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Conflit Ukraine : vers une mise en sommeil du tourisme spatial ?

la chronique de Michel Messager spécialiste du tourisme spatial


Quelles sont et quelles pourraient être les conséquences du conflit Ukrainien dans le domaine du spatial et du tourisme Spatial. Michel Messager notre expert fait le point sur la situation.


Rédigé par le Lundi 28 Février 2022

Quelles sont les conséquences du conflit en Ukraine sur le Tourisme spatial - Depositphotos.com Auteur cookelma
Quelles sont les conséquences du conflit en Ukraine sur le Tourisme spatial - Depositphotos.com Auteur cookelma
Dmitri Rogozine ancien vice-président du gouvernement russe chargé de la Défense et de l'Industrie spatiale, aujourd’hui patron de l'agence spatiale russe Roscosmos a menacé sur Twitter : « Si vous bloquez la coopération avec nous, qui sauvera l'ISS d'une désorbitation incontrôlée et d'une chute sur les États-Unis ou l'Europe.

Je vous suggère de ne pas vous comporter comme un irresponsable (…) Pour éviter que vos sanctions ne vous tombent sur la tête. Et pas seulement au sens figuré
».

Réponse du « berger à la bergère » suite à la déclaration du Président Joe Biden, jeudi 24 mars, annonçant des sanctions économiques de grande envergure contre la Russie, mentionnant spécifiquement que les sanctions « limiteront leur capacité à accéder à la technologie développée à l’ouest...nous allons couper plus de la moitié des importations de haute technologie de la Russie... cela va dégrader également leur industrie aérospatiale, y compris leur programme spatial global ».

A lire aussi : Tourisme Spatial : que sera l’année 2022 ?

Même si l’on connait l’esprit provocateur de Dmitri Rogozine, cette annonce met-elle fin aux interrogations sur la coopération internationale et la bonne entente spatiale entre les occidentaux et les russes ?

Pour la NASA, sans doute pour éviter toute escalade et lever toute ambiguïté de sa position, celle-ci a tenu à publier le communiqué suivant : « La NASA continue de travailler avec tous nos partenaires internationaux, y compris la société spatiale d’État Roscosmos, pour la poursuite des opérations – en toute sécurité – à bord de la Station spatiale internationale ».

Léger flottement dans la communication

De son côté, Josef Aschbacher, le patron de l’agence spatiale européenne, déclare-lui aussi, via un tweet rassurant : « Malgré le conflit actuel, la coopération spatiale reste un pont. L’ESA continue de travailler sur tous ses programmes, y compris sur la campagne de lancement de l’ISS et d’Exomars ».

Ces deux déclarations de début de week-end semblent montrer ‘’un léger flottement’’ dans la communication de l’industrie spatiale :

La réponse russe ne s’est pas fait attendre : « En réaction aux sanctions de l'UE à l'encontre de nos entreprises, Roscosmos suspend sa coopération avec les partenaires européens dans l'organisation des lancements spatiaux depuis le cosmodrome de Kourou et rappelle son personnel technique (...) de Guyane française », a écrit l'agence dans un communiqué.

Lire aussi : La course au tourisme spatial déjà perdue pour l’Europe ?

Quid de l’ISS ?

Pour ce qui est des menaces concernant une désorbitation de l’ISS, comme le remarque sur le site Futura Sciences, le journaliste Rémy Decourt, grand spécialiste du tourisme spatial : « Techniquement il est difficile de désorbiter l’ISS, trois cargos russes Progress seraient nécessaires pour désorbiter l’ISS de façon contrôlée ».

Or poursuit-il « le seul cargo Progress amarré à l'ISS n'est pas suffisant pour cela. De plus, la partie russe de l’ISS vaut tout de même plusieurs milliards de dollars et qu'ils comptent l'utiliser jusqu'en 2030 ».

Donc pour l’instant peu de problème pour les sept personnes à bord de l’ISS : cinq astronautes – quatre américains et un allemand – et deux cosmonautes russes.

Par contre comme l’a déclaré à CNBC Jeff Manber, le président de Voyager Space :
« Alors même que les États-Unis se préparent à prolonger leurs opérations avec l’ISS jusqu’en 2030, le défi du renouvellement du partenariat avec l’agence spatiale russe Roscosmos après 2024 n’a jamais été aussi grand ».

