L’une des (nombreuses) obligations des agences de voyages, c’est l’information des clients des règles de « franchissement des frontières ».
Dans sa grande mansuétude, le législateur a limité ce devoir d’information aux ressortissants de l’Union européenne. Et on lui en sait gré...
C’est déjà compliqué parce qu’un Espagnol, un Suédois ou un Irlandais (du nord ou du sud, l’Irlande ? parce que ça aussi, c’est peut-être un détail pour vous mais pour certains, ça veut dire beaucoup) n’est pas forcément soumis aux mêmes obligations qu’un ressortissant français.
Qu’on m’explique pourquoi on construit l’Europe avec nos petits bras depuis 60 ans si on n’est même pas cap’ d’imposer au moins ça… Vous ne le savez peut-être pas, mais il y des nuances un peu moisies…
L’autre jour, j’avais un client très bronzé (avec un nom avec des cédilles sous les S et des petits trucs non identifiés sur les G) qui voulait m’acheter un voyage à Maurice.
Dans sa grande mansuétude, le législateur a limité ce devoir d’information aux ressortissants de l’Union européenne. Et on lui en sait gré...
C’est déjà compliqué parce qu’un Espagnol, un Suédois ou un Irlandais (du nord ou du sud, l’Irlande ? parce que ça aussi, c’est peut-être un détail pour vous mais pour certains, ça veut dire beaucoup) n’est pas forcément soumis aux mêmes obligations qu’un ressortissant français.
Qu’on m’explique pourquoi on construit l’Europe avec nos petits bras depuis 60 ans si on n’est même pas cap’ d’imposer au moins ça… Vous ne le savez peut-être pas, mais il y des nuances un peu moisies…
L’autre jour, j’avais un client très bronzé (avec un nom avec des cédilles sous les S et des petits trucs non identifiés sur les G) qui voulait m’acheter un voyage à Maurice.
« Vous êtes Français ? Je suis réfugié turc »
C’est au moment de remplir le BI (pas de mauvais esprit, svp !) que je me suis inquiétée de lui demander : « Vous êtes Français, Monsieur ? » Le monsieur aux yeux de biche (qui contrastait avec la virilité qui exsudait par tous les pores de sa peau… mais je m’égare !) me répond alors : « Je suis réfugié turc ».
Alors, entendons-nous bien… « réfugié turc », c’est une nationalité… et un réfugié turc n’est pas soumis aux mêmes règles de franchissement des frontières qu’un Turc.
La solution, dans ces cas-là, c’est un petit texte vraiment perfide qu’on ajoute sur le BI des non-ressortissants de l’UE. Ça dit « le client est informé qu’il est de la responsabilité de l’agence d’informer les ressortissants de l’UE sur les règles des franchissements des frontières. Les ressortissants extra communautaires ont la responsabilité de vérifier eux-mêmes les règles des franchissements des frontières des pays de destination et de transit ». ( Oui, « eux-mêmes » en gras, et souligné… merci )
Cette règle existe et elle m‘arrange bien. Même si je la trouve un poil xénophobe…
Et puis la société évolue, les ressortissants du monde entier voyagent (au moins ceux qui en ont le droit et les moyens) et tout peut se compliquer…
Alors, entendons-nous bien… « réfugié turc », c’est une nationalité… et un réfugié turc n’est pas soumis aux mêmes règles de franchissement des frontières qu’un Turc.
La solution, dans ces cas-là, c’est un petit texte vraiment perfide qu’on ajoute sur le BI des non-ressortissants de l’UE. Ça dit « le client est informé qu’il est de la responsabilité de l’agence d’informer les ressortissants de l’UE sur les règles des franchissements des frontières. Les ressortissants extra communautaires ont la responsabilité de vérifier eux-mêmes les règles des franchissements des frontières des pays de destination et de transit ». ( Oui, « eux-mêmes » en gras, et souligné… merci )
Cette règle existe et elle m‘arrange bien. Même si je la trouve un poil xénophobe…
Et puis la société évolue, les ressortissants du monde entier voyagent (au moins ceux qui en ont le droit et les moyens) et tout peut se compliquer…
Que dire de ma cliente transsexuelle franco-équatorienne ?
