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Devoir de conseil : Responsables mais pas coupables... 🔑

l'Editorial de Jean da Luz


Les Etats-Unis leur ont refusé l’ESTA parce qu’ils avaient voyagé en Iran. Logique. Pourtant, bien que dûment informés des formalités requises, les clients de l’agence ont saisi la justice, et la Cour de cassation leur a donné raison. Revirement de jurisprudence ou cas d’espèce, l’avenir nous le dira. Réflexions.


Rédigé par le Lundi 28 Octobre 2024

Une décision qui va faire couler beaucoup d'encre... /crédit DepositPhoto
Une décision qui va faire couler beaucoup d'encre... /crédit DepositPhoto
On ne commente pas les décisions de la Cour de Cassation, la plus haute institution judiciaire de notre pays.

C’est interdit par la loi et passible de six mois d'emprisonnement et de 7 500 euros d'amende si l’on a cherché “à jeter le discrédit, publiquement par actes, paroles, écrits ou images de toute nature, sur un acte ou une décision juridictionnelle, dans des conditions de nature à porter atteinte à l'autorité de la justice ou à son indépendance…”

Loin de nous cette idée, mais il est difficile de passer sous silence les répercussions que cette décision pourrait entraîner pour l'ensemble de la profession.

La question est légitime : sommes-nous face à un renversement (?) de jurisprudence ou ne s'agit-il que d'un cas d'espèce dû aux circonstances particulières de ce dossier ?


Je ne vais pas m'appesantir sur l’affaire mais juste en rappeler les fondamentaux. Un couple fait appel en urgence (16 jours avant le départ) à une agence de voyages sur mesure pour établir un forfait pour un voyage à Hawaï. Le devis est envoyé, avec la liste des pièces et des formalités obligatoires.


Un régime spécial pour les agences haut de gamme et le voyage personnalisé ?

Les clients signent et se dépêchent de faire l’Esta. Et là, patatras ! C’est la douche froide : ils ont déjà voyagé en Iran, une destination rédhibitoire, même en transit.

Seule solution : un visa en bonne et due forme qu’on ne peut obtenir qu’en se rendant auprès de l’ambassade. Obtenir un rendez-vous dans des délais aussi brefs, c’est mission impossible.

Le couple demande le remboursement. L’agence refuse au motif qu’elle l’avait indiqué dans ses prescriptions et dans ses CGV.

La machine judiciaire s’engrène et s’emballe.

La cour d'appel d'Amiens “estime que dans le cas d'une "d’une prestation haut de gamme et personnalisée (une agence sur-mesure dont la promesse est de partir l'esprit libre)," la simple obligation d'information prévue par l'article R 211-4 du code du tourisme n'est pas suffisante…”.

La Cour de Cassation lui emboîte le pas : il appartenait à cette société, qui connaissait les restrictions à l'entrée sur le sol américain, de vérifier si les passeports de M. et Mme (X) ne comportaient pas des mentions nécessitant l'obtention d'un visa et de les informer de la spécificité de leur situation ainsi que des délais requis pour faire les démarches en vue d'obtenir ce visa…”

De l’incertitude dans le processus de transaction

Il y a deux manières d’interpréter cet arrêt : la première pose une exception à la règle d’obligation d’information elle même et à ses modalités.

En effet, si on le prend au pied de la lettre, les voyages sur mesure et haut de gamme exigeraient des contrôles plus poussés de la part des distributeurs.

Encore faudrait-il savoir ce qu’est un voyage haut de gamme, sur mesure et à partir de quel montant on considère que c’est le cas ?

Bien entendu, cela ne manquera pas d’instiller de l’incertitude dans les relations contractuelles alors que les entreprises ont besoin de stabilité dans leurs process de vente.

La deuxième est de considérer que le droit d’information se double d’un droit de contrôle et que le premier ne suffit plus. Et c’est là que le bât blesse.

On verra si cette jurisprudence est maintenue, mais dans ce cas c’est peut-être le Code du tourisme qu’il faudra réformer ? A moins que, forte de cet arrêt, la Commission européenne qui peaufine la Directive voyages à forfait, ne mette aussi son grain de sel.

Les arbres ne poussent jamais jusqu’au ciel

Si on voit le verre à moitié plein, on peut avancer que l’agence est l’interlocuteur privilégié du client et qu’à ce titre elle se doit d’être irréprochable et infaillible.

Mais les arbres ne montent jamais jusqu’au ciel. Et la responsabilité d’un acteur économique ne peut être illimitée. La protection du consommateur doit primer certes, mais on ne peut rendre le distributeur responsable de situations qu’il n’est pas en mesure de contrôler, y compris de la négligence de ses clients.

Nul n’est censé ignorer la loi ni se prévaloir de sa propre turpitude (clin d’œil aux juristes Ndlr).

Dernièrement, un consommateur a attaqué une agence de voyages au motif que sa femme lui avait fait une infidélité avec le guide… Si !

Si dans l'avenir cet argument de la "responsabilité absolue et incontestable" était brandie par d'autres consommateurs qui ne manqueront pas de s’engouffrer dans la brèche, alors ce sera probablement la goutte d’eau qui fera déborder le vase !


Jean Da Luz L'Editorial de Jean Da Luz Directeur de la rédaction - TourMaG.com
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Commentaires

1.Posté par Controleurouimais le 28/10/2024 08:55 | Alerter
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Juste une question.
Nous ne sommes pas Policiers.
(Même si nous le faisons..) sommes nous habilités officiellement de contrôler des papiers d'identité.
Par ailleurs, un client peut refuser de nous les montrer...
Bonne réflexion...

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