Philippe Fayolle, ex secrétaire du CE
TourMaG.com – Pouvez-vous nous rappeler brièvement l’historique de la Compagnie Aérolyon ?
Philippe Fayolle : « Aérolyon, entreprise créée en 1996 par le groupe Nouvelles Frontières (NF) avait pour vocation initiale de desservir les DOM TOM au départ de la province française (Lyon, Nantes, Toulouse, Marseille, Bordeaux, Brest).
Cette vocation s est peu à peu élargie à la desserte des Caraïbes, du Bassin Méditerranéen et de l Afrique Noire francophone. Aérolyon a été mise en redressement judiciaire le 27 novembre 2001 et liquidée le 26 décembre 2002, après une année fertile en événements rocambolesques dignes des meilleurs romans policiers… »
T.M.com – Qu’est-qui a précipité le déclin de la Compagnie ?
Ph. F. : « Le rachat progressif à partir de 2000 de NF par le groupe allemand TUI (Preussag) a précipité le déclin d Aérolyon, perceptible à partir de 2001. Preussag, groupe sidérurgique allemand en déclin (1,5 % de marge bénéficiaire, fin des années 1990) a annoncé, par voie de presse, avoir pour objectif, de devenir le numéro un du tourisme mondial, avec une marge bénéficiaire de 5 % . Des délocalisations et de lourdes restructurations s’ensuivirent : Aérolyon a fait partie de la charrette. »
T.M.com – On a l’impression, lorsqu’on lit le déroulé des évènements, que Aérolyon embarasse NF. Pourquoi ?
Ph. F. : « NF a cherché par tous les moyens à s’amputer de sa filiale Aérolyon sans bourse délier. Cette opération a été « brillamment » réussie par ses dirigeants au profit des actionnaires de TUI et au détriment des contribuables français : le plan social a été financé par la protection sociale française, avec une « déresponsabilisation » totale du groupe TUI.
Ceci n’a pu être mené a bien que grâce à la légèreté et à l’incurie, voire à la complicité, de l’appareil d’Etat concerné… »
T.M.com – Selon vous, comment un escroc international s’est-il retrouvé à la tête d’une filiale d’un grand groupe touristique ?
Ph. F. : « Il faut savoir qu’escroc n’est pas synonyme de stupide, et que TUI en croyant choisir quelques dirigeants avisés pour sa nouvelle filiale a peut être trouvé quelques escrocs intelligents… »
T.M.com – D’où viennent les 8 millions d’euros qui ont été dilapidés dans un vaine relance de la Cie ?
Ph. F. : « Ces 8 millions d’euros venaient de l’ARAB BANK, à Vienne (Autriche) suite à un accord secret passé, à l’insu du comité déétablissement, entre celle-ci et l administrateur judiciaire ; ce qui est pour le moins surprenant quand on connaît l’utilisation ultérieure de ces fonds... »
T.M.com – Comment une aussi rocambolesque histoire a-t-ele pu avoir lieu, selon vous ?
Ph. F. : « Il faut savoir que l’activité du transport aérien international met en jeu des sommes considérables (un Airbus coûte environ 160 millions € ); la traçabilité des mouvements de fonds est d’autant plus difficile a établir que plusieurs pays sont en cause sans être tous pour autant des modèles de démocratie à l européenne.
C'est là une grande tentation pour des gens intelligents, placés aux bons endroits et peu regardants sur les moyens de faire gagner de l’argent à leurs actionnaires ou… d’en mettre dans leurs propres poches ! »
T.M.com – Vous demandez aujourd’hui la réintégration des salariés chez NF. Y-a-t’il la moindre chance pour que cette demande soit acceptée ?
Ph. F. : « La réintégration des salariés au sein de Nouvelles Frontières est juridiquement possible. Sur le fond la réintégration de l’ensemble des salaries n’est pas contestable puisque les Présidents de TUI et de NF s’y sont engagés publiquement le 23 novembre 2001, le 24 fevrier 2003, en mars 2003 au ministère des transports et en avril 2003 devant la presse (Les Echos) .