Un jour, l’agence a eu un procès avec un client qui avait la double nationalité : il était Français et Tunisien… sur son BI, j’avais écrit « nationalité française » et tout naturellement indiqué « visa à retirer sur place ».
Ce monsieur a égaré son passeport français ( ça arrive à tout le monde… ) et s’est dit « oh ben c’est pas grave, je vais prendre mon passeport tunisien ». Sauf que dans le pays où il allait, les Tunisiens ne peuvent pas retirer leur visa à l’arrivée.
Bilan : refoulé à l’aéroport, soirée à Roissy, 48h à chercher son passeport tunisien et rachat de billet d’avion.
Et que dire de ma cliente transsexuelle franco- équatorienne ?
Depuis des années qu’elle m’achète des billets Paris-Guayaquil, je sais que le prénom indiqué sur son passeport, c’est « Nestor». Elle montre son passeport équatorien quand elle part en Équateur et son passeport français quand elle arrive à Paris.
Comme ça, elle est considérée comme partout « chez elle » (même si on demande parfois à cette dame qui porte des robes décolletées sur une paire de seins énormes si elle n’a pas pris le passeport de son mari…).
Sauf que la France a reconnu son changement d’identité (et de sexe) et qu’elle n’a plus désormais le même prénom sur son passeport français
et son passeport équatorien. Kafkaïen…
Je l’ai renvoyée au Consulat : je sais bien que les Français n’ont pas besoin de visa pour aller en Équateur mais ma cliente n’est pas certaine que les autorités équatoriennes la considèrent comme « vraiment » française…
Ce monsieur a égaré son passeport français ( ça arrive à tout le monde… ) et s’est dit « oh ben c’est pas grave, je vais prendre mon passeport tunisien ». Sauf que dans le pays où il allait, les Tunisiens ne peuvent pas retirer leur visa à l’arrivée.
Bilan : refoulé à l’aéroport, soirée à Roissy, 48h à chercher son passeport tunisien et rachat de billet d’avion.
Et que dire de ma cliente transsexuelle franco- équatorienne ?
Depuis des années qu’elle m’achète des billets Paris-Guayaquil, je sais que le prénom indiqué sur son passeport, c’est « Nestor». Elle montre son passeport équatorien quand elle part en Équateur et son passeport français quand elle arrive à Paris.
Comme ça, elle est considérée comme partout « chez elle » (même si on demande parfois à cette dame qui porte des robes décolletées sur une paire de seins énormes si elle n’a pas pris le passeport de son mari…).
Sauf que la France a reconnu son changement d’identité (et de sexe) et qu’elle n’a plus désormais le même prénom sur son passeport français
et son passeport équatorien. Kafkaïen…
Je l’ai renvoyée au Consulat : je sais bien que les Français n’ont pas besoin de visa pour aller en Équateur mais ma cliente n’est pas certaine que les autorités équatoriennes la considèrent comme « vraiment » française…
Et le cas des noms de jeune fille pour des femmes mariées ?
Vous me direz qu’elle a deux prénoms, deux nationalités et deux sexes et que ça ne court pas les rues… Certes, je peux comprendre l’argument.
Mais des gens qui ont deux noms, il y en a beaucoup : par exemple, les femmes mariées ! Elles doivent être genre 20 millions en France, et je pense que chacun d’entre nous en a quelques-unes dans son fichier clients.
Alors figurez-vous qu’il est de plus en plus commun que les autorités de certains pays imposent aux dames de voyager avec des billets
d’avion à leurs noms de jeune fille.
Certes, je peux trouver cette excuse pour justifier qu’au crépuscule de ma 37e année, je ne suis toujours pas mariée…
« Vous pensez… une grande voyageuse comme moi gardera à vie son nom de jeune fille. »
À l’agence, on demande depuis des années les noms de jeune fille de nos clientes mais ça contrarie un peu le CRM de Big-Boss… parce que si le « nom principal » du couple est le nom de jeune fille de la dame, on a toutes les chances que nos mailings papier (oui, on en fait encore !) reviennent avec la mention « n’habite pas à l’adresse indiquée ».
