François Gemenne : "Le plus grand ennemi du climat, c'est le nombrilisme, cette tendance à se replier sur soi, et dans ce contexte le tourisme doit jouer un rôle fondamental."- Photo C. Gensollen
"Clouer les avions au sol, faire tout à côté de chez soi, sans plus jamais aller voir ailleurs, comment on y vit et, comment on y pense, est une menace terrible qui pèse sur la transition écologique."
Cette phrase n'a pas été formulée par un professionnel de l'aérien, mais par François Gemenne, spécialiste des questions sur le climat et rapporteur du GIEC. à l'occasion du FORUM du SETO à Rabat ou encore lors de l'Assemblée générale du Comité Régional du Tourisme de Provence-Alpes-Côte d'Azur organisée à l'occasion de l'arrivée de la flamme olympique à Marseille le 8 mai denier.
Son discours moins radical que les prises de position de Jean-Marc Jancovici, président de The Shift Project qui avait préconisé la limitation des voyages en avion à 3 ou 4 vols dans une vie. apparait plus audible pour le secteur du tourisme pointé du doigt pour son impact environnemental.
Cette phrase n'a pas été formulée par un professionnel de l'aérien, mais par François Gemenne, spécialiste des questions sur le climat et rapporteur du GIEC. à l'occasion du FORUM du SETO à Rabat ou encore lors de l'Assemblée générale du Comité Régional du Tourisme de Provence-Alpes-Côte d'Azur organisée à l'occasion de l'arrivée de la flamme olympique à Marseille le 8 mai denier.
Son discours moins radical que les prises de position de Jean-Marc Jancovici, président de The Shift Project qui avait préconisé la limitation des voyages en avion à 3 ou 4 vols dans une vie. apparait plus audible pour le secteur du tourisme pointé du doigt pour son impact environnemental.
Faire connaître ses actions vertueuses et inspirantes
"Le plus grand ennemi du climat, c'est le nombrilisme, cette tendance à se replier sur soi, et dans ce contexte, le tourisme doit jouer un rôle fondamental" martèle t-il.
Comment ? En montrant l'exemple, et en mettant en exergue des pratiques vertueuses et inspirantes.
"Il est très important de faire connaitre ses actions aux secteurs pour que les autres puissent s'en inspirer" résume t-il.
François Gemenne rappelle que l'invention du vélo en libre-service a vu le jour à la Rochelle en 1976.
A lire aussi : Climat : "il n’y aura pas de retour à la normale" François Gemenne 🔑
"A cette époque personne n'y croyait, mais le Maire de l'époque s'est accroché et a mené à bien ce projet qui s'est ensuite déployé dans d'autres agglomérations pour arriver à Paris, la première destination touristique mondiale" explique l'expert.
"Qu'on fait les touristes à Paris ? Ils ont utilisé le Velib, et une fois rentrés chez eux, ils ont voulu la même chose ! La mobilité urbaine va se transformer un peu partout dans le monde, à New York à Shanghai ! Et si cela a été possible, c'est grâce au tourisme."
Comment ? En montrant l'exemple, et en mettant en exergue des pratiques vertueuses et inspirantes.
"Il est très important de faire connaitre ses actions aux secteurs pour que les autres puissent s'en inspirer" résume t-il.
François Gemenne rappelle que l'invention du vélo en libre-service a vu le jour à la Rochelle en 1976.
A lire aussi : Climat : "il n’y aura pas de retour à la normale" François Gemenne 🔑
"A cette époque personne n'y croyait, mais le Maire de l'époque s'est accroché et a mené à bien ce projet qui s'est ensuite déployé dans d'autres agglomérations pour arriver à Paris, la première destination touristique mondiale" explique l'expert.
"Qu'on fait les touristes à Paris ? Ils ont utilisé le Velib, et une fois rentrés chez eux, ils ont voulu la même chose ! La mobilité urbaine va se transformer un peu partout dans le monde, à New York à Shanghai ! Et si cela a été possible, c'est grâce au tourisme."
"Il va donc falloir leur donner à voir"
Ce que nous montre cette anecdote, précise François Gemenne, c'est "qu'en matière de transition nous avons besoin d'être inspirés par les autres".
