Les non-lieux : aéroports, gares, chaînes hôtelières
La notion de tiers-lieu a évolué et de nouveaux espaces tels que les espaces de télétravail, de coworking, les fablabs, livinglabs, hackerspaces se sont multipliés. Avec une connotation écologique qui en fait aussi des « éco lieux » - DR : DepositPhotos.com, AllaSerebrina
L’anthropologue Marc Augé* publiait dès 1992 un ouvrage de référence intitulé : « Non- lieux, introduction à une anthropologie de la surmodernité ».
Il entendait par le terme de « non-lieu », des espaces d’anonymat accueillant des individus de plus en plus nombreux, consistant à la fois en installations nécessaires à la circulation des personnes et des biens (voies rapides, échangeurs, gares, aéroports), nécessaires aux moyens de transport (voitures trains, trains ou avions), mais aussi nécessaires aux grandes chaînes hôtelières aux chambres interchangeables...
Pour l’anthropologue : le non-lieu était donc tout le contraire d’une demeure, d’une résidence, d’un lieu au sens commun du terme.
Quant à son utilisateur, seul mais semblable aux autres, il était censé entretenir avec celui-ci une relation unique, de type contractuel, symbolisée par le billet de train ou d’avion, une carte de paiement ou un passeport, un chèque et tout autre permis en autorisant l’accès !
* Marc Augé : « Un non lieu est un espace où l’être humain reste anonyme. Si un lieu peut se définir comme identitaire, relationnel et historique, un espace qui ne peut se définir ni comme identitaire, ni comme relationnel, ni comme historique définira un non- lieu. Le non- lieu s’oppose à la notion de « lieu anthropologique ».
Il entendait par le terme de « non-lieu », des espaces d’anonymat accueillant des individus de plus en plus nombreux, consistant à la fois en installations nécessaires à la circulation des personnes et des biens (voies rapides, échangeurs, gares, aéroports), nécessaires aux moyens de transport (voitures trains, trains ou avions), mais aussi nécessaires aux grandes chaînes hôtelières aux chambres interchangeables...
Pour l’anthropologue : le non-lieu était donc tout le contraire d’une demeure, d’une résidence, d’un lieu au sens commun du terme.
Quant à son utilisateur, seul mais semblable aux autres, il était censé entretenir avec celui-ci une relation unique, de type contractuel, symbolisée par le billet de train ou d’avion, une carte de paiement ou un passeport, un chèque et tout autre permis en autorisant l’accès !
* Marc Augé : « Un non lieu est un espace où l’être humain reste anonyme. Si un lieu peut se définir comme identitaire, relationnel et historique, un espace qui ne peut se définir ni comme identitaire, ni comme relationnel, ni comme historique définira un non- lieu. Le non- lieu s’oppose à la notion de « lieu anthropologique ».
L’hyper-lieu contre le non-lieu
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Mais, ces endroits relativement uniformes et anonymes dans lesquels on n’habite pas, ne sont pas considérés par tous les observateurs de la même façon.
Pour le géographe, Michel Lussault qui a publié un ouvrage intitulé « Hyper-lieux », la globalisation économique et culturelle n’a pas conçu un monde « lisse et plat où les différences culturelles se sont estompées, où l’individu est aliéné et où, pire, la sociabilité des uns et des autres s’est appauvrie et a même disparu.
Dans un aéroport, une gare, un ressort, un parc à thèmes, on a beau souscrire à des attitudes mondialisées, on invente aussi de nouveaux gestes issus à la fois de la mondialisation et du local qui ne sont pas exempts d’une tentative d’appropriation des lieux et d’une quête de contacts avec autrui.
Mieux, toujours selon Michel Lussault : un « hyper-lieu » comme Time Square par exemple, créé à grands coups d’images, de lumières, de millions de dollars constitue un espace de forte sociabilité et de partage dans lequel s’expriment à la fois la joie (Nouvel an) ou la révolte et l’indignation.