La réalité ultérieure a démenti ces promesses, consignées dans le compte rendu du CE de Corsair, autre filiale de TUI, daté du 10 avril 2003. Il y a eu manifestement une volonté délibérée de ne pas respecter ces engagements, ce qui les fait apparaître comme un subterfuge destiné à “ acheter “ la paix sociale.
Grâce à ce stratagème, l’entreprise a pu être liquidée sans contestation violente (blocage de vol, de piste, séquestre d’appareil….) parce que les salaries ont fait confiance aux pouvoirs publics pour faire appliquer des promesses formulées sous leurs auspices.
Il ne dépend plus aujourd’hui que des magistrats concernés de faire appliquer sans faiblesse le droit et de sanctionner des comportements de flibustiers inadmissibles au 21e siècle… »
Philippe Fayolle : « Aérolyon, entreprise créée en 1996 par le groupe Nouvelles Frontières (NF) avait pour vocation initiale de desservir les DOM TOM au départ de la province française (Lyon, Nantes, Toulouse, Marseille, Bordeaux, Brest).
Cette vocation s est peu à peu élargie à la desserte des Caraïbes, du Bassin Méditerranéen et de l Afrique Noire francophone. Aérolyon a été mise en redressement judiciaire le 27 novembre 2001 et liquidée le 26 décembre 2002, après une année fertile en événements rocambolesques dignes des meilleurs romans policiers… »
T.M.com – Qu’est-qui a précipité le déclin de la Compagnie ?
Ph. F. : « Le rachat progressif à partir de 2000 de NF par le groupe allemand TUI (Preussag) a précipité le déclin d Aérolyon, perceptible à partir de 2001. Preussag, groupe sidérurgique allemand en déclin (1,5 % de marge bénéficiaire, fin des années 1990) a annoncé, par voie de presse, avoir pour objectif, de devenir le numéro un du tourisme mondial, avec une marge bénéficiaire de 5 % . Des délocalisations et de lourdes restructurations s’ensuivirent : Aérolyon a fait partie de la charrette. »
T.M.com – On a l’impression, lorsqu’on lit le déroulé des évènements, que Aérolyon embarasse NF. Pourquoi ?
Ph. F. : « NF a cherché par tous les moyens à s’amputer de sa filiale Aérolyon sans bourse délier. Cette opération a été « brillamment » réussie par ses dirigeants au profit des actionnaires de TUI et au détriment des contribuables français : le plan social a été financé par la protection sociale française, avec une « déresponsabilisation » totale du groupe TUI.
Ceci n’a pu être mené a bien que grâce à la légèreté et à l’incurie, voire à la complicité, de l’appareil d’Etat concerné… »
T.M.com – Selon vous, comment un escroc international s’est-il retrouvé à la tête d’une filiale d’un grand groupe touristique ?
Ph. F. : « Il faut savoir qu’escroc n’est pas synonyme de stupide, et que TUI en croyant choisir quelques dirigeants avisés pour sa nouvelle filiale a peut être trouvé quelques escrocs intelligents… »
T.M.com – D’où viennent les 8 millions d’euros qui ont été dilapidés dans un vaine relance de la Cie ?
Ph. F. : « Ces 8 millions d’euros venaient de l’ARAB BANK, à Vienne (Autriche) suite à un accord secret passé, à l’insu du comité déétablissement, entre celle-ci et l administrateur judiciaire ; ce qui est pour le moins surprenant quand on connaît l’utilisation ultérieure de ces fonds... »
T.M.com – Comment une aussi rocambolesque histoire a-t-ele pu avoir lieu, selon vous ?
Ph. F. : « Il faut savoir que l’activité du transport aérien international met en jeu des sommes considérables (un Airbus coûte environ 160 millions € ); la traçabilité des mouvements de fonds est d’autant plus difficile a établir que plusieurs pays sont en cause sans être tous pour autant des modèles de démocratie à l européenne.
C'est là une grande tentation pour des gens intelligents, placés aux bons endroits et peu regardants sur les moyens de faire gagner de l’argent à leurs actionnaires ou… d’en mettre dans leurs propres poches ! »
T.M.com – Vous demandez aujourd’hui la réintégration des salariés chez NF. Y-a-t’il la moindre chance pour que cette demande soit acceptée ?
