Nous sommes au XVIII e siècle, la France étouffe sous le joug d’une monarchie corrompue et d’une église à peu prés aussi corrompue. Il n’est encore question ni de droits de l’homme, ni d’égalité, ni de contrat social, excepté dans les esprits éclairés d’une poignée de visionnaires capables de deviner que la condition humaine peut évoluer.
Parmi eux, celui que l’histoire appellera tout simplement Rousseau, n’est encore qu’un jeune orphelin de mère, genevois, né dans une famille protestante d’horlogers, qui a toutes les peines du monde à rester confiné dans l’étroitesse d’une ville ceinte de remparts dont les portes sont verrouillées tous les soirs. Un soir justement, Rousseau décide de ne pas rentrer. Oublié hors les murs, rejeté dans la campagne suisse, il veut y rester ! à lui, la liberté !
Une liberté physique dont il ne voudra plus jamais se départir d’autant qu’elle ne tardera pas à se muter en liberté d’esprit. Pour le jeune Rousseau qui a dix sept ans, commence alors une vie d’errance dont il rendra compte de longues années plus tard dans la première œuvre autobiographique de la littérature française : les Confessions.
Un ouvrage d’une richesse inestimable dans lequel le futur philosophe conte ses années de jeunesse et se délecte, entre autre, dans l’évocation de l’immense sensation de liberté qu’il a éprouvée lors de ses premières errances.
Parmi eux, celui que l’histoire appellera tout simplement Rousseau, n’est encore qu’un jeune orphelin de mère, genevois, né dans une famille protestante d’horlogers, qui a toutes les peines du monde à rester confiné dans l’étroitesse d’une ville ceinte de remparts dont les portes sont verrouillées tous les soirs. Un soir justement, Rousseau décide de ne pas rentrer. Oublié hors les murs, rejeté dans la campagne suisse, il veut y rester ! à lui, la liberté !
Une liberté physique dont il ne voudra plus jamais se départir d’autant qu’elle ne tardera pas à se muter en liberté d’esprit. Pour le jeune Rousseau qui a dix sept ans, commence alors une vie d’errance dont il rendra compte de longues années plus tard dans la première œuvre autobiographique de la littérature française : les Confessions.
Un ouvrage d’une richesse inestimable dans lequel le futur philosophe conte ses années de jeunesse et se délecte, entre autre, dans l’évocation de l’immense sensation de liberté qu’il a éprouvée lors de ses premières errances.
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Car Rousseau a erré, à pied le plus souvent, parfois à cheval et en attelage, mais toujours avec un infini bonheur. « Libre et maître de moi même, je croyais pouvoir tout faire. J’entrais avec sécurité dans le vaste espace du monde… » écrit-il avec emphase dans les premières lignes du Livre II des Confessions.
Et tandis qu’il vagabonde d’une rencontre avec des coquins de son âge à une autre avec des jeunes filles bien nées, de logis de fortune à la demeure de sa « chère maman » Madame de Warens, le jeune Rousseau n’a de cesse que de repartir, toujours repartir… Vers où ? Vers ailleurs !
« Enfin l’idée d’un grand voyage flattait ma manie ambulante qui déjà commençait à se déclarer. Il me paraissait beau de passer les monts à mon âge. Voir du pays est un appât auquel un Genevois ne résiste guère. » Rousseau n’a toujours que 17 ans ! On est en 1730.
Et tandis qu’il vagabonde d’une rencontre avec des coquins de son âge à une autre avec des jeunes filles bien nées, de logis de fortune à la demeure de sa « chère maman » Madame de Warens, le jeune Rousseau n’a de cesse que de repartir, toujours repartir… Vers où ? Vers ailleurs !
« Enfin l’idée d’un grand voyage flattait ma manie ambulante qui déjà commençait à se déclarer. Il me paraissait beau de passer les monts à mon âge. Voir du pays est un appât auquel un Genevois ne résiste guère. » Rousseau n’a toujours que 17 ans ! On est en 1730.