Selon le géographe, le monde est donc simultanément toujours plus globalisé et homogène mais de plus en plus localisé et hétérogène.
* A propos de Venise : extraits de : « Hyper-lieux » de Michel Lussault : « Venise est sans doute l’un des endroits où l’on saisit le mieux le caractère ambivalent d’un genre de tourisme, qui assure la survie d’un espace et d’une société, tout en les aliénant par la construction d’un artefact spatio-temporel très particulier : le site touristique mondialisé. (...)
Pour le géographe, Michel Lussault qui a publié un ouvrage intitulé « Hyper-lieux », la globalisation économique et culturelle n’a pas conçu un monde « lisse et plat où les différences culturelles se sont estompées, où l’individu est aliéné et où, pire, la sociabilité des uns et des autres s’est appauvrie et a même disparu.
Dans un aéroport, une gare, un ressort, un parc à thèmes, on a beau souscrire à des attitudes mondialisées, on invente aussi de nouveaux gestes issus à la fois de la mondialisation et du local qui ne sont pas exempts d’une tentative d’appropriation des lieux et d’une quête de contacts avec autrui.
Mieux, toujours selon Michel Lussault : un « hyper-lieu » comme Time Square par exemple, créé à grands coups d’images, de lumières, de millions de dollars constitue un espace de forte sociabilité et de partage dans lequel s’expriment à la fois la joie (Nouvel an) ou la révolte et l’indignation.
Selon le géographe, le monde est donc simultanément toujours plus globalisé et homogène mais de plus en plus localisé et hétérogène.
* A propos de Venise : extraits de : « Hyper-lieux » de Michel Lussault : « Venise est sans doute l’un des endroits où l’on saisit le mieux le caractère ambivalent d’un genre de tourisme, qui assure la survie d’un espace et d’une société, tout en les aliénant par la construction d’un artefact spatio-temporel très particulier : le site touristique mondialisé. (...)
Alter-lieux, tiers-lieux, néo localisme et autres contre-lieux
Quant au néo localisme, évoqué aussi par les anthropologues, que désigne-t-il ?
Il implique un phénomène bien réel, très régulièrement mis au cœur des dispositifs touristiques, selon lequel il convient d’agir à partir de l’échelle locale pour avoir des répercussions sur le global.
Ce néo localisme s’accompagne surtout de la création de nouveaux lieux que l’on appelle les « alter-lieux », « éco lieux » ou « tiers-lieux ».
De nature communautaire, ils prétendent ressusciter la convivialité, la solidarité et des pratiques ancestrales notamment de production alimentaire et d’hébergement. Le réseau Oasis et ses 500 communautés inspirées de la stratégie des colibris en est un exemple.
Sauf que, le global aujourd’hui n’est pas que physique, il est virtuel. Via l’internet que les partisans du néo localisme des années soixante n’ont pas eu à connaître, tout acteur du local est simultanément engagé dans une relation avec des espaces de différentes tailles.
La spatialité aujourd’hui se déploie à l’échelle du monde et fait peser sur l’individu un poids supplémentaire énorme : celui d’agir et de penser en fonction de l’humanité toute entière !
Pour un opérateur touristique, il s’agit donc d’avoir en tête en permanence les millions de regards que l’humanité déploie sur lui afin d’ajuster les spécificités des lieux entre elles ! La composante alimentaire locale au succès indéniable doit en particulier faire partie de cet ajustement.
Quant au tiers-lieu, il est moins spécialisé. Défini par le sociologue Ray Oldenburg à la fin des années 80, il est, de manière simplifiée, un lieu où les personnes se plaisent à sortir et se regrouper de manière informelle, situé hors du domicile et de l’entreprise.
Depuis, la notion de tiers-lieu a évolué et surtout de nouveaux espaces tels que les espaces de télétravail, de coworking, les fablabs, livinglabs, hackerspaces etc., se sont multipliés. Avec une connotation écologique qui en fait aussi des « éco lieux ».