Il n'en reste pas moins qu'il y a une "urgence à agir plus, haut, plus vite et plus fort."
"Nous allons devoir faire en 10 ans ce que nous n'avons pas réussi à faire en 30 ans" résumait de son côté, Emmanuel Lechypre, Editorialiste à BFM TV, lui aussi invité du Forum du SETO.
Agir ? oui ! Mais comment embarquer l'opinion sur ce sujet qui culpabilise et impose de nouvelles contraintes ?
"Nous ressentons un ressac sur le sujet de la transition écologique. Les gens ne voient que les contraintes et surtout ils ne voient pas directement les bénéfices. Il y a une très forte dimension intergénérationnelle dans cette affaire. Les actions menées aujourd'hui auront des conséquences sur le génération suivante. Il va donc falloir leur donner à voir" répond François Gemenne.
Il n'en reste pas moins qu'il y a une "urgence à agir plus, haut, plus vite et plus fort."
"Nous allons devoir faire en 10 ans ce que nous n'avons pas réussi à faire en 30 ans" résumait de son côté, Emmanuel Lechypre, Editorialiste à BFM TV, lui aussi invité du Forum du SETO.
Agir ? oui ! Mais comment embarquer l'opinion sur ce sujet qui culpabilise et impose de nouvelles contraintes ?
"Nous ressentons un ressac sur le sujet de la transition écologique. Les gens ne voient que les contraintes et surtout ils ne voient pas directement les bénéfices. Il y a une très forte dimension intergénérationnelle dans cette affaire. Les actions menées aujourd'hui auront des conséquences sur le génération suivante. Il va donc falloir leur donner à voir" répond François Gemenne.
François Gemenne à propos des JO : "peu d'évènement réunit la terre entière"
Selon lui, les Jeux Olympiques de Paris 2024 - pourtant pointés du doigt par certains pour leur coût environnemental - pourraient jouer ce rôle de vitrine.
"L'héritage le plus important que vont laisser ces jeux sont le sourire et l'inspiration. Il n'y a pas beaucoup d'évènement qui réunit la terre entière.
J'espère qu'ils donneront à la France le moyen d'être le porte drapeau de cette transition. Si les épreuves de nages arrivent à se dérouler dans la Seine, imaginez le signal que nous allons envoyer.
Il y a aussi la revitalisation de certains quartiers, les pistes cyclables et tous les équipements qui vont sortir de terre comme les lignes de transports en commun..."
Reste tout de même un sacré cailloux dans la chaussure des grands évènements : la part incompressible des émissions de gaz à effet de serre liées aux transports, notamment aériens.
"L'héritage le plus important que vont laisser ces jeux sont le sourire et l'inspiration. Il n'y a pas beaucoup d'évènement qui réunit la terre entière.
J'espère qu'ils donneront à la France le moyen d'être le porte drapeau de cette transition. Si les épreuves de nages arrivent à se dérouler dans la Seine, imaginez le signal que nous allons envoyer.
Il y a aussi la revitalisation de certains quartiers, les pistes cyclables et tous les équipements qui vont sortir de terre comme les lignes de transports en commun..."
Reste tout de même un sacré cailloux dans la chaussure des grands évènements : la part incompressible des émissions de gaz à effet de serre liées aux transports, notamment aériens.
"Pour garder les bénéfices de l'aérien, il faudra réserver l'avion aux destinations lointaines"
"Très clairement, le secteur aérien est sans doute le secteur de l'économie qui est le plus difficile à décarboner parce que contrairement à d'autres secteurs pour lesquels nous avons des alternatives, il n'existe pas encore de rupture technologique qui permettre de faire un véritable bond en avant" explique François Gemenne.
Si des mesures existent pour faire baisser les émissions (renouvellement des flottes, éco-pilotage, optimisation des opérations de roulage, biocarburant...), elles ne permettent pas de faire entrer de plain-pied l'aérien dans une phase active transition.
Pour autant, le rapporteur du GIEC, estime qu'il est également "important de se poser la question de l'utilité sociale du transport aérien".