Vers une attaque détournée des anciens satellites ?

Il faut également prendre en compte le fait plusieurs observateurs scientifiques se montrent inquiets, notamment si l’on prend en compte l’analyse que fait de la situation Rémy Decourt : « Avec ce tir Asat du 15 novembre 2021, pour détruire un de leurs vieux satellites d'écoute électronique, certains observateurs se demandent si les Russes n'ont pas préparé les hostilités dans l'espace en marge du conflit avec l'Ukraine ».

En effet on peut envisager comme le font certains militaires américains que plutôt que d'attaquer frontalement des satellites militaires américains, ils pourraient détruire certains de leurs vieux satellites, de manière à ce que le nuage de débris généré, soumette les satellites US, à proximité, à un véritable mitraillage de débris...

Nous n’en sommes pas encore là et comme le rappelait le week-end dernier sur BFM le patron d'Arianespace Stéphane Israël « Pendant la guerre froide, un des rares endroits où Russes et Américains continuaient à se parler, c'était dans l'espace » !

Une chose cependant est à surveiller dans ces prochains jours, ce sont les conséquences de ce conflit au niveau des accords entre les USA, l’Europe et la Russie ?

Mise en sommeil du tourisme spatial

De nombreux programmes sont en effet en cours avec la Russie comme par exemple la United Launch Alliance (ULA), qui utilise des moteurs RD-180 de fabrication russe pour sa fusée Atlas V qui envoie de nombreuses missions dans l’espace chaque année où la fusée Antares de Northrop Grumman dont le premier étage de fabrication ukrainienne est propulsé par deux moteurs RD-181 de fabrication russe, ou encore la collaboration et les prochains lancements de Space Adventures qui envoie ses touristes de l’espace à bord de Soyouz pour rejoindre la station spatiale internationale (ISS).

Quand la Russie suspend les lancements depuis le cosmodrome de Kourou expliquant qu'il s'agit d'une réaction aux sanctions de l'Union européenne à l'encontre de Moscou, l’avenir du spatial et du tourisme spatial semblent compromis ou du moins promis à de très sérieuses perturbations.

Il est clair que les conséquences du conflit ukrainien et les sanctions économiques prises à l’égard des russes dans le domaine Spatial impliqueront sinon un arrêt, du moins une ‘’mise en sommeil’’ du Programme Spatial.

Espérons que cette ‘’mise en sommeil’’ soit la plus courte possible et que notre Terre retrouve rapidement ses esprits.

Une pensée pour le peuple Ukrainien : « C'est quand on n'a plus d'espoir qu'il ne faut désespérer de rien ». Courage !

Michel Messager
Michel Messager
Michel MESSAGER est directeur associé de Consul Tours, société de conseil travaillant pour une clientèle privée et institutionnelle dans les secteurs du tourisme.

Après avoir occupé les postes de Secrétaire Général du Tourisme Français, puis de Directeur de Touropa et Directeur du pôle tourisme du Groupe Verney, il rejoint en 1997 l’APST (Association Professionnelle de Solidarité du Tourisme) en qualité de Secrétaire Général jusqu’à fin 2007, période à laquelle, encore jeune retraité, il décide de réactiver sa société de conseils créée au début des années 90.
Nommé par le Ministre chargé du tourisme en 2005, puis en 2012, il siège au Conseil National du Tourisme en qualité de Président Délégué de la section économie touristique, il est aussi Membre Fondateur de l’Institut Européen du Tourisme Spatial et de l’AFST (Association Française des Seniors du Tourisme).

Il est l’auteur de deux livres sur le Tourisme Spatial, le premier publié en 2009 à la documentation française et le second sorti en 2021, "Histoire du Tourisme Spatial de 1950 à 2020" chez Amazon, ainsi que de nombreux articles sur le sujet. Il est considéré actuellement comme l’un des spécialistes en la matière. Il intervient fréquemment sur ce sujet à la radio et à la télévision, ainsi qu’au travers de conférences dans de nombreux pays, notamment au Canada où il réside quelques mois par an.

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