Futuroscopie - Touristes chinois : quand reviendront-ils ? 🔑

Les rues de Paris en ces vacances de la Toussaint ont beau déborder de touristes nationaux et étrangers, les touristes chinois ne sont pas légion.

Loin de là. A peine quelques-uns, sans doute étudiant ou travaillant en Europe, font-ils le déplacement.

De quoi inquiéter les professionnels du tourisme, notamment les hôteliers de luxe et les grands acteurs du shopping qui, dès le mois de mars dernier, selon un article du Journal Les Echos, envoyaient une lettre au Président de la République pour l’alerter sur la situation de l’aérien entre la Chine et la France.

Signée en particulier par Sébastien Bazin (Accor), Henri Giscard d’Estaing (Club Med), Augustin de Romanet (Aéroports de Paris) et Nicolas Houzé (Galeries Lafayette), cette lettre demandait "un assouplissement des restrictions à l’endroit des compagnies aériennes chinoises" défavorisées voire empêchées de voler vers notre pays, à cause de la concurrence jugée déloyale d’Air France.

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De quoi estimer à 600 millions d’euros le manque à gagner pour le premier trimestre de l’année 2023, dont 18% tombaient dans les caisses de l’hôtellerie ! Tandis que les chiffres officiels de l’aérien font état, entre le 16 octobre et le 22 octobre 2023 (Golden Week d’automne) de seulement 7 750 vols internationaux depuis la Chine vers 61 pays, soit à peine 51% des chiffres pré-pandémiques.

Durant la Golden week de printemps (29 avril au 3 mai 2023), 274 millions de touristes ont voyagé en Chine, dont 120 millions par train selon China State Railway Group. Ce qui représente 19% d’augmentation par rapport à 2019. Mais, leur consommation individuelle a baissé d'environ 10%.

Durant la Golden week d’automne 2023, les revenus provenant du tourisme intérieur ont totalisé 86,6 milliards d’euros sur les sept premiers jours de la semaine de congés payés, qui en compte huit. Quelque 754 millions de voyages intérieurs ont été comptabilisés sur la période, soit une progression de près de 80% par rapport à la Golden week de l’an dernier.

Malgré une Golden week début octobre plutôt ratée en France, durant laquelle les touristes chinois sont surtout restés dans leur pays afin de soutenir l’économie nationale en berne, de bonnes nouvelles du ciel semblent arriver.

Selon le quotidien chinois China Daily, les compagnies aériennes chinoises ont en effet programmé 95 651 vols domestiques (marchandises et passagers) par semaine pour la saison prochaine hiver et printemps, soit une augmentation de près de 34% par rapport à la même période en 2019-2020. Plus précisément, d’octobre 2023 à mars 2024 : 516 nouveaux itinéraires domestiques seront ouverts.

Quant aux vols internationaux, 150 compagnies internationales et nationales devraient être capables d’assurer 16 680 vols par semaine vers 68 pays étrangers.

Encore plus précisément, selon le CAAC (Civil aviation administration chinoise) l’aéroport international de Pékin devrait ajouter des vols vers des destinations nouvelles comme San Francisco ou Bakou et augmenter la fréquence des vols vers des destinations européennes comme Francfort, Londres et Paris.

Et, le département des transports chinois promet qu’il encouragera le développement de tous les vols internationaux afin de faciliter les échanges commerciaux et touristiques entre la Chine et le reste du monde.

Seront également incluses dans les nouveaux programmes de vols les destinations situées sur les Routes de la soie.

Rassurantes ces nouvelles, assorties à la grande envie de voyager exprimée dans de nombreuses enquêtes, laissent effectivement espérer un avenir plus rose pour le tourisme chinois sur la scène internationale.

Mais, d’autres nouvelles venant de l’Empire du Milieu par différents canaux médiatiques indiquent que le gouvernement chinois limite les déplacements de ses fonctionnaires et des employés des entreprises liées à l'État qui sont soumis à des contraintes et contrôles plus strictes en matière de voyages privés à l'étranger.

En résumé, selon des avis officiels d’experts : Pékin mène bel et bien une campagne contre l'influence étrangère.

Des employés actuels et anciens ont même déclaré à l’agence Reuters que les restrictions avaient été élargies depuis 2021 pour inclure l'interdiction pure et simple des voyages à l'étranger, des limites plus strictes sur la fréquence et la durée des voyages, des processus d'approbation onéreux et une formation à la confidentialité avant le départ.

Certes, les récits de ces personnes varient, mais décrivent de manière cohérente une surveillance accrue des voyages internationaux même après la réouverture des frontières par la Chine en janvier.

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Par ailleurs, n’oublions pas que dans cette Chine promise à une prospérité régulière, 21% des jeunes de 16 à 24 ans ne trouvent pas de travail.

D’autre part, Selon Henley & Partners, un cabinet spécialisé dans le conseil aux riches, 10 800 millionnaires ont quitté la Chine en 2022, et 13 500 autres devraient fuir le pays en 2023.

La Chine est donc devenue le pays avec le plus grand exode de millionnaires, devant l'Inde qui devrait perdre environ 6 500 de ses citoyens les plus riches. A l'opposé, les États-Unis devraient accueillir 2100 millionnaires !

D’autre part, il ne faut pas sous-estimer les craintes de ces voyageurs. Selon la dernière enquête du Mastercard Institute, ce n’est pas le Covid qui fait peur, c’est :

- la peur du terrorisme : 43%
- les crimes violents : 46%
- la situation géopolitique : 37%
- l’hostilité aux Chinois : 37%
- les coûts : 37%
- les relations avec la Chine : 37%.

Quant aux shoppers, très prisés pour leurs dépenses par les commerces de luxe dont les grands magasins parisiens, ils semblent aussi moins attirés par de folles dépenses.

Selon le rapport du Mastercard Economic Institute, d’une part les touristes chinois ont tendance à rester en Chine afin d’y pratiquer un tourisme qui devient clairement « glamour », notamment en plein air et pleine nature.

D’autre part, ils sont plus tentés par des expériences originales, voire aventureuses, et réduisent donc leurs dépenses en achats matériels.

A noter que, même les destinations asiatiques proches comme la Thaïlande, Singapour, l’Indonésie et les Philippines ont perdu 60% de cette clientèle durant le mois de mai 2023, comparé à 2019.

Et partout, ce sont les touristes indiens qui ont été les plus nombreux ! Un phénomène à suivre de près en attendant un éventuel retour en masse des champions du tourisme international qu’étaient devenus les habitants de l’Empire du Milieu…

Cette clientèle représente 3% des visites dans l’Hexagone, selon Atout France, mais 7,5% des dépenses, notamment dans les établissements de luxe.

Une dépense estimée à 1 milliard d’euros en 2019 à Paris et en Île-de-France, et 3,5 milliards pour l’ensemble de l’économie française.

Journaliste, consultante, conférencière, Josette Sicsic observe depuis plus de 25 ans, les mutations du monde afin d’en analyser les conséquences sur le secteur du tourisme.

Après avoir développé pendant plus de 20 ans le journal Touriscopie, elle est toujours sur le pont de l’actualité où elle décode le présent pour prévoir le futur. Sur le site www.tourmag.com, rubrique Futuroscopie, elle publie plusieurs fois par semaine les articles prospectifs et analytiques.

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