Badr Mohammed Al Meer aux commandes de Qatar Airways : "une culture de confiance et de responsabilisation sera le fondement de notre réussite commune". Crédit : Qatar Airways
Pour beaucoup, le départ de Son Excellence M. Akbar Al Baker a été une surprise.
A 62 ans, soit 12 ans de moins que Tim Clark qui dirige Emirates, l’iconique patron de la compagnie qatarie qui déclarait en septembre dernier : « nous souhaitons continuer à dépasser toutes les attentes pour Qatar Airways dans les années à venir », semblait régner en maitre et pour encore longtemps au sein de la compagnie.
Cependant, à y regarder de plus près, on peut émettre quelques hypothèses sur les causes de son départ soudain, simplement notifié par un simple communiqué.
A 62 ans, soit 12 ans de moins que Tim Clark qui dirige Emirates, l’iconique patron de la compagnie qatarie qui déclarait en septembre dernier : « nous souhaitons continuer à dépasser toutes les attentes pour Qatar Airways dans les années à venir », semblait régner en maitre et pour encore longtemps au sein de la compagnie.
Cependant, à y regarder de plus près, on peut émettre quelques hypothèses sur les causes de son départ soudain, simplement notifié par un simple communiqué.
Al Baker, un caractère particulier
Depuis 1997, année de sa nomination à la tête de la compagnie, Akbar Al Baker a imposé son style et, il faut le dire, ses manières quelque peu rogues, au monde aéronautique.
La forte croissance et la rapide notoriété de la compagnie que l’on doit mettre à son actif, les moyens presque illimités pour acheter des avions lui conféraient une sorte d’immunité.
Ses colères, ses critiques très acerbes envers les constructeurs, les institutions du transport aérien et les concurrents étaient connues et chacun « faisait avec » pour éviter de se mettre à dos, ce gros client, cet important adhérent, ce puissant collègue ou patron…
Jusqu’à ce que n’éclate l’affaire de la peinture des A350.
La forte croissance et la rapide notoriété de la compagnie que l’on doit mettre à son actif, les moyens presque illimités pour acheter des avions lui conféraient une sorte d’immunité.
Ses colères, ses critiques très acerbes envers les constructeurs, les institutions du transport aérien et les concurrents étaient connues et chacun « faisait avec » pour éviter de se mettre à dos, ce gros client, cet important adhérent, ce puissant collègue ou patron…
Jusqu’à ce que n’éclate l’affaire de la peinture des A350.
Une étoile qui pâlit
Constatant que la peinture de ses A350 s’écaillait prématurément, le PDG les avait cloués au sol en 2021, évoquant la sécurité et exigeant d'Airbus des indemnisations dépassant le milliard de dollars. Une erreur qui a commencé à faire pâlir l’étoile d’Akbar Al Baker.
Airbus à l’époque et contrairement à ce qu’on l’on pouvait attendre n’avait pas accepté les mises en cause de son appareil.
Plutôt que de faire le dos rond, dans la perspective d’un très gros contrat à venir, le constructeur avait vigoureusement réagi et parlé publiquement de « déclarations inexactes », de « mauvaises interprétations », et surtout de « menaces sur les protocoles internationaux de sécurité ».
Après une bataille juridique devant les tribunaux anglais, Akbar Al Baker avait dû renoncer aux indemnisations, et se résoudre à un accord à l’amiable.
Plus grave, Airbus, durant cette bataille juridique de plusieurs mois, avait tout bonnement annulé la commande de Qatar Airways de 50 A321neo, privant la compagnie d’un avion clé dans son développement et pour sa rentabilité.
Ce « mauvais procès » intenté contre le constructeur européen aura finalement nui à la compétitivité de Qatar et terni son image.
Au plus fort de cette crise et selon l’agence Reuters, le Président Emmanuel Macron, sans doute un peu agacé, avait directement évoqué cette affaire avec son homologue l’émir qatari Cheikh Tamim ben Hamad al-Thani.
Rappelons que la compagnie aérienne est entièrement détenue par le gouvernement qatari.
Autre « sortie » remarquée de l’ex-PDG de Qatar, lorsqu’il a exprimé publiquement sa totale incrédulité quant aux objectifs fixés par l’OACI* de supprimer les émissions de carbone d'ici à 2050 au sein du secteur aérien.
Certes, tout dirigeant peut avoir de très bonnes raisons de douter quant à la réalisation de cet objectif très ambitieux et Akbar Al Baker est loin d’être le seul à être pessimiste à ce sujet.
Cependant, alors même que le site internet de la compagnie indique « Nous nous engageons à atteindre zéro émission carbone d'ici à 2050 en tant que compagnie aérienne » et que sur le site du gouvernement qatari on peut lire que « le Qatar est engagé depuis longtemps à relever les défis environnementaux mondiaux. Le Qatar est un partenaire actif dans la campagne de la communauté internationale pour faire face à la crise climatique. », les déclarations publiques d’Akbar Al Baker ont fait tache et finalement brouillé les messages de la compagnie et du gouvernement.