"Un étudiant qui va passer une année d'études aux Etats-Unis aura le même bilan carbone qu'un voyageur qui va passer un week-end Outre-Atlantique faire du shopping et pourtant les bénéfices et l'utilité pour la société ne sont pas les mêmes." illustre François Gemenne.
Si des mesures existent pour faire baisser les émissions (renouvellement des flottes, éco-pilotage, optimisation des opérations de roulage, biocarburant...), elles ne permettent pas de faire entrer de plain-pied l'aérien dans une phase active transition.
Pour autant, le rapporteur du GIEC, estime qu'il est également "important de se poser la question de l'utilité sociale du transport aérien".
"Un étudiant qui va passer une année d'études aux Etats-Unis aura le même bilan carbone qu'un voyageur qui va passer un week-end Outre-Atlantique faire du shopping et pourtant les bénéfices et l'utilité pour la société ne sont pas les mêmes." illustre François Gemenne.
Transition écologique : la coopération sera essentielle
Pour conserver les bénéfices de l'arien, il faudra "réserver l'avion aux destinations lointaines et aller vers des partenariats voire même pourquoi pas, des fusions entre des compagnies aériennes et ferroviaires.
Il y a une nécessité d'investissements massifs dans les trains à grand vitesse pour relier les capitales européennes, desservir la côte Est et Ouest aux Etats-Unis ou encore pour relier les grandes villes en Australie."
Quant à l'offre touristique en elle-même, elle devra se diversifier : "il va être de plus en plus important de diversifier les destinations qu'il y a dans chaque pays, favoriser les séjours plus longs, et trouver une forme de tourisme qui soit davantage en lien avec les territoires et avec les habitants".
Enfin pour mener à bien cette transition, la coopération sera essentielle : "nos vies n'ont jamais été aussi dépendantes les unes des autres. Les décisions prises à Paris ont un impact sur le Soudan, le Bangladesh et nous dépendons des politiques climatiques prises à Jakarta, Delhi ou Brazzaville. "
Une coopération mise à mal par le contexte géopolitique : conflit en Ukraine, à Gaza, montée des extrêmes...
C'est pourquoi François Gemenne voit dans la COP28 organisée à Dubaï en décembre dernier - et là aussi largement montrée du doigt pour son impact environnemental - "un miracle diplomatique".
L'accord, jugé historique, a été signé par 197 pays. Il prévoit une sortie des énergies fossiles afin d’atteindre la neutralité carbone en 2050. "Nous n'y arriverons pas si nous réalisons une transition dans notre coin".
Un message porté et passé au plus près des professionnels du tourisme, qui espérons-le sauront faire bouger les lignes à leur niveau.
Il y a une nécessité d'investissements massifs dans les trains à grand vitesse pour relier les capitales européennes, desservir la côte Est et Ouest aux Etats-Unis ou encore pour relier les grandes villes en Australie."
Quant à l'offre touristique en elle-même, elle devra se diversifier : "il va être de plus en plus important de diversifier les destinations qu'il y a dans chaque pays, favoriser les séjours plus longs, et trouver une forme de tourisme qui soit davantage en lien avec les territoires et avec les habitants".
Enfin pour mener à bien cette transition, la coopération sera essentielle : "nos vies n'ont jamais été aussi dépendantes les unes des autres. Les décisions prises à Paris ont un impact sur le Soudan, le Bangladesh et nous dépendons des politiques climatiques prises à Jakarta, Delhi ou Brazzaville. "
Une coopération mise à mal par le contexte géopolitique : conflit en Ukraine, à Gaza, montée des extrêmes...
C'est pourquoi François Gemenne voit dans la COP28 organisée à Dubaï en décembre dernier - et là aussi largement montrée du doigt pour son impact environnemental - "un miracle diplomatique".
L'accord, jugé historique, a été signé par 197 pays. Il prévoit une sortie des énergies fossiles afin d’atteindre la neutralité carbone en 2050. "Nous n'y arriverons pas si nous réalisons une transition dans notre coin".
Un message porté et passé au plus près des professionnels du tourisme, qui espérons-le sauront faire bouger les lignes à leur niveau.