Forcément, une dame de 72 ans mariée depuis genre 45 ou 50 ans ne pense pas systématiquement à coller son nom de jeune fille sur sa boîte aux lettres…)
Demander à nos clients comment ils s’appellent semble carrément idiot mais ne nous trompons pas : je pense qu’un agent de voyages lambda perd bien 6 mois de sa vie (nuits et week-ends inclus) à bosser (gratuitement) pour des gens qui ne savent pas comment ils s’appellent.
Si on demande leurs noms de jeunes filles aux dames, c’est bien parce qu’on nous a dit au moins 1 000 fois (au moment de la remise du carnet de voyage) « je vous ai dit que je m’appelais Madame Machin mais bon, vous comprenez, on n’est pas mariés mais c’est tout comme » (tu expliqueras ça à la police de l’air, Madame…).
Mais des gens qui ont deux noms, il y en a beaucoup : par exemple, les femmes mariées ! Elles doivent être genre 20 millions en France, et je pense que chacun d’entre nous en a quelques-unes dans son fichier clients.
Alors figurez-vous qu’il est de plus en plus commun que les autorités de certains pays imposent aux dames de voyager avec des billets
d’avion à leurs noms de jeune fille.
Certes, je peux trouver cette excuse pour justifier qu’au crépuscule de ma 37e année, je ne suis toujours pas mariée…
« Vous pensez… une grande voyageuse comme moi gardera à vie son nom de jeune fille. »
À l’agence, on demande depuis des années les noms de jeune fille de nos clientes mais ça contrarie un peu le CRM de Big-Boss… parce que si le « nom principal » du couple est le nom de jeune fille de la dame, on a toutes les chances que nos mailings papier (oui, on en fait encore !) reviennent avec la mention « n’habite pas à l’adresse indiquée ».
Forcément, une dame de 72 ans mariée depuis genre 45 ou 50 ans ne pense pas systématiquement à coller son nom de jeune fille sur sa boîte aux lettres…)
Demander à nos clients comment ils s’appellent semble carrément idiot mais ne nous trompons pas : je pense qu’un agent de voyages lambda perd bien 6 mois de sa vie (nuits et week-ends inclus) à bosser (gratuitement) pour des gens qui ne savent pas comment ils s’appellent.
Si on demande leurs noms de jeunes filles aux dames, c’est bien parce qu’on nous a dit au moins 1 000 fois (au moment de la remise du carnet de voyage) « je vous ai dit que je m’appelais Madame Machin mais bon, vous comprenez, on n’est pas mariés mais c’est tout comme » (tu expliqueras ça à la police de l’air, Madame…).
« On m’appelle Sophie mais sur mon passeport, il est écrit Anne-Ginette »
Mais il y a parfois plus rigolo : (je ne citerai qu’un exemple, vécu à l’agence) : « On m’appelle Sophie mais sur mon passeport, il est écrit Anne-Ginette » ( alors Madame, s’il est écrit « Anne- Ginette » sur ton passeport, c’est parce que tu t’appelles comme ça… Sophie, c’est un nom que tu t’es inventée toute seule, hein… alors tu assumes de racheter un billet d’avion.
En tous cas, chez Big-Boss Voyage, on prend les devants pour tout : on demande les passeports de tout le monde et on fait des copies… on engueule les gens qui s’inventent des prénoms, on vérifie les dates de validité des passeports en question (parce que oui, les passeports de vos enfants, que vous avez fait faire en même temps que les vôtres sont valables 5 ans… alors que les vôtres sont valables 10 ans…).
On rappelle aussi que Tahiti, ça n’est pas complètement la France (et que quand on passe par les États-Unis, il faut un passeport et un ESTA) et que tous les pays ne savent pas que les cartes d’identité (qui ont une validité écrite de 10 ans) ont été un beau matin prorogées de 5 ans (alors on explique qu’il faut faire de fausses déclarations et dire qu’on les a perdues).