Airbus à l’époque et contrairement à ce qu’on l’on pouvait attendre n’avait pas accepté les mises en cause de son appareil.
Plutôt que de faire le dos rond, dans la perspective d’un très gros contrat à venir, le constructeur avait vigoureusement réagi et parlé publiquement de « déclarations inexactes », de « mauvaises interprétations », et surtout de « menaces sur les protocoles internationaux de sécurité ».
Après une bataille juridique devant les tribunaux anglais, Akbar Al Baker avait dû renoncer aux indemnisations, et se résoudre à un accord à l’amiable.
Plus grave, Airbus, durant cette bataille juridique de plusieurs mois, avait tout bonnement annulé la commande de Qatar Airways de 50 A321neo, privant la compagnie d’un avion clé dans son développement et pour sa rentabilité.
Ce « mauvais procès » intenté contre le constructeur européen aura finalement nui à la compétitivité de Qatar et terni son image.
Au plus fort de cette crise et selon l’agence Reuters, le Président Emmanuel Macron, sans doute un peu agacé, avait directement évoqué cette affaire avec son homologue l’émir qatari Cheikh Tamim ben Hamad al-Thani.
Rappelons que la compagnie aérienne est entièrement détenue par le gouvernement qatari.
Autre « sortie » remarquée de l’ex-PDG de Qatar, lorsqu’il a exprimé publiquement sa totale incrédulité quant aux objectifs fixés par l’OACI* de supprimer les émissions de carbone d'ici à 2050 au sein du secteur aérien.
Certes, tout dirigeant peut avoir de très bonnes raisons de douter quant à la réalisation de cet objectif très ambitieux et Akbar Al Baker est loin d’être le seul à être pessimiste à ce sujet.
Cependant, alors même que le site internet de la compagnie indique « Nous nous engageons à atteindre zéro émission carbone d'ici à 2050 en tant que compagnie aérienne » et que sur le site du gouvernement qatari on peut lire que « le Qatar est engagé depuis longtemps à relever les défis environnementaux mondiaux. Le Qatar est un partenaire actif dans la campagne de la communauté internationale pour faire face à la crise climatique. », les déclarations publiques d’Akbar Al Baker ont fait tache et finalement brouillé les messages de la compagnie et du gouvernement.
Badr Mohammed Al Meer, une nouvelle génération
A l’heure où une nouvelle génération regarde de très près les questions d’environnement, les doutes exprimés par l’ex-dirigeant de Qatar Airways à ce sujet ont surement pesé dans la décision du gouvernement qatari de nommer à la tête de la compagnie un dirigeant plus jeune, plus enthousiaste et affichant plus d’optimisme face aux enjeux de l’environnement.
C’est le cas du nouveau PDG, Badr Mohammed Al Meer qui, à peine nommé, s’est empressé de déclarer : « Dans cette industrie du voyage dynamique et en constante évolution, je prévois d'investir dans les priorités et les préoccupations de ma génération, et je mettrai un accent renouvelé sur l'exploitation des technologies émergentes, le développement et la mise en œuvre de solutions d'aviation durables ».
Titulaire de diplômes d'ingénieur de l'Université américaine de Beyrouth et de l'Université du Colorado, Badr Mohammed Al Meer occupait précédemment le poste de Directeur des Opérations de l'Aéroport international Hamad.
Crédité d’un bon leadership et ayant bien réussi le défi historique de la Coupe du monde de la FIFA 2022 qui a permis à l'aéroport d'accueillir plus d'un million de visiteurs, ce nouveau PDG incarne bien la volonté du Qatar à mettre en place une nouvelle génération de dirigeants.
Tout indique au travers de ses premières déclarations que son style sera surement plus policé que celui de son prédécesseur.
C’est le cas du nouveau PDG, Badr Mohammed Al Meer qui, à peine nommé, s’est empressé de déclarer : « Dans cette industrie du voyage dynamique et en constante évolution, je prévois d'investir dans les priorités et les préoccupations de ma génération, et je mettrai un accent renouvelé sur l'exploitation des technologies émergentes, le développement et la mise en œuvre de solutions d'aviation durables ».
Titulaire de diplômes d'ingénieur de l'Université américaine de Beyrouth et de l'Université du Colorado, Badr Mohammed Al Meer occupait précédemment le poste de Directeur des Opérations de l'Aéroport international Hamad.
Crédité d’un bon leadership et ayant bien réussi le défi historique de la Coupe du monde de la FIFA 2022 qui a permis à l'aéroport d'accueillir plus d'un million de visiteurs, ce nouveau PDG incarne bien la volonté du Qatar à mettre en place une nouvelle génération de dirigeants.
Tout indique au travers de ses premières déclarations que son style sera surement plus policé que celui de son prédécesseur.
Qatar Airways : un changement de culture
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Changement de style, changement de ton, mais le plus important dans cette nomination outre les aspects relevant de la forme, c'est ce qui devrait se passer sur le fond quant au management de l’entreprise.
Avec ce nouveau dirigeant, Qatar Airways veut faire évoluer la culture d’entreprise en se rapprochant des standards occidentaux.
