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Aéroports, compagnies aériennes : les enjeux olympiques de Paris 2024 🔑

Pour les acteurs de l’aérien, l’heure n’est pas aux réjouissances


Moins de cinq mois nous séparent désormais du démarrage des Jeux olympiques de Paris 2024. Les aéroports de Paris et les compagnies aériennes sauront-ils absorber le choc et en profiter ? Quels en sont les impacts et les défis à relever ? TourMaG vous propose un état des lieux à cinq mois de l’ouverture de la cérémonie, en plein cœur de Paris.


Rédigé par le Mercredi 6 Mars 2024

Au plus fort du « coup de feu », c’est 4 000 arrivées par jour de membres de délégations et de journalistes qu’il faudra gérer, mais aussi 114 000 bagages, 47 000 équipements sportifs parmi lesquels 17 000 hors format (4 000 par an sur une année normale) - DR : Depositphotos.com alfredosaz.gmail.com.
Au plus fort du « coup de feu », c’est 4 000 arrivées par jour de membres de délégations et de journalistes qu’il faudra gérer, mais aussi 114 000 bagages, 47 000 équipements sportifs parmi lesquels 17 000 hors format (4 000 par an sur une année normale) - DR : Depositphotos.com alfredosaz.gmail.com.
Sans vouloir offenser ce cher Baron Pierre de Coubertin, pour les responsables des infrastructures parisiennes, les aéroports et les compagnies aériennes, notamment Air France, l’important ne sera pas seulement de participer, mais bien de remporter l’épreuve que constitue l’arrivée et le déplacement de 15 millions de personnes attendues pendant la période des Jeux olympiques 2024.

L’afflux de clients semble être tout bénéfice pour les entreprises qui vont les transporter et les accueillir.

Cependant, même si d’après le groupe ADP il n’y aura pas plus de passagers attendus dans les aéroports parisiens, c’est bien la nature de ces passagers et leurs demandes qui diffèrent et qui complexifient les enjeux en termes de sécurité, de sûreté, de contrôle des flux et d’efficacité opérationnelle.

Pour les acteurs de l’aérien, l’heure n’est pas aux réjouissances, mais bien sûr à l’effort à fournir.

Une épreuve d’endurance à laquelle s’ajoute cet obstacle de taille : 60 000 personnes accréditées, 28 000 journalistes, 12 000 membres de fédérations et 17 000 athlètes et staffs.


Compagnies aériennes françaises : pas de pointe spécifique

À l’Office du tourisme parisien, les prévisions semblent - à l’inverse des prévisions d’ADP - indiquer une augmentation du volume de passagers dans les aéroports parisiens.

L’Office a indiqué récemment que les JO ont engendré jusqu'ici plus de deux fois plus de réservations aériennes vers la capitale française que lors de la même période à l'été 2023, selon le baromètre du tourisme parisien de janvier. Le volume de réservations aériennes internationales à date pour les Jeux olympiques à destination d'Orly et de Roissy est en hausse de +115,5% par rapport à la période 26 juillet - 11 août 2023.

Cependant, avec habituellement de bons remplissages à cette époque de l’année, les compagnies françaises ne constatent pas de pointe spécifique pour cette période des jeux.

Récemment, Pascal de Izaguirre, le président de la FNAM, estimait qu’il fallait certes considérer le nombre de voyages générés par l'événement, mais aussi celui des voyages qui ne se feront pas ou qui seront reportés du fait de la tenue des jeux. Tout juste une petite hausse, à ce jour, signalée par Frenchbee concernant les vols depuis les États-Unis.

Les compagnies n'ont pas droit à l'erreur

Selon certains analystes, l’impact positif pourrait davantage s'expliquer par la hausse des tarifs que par un volume augmenté.

« Certes les prix vont augmenter, mais toutes les compagnies aériennes et pas seulement Air France, volent à pleine capacité en été et nous ne pourrons pas rajouter de vols supplémentaires » nous confiait vendredi dernier Ben Smith, le PDG d'Air France - KLM.

L'amélioration de la rentabilité pendant cette période n’est pas une évidence.

On peut lire dans une note émise par le bureau d’études indépendant AlphaValue que « les bénéfices pour Air France-KLM sont "incertains" et qu'il est compliqué de tabler sur une amélioration de la rentabilité du groupe durant la période olympique.

