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Aéroport : un modèle économique à revoir en France ?

Rapport de la Cour des Comptes sur l'impact de la crise sur les aéroports français


De janvier à juin 20221, la Cour des Comptes a mené une longue enquête auprès d'un panel de 10 aéroports français. Au-delà de l'impact que nous savons tous désastreux, la juridiction financière a livré un panorama de l'écosystème, mais surtout livre un verdict sans appel. Le modèle économique de ces infrastructures doit être revu, mais ce n'est pas tout.


Rédigé par le Mercredi 16 Février 2022

Rapport de la Cour des Comptes sur l'impact de la crise sur les aéroports français - Depositphotos @BalkansCat
Rapport de la Cour des Comptes sur l'impact de la crise sur les aéroports français - Depositphotos @BalkansCat
Depuis mars 2020, tout l'écosystème touristique est aux abois, avec quelques rares embellies.

Les agences de voyages et tour-opérateurs observent une reprise de l'activité seulement depuis 15 jours avec des équipes toujours en chômage partiel. Alors que l'économie française est pleinement repartie, le tourisme souffre (moins) d'une crise qui n'en finit plus et les aéroports ne sont pas en reste.

La Cour des Comptes a réalisé une enquête de janvier à juin 2021, auprès d'un panel de dix plateformes aéroportuaires millionnaires. Dans le lot vous trouvez Aéroports de Paris (Roissy et Orly), Nice-Côte d’Azur, Lyon, Marseille, La Réunion-Roland Garros et La Guadeloupe-Pôle Caraïbes, etc.

A lire : Pandémie : "Certains aéroports vont devoir abandonner le trafic commercial..." 🔑

Ce serait mentir que de dire que les deux dernières années se sont bien passées pour les grands aéroports français.

Dans l'ensemble ces derniers ont été "durement éprouvés par la crise". Imaginez un peu que le trafic de Paris-Charles de Gaulle (CDG) n’a pas dépassé 20 % de son niveau de 2019, sur l'ensemble de l'année 2020.

Aéroport : le chiffre d'affaires fond, l'endettement devient problématique

Depuis le secteur va de reprises avortées en arrêts et peine à se dessiner un avenir. Nous parlons là d'une étude qui s'est arrêtée en juin 2021, donc elle ne prend pas en compte les récentes actualités.

Dans ce contexte déprimé, Eurocontrol a établi 3 scénarios de retour au trafic de 2019, dont le plus optimiste fixe à mi-2023 une reprise du trafic sur des volumes équivalents à ceux de 2019. Le plus pessimiste campe sur un retour à la normale en... 2027.

Face à une situation économique complexe, la gouvernance des différentes infrastructures a mis en place des plans d’économies exceptionnels. De plus la crise a révélé la forte flexibilité opérationnelle des grands aéroports français.

A noter tout de même que nous parlons d'entreprises qui étaient fortement rentables, avant crise.

"Au cours des précédentes décennies, la croissance continue du trafic aérien a assuré aux aéroports une rentabilité d’exploitation relativement élevée, autour de 20 % en 2019," révèle la Cour des Comptes.

En 2019, l'échantillon de l'enquête affichait un chiffre d'affaires de 3,8 milliards d'euros, composé à 46 % de recettes aéronautiques, à 35% de recettes extra-aéronautiques tirées d’activités domaniales et commerciales et à 19 % du produit de la taxe d’aéroport.

Des recettes qui ont fondu de 54% en 2020.

Dans le même temps et malgré des "plans d’économies d’une ampleur sans précédent", l'endettement net des 10 aéroports est passé de 4,8 milliards d'euros, pour près de 4 années de résultat d’exploitation, à 5,5 milliards à la fin de l'année 2020.

Si le niveau d'endettement par le passé témoignait "d’une certaine robustesse", il est pour beaucoup d'entre eux "problématique" explique la Cour des Comptes.

Aéroport : un modèle économique fragilisé à court et moyen terme

Surtout que nul ne sait quand la rentabilité sera de nouveau de retour, alors même qu'une partie de la clientèle pourrait ne plus revenir.