Ce n'est pas demain que les syndicats vont débouler au siège à Doha, cependant le nouveau PDG est très clair, souhaitant : « faire évoluer le groupe Qatar Airways » et le « faire entrer dans une nouvelle ère, dans laquelle une culture de confiance et de responsabilisation sera le fondement de notre réussite commune »
Déjà , du côté des hôtesses et des stewards, les choses semblent évoluer. Le site Aerotime.aero rapporte qu'ils auraient été avisés il y a quelques jours que les règles qui leur imposent de rester obligatoirement chez eux avant un vol allaient être assouplies.
Une sorte de couvre-feu qui n’existe pas dans les compagnies occidentales et peu apprécié des navigants dont beaucoup considéraient qu’il s’agissait d’une grave entrave à la vie privée.
Pour la compagnie qatari, les enjeux liés à son attractivité en tant qu’employeur sont énormes au vu de la forte croissance du transport aérien dans les années qui viennent.
Il y a quelques années les opportunités d’emplois dans les compagnies aériennes étaient rares sauf dans les pays du Golfe où se pressaient de très nombreux candidats. Depuis la fin de la pandémie, les choses ont changé et les compagnies du monde entier recherchent des collaborateurs et particulièrement des navigants.
L’offre devient supérieure à la demande. Salaires, conditions de travail et de vie, mais aussi culture d’entreprise seront des critères déterminants pour choisir son employeur ce que semble avoir bien compris Qatar Airways.
Une page se tourne donc. Dans les communiqués de la compagnie, le nom du PDG n’est plus précédé de « son excellence » mais d’un simple M.
Dans l’hommage qu’il lui a rendu, Badr Mohammed Al Meer a déclaré à propos de son prédécesseur : « Son excellence M. Akbar Al Baker a laissé une empreinte inoubliable sur cette organisation, ayant construit Qatar Airways depuis ses débuts pour en faire une compagnie aérienne de classe mondiale… »
Cette excellence est effectivement à mettre au crédit d'Akbar Al Baker. Nous l’avions rencontré il y a quelques mois au salon du Bourget.
L’homme, ce jour-là , était souriant, charmant avec tout le monde avec même de l’humour. Des traits de personnalité qu’il n’affichait pas souvent, entretenant plutôt l’idée d’un homme autoritaire et cassant.
Un portrait qui ne semble plus être conforme à l’image que Qatar Airways veut donner de ses dirigeants.
*Organisation de l'aviation civile internationale
Avec ce nouveau dirigeant, Qatar Airways veut faire évoluer la culture d’entreprise en se rapprochant des standards occidentaux.
Ce n'est pas demain que les syndicats vont débouler au siège à Doha, cependant le nouveau PDG est très clair, souhaitant : « faire évoluer le groupe Qatar Airways » et le « faire entrer dans une nouvelle ère, dans laquelle une culture de confiance et de responsabilisation sera le fondement de notre réussite commune »
Déjà , du côté des hôtesses et des stewards, les choses semblent évoluer. Le site Aerotime.aero rapporte qu'ils auraient été avisés il y a quelques jours que les règles qui leur imposent de rester obligatoirement chez eux avant un vol allaient être assouplies.
Une sorte de couvre-feu qui n’existe pas dans les compagnies occidentales et peu apprécié des navigants dont beaucoup considéraient qu’il s’agissait d’une grave entrave à la vie privée.
Pour la compagnie qatari, les enjeux liés à son attractivité en tant qu’employeur sont énormes au vu de la forte croissance du transport aérien dans les années qui viennent.
Il y a quelques années les opportunités d’emplois dans les compagnies aériennes étaient rares sauf dans les pays du Golfe où se pressaient de très nombreux candidats. Depuis la fin de la pandémie, les choses ont changé et les compagnies du monde entier recherchent des collaborateurs et particulièrement des navigants.
L’offre devient supérieure à la demande. Salaires, conditions de travail et de vie, mais aussi culture d’entreprise seront des critères déterminants pour choisir son employeur ce que semble avoir bien compris Qatar Airways.
Une page se tourne donc. Dans les communiqués de la compagnie, le nom du PDG n’est plus précédé de « son excellence » mais d’un simple M.
Dans l’hommage qu’il lui a rendu, Badr Mohammed Al Meer a déclaré à propos de son prédécesseur : « Son excellence M. Akbar Al Baker a laissé une empreinte inoubliable sur cette organisation, ayant construit Qatar Airways depuis ses débuts pour en faire une compagnie aérienne de classe mondiale… »
Cette excellence est effectivement à mettre au crédit d'Akbar Al Baker. Nous l’avions rencontré il y a quelques mois au salon du Bourget.
L’homme, ce jour-là , était souriant, charmant avec tout le monde avec même de l’humour. Des traits de personnalité qu’il n’affichait pas souvent, entretenant plutôt l’idée d’un homme autoritaire et cassant.
Un portrait qui ne semble plus être conforme à l’image que Qatar Airways veut donner de ses dirigeants.
*Organisation de l'aviation civile internationale
Publié par Christophe Hardin Journaliste AirMaG - TourMaG.com
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