"La part de marché des low cost en France est amenée à augmenter" selon Paul Chiambaretto, le directeur de la Chaire Pégase - Crédit photo : RP
TourMaG.com - Il y a quelques jours un évènement marquant s'est produit dans le ciel français, puisque Volotea est devenu la première compagnie en termes de lignes intérieures, dépassant Air France. Qu'est-ce que cela nous dit ?
Paul Chiambaretto : Il y a plusieurs interprétations possibles.
Tout d'abord, cela dépend des statistiques, car Air France a transféré une partie importante de ses lignes domestiques vers Transavia. En faisant la somme des vols des deux compagnies françaises, je ne suis pas sûr que Volotea conserve sa première place, ni même en comparant le volume du trafic.
Air France s'est peu à peu désengagée sur les lignes intérieures, car elles sont structurellement déficitaires, alors que ses coûts au siège kilomètre offert (CSKO, ndlr) sont 2 ou 3 fois supérieurs à ceux de Transavia.
A lire : Air France : quel avenir pour le réseau domestique ?
Le meilleur moyen pour le groupe Air France - KLM de pouvoir rester sur le marché des vols courts et moyen-courriers, donc de lutter contre les compagnies low cost et le train, n'est autre que de transférer une partie des activités à Transavia.
Paul Chiambaretto : Il y a plusieurs interprétations possibles.
Tout d'abord, cela dépend des statistiques, car Air France a transféré une partie importante de ses lignes domestiques vers Transavia. En faisant la somme des vols des deux compagnies françaises, je ne suis pas sûr que Volotea conserve sa première place, ni même en comparant le volume du trafic.
Air France s'est peu à peu désengagée sur les lignes intérieures, car elles sont structurellement déficitaires, alors que ses coûts au siège kilomètre offert (CSKO, ndlr) sont 2 ou 3 fois supérieurs à ceux de Transavia.
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Le meilleur moyen pour le groupe Air France - KLM de pouvoir rester sur le marché des vols courts et moyen-courriers, donc de lutter contre les compagnies low cost et le train, n'est autre que de transférer une partie des activités à Transavia.
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"Finalement, Volotea a écrasé la concurrence" en France
TourMaG.com - Nous en avons parlé en juin dernier, mais Air France réduit de plus en plus son réseau domestique, même ses navettes. Que va-t-il rester à terme de ces lignes ?
Paul Chiambaretto : Au final, il ne restera quelques lignes rentables et celles qui doivent alimenter les dessertes long-courriers, sur le principe du hub.
A la sortie de la crise sanitaire, nous nous sommes rendu-compte que les routes intérieures n'ont pas forcément retrouvé leur niveau de 2019. D'ailleurs, avant cela, le trafic stagnait, voire même baissait.
Cette dynamique s'explique par la concurrence du TGV, puis aussi les changements d'habitude des voyageurs d'affaires. Ainsi, il reste plutĂ´t logique que les radiales baissent un peu.
Après Volotea a un positionnement intéressant : elle ouvre des lignes de province à province, sur des routes où le TGV n'est absolument attractif. La compagnie espagnole a eu l'intelligence de ne pas aller en frontal avec le train, surtout que dans le même temps Air France n'était pas très bonne sur ces lignes transversales.
Hop n'avait pas une flotte très productive et des coûts assez élevés. Finalement, Volotea a écrasé la concurrence.
TourMaG.com - Est-ce un évènement marquant de voir une compagnie espagnole détrôner Air France ?
Paul Chiambaretto : Oui bien sûr, cela montre que les acteurs français délaissent le marché domestique, alors que celui-ci reste attractif pour des acteurs étrangers.
Il s'est passé un peu la même chose en Angleterre, il y a très longtemps, avec l'arrivée de Ryanair et easyJet. Nous avons connu la même chose en Italie, où le premier acteur en part de marché reste Ryanair.
A lire : Aérien : l'avènement mondial des low cost ?
Jusque-là , nous étions en France assez bien protégés de la concurrence des compagnies aériennes étrangères. En quelque sorte, la France devient un pays normal, comparativement aux autres pays européens.
Paul Chiambaretto : Au final, il ne restera quelques lignes rentables et celles qui doivent alimenter les dessertes long-courriers, sur le principe du hub.
A la sortie de la crise sanitaire, nous nous sommes rendu-compte que les routes intérieures n'ont pas forcément retrouvé leur niveau de 2019. D'ailleurs, avant cela, le trafic stagnait, voire même baissait.
