Tourisme et handicap : du transport à l’hôtel, l’enjeu d’un parcours fluide et inclusif !

Le 3 avril 2025, à l’occasion des 20 ans de la loi du 11 février 2005 sur le handicap, une journée spéciale dédiée à l’inclusion a été organisée au siège du groupe Accor, portée par la Délégation ministérielle à l’accessibilité, en partenariat avec Acceslibre, Acceslibre Mobilité, Very Important Parking et Athénée Collection.

La question de l’accessibilité des loisirs, de la culture et du tourisme pour les personnes en situation de handicap a été au cœur d’une table ronde riche en échanges.

Une thématique qui prend d’autant plus de sens à l’heure où, malgré une baisse du taux de chômage des personnes handicapées (passé de 19 % à 12 %), leur inclusion sociale et culturelle reste un défi majeur.

"Travailler, c’est bien. Mais si on ne peut pas dépenser l'argent qu'on gagne pour se faire plaisir, où est le sens ?" a lancé en introduction Anthony Martins Misse, journaliste chez Sud Radio et para athlète.

Car derrière la question de l'emploi se cache aussi celle de la participation à la vie sociale, à commencer par le droit à la mobilité, aux loisirs et à la culture.

Parmi les intervenants, Marie Gonzato Yaël, directrice accessibilité et expérience client chez Keolis, a insisté sur le rôle crucial des transports dans la chaîne du voyage.

“Quand on veut envisager le tourisme, il faut envisager le cheminement. Et ce cheminement commence dans les transports du quotidien”, a-t-elle rappelé.

Avec ses 62 filiales en France couvrant 39 départements, Keolis œuvre à la fois dans le transport régulier urbain et les voyages occasionnels en autocar.

L'entreprise adapte son offre selon les zones touristiques (comme Bordeaux ou Sophia Antipolis), mais elle mise aussi sur l’information voyageur accessible, avec des plans simplifiés, traduits en plusieurs langues, et un personnel formé.

“La formation est renforcée pour les grands événements comme les 24 Heures du Mans ou le Main Square Festival”, précise Marie Gonzato Yaël.

Objectif : garantir un accueil professionnel, bienveillant et adapté à tous les publics. Une approche inclusive qui ne se limite pas à l’instant du transport, mais qui s’inscrit dans une logique de parcours sans rupture, de la gare ou de l’arrêt de bus jusqu’au lieu de séjour.

Keolis s’investit aussi dans l’expérimentation de nouvelles solutions technologiques, telles que les systèmes d’information en temps réel vocalisés ou les dispositifs d’aide à la navigation pour les personnes malvoyantes.

Du côté institutionnel, Muriel Larrouy, chargée de mission à la Délégation ministérielle à l’Accessibilité (DMA), a présenté les avancées concrètes en matière de données accessibles et de structuration de l'information.

Elle a notamment mis en avant la plateforme Accès Libre, qualifiée de “bibliothèque nationale de l’accessibilité”.

Ce portail collaboratif, alimenté par les gestionnaires d’établissements recevant du public, recense aujourd’hui près de 900 000 lieux, et permet de centraliser les informations d’accessibilité des bâtiments, voiries, services et transports.

Son objectif : offrir à tous les acteurs, entreprises, collectivités, plateformes de réservation comme The Fork, AlloCiné, ou Accor, un accès à des données fiables, harmonisées et interopérables.

"Nous voulons une seule et même langue pour décrire l’accessibilité, que ce soit dans les transports, la voirie ou les bâtiments. L’idée, c’est que quelqu’un qui cherche un parcours accessible à Brest ait la même information que s’il le cherche à Marseille”, résume Muriel Larrouy.

La DMA travaille également à élargir cette logique harmonisée à des espaces encore peu pris en compte : les espaces naturels.

Un référentiel d’accessibilité pour les parcs, plages, forêts et sentiers est en cours d’élaboration, avec l’ambition d’intégrer ces lieux dans les parcours touristiques accessibles. "On veut que les collectivités puissent décrire les cheminements accessibles dans les forêts ou les bords de mer avec le même langage qu’en centre-ville", ajoute-t-elle.

Cette initiative, encore en phase expérimentale, pourrait représenter un tournant dans l’accessibilité des loisirs en pleine nature.

Dernier maillon fondamental de la chaîne du tourisme accessible : l’hébergement.

Christian Pensart, représentant du Groupe Accor, a pris la parole en ouverture de la conférence pour rappeler l’engagement de son groupe sur cette thématique, notamment dans la dynamique impulsée par les Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024.

"Tout commence par la sensibilisation des équipes, mais aussi par l’implication concrète de nos collaborateurs en situation de handicap dans les groupes de travail", a-t-il précisé.

Accor a ainsi développé un module de formation e-learning dédié à l’accueil des personnes en situation de handicap. Ce programme repose sur une auto-évaluation des établissements selon plusieurs critères (accueil, accessibilité physique, information en ligne, signalétique, etc.), dans l’optique d’obtenir le label Tourisme & Handicap.

"Sur nos 1 700 hôtels en France, environ 500 sont déjà engagés dans la démarche”, a souligné Christian Pensart. L’objectif est à terme d’étendre cette dynamique à l’échelle internationale.

Au fil de cette table ronde, une idée s’est imposée : l’accessibilité touristique ne se résume pas à des rampes d’accès ou à des ascenseurs. Elle implique une coordination fine entre transporteurs, hôteliers, collectivités et acteurs culturels, un langage commun de l’accessibilité, et surtout, une volonté partagée d’inclure tout le monde dans le droit au voyage.

"Voyager, se divertir, se cultiver : ce ne sont pas des privilèges, mais des droits fondamentaux pour chacun, quelle que soit sa situation." a conclu Anthony Martins Misse.

La soirée de remise des prix du 3 avril, animée par Anthony Drevet, à mis à l’honneur 7 projets lauréats, ainsi que 3 précurseurs dont l'engagement au long cours a marqué le paysage de l’inclusion en France.

Prix Précurseurs
• Secteur public : Annette Masson, Présidente de l’association Tourisme et Handicaps
• Secteur associatif : Fouad Ben Ahmed, fondateur du collectif Plus sans ascenseur et de l'entreprise Solution d’Assistance à Mobilité Verticale.
• Secteur privé : Nadia Sahmi, architecte spécialisée en accessibilité

Univers Établissements recevant du public
Catégorie Accessibilité par le numérique : Evelity (Okeenea), première application de guidage indoor pour toutes personnes en situation de handicap.
Catégorie Services et prestations : FC Metz, notamment pour le lancement d’une fréquence FM dédiée à l’audiodescription dans les tribunes.

Univers Mobilité
Catégorie Politique et gouvernance : Théâtre Eurydice qui fait rayonner les talents des personnes en situation de handicap et des artistes émergents.
Catégorie Numérique : Ginko Guide (Grand Besançon), pour son application mobile dont l'objectif est de rendre les déplacements dans les transports en commun accessibles aux personnes ayant un handicap visuel ou cognitif.
Catégorie Services et prestations : MonCopilote - grâce à ce service d'accompagnement, les pilotes à mobilité réduite sont mis en relation avec des copilotes accompagnateurs afin de réaliser leurs trajets.

Univers Espaces naturels - Services et prestations : Parc naturel de la Vanoise pour ses sites, matériels et activités aménagés.

Prix Spécial du jury : Lorient Agglomération. La collectivité avait candidaté dans le cadre de son projet Handicap innovation et territoire, un projet collaboratif ayant pour ambition de faire du handicap un levier d’innovation sociale et technologique au service des citoyens.