« La manie ambulante »
« Manie ambulante ? » Désuète cette expression que plus personne n’utiliserait aujourd’hui, est caractéristique du personnage et probablement d’une génération à venir de voyageurs sans bagage et, sans équipage, animés d’une irrésistible envie de sortir de chez eux, de bouger et de voir le monde tout en multipliant les rencontres initiatiques !
Le jeune Rousseau avait bel et bien la bougeotte ! Il l’a eue toute sa vie. Voltaire également, mais tellement différemment, lui qui voyageait en carrosse allant de châteaux en châteaux. Quant à Diderot, occupé à mener à bien l’Encyclopédie, il voyageait plutôt dans les rues de Paris, ses cafés et ses théâtres. A une exception près : son célèbre voyage en Russie au cours duquel il découvrit la mer et les bains de mer, de passage aux Pays-Bas.
Le futur auteur de l’Emile et autres chefs d’œuvres philosophiques n’était donc pas la résultante d’une époque, il était lui même, c’est à dire un être libre dont le sentiment de liberté se trouvait amplifié par le simple fait de se déplacer vers l’inconnu de préférence !
Et cela, sans contraintes autres que ces satanées contraintes matérielles qui toute sa vie l’obligeront à faire des compromis. En cela, il était donc un pionnier à l’avant garde des siècles à venir au cours desquels les Occidentaux les plus lettrés, romantiques et révoltés s’élanceront dans une découverte effrénée de l’ailleurs.
Le jeune Rousseau avait bel et bien la bougeotte ! Il l’a eue toute sa vie. Voltaire également, mais tellement différemment, lui qui voyageait en carrosse allant de châteaux en châteaux. Quant à Diderot, occupé à mener à bien l’Encyclopédie, il voyageait plutôt dans les rues de Paris, ses cafés et ses théâtres. A une exception près : son célèbre voyage en Russie au cours duquel il découvrit la mer et les bains de mer, de passage aux Pays-Bas.
Le futur auteur de l’Emile et autres chefs d’œuvres philosophiques n’était donc pas la résultante d’une époque, il était lui même, c’est à dire un être libre dont le sentiment de liberté se trouvait amplifié par le simple fait de se déplacer vers l’inconnu de préférence !
Et cela, sans contraintes autres que ces satanées contraintes matérielles qui toute sa vie l’obligeront à faire des compromis. En cela, il était donc un pionnier à l’avant garde des siècles à venir au cours desquels les Occidentaux les plus lettrés, romantiques et révoltés s’élanceront dans une découverte effrénée de l’ailleurs.
Ecolo avant l’heure ?
Déjà Rimbaud, déjà Baudelaire ? Sans doute, mais Rousseau était plus que cela, car sa fuite avait aussi pour destination finale : la nature. C’est dans les champs, les montagnes et les routes de campagnes entre Suisse, France et Italie, qu’il passe les meilleurs moments de sa jeunesse. Plus tard, fuyant Paris dans un accès de misanthropie, c’est à Montmorency qu’il se réfugie et écrit dans une fort modeste demeure livrée aux courants d’air : le célèbre Ermitage, ses œuvres majeures : La nouvelle Héloïse, le plus grand succès littéraire de l’époque, l’Emile, condamné par le parlement de Paris, Le contrat social qui lui vaudra un temps l’exil.
Victime de persécution en partie réelle, en partie imaginaire, Rousseau avait pris en horreur l’ambiance corrompue des villes et le jeu social urbain auxquels il préférait la solitude, la réflexion et surtout la compagnie des arbres, des fleurs, des oiseaux.
Tendant à la névrose, cette autre « manie » alla jusqu’à faire de lui dans la dernière phase de sa vie, un botaniste passionné, un herboriste expert et boulimique et surtout l’auteur des sublimes Rêveries du promeneur solitaire. Ecrit dès 1776, ce monologue qu’il composa tout en cueillant des plantes dans la forêt d’Ermenonville puis dans l’île de Saint Pierre au milieu du lac de Bienne, donne la pleine mesure des choix faits par le philosophe : la nature, sa candeur et sa simplicité contre les hommes, leur orgueil, leurs vices et autres méchancetés : « je passais mon après midi à parcourir l’île en herborisant à droite et à gauche » confesse-t-il dans la Cinquième promenade.