Cette dynamique s'explique par la concurrence du TGV, puis aussi les changements d'habitude des voyageurs d'affaires. Ainsi, il reste plutĂ´t logique que les radiales baissent un peu.
Après Volotea a un positionnement intéressant : elle ouvre des lignes de province à province, sur des routes où le TGV n'est absolument attractif. La compagnie espagnole a eu l'intelligence de ne pas aller en frontal avec le train, surtout que dans le même temps Air France n'était pas très bonne sur ces lignes transversales.
Hop n'avait pas une flotte très productive et des coûts assez élevés. Finalement, Volotea a écrasé la concurrence.
TourMaG.com - Est-ce un évènement marquant de voir une compagnie espagnole détrôner Air France ?
Paul Chiambaretto : Oui bien sûr, cela montre que les acteurs français délaissent le marché domestique, alors que celui-ci reste attractif pour des acteurs étrangers.
Il s'est passé un peu la même chose en Angleterre, il y a très longtemps, avec l'arrivée de Ryanair et easyJet. Nous avons connu la même chose en Italie, où le premier acteur en part de marché reste Ryanair.
A lire : Aérien : l'avènement mondial des low cost ?
Jusque-là , nous étions en France assez bien protégés de la concurrence des compagnies aériennes étrangères. En quelque sorte, la France devient un pays normal, comparativement aux autres pays européens.
"Une compagnie nait low cost, mais ne le devient pas"
TourMaG.com - Avec cet exemple, même si nous parlons de ligne et non pas de volume, le low cost est voué à détrôner les compagnies régulières sur ce genre de vols ? Finalement, les majors n'ont-elles pas de business model sur ces lignes ?
Paul Chiambaretto : Elles n'ont pas de business model sur ce genre de lignes, c'est sûr.
Les compagnies régulières essaient de réduire leurs coûts, mais la conviction que j'ai depuis des années : une compagnie nait low cost, mais ne le devient pas.
Il devient très compliqué de réduire les charges salariales d'un transporteur par exemple. Il est assez peu commun de lire que des salariés ont baissé drastiquement leurs salaires, pour s'adapter au nouveau business modèle de l'entreprise.
Il existe un certain nombre de facteurs qui fait que la réduction des coûts est très difficile.
La seule alternative et c'est ce que font tous les grands groupes : avoir une filiale low cost, dont ils sont propriétaires. Air France ne déroge pas à la règle, avec Transavia.
TourMaG.com - Est-ce que Transavia peut suffire pour résister à la montée des Volotea ou Ryanair sur les vols domestiques ?
Paul Chiambaretto : Non, pour vous donner une idée, Transavia avait en 2021 des coûts au siège kilomètre offert (CSKO) équivalent à ceux de Vueling ou easyJet.
Elle a beau être très compétitive, elle reste beaucoup plus chère que Ryanair.
Transavia est bien placé dans le middle cost. Elle pourrait venir attaquer Volotea, mais elle ne le fait pas, car ce n'est pas le modèle de Transavia. De plus, Transavia exploite des avions relativement vieux, avec des Boeing 737, n'ayant pas le meilleur rendement économique.
Le rajeunissement à venir de la flotte pourrait rendre la compagnie plus compétitive sur ce marché domestique.
Paul Chiambaretto : Elles n'ont pas de business model sur ce genre de lignes, c'est sûr.
Les compagnies régulières essaient de réduire leurs coûts, mais la conviction que j'ai depuis des années : une compagnie nait low cost, mais ne le devient pas.
Il devient très compliqué de réduire les charges salariales d'un transporteur par exemple. Il est assez peu commun de lire que des salariés ont baissé drastiquement leurs salaires, pour s'adapter au nouveau business modèle de l'entreprise.
Il existe un certain nombre de facteurs qui fait que la réduction des coûts est très difficile.
La seule alternative et c'est ce que font tous les grands groupes : avoir une filiale low cost, dont ils sont propriétaires. Air France ne déroge pas à la règle, avec Transavia.
TourMaG.com - Est-ce que Transavia peut suffire pour résister à la montée des Volotea ou Ryanair sur les vols domestiques ?
Paul Chiambaretto : Non, pour vous donner une idée, Transavia avait en 2021 des coûts au siège kilomètre offert (CSKO) équivalent à ceux de Vueling ou easyJet.
Elle a beau être très compétitive, elle reste beaucoup plus chère que Ryanair.
Transavia est bien placé dans le middle cost. Elle pourrait venir attaquer Volotea, mais elle ne le fait pas, car ce n'est pas le modèle de Transavia. De plus, Transavia exploite des avions relativement vieux, avec des Boeing 737, n'ayant pas le meilleur rendement économique.