À long terme, néanmoins, l'augmentation de la notoriété de la marque devrait favoriser l'acquisition de nouveaux clients et les perspectives de revenus »
… Si bien sûr tout se passe bien, car Air France comme les autres compagnies aériennes, ne doit pas se louper sur le service rendu aux voyageurs qui viendront à Paris, et en particulier aux athlètes et aux délégations.

Un vol annulé, un perchiste sans sa perche ou un cycliste sans son cycle ne sera pas de nature à « augmenter la notoriété ».

L’admonestation du PDG du groupe ADP sur « le maillon faible » que sont, selon lui, les compagnies d’assistance, sonne comme un avertissement sérieux envers les opérateurs.

Lire aussi : JO, contrôles aériens, taxe : les enjeux de 2024 pour le transport aérien

Bien faire vivre les premiers instants de la fête

Pour le groupe ADP, la situation est la même. Les JO seront-ils rentables ? Rien n’est moins sûr, tant les coûts pour se préparer à cette période hors-norme sont importants.

ADP a très bien terminé l’année avec une forte croissance et un bénéfice net pour 2023 à 631 millions d'euros. Il a cependant déjà dépensé 50 millions d’euros pour se préparer aux Jeux, nous annonçait Augustin de Romanet, le PDG au début du mois dernier.

Des investissements, il en faudra pour réussir les missions partagées avec les compagnies aériennes de bien faire vivre les premiers instants de la fête pour les centaines de délégations d’athlètes, les milliers de journalistes, de spectateurs, ambassadeurs et chefs d’État venus du monde entier.

« Une grande majorité se forgera ses premiers comme ses derniers souvenirs à nos côtés », a précisé Augustin de Romanet qui a pris publiquement l’engagement que « les Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024 démontreront à la fois notre expertise aéroportuaire et notre sens de l’accueil. »

Objectif : fluidité

Au plus fort du « coup de feu », c’est 4 000 arrivées par jour de membres de délégations et de journalistes qu’il faudra gérer, mais aussi 114 000 bagages, 47 000 équipements sportifs parmi lesquels 17 000 hors format (4 000 par an sur une année normale).

Les bagages seront donc une préoccupation majeure.

Pour faciliter les choses, les équipes supports des délégations sportives auront accès à la salle de livraison des bagages, des chariots très grand format seront mis à disposition et des manutentionnaires seront sollicités en renfort. En cas de bagage manquant, un processus pour le mettre à disposition au plus vite sera mis en place.

Dommage, le dispositif destiné à assurer la traçabilité des bagages grâce à des étiquettes équipées de puces d’identification par radiofréquence se déploie trop lentement depuis 2020 et n’est pas encore généralisé de l’aveu même du PDG d’ADP.

L’attente aux postes-frontière est également un défi. Le Groupe ADP s’est mis en capacité d’ouvrir l’intégralité de ses terminaux pour les JO, avec notamment la réouverture après travaux, du terminal 2C et, temporairement, de la partie Est du terminal 2A.

L’objectif est que tous les parcours soient les plus fluides possible, avec un passage aux contrôles sûreté de moins de 10 minutes pour au moins 95% des passagers, et un passage en moins de 10 minutes aux contrôles frontières pour le maximum de passagers.

Pour rappel, le baromètre du contrôle frontière des aéroports parisiens, mis en place en janvier 2023, a montré qu’à l’été 2023, à Paris-Orly, 90% des passagers ont attendu moins de 10 minutes, et à Paris-CDG c’était 84% des passagers.

Pour les contrôles frontières, le Groupe ADP investit dans le déploiement de sas supplémentaires de passages automatisés : 188 sas Parafe seront déployés à l’été 2024 contre 121 à l’été 2023 (152 à Paris-CDG et 36 à Paris-Orly).

Les données actuellement disponibles indiquent que la grande majorité des accrédités arriveront et partiront depuis Paris-Charles de Gaulle.

Un terminal éphémère dans la pampa

La police nationale, quant à elle, prévoit le recrutement de 200 gardes-frontières pour renforcer le nombre de personnes habilitées à contrôler les passeports.

La signalétique va être également adaptée, avec le déploiement du langage FALC, Facile à Lire et à Comprendre, en particulier aux postes d’inspection filtrage et près des ascenseurs.

1 500 volontaires viendront également en appui des équipes sur le terrain pour aider à l’accueil, l’orientation, la coordination des opérations, la régulation routière, la gestion des zones bagages…

Aussi, pour les trois jours très « chauds » du retour en masse des athlètes après la cérémonie de clôture le 11 août, Augustin de Romanet rappelait récemment la construction d’un terminal éphémère, « un terminal qui ne servira que trois jours et que nous avons construit dans la pampa de CDG ».