Et, plus loin, confirmant l’osmose nécessaire entre homme et nature, il poursuit : « en me voyant entouré de verdure, de fleurs, d’oiseaux et laissant errer mes yeux au loin j’assimilais mes fictions à tous ces aimables objets ». Plus qu’un romantique venu épancher son mal être, Rousseau « se met au vert » pour se protéger, se retrouver, se ressourcer, retrouver cet « état de nature » dont il fait la condition primitive de l’homme, abstraction faite de ce qu’il doit à la vie sociale.
Et ne rien faire ! Oui, Rousseau parlait déjà de « far niente » en expliquant qu’il s’agit d’ « une occupation délicieuse et nécessaire » ! Bien sûr, Voltaire fréquentera également la nature dans son château de Ferney où il avait installé une communauté agricole. Mais différemment.
S’il estimait indispensable de « cultiver son jardin », il voyait dans la nature une machine de production. Voltaire restera toujours Voltaire ! Quant à Marie Antoinette ne jouait-elle pas à la bergère ? Et bien avant, Horace, Lucrèce, Virgile et le brillant Epicure dans son « jardin » de Samos, ne célébraient-ils pas aussi les retrouvailles indispensables de l’homme avec la nature ?
Robinson Crusoé que Rousseau avait lu, n’était il pas également retourné à la nature, sur son île déserte ? Et bien après, toute l’école transcendaliste américaine n’a-t-elle pas mené un combat comparable, avec en tête Emerson, Whitman et l’indispensable H.D Thoreau qui, comme Rousseau, un siècle plus tard, se réfugie dans les bois et en tire un ouvrage fondamental : Walden ou la vie dans les bois ?
Victime de persécution en partie réelle, en partie imaginaire, Rousseau avait pris en horreur l’ambiance corrompue des villes et le jeu social urbain auxquels il préférait la solitude, la réflexion et surtout la compagnie des arbres, des fleurs, des oiseaux.
Tendant à la névrose, cette autre « manie » alla jusqu’à faire de lui dans la dernière phase de sa vie, un botaniste passionné, un herboriste expert et boulimique et surtout l’auteur des sublimes Rêveries du promeneur solitaire. Ecrit dès 1776, ce monologue qu’il composa tout en cueillant des plantes dans la forêt d’Ermenonville puis dans l’île de Saint Pierre au milieu du lac de Bienne, donne la pleine mesure des choix faits par le philosophe : la nature, sa candeur et sa simplicité contre les hommes, leur orgueil, leurs vices et autres méchancetés : « je passais mon après midi à parcourir l’île en herborisant à droite et à gauche » confesse-t-il dans la Cinquième promenade.
Et, plus loin, confirmant l’osmose nécessaire entre homme et nature, il poursuit : « en me voyant entouré de verdure, de fleurs, d’oiseaux et laissant errer mes yeux au loin j’assimilais mes fictions à tous ces aimables objets ». Plus qu’un romantique venu épancher son mal être, Rousseau « se met au vert » pour se protéger, se retrouver, se ressourcer, retrouver cet « état de nature » dont il fait la condition primitive de l’homme, abstraction faite de ce qu’il doit à la vie sociale.
Et ne rien faire ! Oui, Rousseau parlait déjà de « far niente » en expliquant qu’il s’agit d’ « une occupation délicieuse et nécessaire » ! Bien sûr, Voltaire fréquentera également la nature dans son château de Ferney où il avait installé une communauté agricole. Mais différemment.
S’il estimait indispensable de « cultiver son jardin », il voyait dans la nature une machine de production. Voltaire restera toujours Voltaire ! Quant à Marie Antoinette ne jouait-elle pas à la bergère ? Et bien avant, Horace, Lucrèce, Virgile et le brillant Epicure dans son « jardin » de Samos, ne célébraient-ils pas aussi les retrouvailles indispensables de l’homme avec la nature ?