Ph. F. : « La réintégration des salariés au sein de Nouvelles Frontières est juridiquement possible. Sur le fond la réintégration de l’ensemble des salaries n’est pas contestable puisque les Présidents de TUI et de NF s’y sont engagés publiquement le 23 novembre 2001, le 24 fevrier 2003, en mars 2003 au ministère des transports et en avril 2003 devant la presse (Les Echos) .
La réalité ultérieure a démenti ces promesses, consignées dans le compte rendu du CE de Corsair, autre filiale de TUI, daté du 10 avril 2003. Il y a eu manifestement une volonté délibérée de ne pas respecter ces engagements, ce qui les fait apparaître comme un subterfuge destiné à “ acheter “ la paix sociale.
Grâce à ce stratagème, l’entreprise a pu être liquidée sans contestation violente (blocage de vol, de piste, séquestre d’appareil….) parce que les salaries ont fait confiance aux pouvoirs publics pour faire appliquer des promesses formulées sous leurs auspices.
Il ne dépend plus aujourd’hui que des magistrats concernés de faire appliquer sans faiblesse le droit et de sanctionner des comportements de flibustiers inadmissibles au 21e siècle… »
Les rebondissements et les questions du dossier
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Tous les ingrédient d’un bon polar sont réunis : un escroc de stature internationale, des repreneurs aux motivations ambigües, un magot de 8 Mie dilapidé, des mises en examen, on en passe et des pires… Dans le dossier établi par l’ADASCAA Association créée pour la Défense des Anciens Salariés de la Compagnie Aérienne AéroLyon, les interrogations fusent. Nous en avons relevé un certain nombre.
Par exemple, que l’attestation de présence des fonds, de 8,2 M d'euros sur la General Electric Bank, présenté au Tribunal de Commerce au moment du rachat de la compagnie, est un faux. Plus fort : Philippe Solomon, représentant de la société canadienne Universal Capital qui détient parès la reprise 45% des parts de la compagnie L.AIR, est connu des services judiciaires américains sous le nom de Philippe Hababou.
On va dans cette affaire de surprise en coup de théâtre : Jean-Marie Gras, PDG de la compagnie, et les autres actionnaires « n'ont jamais mis un centime dans cette société
et n'avaient aucunement l'intention d'en mettre… » relève le dossier.
On comprend le dépit et la colère des anciens salariés de cette compagnie qui, en juillet 2001 employait 242 personnes et figurait au 3e rang des employeurs de Lyon St Ex. Aujourd’hui ils se demandent si, derrière toutes ces machinations, leur société était réellement déficitaire.
Pourquoi l’augmentation siège-passagers demandée à NF par Jean-Louis Chicon, DG et gérant d’Aérolyon lui a-t-elle été refusée alors qu’en revanche « cette augmentation est accordée à Corsair sans qu'elle en ait fait la demande ? »
Pourquoi le TC de Lyon a-t-il écarté des dossiers aux « garanties bancaires largement
plus intéressantes » ? Pourquoi ni le TC ni NF n’ont vérifié l'authenticité de l'attestation présentée par le repreneur ?
Pourquoi la Direction des Transports Aériens, service de la DGAC ( Direction Générale de l'Aviation Civile) n'a pas procédé, comme elle le devait, à l'analyse des futurs dirigeants de la compagnie L.AIR ?
Pour l’Association, NF « s'est débarrassée à moindres coûts d'une filiale du groupe sans avoir de plan social à financer ni de comblement de passif à effectuer. « Corsair a récupéré l'intégralité des vols de sa compagnie soeur sans embaucher ses anciens salariés. De même, rappelle l’Association, si MM Jean-Marie Gras et Philippe Solomon alias Hababou
ainsi que leur avocat Me Bruno Allar ont été inculpés de faux, usage de faux et escroquerie, seul Philippe Hababou-Solomon été condamné.
