
Pour Guillaume Desmurs, l'auteur du livre "Le crépuscule des Jeux", le dossier des Alpes françaises n'a rien de sérieux - Crédit Photo : RP
Le 24 juillet 2024, Renaud Muselier et Laurent Wauquiez se tournent avec de grands sourires vers le président de la République pour lui serrer chaleureusement la main.
La candidature unie des Alpes françaises a reçu l'approbation, sous condition, d'organiser les Jeux olympiques d'hiver en 2030. Une victoire en trompe-l'œil puisque les autres concurrents n'ont pas été retenus par le Comité international olympique (CIO).
Depuis ce grand jour, les bouteilles de champagne ont été remisées et les cotillons ramassés. La joie semble laisser place à un certain doute que peine à dissiper l'intronisation d'Edgar Grospiron comme président des JO 2030.
"Je suis positivement surpris par la prise de conscience des journalistes avec qui j'ai pu échanger sur le sujet, suite à la sortie de mon livre, aussi bien ceux qui traitent de l'actualité nationale que ceux sportifs.
Ils sont assez dubitatifs sur ces JO, ils se posent des questions. Ils ont globalement conscience que derrière cet évènement se joue l'avenir des montagnes, et que ces jeux s'inscrivent dans une réflexion plus large de ce qu'il va se passer dans nos stations de ski demain," expose Guillaume Desmurs, après avoir enchaîné les interviews après la publication de son livre "Le crépuscule des Jeux".
Le journaliste spécialiste de l'outdoor et de la montagne a passé plusieurs mois à enquêter sur ce grand raout afin d'en connaitre les dessous, mais surtout savoir ce qu'il signifie pour les territoires.
La candidature unie des Alpes françaises a reçu l'approbation, sous condition, d'organiser les Jeux olympiques d'hiver en 2030. Une victoire en trompe-l'œil puisque les autres concurrents n'ont pas été retenus par le Comité international olympique (CIO).
Depuis ce grand jour, les bouteilles de champagne ont été remisées et les cotillons ramassés. La joie semble laisser place à un certain doute que peine à dissiper l'intronisation d'Edgar Grospiron comme président des JO 2030.
"Je suis positivement surpris par la prise de conscience des journalistes avec qui j'ai pu échanger sur le sujet, suite à la sortie de mon livre, aussi bien ceux qui traitent de l'actualité nationale que ceux sportifs.
Ils sont assez dubitatifs sur ces JO, ils se posent des questions. Ils ont globalement conscience que derrière cet évènement se joue l'avenir des montagnes, et que ces jeux s'inscrivent dans une réflexion plus large de ce qu'il va se passer dans nos stations de ski demain," expose Guillaume Desmurs, après avoir enchaîné les interviews après la publication de son livre "Le crépuscule des Jeux".
Le journaliste spécialiste de l'outdoor et de la montagne a passé plusieurs mois à enquêter sur ce grand raout afin d'en connaitre les dessous, mais surtout savoir ce qu'il signifie pour les territoires.
JO 2030 : "une candidature politique, au service des intérêts personnels"

"Ils ne sont pas spécialement très critiquables. Nous parlons d'une compétition qui a lieu seulement tous les 4 ans et qui réunit des athlètes de la planète entière, ce n'est pas ce sujet qui m'intéresse non.
Je cherche à savoir ce que veut dire l'organisation des JO sur la stratégie à long terme de nos territoires. Est-ce que ce projet est durable et reflète une volonté collective ?
On parle de milliards d'euros d'argent public mobilisés, c'est un sujet central pour nos montagnes, sauf qu'on ne sait finalement pas grand-chose," explique l'écrivain.
Pour l'heure, il n'est pas facile de se faire une idée de l'impact qu'ils auront puisqu'il n'existe encore aucune publication officielle sur cette candidature.
Face à cette absence de littérature, il fallut arpenter les stations, les villes et les instances politiques de ce territoire.
Si des déclarations ont bien eu lieu pour rassurer les autorités nationales, les habitants et même les associations de protection de l'environnement, elles ne sont restées qu'à ce stade... pour le moment.