J’aime bien avoir les vrais passeports des clients parce que je peux vérifier qu’il y a de la place pour les visas (ben oui… vends des combinés Laos-Cambodge, par exemple, il faut 2 pages complète ) et puis ça me donne des informations sur les clients.
Style : tiens… ce tampon de Maurice il y a 3 mois, je n’étais pas au courant… ils l’ont acheté où ce voyage ?
En tous cas, chez Big-Boss Voyage, on prend les devants pour tout : on demande les passeports de tout le monde et on fait des copies… on engueule les gens qui s’inventent des prénoms, on vérifie les dates de validité des passeports en question (parce que oui, les passeports de vos enfants, que vous avez fait faire en même temps que les vôtres sont valables 5 ans… alors que les vôtres sont valables 10 ans…).
On rappelle aussi que Tahiti, ça n’est pas complètement la France (et que quand on passe par les États-Unis, il faut un passeport et un ESTA) et que tous les pays ne savent pas que les cartes d’identité (qui ont une validité écrite de 10 ans) ont été un beau matin prorogées de 5 ans (alors on explique qu’il faut faire de fausses déclarations et dire qu’on les a perdues).
J’aime bien avoir les vrais passeports des clients parce que je peux vérifier qu’il y a de la place pour les visas (ben oui… vends des combinés Laos-Cambodge, par exemple, il faut 2 pages complète ) et puis ça me donne des informations sur les clients.
Style : tiens… ce tampon de Maurice il y a 3 mois, je n’étais pas au courant… ils l’ont acheté où ce voyage ?
Un agent de voyages doit tout savoir
Un agent de voyages doit tout savoir : qu’on ne peut pas entrer à Cuba sans avoir de carte de tourisme ou d’assurance voyage… que bientôt, il faudra une assurance médicale pour aller en Thaïlande… mais tout ça, vous le savez parce que vous êtes des pros.
Mais le plus important, à chaque fois, c’est penser à s’exclamer :
« Oh la la… comme c’est compliqué ! C’est un métier de faire voyager les gens… Heureusement que vous êtes venus à l’agence et que j’ai pensé à vous le dire parce que vous imaginez, si vous aviez acheté sur internet, vous seriez restés bloqués à l’aéroport… »
Parce qu’à l’heure de la simplification des procédures, de l’e-ticket et de la carte d’embarquement sur mobile, quand tout semble si facile… il faut bien que quelqu’un décide de tout compliquer.
Sinon, ça ne serait pas drôle : comme disait ma Mamie : « Pourquoi faire simple si on peut faire (très) compliqué ? »
Des bisous,
Léa (enfin, c’est pas le prénom qui apparaît sur mon passeport, mais dans la première agence où j’ai travaillé, il y avait 4 filles qui portaient mon prénom, alors depuis 16 ans que je travaille, toute la profession m’appelle Léa alors c’est pareil, hein…)
Mais le plus important, à chaque fois, c’est penser à s’exclamer :
« Oh la la… comme c’est compliqué ! C’est un métier de faire voyager les gens… Heureusement que vous êtes venus à l’agence et que j’ai pensé à vous le dire parce que vous imaginez, si vous aviez acheté sur internet, vous seriez restés bloqués à l’aéroport… »
Parce qu’à l’heure de la simplification des procédures, de l’e-ticket et de la carte d’embarquement sur mobile, quand tout semble si facile… il faut bien que quelqu’un décide de tout compliquer.
Sinon, ça ne serait pas drôle : comme disait ma Mamie : « Pourquoi faire simple si on peut faire (très) compliqué ? »
Des bisous,
Léa (enfin, c’est pas le prénom qui apparaît sur mon passeport, mais dans la première agence où j’ai travaillé, il y avait 4 filles qui portaient mon prénom, alors depuis 16 ans que je travaille, toute la profession m’appelle Léa alors c’est pareil, hein…)
Retrouvez cet article et l'ensemble de notre magazine 2017, intitulé "Nouvelles frontières, nouveaux défis", en ligne en cliquant sur ce lien.