Par exemple, que l’attestation de présence des fonds, de 8,2 M d'euros sur la General Electric Bank, présenté au Tribunal de Commerce au moment du rachat de la compagnie, est un faux. Plus fort : Philippe Solomon, représentant de la société canadienne Universal Capital qui détient parès la reprise 45% des parts de la compagnie L.AIR, est connu des services judiciaires américains sous le nom de Philippe Hababou.
On va dans cette affaire de surprise en coup de théâtre : Jean-Marie Gras, PDG de la compagnie, et les autres actionnaires « n'ont jamais mis un centime dans cette société
et n'avaient aucunement l'intention d'en mettre… » relève le dossier.
On comprend le dépit et la colère des anciens salariés de cette compagnie qui, en juillet 2001 employait 242 personnes et figurait au 3e rang des employeurs de Lyon St Ex. Aujourd’hui ils se demandent si, derrière toutes ces machinations, leur société était réellement déficitaire.
Pourquoi l’augmentation siège-passagers demandée à NF par Jean-Louis Chicon, DG et gérant d’Aérolyon lui a-t-elle été refusée alors qu’en revanche « cette augmentation est accordée à Corsair sans qu'elle en ait fait la demande ? »
Pourquoi le TC de Lyon a-t-il écarté des dossiers aux « garanties bancaires largement
plus intéressantes » ? Pourquoi ni le TC ni NF n’ont vérifié l'authenticité de l'attestation présentée par le repreneur ?
Pourquoi la Direction des Transports Aériens, service de la DGAC ( Direction Générale de l'Aviation Civile) n'a pas procédé, comme elle le devait, à l'analyse des futurs dirigeants de la compagnie L.AIR ?
Pour l’Association, NF « s'est débarrassée à moindres coûts d'une filiale du groupe sans avoir de plan social à financer ni de comblement de passif à effectuer. « Corsair a récupéré l'intégralité des vols de sa compagnie soeur sans embaucher ses anciens salariés. De même, rappelle l’Association, si MM Jean-Marie Gras et Philippe Solomon alias Hababou
ainsi que leur avocat Me Bruno Allar ont été inculpés de faux, usage de faux et escroquerie, seul Philippe Hababou-Solomon été condamné.
Le film des évènements
1996 - Créée le 04 octobre 1996, la compagnie aérienne Aérolyon basée à Lyon débute son activité en décembre . Compagnie soeur de Corsair et filiale de NF elle effectuait pour le compte du TO des vols à destination de la Guadeloupe, de la Martinique et de l'île de la Réunion au départ de Lyon, Marseille, Nantes, Bordeaux et Toulouse.
1999 - A la fin de l'année un 2e avion, identique au précédent, vient renforcer la flotte.
2001 - Le 27 novembre, à la surprise des salariés, Aérolyon est placée en redressement judiciaire. Nouvelles Frontières est devenue depuis quelques mois la propriété du groupe allemand PREUSSAG qui exploite TUI.
2002 - Le 23 avril, Aérolyon est cédée à la société Aéroplus. La nouvelle compagnie est baptisée L.AIR.
2002 - En Août, les salariés saisissent le Tribunal de Commerce de Lyon, car leurs salaires de juin et de juillet ne sont pas payés. Le 26 août, la société est placée en redressement judiciaire. Et liquidée le 26 décembre
2002 - Aucun avion de la compagnie n'a plus décollé entre le 01 mai et le 26 décembre
1999 - A la fin de l'année un 2e avion, identique au précédent, vient renforcer la flotte.
2001 - Le 27 novembre, à la surprise des salariés, Aérolyon est placée en redressement judiciaire. Nouvelles Frontières est devenue depuis quelques mois la propriété du groupe allemand PREUSSAG qui exploite TUI.
2002 - Le 23 avril, Aérolyon est cédée à la société Aéroplus. La nouvelle compagnie est baptisée L.AIR.
2002 - En Août, les salariés saisissent le Tribunal de Commerce de Lyon, car leurs salaires de juin et de juillet ne sont pas payés. Le 26 août, la société est placée en redressement judiciaire. Et liquidée le 26 décembre
2002 - Aucun avion de la compagnie n'a plus décollé entre le 01 mai et le 26 décembre
Photo copyright A. Boidron DR