Pourtant, nos Alpes sont un peu à la croisée des chemins, alors que l'or blanc se raréfie, cela pose des questions quant à la pérennité de leur économie. Ces JO 2030 arrivent comme un cheveu sur la soupe.
"Le projet est porté par trois personnes : Renault Muselier, Laurent Wauquiez et David Lapartien.
Ils démontrent que cette candidature est politique, au service des intérêts personnels de ces personnages. L'un veut être maire de Marseille, l'autre président de la République et le dernier président du CIO.
Les Jeux olympiques ne sont qu'un prétexte," estime Guillaume Desmurs.
"Les JO 2030 sont un merveilleux cadeau au business du ski industriel"
Ce n'est pas une critique gratuite, il suffit de voir l'aura qui entoure encore Michel Barnier, 33 ans après Albertville ou encore Tony Estanguet qui aurait refusé le poste de Premier ministre à l'automne dernier.
Les Jeux olympiques sont un promontoire politique, une caisse de résonance infinie, surtout lorsqu'ils marquent l'histoire du pays.
"Laurent Wauquiez, en tant que président de la région Auvergne-Rhône-Alpes, a toujours soutenu l'agriculture et le ski industriel.
Ce n'est pas une critique, mais un regard factuel.
Il a mis en place des plans pour maintenir ces deux secteurs, en orientant des millions d'euros vers l'installation de canons à neige. Il ne fait pas mystère de son soutien indéfectible à l'industrie du ski et les JO sont un merveilleux cadeau à ce business," analyse Guillaume Desmurs.
A lire : JO d'Hiver 2030 : "Un mauvais signal envoyé à la montagne française".
Une industrie que le réchauffement climatique ébranle année après année.
Et pour ne pas se mettre à dos les associations ou les populations, l'organisation a martelé que l'évènement sera "durable et économe," puisque 95% des installations sportives sont déjà construites.
Il doit aussi devenir un laboratoire pour l'aménagement et l'innovation des territoires d'accueil des compétitions.
"Les porteurs de la candidature ont bien utilisé ces mots, même Emmanuel Macron a affirmé qu'il fallait changer ce modèle économique.
La transition est indispensable, sauf que l'unique document officiel publié l'a été par le CIO (Commission de futur hôte des Jeux Olympiques d'hiver, ndlr) et il n'y a absolument rien sur ce sujet.
Sur les transports, il est expliqué qu'il y aura des navettes électriques et/ou à hydrogène, puis la décarbonation du transport aérien se fera par les innovations technologiques d'ici 2030.
J'ai creusé, je me suis demandé s'ils pouvaient être un accélérateur de stratégie de transition," recontextualise le montagnard.
Un des rares cas de transformation probants a été celui de Barcelone.
Il y avait déjà tout un plan de modernisation de la ville et les JO sont arrivés au meilleur moment pour accélérer et aussi mettre en image cette révolution.
Trente ans plus tard, l'évènement donne plutôt l'impression de remettre seulement une pièce dans la machine d'un système efficace, mais fragile, sans le remettre vraiment en question.
Les Jeux olympiques sont un promontoire politique, une caisse de résonance infinie, surtout lorsqu'ils marquent l'histoire du pays.
"Laurent Wauquiez, en tant que président de la région Auvergne-Rhône-Alpes, a toujours soutenu l'agriculture et le ski industriel.
Ce n'est pas une critique, mais un regard factuel.
Il a mis en place des plans pour maintenir ces deux secteurs, en orientant des millions d'euros vers l'installation de canons à neige. Il ne fait pas mystère de son soutien indéfectible à l'industrie du ski et les JO sont un merveilleux cadeau à ce business," analyse Guillaume Desmurs.
A lire : JO d'Hiver 2030 : "Un mauvais signal envoyé à la montagne française".
Une industrie que le réchauffement climatique ébranle année après année.
Et pour ne pas se mettre à dos les associations ou les populations, l'organisation a martelé que l'évènement sera "durable et économe," puisque 95% des installations sportives sont déjà construites.
Il doit aussi devenir un laboratoire pour l'aménagement et l'innovation des territoires d'accueil des compétitions.
"Les porteurs de la candidature ont bien utilisé ces mots, même Emmanuel Macron a affirmé qu'il fallait changer ce modèle économique.
