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FUTUROSCOPIE - les Français ont cultivé leur bonheur... en bougeant moins ! 🔑

Décryptage de Josette Sicsic, Futuroscopie


Alors que l’Insee publie son dernier Portrait social, le Baromètre des territoires réalisé par Elabe fait le point sur les nouveaux visages de la France d’après crise sanitaire. Nouveaux ? Pas tant que cela. En fait, on y retrouve toujours quatre catégories de Français dont les deux premières composent vraisemblablement la clientèle touristique. Et une affirmation de certaines tendances déjà observées, dont le goût de rester chez soi ou pas très loin, bref un retour au cocooning.


Rédigé par le Jeudi 25 Novembre 2021

Après la crise sanitaire quelles sont les nouveaux visages de la France ? Depositphotos.com Auteur Sky-Designs
Après la crise sanitaire quelles sont les nouveaux visages de la France ? Depositphotos.com Auteur Sky-Designs
Premier point avant de détailler les quatre catégories : le changement de paradigme qui nous affectent tous : le retour du cocooning. Le rêve de tour du monde a en effet vécu.

Et de la contrainte d’un horizon rétréci par la pandémie, une majorité des Français est passée à la saveur d’« être bien chez soi ». Protégés par ce cocon, les Français ont cultivé leur bonheur en bougeant moins.

Le domicile, le « 1 km », le « 10 km », sa région, c’est le nid du cocon dans lequel les Français se sont réfugiés pendant la crise, et dans lequel ils semblent vouloir s’épanouir aujourd’hui.



Cette aspiration, amplifiée par l’expérience des confinements, alimente un réel mouvement de départ des grandes agglomérations vers les villes moyennes notamment.

Motivés par la recherche d’un meilleur cadre de vie (51%), synonyme notamment de proximité de la nature, de la campagne (37%), 8% des Français ont déménagé suite à la crise Covid.


L’envie de déménager atteint 29% dans l’agglomération parisienne et 21% dans les autres agglomérations de plus de 100.000 habitants, alors qu’elle n’est « que » de 14% dans les zones rurales et petites agglomérations. Si le rêve apparaît réalisable rapidement pour 25% d’entre eux, 66% estiment que cela n’est pas faisable dans l’immédiat. 9% jugent leur envie d’ailleurs inatteignable. Voyons maintenant les quatre catégories de Français qui composent la population :

Les « Affranchis » : ils sont plutôt heureux

20% de la population

Les « Affranchis » sont très probablement vos meilleures clientèles. Constitués d’une proportion plus importante de jeunes de moins de 35 ans où les cadres et les hommes sont sur-représentés, 56% d’entre eux résident dans une grande agglomération, surtout en Ile-de-France. Maîtres de leur destin, ils peuvent franchir les obstacles de la vie sans peine. Disposant d’un capital économique et culturel élevé, ils évoluent avec aisance dans le monde actuel et s’adaptent facilement aux changements. Ils se sentent bien là où ils habitent, mais leur ancrage territorial est faible : leur territoire de vie, c’est avant tout celui qui leur permet de saisir les opportunités conjoncturelles. En fait, ce sont les plus mobiles.

Décrivant leur rapport à la vie avec un prisme hédoniste, ils sont 87% contre 70% en moyenne à se dire heureux et à avoir une vie sociale riche. En sortie de crise, ils se sentent même plutôt confiants d’autant que 55% d’entre eux ont des métiers « télétravaillables ». Ce qui leur a permis de ne pas être menacés par la crise.

D’ailleurs, pour eux, les fins de mois ne sont pas source d’inquiétude. Ils ont même une capacité d’épargne et un tiers d’entre eux a le sentiment que sa situation financière s’est améliorée pendant les 12 derniers mois. Dans leur comportement d’achat, pour la grande majorité, la dimension financière ne dicte donc pas leurs choix (« seuls » 13% à 25% cherchent systématiquement les prix les plus bas.

Autres éléments : 16% sont cadres (contre 10% en moyenne). Près d’un sur deux parle anglais et 96% sont à l’aise avec les outils et services numériques.

Quant à leur cadre de vie, 89% en sont satisfaits. Ils le jugent dynamique économiquement et bien équipé et desservi par les transports en commun. Mieux, 78% s’y sentent en sécurité.

Encore mieux, ils jugent la vie locale et le lien social de qualité bien qu’un petit quart estime qu’il y a trop d’immigrés et affichent une confiance généralisée à l’égard des acteurs de la société et dans leurs propres capacités.

Cependant, malgré une propension à voir la vie en rose, ils partagent en partie l’inquiétude ambiante : 54% seulement considèrent que la société actuelle est juste et que l’ascenseur social fonctionne. Moins défiants cependant envers autrui et envers les institutions, ils leur font confiance et se sont donc fait vacciner sans broncher.

Les « Enracinés » : on reste chez nous !

31% de la population

Les « Enracinés » sont le groupe le plus nombreux. Sur-représentés en Bretagne (36%) en Bourgogne-Franche-Comté (35%), et en Pays de la Loire (35%), ils mènent une vie qui leur convient et leur permet d’aborder l’avenir avec sérénité. Pour eux, le lieu de vie tient une place majeure dans leur bien-être. Leur quartier, leur commune, c’est leur cocon. Bien là où ils sont, ils ne manifestent aucune envie d’en partir. Ils ne quitteraient même pas leurs quartiers (sauf pour les vacances !).

