
Responsabilité de plein droit : "une interprétation des juges très problématique" selon Guillaume Beurdeley - Depositphotos Sunbeam_ks
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La responsabilité de plein droit avait déjà fait l'objet d'une importante bataille politique et judiciaire au moment de son inscription dans le code du tourisme.
Les Entreprises du Voyage avaient mené une campagne auprès des sénateurs pour supprimer ce concept de la transposition française de la directive du voyage à forfait, puis saisi le Conseil d'Etat, en vain.
Au moment du vote à l'Assemblée nationale, le syndicat rappelait l'importance du moment "vous allez devoir faire un choix crucial pour l’avenir d’un secteur primordial de l’économie."
Et si pendant plusieurs années, la surtransposition d'un principe appliqué uniquement en France, n'a pas tellement pesé dans le quotidien des agences de voyages. La situation a radicalement changé depuis que la justice rejette systématiquement, ou presque, la faute sur les distributeurs.
Début avril, nous vous relations, le cas d'une responsabilité partagée dans le cadre d'un accident de 4x4, alors que la clientèle n'avait pas suivi les instructions de sécurité. Elle n'avait pas bouclé sa ceinture de sécurité.
Quelques jours plus tard, un voyageur tombe tout seul dans un aéroport et l'agent de voyage se retrouve contraint de verser 46 234,44 euros de préjudices, dont certains d’ordre esthétique et d'autres en raison l’impossibilité pour la victime de pratiquer son loisir habituel, en raison de l’accident.
"Cet arrêt illustre parfaitement le caractère sévère – pour ne pas dire disproportionné – de la responsabilité de plein droit prévue par le Code du tourisme et imposée par le législateur français," commentait alors Chloé Rezlan.
Trop, c'est trop pour les professionnels. S'ils en ont marre, les marges de manœuvre des Entreprises du Voyage paraissent minces, voire inexistantes à l'heure actuelle.
Responsabilité de plein droit : "une interprétation des juges très problématique"

Dans le cas de l'accident de 4x4 nous sommes sur un jugement classique. En revanche, la condamnation prononcée dans l’affaire du voyageur tombé seul dans un aéroport apparaît particulièrement sévère.
Dans, ce cas précis l'interprétation des juges est très problématique," analyse Guillaume Beurdeley, secrétaire général adjoint des Entreprises du Voyage.
La justice aura mis 16 ans pour trancher. En 2018, le tribunal avait estimé que les circonstances de l'accident n’étaient pas établies et que le client de l'agence ne prouvait pas de manquement contractuel de la part du distributeur.
Puis la cour d'appel a annulé ce jugement en mars 2025. Elle a estimé que le professionnel est responsable en raison de... la responsabilité de plein droit.
"C'est pénalisant pour l'image de la profession, même si les voyageurs se rendent compte de la protection qu'ils ont en passant par une agence de voyages.
Après pour un entrepreneur, ce type de décision génère un stress important, alors qu'il se trouve dans une situation où il n'a aucune prise," souffle le cadre du syndicat.
Malheureusement, même si le concept de responsabilité de plein droit disparait, la profession ne serait pas nécessairement à l’abri de décisions judiciaires sévères.
Responsabilité de plein droit : " Nous saisirons toutes les opportunités pour la faire évoluer"
En effet, dans le cas de la chute accidentelle à l'aéroport, des causes d'exonération prévues dans la directive auraient sans doute entrainé le même résultat juridique.
"Si une cause d'exonération est prouvée, alors le fait est imputable aux voyageurs et donc l'agence de voyages est exonérée.
Dès lors que le juge français considère qu'un client tombe tout seul, sans raison extérieure apparente aux infrastructures et que ce n'est pas un fait imputable aux voyageurs, alors nous pouvons faire modifier tous les textes possibles, ça ne changera rien au problème.
Nous sommes sur une interprétation des juges français et nous ne pouvons rien y faire," poursuit Guillaume Beurdeley.
Par chance, les exemples de dommages corporels sont pour le moment relativement rares. Et de toute façon, la disparition de la mention responsabilité de plein droit ne changera rien au problème.
Il faudrait alors que le voyageur ait rédigé une lettre avant de tomber pour prouver qu'il allait se jeter par terre dans le but de se faire mal.
"Nous avons déjà eu des cas similaires par le passé, concernant l'interprétation de juge français sur un fait imputable aux voyageurs. D'ailleurs dans d'autres pays européens qui n'ont pas la responsabilité de plein droit, les décisions des juges sont aussi très dures contre les agences de voyages.
Avant le Brexit, une agence de voyages a été déclarée responsable d'une agression sexuelle commise par un électricien appelé par l'hôtel pour régler un problème dans une chambre.
Cela ne change rien à notre posture : la responsabilité de plein droit est problématique. Nous saisirons toutes les opportunités pour la faire évoluer," affirme le secrétaire général adjoint.
"Si une cause d'exonération est prouvée, alors le fait est imputable aux voyageurs et donc l'agence de voyages est exonérée.