La transition est indispensable, sauf que l'unique document officiel publié l'a été par le CIO (Commission de futur hôte des Jeux Olympiques d'hiver, ndlr) et il n'y a absolument rien sur ce sujet.
Sur les transports, il est expliqué qu'il y aura des navettes électriques et/ou à hydrogène, puis la décarbonation du transport aérien se fera par les innovations technologiques d'ici 2030.
J'ai creusé, je me suis demandé s'ils pouvaient être un accélérateur de stratégie de transition," recontextualise le montagnard.
Un des rares cas de transformation probants a été celui de Barcelone.
Il y avait déjà tout un plan de modernisation de la ville et les JO sont arrivés au meilleur moment pour accélérer et aussi mettre en image cette révolution.
Trente ans plus tard, l'évènement donne plutôt l'impression de remettre seulement une pièce dans la machine d'un système efficace, mais fragile, sans le remettre vraiment en question.
JO 2030 sont "un pari sur le passé" et non l'avenir !
Et l'auteur du livre "Le crépuscule des Jeux" de poursuivre.
"Il n'y a aucune stratégie ferroviaire dans la région Auvergne-Rhône-Alpes, donc ils ne peuvent pas accélérer un plan de développement inexistant.
De plus, même s'il y a une commande, les wagons ne seront jamais livrés dans 5 ans.
Cette compétition avec les éléments que nous avons en notre possession, nous ne pouvons pas affirmer qu'elle sera au service de la transition des montagnes.
C'est un pari sur le passé, ces JO, car il va faire perdurer un modèle dont on sait qu'il est moribond, dont on voit les effets négatifs sur les territoires de montagne."
Et malheureusement l'intronisation d'Edgar Grospiron n'a pour l'heure pas vraiment fait avancer le dossier.
L'ancien champion olympique de bosses a bien tenté de rassurer.
"Je l'ai entendu plusieurs fois, il ne m'a pas convaincu ni par ses déclaration, ni par son argumentaire. Il pédale dans la semoule, on n'est pas plus avancé. Après ce n'est pas un mauvais choix, c'est un ancien athlète de haut niveau, un super commercial, un bon communicant, puis il a une prestance.
Le COJO devait être fonctionnel en septembre, il a finalement vu le jour mi-février, mais il doit encore nommer son équipe quand Salt Lake 2034 a déjà coché ces cases.
Dans l'ensemble cette candidature n'est pas sérieuse, tout comme Edgar Grospiron ne l'est pas dans ses différentes prises de parole. Il n'y a pas de chiffre, pas de débat, pas d'argumentaire... tout ça n'est pas sérieux," résume le journaliste.
"Il n'y a aucune stratégie ferroviaire dans la région Auvergne-Rhône-Alpes, donc ils ne peuvent pas accélérer un plan de développement inexistant.
De plus, même s'il y a une commande, les wagons ne seront jamais livrés dans 5 ans.
Cette compétition avec les éléments que nous avons en notre possession, nous ne pouvons pas affirmer qu'elle sera au service de la transition des montagnes.
C'est un pari sur le passé, ces JO, car il va faire perdurer un modèle dont on sait qu'il est moribond, dont on voit les effets négatifs sur les territoires de montagne."
Et malheureusement l'intronisation d'Edgar Grospiron n'a pour l'heure pas vraiment fait avancer le dossier.
L'ancien champion olympique de bosses a bien tenté de rassurer.
"Je l'ai entendu plusieurs fois, il ne m'a pas convaincu ni par ses déclaration, ni par son argumentaire. Il pédale dans la semoule, on n'est pas plus avancé. Après ce n'est pas un mauvais choix, c'est un ancien athlète de haut niveau, un super commercial, un bon communicant, puis il a une prestance.
Le COJO devait être fonctionnel en septembre, il a finalement vu le jour mi-février, mais il doit encore nommer son équipe quand Salt Lake 2034 a déjà coché ces cases.
Dans l'ensemble cette candidature n'est pas sérieuse, tout comme Edgar Grospiron ne l'est pas dans ses différentes prises de parole. Il n'y a pas de chiffre, pas de débat, pas d'argumentaire... tout ça n'est pas sérieux," résume le journaliste.