Alors que 81% se sentent en sécurité, très peu relaient un climat de méfiance entre habitants et aussi peu estiment qu’il y a trop d’immigrés. Côté environnement : 73% louent la situation environnementale. En revanche, le dynamisme économique et la qualité des infrastructures ne sont pas jugés particulièrement performants.

Avec des conditions économique et sociales satisfaisantes, 73% d’entre eux se disent plutôt heureux et 82% se disent satisfaits de l’équilibre de leur vie.

Autre point non négligeable : 78% bouclent leurs fins de mois sans se restreindre. Par rapport aux « Affranchis », ils sont cependant moins nombreux à avoir la capacité d’épargner. Dans leurs comportements d’achat, ils restent vigilants sur les prix.

Mais, alors que les « Enracinés » sont plutôt optimistes pour leur propre avenir (69%) et celui de leur lieu de vie (77%), ils portent un regard assez contrasté sur l’état de la société française pour lequel seuls 33% sont optimistes.

Il faut dire que, sociologiquement parlant, ce groupe est le plus âgé et est constitué d’une proportion plus importante de retraités (44% contre 28% en moyenne). 47% résident dans une commune rurale ou une petite agglomération de moins de 20.000 habitants et 73% en maison individuelle (contre 62% en moyenne). 74% sont propriétaires (contre 58% en moyenne).

Les « Assignés » : ce sont aussi les oubliés

24% de la population

Ceux-là ne partent pas souvent en vacances. Pourquoi ? Parce qu’ils sont englués dans les difficultés, notamment financières qui entravent la maîtrise de leur destin et les empêchent de « sortir la tête de l’eau ». Mal sur leur territoire qu’ils jugent peu dynamique économiquement, peu sécurisé et peu convivial, ils déplorent un lien social détérioré, un sentiment d’insécurité, un cadre de vie dégradé. Mais, hélas, ils ne peuvent le quitter. Faute de moyens. Pire, 66% estiment ne pas mener la vie qu’ils ont choisie et 56% doivent se restreindre pour boucler leurs fins de mois (contre 36% en moyenne).

Au quotidien, cela se traduit par des achats fortement dictés par le critère du prix, voire des privations. D’autant que près d’un sur deux estime que sa situation financière s’est dégradée (contre 28% en moyenne). Leur vie sociale pour sa part, est réduite voire inexistante, si bien que 63% sont pessimistes pour leur avenir personnel.

En sortie de crise, 4 sentiments dominent cette population : lassitude (57% contre 41% en moyenne), nostalgie (45% contre 40%), tristesse (43% contre 27% en moyenne) et colère (39% contre 24%).

Sociologiquement, ce groupe est constitué d’une part plus importante de personnes d’un âge intermédiaire, entre 35 et 64 ans (57% contre 49% en moyenne). Les ouvriers y sont légèrement sur-représentés (15%) et 27% sont des sympathisants des « gilets jaunes » (contre 19% en moyenne). On les retrouve surtout dans les Hauts-de-France (28%) et en Centre-Val-de-Loire (27%).

Les « Sur le fil » : dure, dure la vie !

25% de la population

Les « Sur le fil » sont répartis sur tout le territoire. Leur vie est pleine d’embûches et ils peinent à s’affranchir de leur situation socioéconomique et des inégalités territoriales. Pour autant, leur situation n’est pas figée et ils sont moins acculés que les « Assignés ». Ils sont en effet 48% seulement à devoir se restreindre et un tiers fait ses achats en fonction des prix.

Avec un profil socioéconomique hétérogène, ce groupe plutôt jeune, composé à 63% de moins de 50 ans, compte une sur-représentation de la population féminine. Le regard sur leur lieu de vie est assez partagé, même s’ils semblent tout de même pâtir d’un certain nombre d’inconvénients. Seuls 56% des « Sur le fil » jugent que leur territoire de vie « va bien ». Et, seuls 54% estiment qu’il fait bon vivre chez eux (contre 66% en moyenne).
Au final, 40% aimeraient pouvoir quitter leur commune tout en restant dans la même région.

A noter également que 71% parlent d’une société française injuste (contre 68% en moyenne).

Les « Sur le fil » sont donc assez éloignés de la politique. 37% n’ont pas voté à la dernière élection présidentielle et se dirigent plutôt vers une abstention massive !

Les points communs des quatre groupes

Enfin, si ces différents groupes ont des parcours de vie, des conditions d’existence, un quotidien drastiquement différent, les quatre groupes partagent des points essentiels à propos de ce qu’est une vie réussie et à propos du projet de société susceptible de les réunir.

- Quel que soit le groupe, être en bonne santé, se sentir bien dans son corps, avoir des relations régulières avec ses proches et avoir un métier qui plaît constituent les essentiels d’une vie réussie.

Et pour tous, le dernier smartphone, le tour du monde, la belle voiture et la belle montre sont en queue de liste.

- Pour la société de demain, tous se rejoignent pour ériger le respect en valeur cardinale. Et tous l’accompagnent des valeurs d’honnêteté, de justice, de sécurité, de liberté et de sincérité.

- Le besoin de souveraineté et de ne plus être en situation de dépendance est lui aussi partagé de tous (75% à 85% de chaque groupe).

- Le défi écologique est aussi vecteur de rassemblement : impact sur la santé, volonté d’agir, besoin d’une direction claire. Tous partagent également l’idée que la cause environnementale peut être une opportunité pour l’emploi (entre 75% et 92%).

Sources Baromètre des Territoires/ Elabe/ 2021


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