DRH VTF : "La fonction RH ne se transforme pas, elle s’étend..." 🔑

"Auparavant, pour recruter, il suffisait de diffuser ses annonces sur des jobboards. Aujourd’hui, ce n’est plus suffisant", affirme Stéphanie Laymard, DRH de VTF Vacances. - @S.L.

TourMaG - Quel est votre parcours ? Que représente VTF Vacances aujourd'hui ?

Stéphanie Laymard : Je suis diplômée de l’IAE d’Aix-en-Provence, avec une spécialisation en Gestion des Ressources Humaines.

Après une première expérience comme Chargée de RH en milieu hospitalier, j’occupe depuis une vingtaine d’année des fonctions de DRH, toujours dans des structures de l’Economie Sociale et Solidaire, d’abord pendant 10 ans dans le secteur socio-culturel puis depuis 8 ans dans le secteur du tourisme social et familial, au sein de VTF.

Concrètement, je pilote le service RH, sur l’ensemble du périmètre de la fonction, avec une équipe de 4 personnes.

VTF a pour activité principale la gestion de villages vacances et la commercialisation de séjours pour nos différents types de clientèle, essentiellement en France. Nous déployons également une activité de Voyages à l’Etranger qui vient compléter notre offre sur le marché intérieur.

Nos collaborateurs occupent pour plus de 80% des métiers de l’hôtellerie-restauration et de l’animation. Le reste de nos collaborateurs est positionné sur des fonctions commerciales ou support.

Chaque année, ce sont plus de 1 000 collaborateurs qui travaillent chez VTF, pour environ 500 ETP, notre organisation recrutant majoritairement des salariés saisonniers.

TourMaG - Comment avez-vous vu évoluer vos missions depuis vos débuts ?

Stéphanie Laymard : Pour moi, la fonction RH est une fonction à géométrie très variable, très dépendante de son environnement et perméable aux évolutions sociétales ambiantes, comme la digitalisation et les nouvelles attentes des salariés.

Pour autant, elle repose sur un socle solide de missions historiques (recrutement, ADP et paie, développement RH…) que nous devons continuer à maîtriser en plus des nouvelles dimensions émergentes.

Depuis quatre ou cinq ans, le périmètre de la fonction s’est clairement élargi. La fonction d’une DRH est d’accompagner l’organisation dans ses évolutions, en intégrant ses enjeux de développement économique mais également des enjeux liés aux attentes des collaborateurs.

Notre rôle se déplace aujourd’hui vers un scope plus large qui englobe de nouvelles priorités telles que le développement du « sens » via le déploiement de politiques RSE et les questions autour de la Qualité de Vie et des Conditions de Travail (QVCT).

La fonction RH ne se transforme pas, elle s’étend.

"Faire évoluer nos stratégies de recrutement et nos modes d’organisation pour pouvoir être attractifs"

TourMaG - Comment définiriez-vous le marché de l'emploi ?

Stéphanie Laymard : Depuis la fin de la période COVID, le secteur du tourisme est très tendu, notamment sur les métiers de l’hôtellerie-restauration. Nous avons constaté un réel déficit de collaborateurs saisonniers qui ont quitté le secteur d’activité, après cette longue période d’arrêt d’activité.

Certain.es ont également pris conscience de la pénibilité de ces métiers et ont choisi de se réorienter vers des métiers à moindre contrainte (coupures, travail en soirée et le WE…).

Aujourd’hui, il y a beaucoup d’offres, moins de demandes ou des demandes plus exigeantes des candidats. Nous sommes obligés de nous adapter et de faire évoluer nos stratégies de recrutement et nos modes d’organisation pour pouvoir être attractifs.

Nous travaillons également à la fidélisation des collaborateurs, leur intégration et évolution par des temps de formation en intersaison.

TourMaG - Le secteur connait des difficultés de recrutement depuis des années. Comment les expliquer ?

Stéphanie Laymard : Déjà, avant COVID, certains métiers, notamment de la restauration, étaient déjà en tension, sans doute liés à des difficultés d’attractivité du secteur au regard des conditions d’emploi.

Ces difficultés sont liées à plusieurs facteurs, notamment la crise sanitaire, qui a touché de plein fouet le secteur et entraîné la reconversion d’un certain nombre de professionnels, ainsi qu’une dynamique de création d’emploi, qui a provoqué une forte concurrence entre les secteurs d’activités et les opérateurs.

La crise a décuplé le sentiment d’insécurité lié à l’emploi, sans compter la réforme de l’assurance chômage qui est venue rajouter de la précarité dans un secteur où celle-ci est déjà présente, avec une majorité de recrutements en CDD.

Enfin, la question de la rémunération, d’autant plus dans une période de forte inflation, est centrale. Nous devons apporter des réponses très diversifiées, selon les situations d’emploi, tout en tenant compte des équilibres économiques.

TourMaG - Comment y répondez-vous ?

Stéphanie Laymard : D’une part, compte tenu de la pénurie de candidats, nous avons, pour certains métiers ne nécessitant pas une technicité particulière, privilégié le recrutement à partir des soft-skills. Notre activité est en premier lieu l’accueil du vacancier et la proposition d’un séjour de qualité.