Le rajeunissement à venir de la flotte pourrait rendre la compagnie plus compétitive sur ce marché domestique.
"La part de marché des low cost en France est amenée à augmenter"
TourMaG.com - Transavia a déjà récupéré des lignes du marché intérieur français. A terme, si elles ne deviennent pas plus rentables, alors les vols pourraient être réservés seulement aux compagnies low cost, celles très agressives sur les coûts...
Paul Chiambaretto : C'est une éventualité.
La part de marché des low cost en France, qui est sensiblement plus basse que dans les autres pays d'Europe, pourrait être amenée à augmenter. C'est le sens de l'histoire.
D'autant plus, que dans le même temps, les offres ferroviaires sont amenées à se développer. Les acteurs vont devoir se repositionner.
Il est légitime de se poser la question : un opérateur historique français, comme Air France, n'a-t-il pas vocation à desservir d'autres paires de routes en dehors de Paris ? Habitant à Montpellier pour me déplacer, même en dehors de la France, le choix est presque restreint à Volotea.
TourMaG.com - Cela peut interpeller alors qu'Air France a reçu des aides massives de l'Etat, durant la crise sanitaire, pour au final abandonner la France...
Paul Chiambaretto : Elle s'était déjà désengagée, avec Hop.
Vous avez raison, cela interroge, même si l'entreprise est privée, l'Etat y est actionnaire. Même si l'entreprise subit des pressions politiques, elle a aussi des impératifs financiers.
Après la dynamique d'Air France est assez logique. Les modèles des compagnies aériennes traditionnelles, les legacy, ne reposent plus du tout sur le court et le moyen courrier.
Le long-courrier rapporte de l'argent, elles vont donc s'intéresser seulement aux vols qui alimentent le hub, mais pas au-delà .
TourMaG.com - Avec un seul acteur sur certains axes, les voyageurs pourraient voir les prix flamber. Est-ce une éventualité ?
Paul Chiambaretto : C'est un risque.
Après sur les axes domestiques, les alternatives ferroviaires existent, même si elles ne sont pas toujours très attractives, puis il y a aussi le bus ou la voiture.
Si les prix augmentent trop, alors le marché va devenir très attractif et d'autres acteurs vont se positionner, donc il n'est pas dans leur intérêt de proposer des billets à des tarifs trop élevés. Il faut être gourmand, mais pas trop.
Le low cost a un très bel avenir devant lui.
Paul Chiambaretto : C'est une éventualité.
La part de marché des low cost en France, qui est sensiblement plus basse que dans les autres pays d'Europe, pourrait être amenée à augmenter. C'est le sens de l'histoire.
D'autant plus, que dans le même temps, les offres ferroviaires sont amenées à se développer. Les acteurs vont devoir se repositionner.
Il est légitime de se poser la question : un opérateur historique français, comme Air France, n'a-t-il pas vocation à desservir d'autres paires de routes en dehors de Paris ? Habitant à Montpellier pour me déplacer, même en dehors de la France, le choix est presque restreint à Volotea.
TourMaG.com - Cela peut interpeller alors qu'Air France a reçu des aides massives de l'Etat, durant la crise sanitaire, pour au final abandonner la France...
Paul Chiambaretto : Elle s'était déjà désengagée, avec Hop.
Vous avez raison, cela interroge, même si l'entreprise est privée, l'Etat y est actionnaire. Même si l'entreprise subit des pressions politiques, elle a aussi des impératifs financiers.
Après la dynamique d'Air France est assez logique. Les modèles des compagnies aériennes traditionnelles, les legacy, ne reposent plus du tout sur le court et le moyen courrier.
Le long-courrier rapporte de l'argent, elles vont donc s'intéresser seulement aux vols qui alimentent le hub, mais pas au-delà .
TourMaG.com - Avec un seul acteur sur certains axes, les voyageurs pourraient voir les prix flamber. Est-ce une éventualité ?
Paul Chiambaretto : C'est un risque.
Après sur les axes domestiques, les alternatives ferroviaires existent, même si elles ne sont pas toujours très attractives, puis il y a aussi le bus ou la voiture.
Si les prix augmentent trop, alors le marché va devenir très attractif et d'autres acteurs vont se positionner, donc il n'est pas dans leur intérêt de proposer des billets à des tarifs trop élevés. Il faut être gourmand, mais pas trop.
Le low cost a un très bel avenir devant lui.