Robinson Crusoé que Rousseau avait lu, n’était il pas également retourné à la nature, sur son île déserte ? Et bien après, toute l’école transcendaliste américaine n’a-t-elle pas mené un combat comparable, avec en tête Emerson, Whitman et l’indispensable H.D Thoreau qui, comme Rousseau, un siècle plus tard, se réfugie dans les bois et en tire un ouvrage fondamental : Walden ou la vie dans les bois ?
Ecologie, écosophie…
… Le besoin de nature n’est donc pas né ces dernières années. La vague « écolo » est ancienne, profonde, inhérente à la condition d’une humanité qui, coupée de son élément premier, n’a de cesse que d’y retourner.
Toutes les époques ont pris la clé des champs. Toutes les époques ont trouvé le repos au milieu de la verdure. Presque toutes ont compris l’intérêt de protéger l’ensemble de la nature. Mais, le combat mené aujourd’hui est collectif, planétaire, technocratique alors qu’il était individuel, un brin narcissique et non théorique au temps de Rousseau. « J’avais désiré la campagne, je l’ai eue » clame le philosophe à la fin des Rêveries. Une affirmation qui en dit long sur sa modernité.
Sources : Les confessions. Les rêveries du promeneur solitaire
Toutes les époques ont pris la clé des champs. Toutes les époques ont trouvé le repos au milieu de la verdure. Presque toutes ont compris l’intérêt de protéger l’ensemble de la nature. Mais, le combat mené aujourd’hui est collectif, planétaire, technocratique alors qu’il était individuel, un brin narcissique et non théorique au temps de Rousseau. « J’avais désiré la campagne, je l’ai eue » clame le philosophe à la fin des Rêveries. Une affirmation qui en dit long sur sa modernité.
Sources : Les confessions. Les rêveries du promeneur solitaire
Retrouvez les autres articles de notre série "La contribution des écrivains voyageurs"
D’hier à demain
A l’époque de Rousseau, on ne parlait certes pas de tourisme vert ou rural ou durable parce que le tourisme n’était pas encore né. Mais, toutes les villégiatures choisissaient la nature comme cadre et tous les villégiateurs étaient des passionnés de verdure, de nature et de naturel.
Tendance contemporaine, la demande de nature est donc ancienne et, elle ne devrait jamais cesser de s’amplifier car elle compte parmi les aspirations anthropologiques de l’homme.
Bonne nouvelle pour le tourisme vert dont il est certain qu’il aura toujours le vent en poupe dès lors qu’il sait moderniser ses hébergements, son offre de restauration, son accessibilité, son animation, tout en sachant surtout éviter les excès. Conserver sa virginité originelle et sa virginité symbolique constitue la condition sine qua non de son succès.
Tendance contemporaine, la demande de nature est donc ancienne et, elle ne devrait jamais cesser de s’amplifier car elle compte parmi les aspirations anthropologiques de l’homme.
Bonne nouvelle pour le tourisme vert dont il est certain qu’il aura toujours le vent en poupe dès lors qu’il sait moderniser ses hébergements, son offre de restauration, son accessibilité, son animation, tout en sachant surtout éviter les excès. Conserver sa virginité originelle et sa virginité symbolique constitue la condition sine qua non de son succès.
Journaliste, consultante, conférencière, Josette Sicsic observe depuis plus de 25 ans, les mutations du monde afin d’en analyser les conséquences sur le secteur du tourisme.
Après avoir développé pendant plus de 20 ans le journal Touriscopie, elle est toujours sur le pont de l’actualité où elle décode le présent pour prévoir le futur. Sur le site www.tourmag.com, rubrique Futuroscopie, elle publie plusieurs fois par semaine les articles prospectifs et analytiques.
Contact : 06 14 47 99 04
Mail : touriscopie@gmail.com
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