Cette crise a révélé dans un premier temps que les aéroports ont été bernés par la croissance continue et soutenue de l'industrie.

"Il (le ralentissement du trafic) met également en évidence les faiblesses du modèle économique et du système de régulation, jusque-là occultées par la croissance du trafic," analyse la juridiction.

Cette remise en cause devra s'opérer aussi bien à court qu'à long terme.

Durant la pandémie, les aéroports ont une nouvelle fois soulevé le financement des missions régaliennes de sûreté et de sécurité qui a fortement pesé sur leurs comptes.

La seule réponse de l'Etat a été de proposer des avances à rembourser à partir de 2024 de l'ordre de 550 millions pour que les équipements remplissent ces missions.

"La taxe additionnelle qui en résultera (de se remboursement, ndlr) par passager à compter de 2024 a été estimée par la DGAC à près de 0,80 centime," précise le document.

L'augmentation des taxes aéroportuaires perçues à l’aéroport de la Guadeloupe augmentera de 5,7 % et 14,2 % pour Strasbourg.

Ce n'est pas tout, car la direction générale de l’aviation civile (DGAC) au printemps 2020 a été saisie concernant une demande de compensation des baisses de leurs recettes. Les discussions se poursuivent pour savoir s'il y aura une aide du gouvernement.

"L’État et l’Autorité de régulation des transports (ART) devront prendre des décisions difficiles"

Ce n'est pas les seuls défis auxquels feront face les grands aéroports français.

Toujours selon la Cour des Comptes, la problématique de la régulation des tarifs aéroportuaire sera nettement plus complexe, alors que la crise, par son impact financier sur les aéroports, a mis à mal l’application des principes de régulation.

Concrètement, pour rentrer dans les clous les aéroports sont en mesure, par la loi, d'augmenter copieusement le niveau des redevances pour compenser la baisse du trafic. Sauf que cette opération ne serait absolument pas possible, au regard de la situation économique des compagnies aériennes.

Donc comment peuvent faire les aéroports, alors même que les commerces et les revenus commerciaux se sont effondrés ?

Surtout que dans le même temps, ces infrastructures font face à d'importants besoins en investissement, en raison du renouvellement, pas constant mais régulier et de la mise aux normes des équipements.

Pour la Cour des Comptes, il est temps que l'Etat s'interroge sur l'évolution du modèle aéroportuaire, notamment sur la vision, les enjeux, mais aussi sur le mécanisme de régulation, déjà contesté avant la crise.

"Dans un contexte de marges financières durablement réduites, l’État et l’Autorité de régulation des transports (ART) devront prendre des décisions difficiles. Sobriété dans les projets d’investissement et gains d’efficience seront vraisemblablement prioritaires," explique dans sa conclusion l'enquête.

L'instance a émis deux recommandations qui découlent des enseignements de la pandémie.

"Il faut mieux définir les indicateurs d’alerte et les mesures graduées à mettre en œuvre dans les aéroports ouverts à l’international en cas de risque sanitaire.

Et dans l’espace aérien européen, il convient de proposer le renforcement de la coordination des dispositifs en cas de crise sanitaire,
conclut la Court des Comptes.

Retrouvez les 30 pages du rapport de la Cour des Comptes :


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Commentaires

1.Posté par tracfin le 18/02/2022 07:01 | Alerter
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C'est bien simple les privatisations ne peuvent être renflouées par de la finance public. Une rentabilité privatisée quand ça va bien et sous couvert de la prise de risque imprévisible... Justement quand ça va mal, c'est carrément indécent de demander l'aide public. Que ne comprenez-vous pas dans le mot privé et le mot public? Dans ce cas cela relève-t-il d'une corruption les aides qui tombent? Le ménage devra être fait! surtout à Lyon, car une entreprise privée, un groupe privé est "aidé", et se retrouve ainsi en quasi situation de monopole et ce, sur la région presque toute entière! J'ai rien contre vinci concessions, vinci airports ou vinci tout court, ceux la qui engrangent bénéfices sur bénéfices, distribuent des dividendes en pagailles et arrivent quand même à coopter des aides publics. Plaît-il?

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