujourd'hui il est source d'angoisse. Dans le même temps, beaucoup d'entreprises ont baissé leurs budgets et la responsabilité environnementale ne cesse de prendre de l'ampleur" témoigne le patron.

François Bitouzet n'est pas venu à Pau pour poser des chrysanthèmes sur la stèle du MICE. Ces contraintes sont aussi des opportunités, non pas de se réinventer, mais d'évoluer.

"Nous n'allons pas réinventer le MICE, mais nous devons travailler avec ces considérations et faire quelque chose d'intéressant pour donner de l'intérêt à note métier."

Alors que l'IFTM Top Resa a refermé ses portes, que les Rencontres eTourisme vont bientôt le faire et que le DITEX s'annonce pour début décembre, il serait facile de croire que la reprise est bel et bien là.

Pourtant la vérité est plutôt à nuancer entre ceux qui parlent de reprise et les autres de rattrapage, l'industrie navigue a vue et sans trop de certitude.

"Sur 100 événements qui avaient lieu en 2019, demain 25 ne se feront plus"

Le tableau n'est malgré tout pas si noir. Des nouveaux réflexes apparaissent et comme les destinations françaises pendant deux ans, les organisateurs de salons doivent composer avec une cible plus locale.

"Il y a une reterritorialisation des événements professionnels, la majorité du public est dorénavant français et ça va s'installer dans la durée. Par le passé les grands groupes étaient surreprésentés, ce n'est plus totalement le cas," rapporte le patron de PublicisLive.

Les petites et moyennes entreprises reprennent les rênes aussi bien pour impulser les événements que dans la fréquentation.

En quelque sorte, il y a aussi bien une transformation géographique qu'un changement de type d'acteurs, mais ce n'est pas tout.

"Nous sentons qu'il y aura moins de mégas-événements, du fait d'une très rude concurrence internationale.

A la fin, il ne restera que les meilleurs. Maintenant nous devons savoir si nous avons des champions nationaux qui attirent suffisamment de monde pour ne pas passer à la trappe.
"

Est-ce que le salon automobile de Paris survivra ou encore VivaTech ? Ce n'est pas si sûr pour le moment .

Face à ce retrait des méta-salons, les villes plus petites et quelques destinations vont tirer leur épingle du jeu. Un constat qui rappelle la pensée de Sophie Lacour sur la revanche des petites villes.

"Sur 100 événements qui avaient lieu en 2019, 25 ne se feront plus car ils coûtent trop cher, polluent et/ou ne ne servaient pas à grand-chose. Puis 25 resteront totalement physiques, les 50% restants seront hybrides," schématise François Bitouzet.

La durabilité des salons et événements n'est plus une option pour faire bien ou s'acheter une bonne conscience : elle serait devenue un impératif.

Tourisme d'affaires durable : "aujourd'hui l'événement doit être contributif et positif"

"Sur 100 événements qui avaient lieu en 2019, 25 ne se feront plus car ils coutent trop cher, ils polluent et aussi ils ne servaient pas à grand-chose" schématise François Bitouzet. - Crédit photo : RP
"Sur 100 événements qui avaient lieu en 2019, 25 ne se feront plus car ils coutent trop cher, ils polluent et aussi ils ne servaient pas à grand-chose" schématise François Bitouzet. - Crédit photo : RP
Le MICE est drivé par les appels d'offres et sans la présentation de différents labels de protection de l'environnement, il n'est plus possible de passer l'étape de la sélection des grands groupes.

Les interrogations pour les professionnels ne portent plus s'il faut le faire, mais comment et jusqu'où s'approprier la démarche durable.

"Nous avons pris le parti que l'événement doit être contributif et positif. Ainsi, quand il a lieu, le monde se porte un peu mieux que ce qu'il était avant.

Pourquoi ne pas rendre une friche industrielle viable pour un salon ou un team building ou autres, puis à la fin elle sera rendue aux communautés locales, c'est ça Event for Good,
" raconte le PDG de PublicisLive.

S'il ne faut pas trop prêter attention à l'angélisme de ces pensées, une telle idée pourrait rendre le tourisme d'affaires plus vertueux et enrichissant pour les destinations.

Les clients semblent, du moins ceux qui peuvent se le permettre, avoir envie de cette démarche. Car en plus d'être onéreux, l'événementiel durable nécessite de nouvelles compétences.

"Ce sont des nouveautés métiers, comme une personne qui est responsable du développement durable aussi bien au niveau production et formation des équipes.

Au niveau du greenwashing, j'ai envie de dire que peu importe l'intention, ce qui importe c'est le résultat final
," explique François Bitouzet.

Par exemple sur ce virage vert, les Rencontres eTourisme de Pau ont noté une baisse drastique des participants qui prennent l'avion, à la faveur du train.

Digitalisation des événements : ok, "mais qui va payer ?"

Malgré tout, il reste des points d'achoppements au niveau de la restauration ou des aménagements, etc. La digitalisation est l'autre révolution.

"Nous en parlons depuis très longtemps, nous n'avons pas attendu 2020. Par contre ça n'a jamais été pris à bras le corps. Avec la crise sanitaire cela s'installe dans les pratiques et nous ne reviendrons pas à ce qu'il se faisait avant.

Une fois que l'activité est digitalisée, il n'y a pas de retour en arrière,
" prédit le responsable de l'agence.

Par contre, comme pour l'IFTM Top Resa, les Rencontres eTourisme ou le DITEX de mars 2022, nous ne basculerons pas dans le 100% digital. L'humain et la rencontre seront toujours indispensables, surtout dans le BtoB.

Sauf que cette hybridation doit être pensée.

"L'expérience à distance ne doit pas être dévaluée, mais pensée comme quelque chose de différent. Regardez les matchs de foot, en stade l'ambiance est géniale, par contre vous ne verrez jamais les replays et les actions de près, alors que dans votre salon, la vision est incroyable.

Nous devons penser l'hybridation comme ça, pour éviter de nous planter
."

Les expériences doivent être dissociées, pour éviter la frustration.

A l'avenir, un lieu majeur rassemblera le cœur de l'événement , quand en province ou dans un autre pays des salles seront aménagées pour faire vivre un CES Las Vegas au plus près ou un VivaTech.

Si le digital s'empare des salons, foires et autres congrès, cette transformation pose la question de la souveraineté technologique des entreprises du secteur. Un peu à l'image du combat perdu par les hôteliers avec Booking.com

Faut-il laisser à Zoom, Facebook ou toutes autres entreprises la gestion de la digitalisation ?


"Nous avons pris le parti de développer avec Orange une plateforme pour intégrer la numérisation de l'événementiel. Après nous nous posons tous la même question : ajouter du digital au physique représente un coût, mais qui va payer ?" questionne le patron de PublicisLive.

Tout comme les agences de voyages, l'événementiel se retrouve face à des bouleversements et des questions existentielles...

Retrouvez les articles sur les 17e rencontres eToursime de Pau :


Romain Pommier Publié par Romain Pommier Journaliste - TourMaG.com
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