Selon Me Emmanuelle Llop, au lieu d'invoquer la Convention de Montréal, il aurait fallu, ici, se référer au Code du Tourisme - Fotolia
TourMaG.com – Qu'est-ce que l'arrêt Cass. Civ 1. 13.03.2013 N°164 apporte de nouveau dans la réglementation du tourisme ?
Emmanuelle Llop : "Cet arrêt de la Cour de cassation n'apporte pas grand chose de nouveau dans la réglementation.
Ce qui est intéressant, c'est surtout que la Cour répète qu'une fois qu'on est dans le domaine de la Convention de Montréal, on n'applique que celle-ci. Cet arrêt rappelle la supériorité du droit international sur le droit interne, selon le principe de l'article 55 de la Constitution française. C'est ce qui ressort explicitement du dernier « attendu » de l'arrêt.
Autrement dit, il rappelle que les dispositions spéciales - la Convention de Montréal en l'occurrence – dominent sur les dispositions générales (Code Civil).
Afin de vérifier si l'article 19 de la Convention de Montréal a bien été interprété par la Cour d'appel de Bordeaux, la Cour de cassation s'est demandée si ces conditions étaient bien remplies. L'article couvre les compagnies aériennes si elles prouvent que malgré tous leurs efforts, elles n'ont rien pu faire pour éviter le retard.
En l’occurrence, la Cour de cassation n'a pas pu vérifier que les conditions prévues par l'article en question étaient réunies car la Cour d'appel n'a pas suffisamment motivé son arrêt.
Elle a donc décidé de casser et d'annuler celui-ci. Les parties sont ainsi renvoyées devant la Cour d'appel de Toulouse comme si l'arrêt de celle de Bordeaux n'avait jamais existé.
D'un point de vue pratique, cet arrêt présente Bailly Voyages comme un transporteur contractuel alors que, pour moi, c'est une agence de voyages qui a affrété un vol auprès d'une compagnie (ou d'un consolidateur).
Je trouve donc assez curieux que l'agence n'ait pas formé un appel en garantie à l'égard de son prestataire aérien devant le premier juge et devant la Cour d'appel.
De plus, je trouve paradoxal d'invoquer la Convention de Montréal pour une agence si l'on se souvient bien de l'arrêt « Thomas Cook » du 8 mars 2012, qui précisait l'impossibilité pour une agence de voyages d'invoquer le droit européen relatif au transport aérien (Règlement 261/2004) car elle n'est justement pas ... transporteur aérien.
Pour moi, dans cette affaire, des maillons sont manquants. Je pense que, dans ce cas, il aurait suffit de se référer au Code du Tourisme."
Emmanuelle Llop : "Cet arrêt de la Cour de cassation n'apporte pas grand chose de nouveau dans la réglementation.
Ce qui est intéressant, c'est surtout que la Cour répète qu'une fois qu'on est dans le domaine de la Convention de Montréal, on n'applique que celle-ci. Cet arrêt rappelle la supériorité du droit international sur le droit interne, selon le principe de l'article 55 de la Constitution française. C'est ce qui ressort explicitement du dernier « attendu » de l'arrêt.
Autrement dit, il rappelle que les dispositions spéciales - la Convention de Montréal en l'occurrence – dominent sur les dispositions générales (Code Civil).
Afin de vérifier si l'article 19 de la Convention de Montréal a bien été interprété par la Cour d'appel de Bordeaux, la Cour de cassation s'est demandée si ces conditions étaient bien remplies. L'article couvre les compagnies aériennes si elles prouvent que malgré tous leurs efforts, elles n'ont rien pu faire pour éviter le retard.
En l’occurrence, la Cour de cassation n'a pas pu vérifier que les conditions prévues par l'article en question étaient réunies car la Cour d'appel n'a pas suffisamment motivé son arrêt.
Elle a donc décidé de casser et d'annuler celui-ci. Les parties sont ainsi renvoyées devant la Cour d'appel de Toulouse comme si l'arrêt de celle de Bordeaux n'avait jamais existé.
D'un point de vue pratique, cet arrêt présente Bailly Voyages comme un transporteur contractuel alors que, pour moi, c'est une agence de voyages qui a affrété un vol auprès d'une compagnie (ou d'un consolidateur).