JO 2030 : "une candidature qui n'a rien de sérieux"
Et alors que l'organisation semble aller dans le mur, il est encore temps d'agir, de stopper et réfléchir.
L'histoire ne se répète pas, elle bégaye parfois. Les Alpes pourraient regarder ce qu'il s'est passé à Denver dans les années 1970. La capitale du Colorado devait organiser les JO d'hiver, finalement la population locale s'élève contre le projet et l'évènement est délocalisé en urgence à Innsbruck.
A lire : Réinventons la montagne : oui, mais comment ?
"Il y a une véritable ressemblance avec ce qu'il se passe actuellement, les jeux d'acteurs et les arguments sont les mêmes.
La candidature américaine est portée par des politiques et hommes d'affaires qui voient l'opportunité de faire la promotion des stations de l'Etat et pouvoir développer l'immobilier.
Ces JO 2030 profitent eux aussi au business, notamment l'immobilier, qui est au cœur du modèle économique de nos stations de ski," affirme l'écrivain.
Pour Guillaume Desmurs, nous sommes dans un déni démocratique.
Aucun véritable sondage indépendant n'a été fait pour sonder les populations, les maires ne savent toujours pas quelles sommes ils devront financer, ni comment.
"Au lieu de ça, nous pourrions travailler sur les imaginaires pour imaginer comment la montagne peut devenir un lieu d'habitation à l'année, comment on peut transformer les métiers, transformer la façon de côtoyer, de vivre dans ces territoires et transformer les modèles économiques, les activités.
Les promesses ne sont pas tenables, donc ce qui serait chevaleresque ce serait de dire au CIO, nous allons les organiser à notre manière, en faire la vitrine des JO de demain et vraiment durable, sobre et populaire," rêve Guillaume Desmurs.
Tout comme le tourisme, la montagne doit opérer sa mue et cela passe aussi par les imaginaires, pour faire sortir des cartons un futur enviable et non une transition brutale et subie.
Rappelons que le 10 mars, le gouvernement a présenté son plan d'adaptation au changement climatique, dans l'hypothèse d'un réchauffement qui pourrait atteindre +4 degrés.
Un seuil qui ferait dispaitre toute illusion d'un or blanc éternel...
L'histoire ne se répète pas, elle bégaye parfois. Les Alpes pourraient regarder ce qu'il s'est passé à Denver dans les années 1970. La capitale du Colorado devait organiser les JO d'hiver, finalement la population locale s'élève contre le projet et l'évènement est délocalisé en urgence à Innsbruck.
A lire : Réinventons la montagne : oui, mais comment ?
"Il y a une véritable ressemblance avec ce qu'il se passe actuellement, les jeux d'acteurs et les arguments sont les mêmes.
La candidature américaine est portée par des politiques et hommes d'affaires qui voient l'opportunité de faire la promotion des stations de l'Etat et pouvoir développer l'immobilier.
Ces JO 2030 profitent eux aussi au business, notamment l'immobilier, qui est au cœur du modèle économique de nos stations de ski," affirme l'écrivain.
Pour Guillaume Desmurs, nous sommes dans un déni démocratique.
Aucun véritable sondage indépendant n'a été fait pour sonder les populations, les maires ne savent toujours pas quelles sommes ils devront financer, ni comment.
"Au lieu de ça, nous pourrions travailler sur les imaginaires pour imaginer comment la montagne peut devenir un lieu d'habitation à l'année, comment on peut transformer les métiers, transformer la façon de côtoyer, de vivre dans ces territoires et transformer les modèles économiques, les activités.
Les promesses ne sont pas tenables, donc ce qui serait chevaleresque ce serait de dire au CIO, nous allons les organiser à notre manière, en faire la vitrine des JO de demain et vraiment durable, sobre et populaire," rêve Guillaume Desmurs.
Tout comme le tourisme, la montagne doit opérer sa mue et cela passe aussi par les imaginaires, pour faire sortir des cartons un futur enviable et non une transition brutale et subie.
Rappelons que le 10 mars, le gouvernement a présenté son plan d'adaptation au changement climatique, dans l'hypothèse d'un réchauffement qui pourrait atteindre +4 degrés.
Un seuil qui ferait dispaitre toute illusion d'un or blanc éternel...