Nous privilégions donc les candidats qui nous démontrent qu’ils disposent du sens de l’accueil et de la relation client, le sourire, la capacité de travailler en équipe et l’envie de bien faire. Nous sommes plus attachés à la personnalité, l’histoire de la personne, sa curiosité, que son CV.

D’autre part, plutôt que d’investir notre énergie pour recruter sur des métiers en tension, nous avons développé, avec des CFA partenaires, des parcours de formation en alternance, adaptés à notre saisonnalité, et qui nous permettent d’intégrer dans notre structure des jeunes, même non qualifiés, et de les accompagner dans un parcours professionnel jusqu’à l’obtention d’une certification, en veillant à les suivre tout au long du parcours et les fidéliser à l’issue de la formation.

Enfin, nous avons fait évoluer nos outils internes et mis en place un process de recrutement digitalisé via un ATS qui nous permet de travailler cette question de manière plus collaborative avec nos managers qui ont une part plus active dans le process.

Ceci nous a permis également d’être plus réactifs en termes de délais de traitement des candidatures, qui ont aujourd’hui, une durée de vie très courte et donc d’améliorer de manière générale « l’expérience candidat » qui peut suivre l’évolution de sa candidature à chaque étape du recrutement.

"L’un de nos premiers enjeux est l’accueil et l’intégration de nos collaborateurs et l’adaptation rapide au poste de travail"

TourMaG - Les attentes des candidats se sont affirmées, comment les satisfaire ?

Stéphanie Laymard : Comme nous recrutons principalement des collaborateurs saisonniers, l’un de nos premiers enjeux est l’accueil et l’intégration de nos collaborateurs et l’adaptation rapide au poste de travail.

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Le second enjeu reste le logement que nous proposons quasi systématiquement en complément de l’emploi pour nos collaborateurs saisonniers. Il est aujourd’hui impératif de pouvoir le proposer à moindre coût pour nous permettre d’attirer des candidats qui ne sont pas localisés à proximité de nos établissements. Ce sujet est d’ailleurs devenu un enjeu national avec le lancement dernièrement d’un « plan saisonniers » par le Gouvernement actuel.

Le troisième enjeu tourne autour de l’accompagnement et la montée en compétence. Nos collaborateurs, majoritairement des jeunes de moins 30 ans, sont dans l’attente de perspectives d’évolution. C’est très générationnel.

Au sein de VTF, nous avons aussi une population de collaborateurs de plus de 40 ans fidèles et qui se projettent dans l’entreprise. La problématique concerne plutôt une population plus jeune sur des postes moins qualifiés.

TourMaG - Quel regard portent les jeunes sur le monde du travail ?

Stéphanie Laymard : Aujourd’hui, la priorité des jeunes est de trouver un équilibre entre leur vie personnelle et professionnelle, ce qui est assez éloigné de ce que nous avons vécu.

Ils sont également à la recherche de sens, ce qui nous pousse à mieux communiquer sur nos engagements, notamment autour des questions de développement durable, d’inclusion et de diversité.

VTF défend des valeurs d’accès aux vacances pour tous, de solidarité et de valorisation des territoires. En lien avec ces valeurs, notre politique RSE est orientée vers le déploiement de labels et de démarche d’amélioration continue sur les questions de durabilité (labellisation Clé Verte progressive pour nos établissements, mise en place de la démarche Mon restau responsable portée par la fondation pour la nature et l’homme) mais nous investissons également ces questions sur les aspects RH autour des thématiques d’égalité Femme/Homme, d’insertion et de diversité.

Nos établissements constituent souvent la première expérience professionnelle pour de nombreux jeunes pour lesquels nous jouons un rôle professionnalisant.

"Nos collaborateurs sont beaucoup plus volatiles aujourd’hui"

TourMaG - Quels sont les enjeux RH aujourd'hui ? Etaient-ils différents il y a une vingtaine d’années ?

Stéphanie Laymard : Auparavant, pour recruter, il suffisait de diffuser ses annonces sur des jobboards. Aujourd’hui, ce n’est plus suffisant.

Nous avons donc travaillé en interne sur le développement de notre marque employeur, pour mettre en lumière ce que nous faisons déjà depuis plusieurs années mais sur quoi nous ne communiquions pas nécessairement.

Nous avons également noué de longue date des partenariats avec des écoles, notamment pour faire découvrir notre structure et nos métiers, développer l’accueil de stagiaires au sein de nos équipes et créer des viviers de candidats. Nous participons également à des forums de recrutement.

Nos collaborateurs sont beaucoup plus volatiles aujourd’hui. Nous n’avons pas d’autre choix que de répondre aux attentes des collaborateurs et des candidats.

C’est donnant/donnant. Un collaborateur qui se sent bien, reste, il est productif, positif et va attirer d’autres personnes. Nous devons développer la réponse individuelle tout en préservant le collectif.

TourMaG - Quelles sont les principales évolutions qui attendent le monde du travail ?

Stéphanie Laymard : Nous devrons dans les années à venir faire évoluer nos organisations de travail pour répondre aux attentes d’équilibre vie pro/perso.

Si la question du télétravail n’est pas centrale chez VTF puisque la grande majorité de nos collaborateurs exercent des fonctions « non télétravaillables », nous devons nous attacher à repenser nos modes d’organisation pour réduire les contraintes (moins de coupures, rythmes de repos dans la semaine…..)