Je trouve donc assez curieux que l'agence n'ait pas formé un appel en garantie à l'égard de son prestataire aérien devant le premier juge et devant la Cour d'appel.
De plus, je trouve paradoxal d'invoquer la Convention de Montréal pour une agence si l'on se souvient bien de l'arrêt « Thomas Cook » du 8 mars 2012, qui précisait l'impossibilité pour une agence de voyages d'invoquer le droit européen relatif au transport aérien (Règlement 261/2004) car elle n'est justement pas ... transporteur aérien.
Pour moi, dans cette affaire, des maillons sont manquants. Je pense que, dans ce cas, il aurait suffit de se référer au Code du Tourisme."
Manquement à l'obligation d'information pénalisé
Emmanuelle Llop, Equinoxe Avocats, est avocate au Barreau de Paris - Photo DR
TM.com – Gardons ce point de vue pratique : qu'est-ce que cet arrêt va changer pour les agences de voyages ?
E.L : "Il ne change rien. Il s'agit plutôt d'une mise en garde pour les agences de voyages.
Cet arrêt doit les inciter à faire attention à la définition des rôles, des responsabilités et des recours possibles pour chaque acteur suivant la prestation vendue.
Mais c'est ce que je conseille déjà à tous mes clients. Qu’ils soient tour-opérateurs, agents de voyages ou compagnies aériennes."
TM.com – L'Assemblée nationale a adopté la semaine dernière une proposition de loi qui veut obliger les agences de voyages à informer et trouver des alternatives à leurs clients dans le cas où une compagnie aérienne est inscrite sur liste noire. Comment faire quand on envoie un voyageur dans un pays où tous les transporteurs sont blacklistés ?
E.L : "Il n'est pas interdit de faire voyager un client sur une compagnie blacklistée par l'Union européenne hors de son territoire. Mais, dans ce cas, il faut informer le client et l'inviter à chercher d'autres solutions de transport. C'est ce que dit le texte.
Il vient donc, dans un premier temps, alourdir l'obligation d'information pour les agences de voyages.
Et, dans un deuxième temps, il vient pénaliser le manquement à cette obligation : 7 500 € par billet vendu. Et ce même si aucun problème ne survient pendant le transport.
Sur ce point, j'invite les agences de voyages à faire preuve d'une forte vigilance. Si j'avais un conseil à leur adresser, je leur dirais de toujours garder une preuve que l'information a bien été donnée au client.
Je pense que ce texte a surtout le mérite de clarifier le flou juridique qui subsistait jusqu'alors sur le bout de ligne en matière de compagnies aériennes inscrites sur la liste noire de l'Union européenne."
E.L : "Il ne change rien. Il s'agit plutôt d'une mise en garde pour les agences de voyages.
Cet arrêt doit les inciter à faire attention à la définition des rôles, des responsabilités et des recours possibles pour chaque acteur suivant la prestation vendue.
Mais c'est ce que je conseille déjà à tous mes clients. Qu’ils soient tour-opérateurs, agents de voyages ou compagnies aériennes."
TM.com – L'Assemblée nationale a adopté la semaine dernière une proposition de loi qui veut obliger les agences de voyages à informer et trouver des alternatives à leurs clients dans le cas où une compagnie aérienne est inscrite sur liste noire. Comment faire quand on envoie un voyageur dans un pays où tous les transporteurs sont blacklistés ?
E.L : "Il n'est pas interdit de faire voyager un client sur une compagnie blacklistée par l'Union européenne hors de son territoire. Mais, dans ce cas, il faut informer le client et l'inviter à chercher d'autres solutions de transport. C'est ce que dit le texte.
Il vient donc, dans un premier temps, alourdir l'obligation d'information pour les agences de voyages.
Et, dans un deuxième temps, il vient pénaliser le manquement à cette obligation : 7 500 € par billet vendu. Et ce même si aucun problème ne survient pendant le transport.
Sur ce point, j'invite les agences de voyages à faire preuve d'une forte vigilance. Si j'avais un conseil à leur adresser, je leur dirais de toujours garder une preuve que l'information a bien été donnée au client.
Je pense que ce texte a surtout le mérite de clarifier le flou juridique qui subsistait jusqu'alors sur le bout de ligne en matière de compagnies aériennes inscrites sur la liste noire de l'Union européenne."
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