Pour le retour des délégations, Anne Rigail, la directrice générale d’Air France, a indiqué que la compagnie mettra en place des possibilités de pré-enregistrement au village olympique et dans les grands hôtels parisiens.

Ligne 14 Orly, oui ; CDG Express, non

Pour quitter ou accéder aux aéroports, les délégations seront privilégiées et bénéficieront d’un dispositif en partie privatisé.

Des voies réservées aux personnes accréditées seront mises en place entre Paris et Roissy-CDG, permettant d’éviter ce que vivent les Franciliens au quotidien : des infrastructures routières saturées et la sempiternelle « chienlit » du RER B. Une privatisation des voies qui, il faut le rappeler, était une exigence dans les conditions fixées par le Comité international olympique (CIO).

Pour le commun des mortels et notamment les salariés de l’aérien, le risque de galérer pour se rendre à Roissy reste bien réel. Les restrictions de circulation sur l'A1, l'A13 et les deux tiers du périphérique parisien peuvent tourner au cauchemar.

De plus, le CDG Express, la future liaison ferroviaire directe entre Paris et l'aéroport Roissy - Charles-de-Gaulle, ne sera pas prêt et ratera son rendez-vous avec les JO.

Interrogé par TourMaG, Arnaud Duplay, chargé du projet d'accueil des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024 chez ADP, affirme : « Nous prenons l’affaire des conditions routières le plus sérieusement possible.

Avec Air France, nous avons signé un courrier conjoint aux autorités nationales pour la fluidité de l’accès aux plateformes aéroportuaires, notamment pour l’ensemble des salariés. Nous avons enfin obtenu que notre cas soit examiné avec la même attention que pour les autres sites olympiques
».

Côté Orly, l’extension de la ligne 14 permettant de relier l’aéroport au cœur de la capitale en 25 minutes sera bien au rendez-vous des JO et devrait être inaugurée au mois de juin prochain.

Verra-t-on les taxis volants ?

Le groupe ADP avait aussi le projet de faire voler, pour la première fois dans le ciel parisien et dans le cadre d’une expérimentation, les premiers taxis volants électriques.

Déjà construits par l’entreprise allemande Volocopter, et ayant déjà fait quelques vols de démonstration, ils sont en attente d’une homologation pour pouvoir faire des vols de démonstration (non commerciaux) entre les aéroports parisiens et une barge sur la seine près du quai d’Austerlitz.

Lire aussi : Mobilité aérienne urbaine : des premiers tests à Pontoise en juin 2021

L’idée des dirigeants d’ADP n’est pas bien sûr de solutionner ainsi les problèmes d’engorgement du trafic, mais bien de faire de ces vols le symbole de l'innovation et de l'esprit d'entreprise français.

« La course à l'innovation s'est accélérée ces derniers mois et nous souhaitons que la France ouvre la voie par rapport à d'autres pays qui envisagent dès à présent d'autoriser les expérimentations », argumentait il y a quelques jours le PDG d’ADP.

Un projet évidemment contesté par les élus du conseil de Paris, vent debout contre la tenue des Jeux. Valérie Pécresse, la présidente de la région Île-de-France soutient elle le projet et souhaite que la déclaration d'utilité publique soit prise par l'État pour permettre cette expérimentation.

« Une décision sera rendue ultérieurement», a pour sa part indiqué le ministère des Transports la semaine dernière.

Enfin, de nombreuses mesures de sûreté seront mises en place durant la période des JO. La plus spectaculaire, radicale et impactante pour le trafic aérien, sera bien sûr la totale fermeture de l’espace aérien dans un périmètre de 150 kilomètres autour de Paris pendant la cérémonie d’ouverture, en début de soirée le 26 juillet.

Une fermeture complète incluant non seulement les approches et les décollages, mais aussi le trafic traversant, a précisé Arnaud Duplay.


À quelques semaines du plus grand événement sportif jamais organisé en France, les acteurs de l’aérien sont concentrés. Autorités, infrastructures, opérateurs, c’est, on l’espère, l’union sacrée.

À suivre les préparatifs depuis plus d’un an, se dégage à l’évidence l’idée que la rentabilité financière des opérations n’est pas l’objectif principal. L’enjeu est supérieur : donner l’image d’une France qui aura accueilli le monde dans l’amitié, le respect, l’excellence, les trois grandes valeurs de l’olympisme.

Sacré plan de vol !

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