Dès lors que le juge français considère qu'un client tombe tout seul, sans raison extérieure apparente aux infrastructures et que ce n'est pas un fait imputable aux voyageurs, alors nous pouvons faire modifier tous les textes possibles, ça ne changera rien au problème.
Nous sommes sur une interprétation des juges français et nous ne pouvons rien y faire," poursuit Guillaume Beurdeley.
Par chance, les exemples de dommages corporels sont pour le moment relativement rares. Et de toute façon, la disparition de la mention responsabilité de plein droit ne changera rien au problème.
Il faudrait alors que le voyageur ait rédigé une lettre avant de tomber pour prouver qu'il allait se jeter par terre dans le but de se faire mal.
"Nous avons déjà eu des cas similaires par le passé, concernant l'interprétation de juge français sur un fait imputable aux voyageurs. D'ailleurs dans d'autres pays européens qui n'ont pas la responsabilité de plein droit, les décisions des juges sont aussi très dures contre les agences de voyages.
Avant le Brexit, une agence de voyages a été déclarée responsable d'une agression sexuelle commise par un électricien appelé par l'hôtel pour régler un problème dans une chambre.
Cela ne change rien à notre posture : la responsabilité de plein droit est problématique. Nous saisirons toutes les opportunités pour la faire évoluer," affirme le secrétaire général adjoint.
Responsabilité de plein droit : "pas de marge de manoeuvre" à court terme
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Les occasions de changer la loi ne sont pas légion. Depuis la saisine du Conseil d'Etat n'a rien changé.
Il y a bien eu la tentative de modifier le texte dans le cadre de la simplification administrative, en demandant d'aligner la transposition sur celles de nos voisins européens. La réponse de l'administration a toujours été la même : non.
"Nous n'avons pas de marge de manœuvre sur ce sujet. Nous n'avons pas de créneau, ni de véhicule législatif pour soulager les agents de voyages avant plusieurs années. Nous le remettrons bien évidemment sur la table dans le cadre de la prochaine transposition de la directive du voyage à forfait.
Concernant cette dernière, la règlementation européenne est par nature très consumériste, elle n'évoluera pas.
Par contre, nous avons une possibilité de faire entendre notre voix, sur le fait d'introduire entre les opérateurs une chaîne de responsabilité cohérente, afin qu'elle soit partagée de manière équitable entre chaque opérateur," affirme le responsable.
L'enjeu serait donc d'intégrer à la nouvelle mise à jour de la directive, une possible action récursoire en faveur des agents de voyages pour leur permettre "d'exercer ensuite un recours contre le véritable responsable afin d'obtenir le remboursement des sommes versées," comme l'explique Dalloz.
En attendant, ces potentiels changements, les professionnels peuvent se prémunir pour limiter les dégâts.
"Il est indispensable de bien faire attention aux activités proposées dans le cadre d'un voyage à forfait, notamment celles à risque et aussi bien choisir ses prestataires. Les agents de voyages doivent vérifier de quelle manière leurs prestataires sont couverts en termes d'assurance responsabilité civile.
En cas de sinistre, il est important de déclarer au moins à titre conservatoire, tout dommage corporel subi par un client, auprès de son assurance responsabilité civile. Le délai de signalement est souvent de quelques jours.
S'il est fait trop tardivement, alors ils ne seront pas couverts," conseille Guillaume Beurdeley.
Il y a bien eu la tentative de modifier le texte dans le cadre de la simplification administrative, en demandant d'aligner la transposition sur celles de nos voisins européens. La réponse de l'administration a toujours été la même : non.
"Nous n'avons pas de marge de manœuvre sur ce sujet. Nous n'avons pas de créneau, ni de véhicule législatif pour soulager les agents de voyages avant plusieurs années. Nous le remettrons bien évidemment sur la table dans le cadre de la prochaine transposition de la directive du voyage à forfait.
Concernant cette dernière, la règlementation européenne est par nature très consumériste, elle n'évoluera pas.
Par contre, nous avons une possibilité de faire entendre notre voix, sur le fait d'introduire entre les opérateurs une chaîne de responsabilité cohérente, afin qu'elle soit partagée de manière équitable entre chaque opérateur," affirme le responsable.
L'enjeu serait donc d'intégrer à la nouvelle mise à jour de la directive, une possible action récursoire en faveur des agents de voyages pour leur permettre "d'exercer ensuite un recours contre le véritable responsable afin d'obtenir le remboursement des sommes versées," comme l'explique Dalloz.
En attendant, ces potentiels changements, les professionnels peuvent se prémunir pour limiter les dégâts.
"Il est indispensable de bien faire attention aux activités proposées dans le cadre d'un voyage à forfait, notamment celles à risque et aussi bien choisir ses prestataires. Les agents de voyages doivent vérifier de quelle manière leurs prestataires sont couverts en termes d'assurance responsabilité civile.
En cas de sinistre, il est important de déclarer au moins à titre conservatoire, tout dommage corporel subi par un client, auprès de son assurance responsabilité civile. Le délai de signalement est souvent de quelques jours.
S'il est fait trop tardivement, alors ils ne seront pas couverts," conseille Guillaume Beurdeley.