Il implique un phénomène bien réel, très régulièrement mis au cœur des dispositifs touristiques, selon lequel il convient d’agir à partir de l’échelle locale pour avoir des répercussions sur le global.
Ce néo localisme s’accompagne surtout de la création de nouveaux lieux que l’on appelle les « alter-lieux », « éco lieux » ou « tiers-lieux ».
De nature communautaire, ils prétendent ressusciter la convivialité, la solidarité et des pratiques ancestrales notamment de production alimentaire et d’hébergement. Le réseau Oasis et ses 500 communautés inspirées de la stratégie des colibris en est un exemple.
Sauf que, le global aujourd’hui n’est pas que physique, il est virtuel. Via l’internet que les partisans du néo localisme des années soixante n’ont pas eu à connaître, tout acteur du local est simultanément engagé dans une relation avec des espaces de différentes tailles.
La spatialité aujourd’hui se déploie à l’échelle du monde et fait peser sur l’individu un poids supplémentaire énorme : celui d’agir et de penser en fonction de l’humanité toute entière !
Pour un opérateur touristique, il s’agit donc d’avoir en tête en permanence les millions de regards que l’humanité déploie sur lui afin d’ajuster les spécificités des lieux entre elles ! La composante alimentaire locale au succès indéniable doit en particulier faire partie de cet ajustement.
Quant au tiers-lieu, il est moins spécialisé. Défini par le sociologue Ray Oldenburg à la fin des années 80, il est, de manière simplifiée, un lieu où les personnes se plaisent à sortir et se regrouper de manière informelle, situé hors du domicile et de l’entreprise.
Depuis, la notion de tiers-lieu a évolué et surtout de nouveaux espaces tels que les espaces de télétravail, de coworking, les fablabs, livinglabs, hackerspaces etc., se sont multipliés. Avec une connotation écologique qui en fait aussi des « éco lieux ».
Les contre-lieux : révolte et combat
Enfin, on pourrait ajouter la fabrication de « contre-lieux » comme les Zad par exemple ou les Ronds-points des Gilets jaunes, incarnant un combat, une révolte ou au moins une contestation.
Ces lieux sont parfois éphémères : c’est la Place de la République pendant le mouvement Nuit debout ou à New York Occupy Wall Street.
Ayant une valeur plus ou moins historique et symbolique, ils ont une valeur touristique. Un temps au moins.
Ces lieux sont parfois éphémères : c’est la Place de la République pendant le mouvement Nuit debout ou à New York Occupy Wall Street.
Ayant une valeur plus ou moins historique et symbolique, ils ont une valeur touristique. Un temps au moins.
Repenser les liens entre lieux et populations
Face à̀ des notions complexes mais bien réelles et des débats intellectuels mais légitimes qui ne manqueront pas d’occuper fort pertinemment les années à venir, les territoires ne peuvent faire l’économie d’une réflexion transcendant les simples questions de marketing.
Prospecter des marchés et répondre à leurs attentes devrait à l’avenir aller bien au- delà d’une mise en adéquation superficielle de l’offre à la demande.
Il s’agira sans doute de repenser les lieux dès leur conception dans le cas de nouveaux lieux, afin de leur donner d’emblée la dimension nécessaire à leur spécificité.
Et, pour cela, il ne devrait pas s’agir de combiner tout simplement une dose de localisme avec une dose de mondialisation (comme le font les aéroports par exemple et bien des chaînes hôtelières).
Il ne s’agira pas non plus de multiplier les plagiats de villages dans des villes devenues trop vastes, agrémentées de verdissement, de cultures alimentaires locales destinées à combler les attentes des « locavores » !
Le passé imité et reconstruit, l’échelle humaine redécouverte ne suffisent pas. Le mini contre le maxi, la décroissance contre la croissance, le slow contre le fast, les Amaps contre le supermarché ... Tous ces schémas ne devraient rien régler sur du long terme.
Modes passagères, capables de calmer le jeu économique et social pendant un temps, ces solutions seront provisoires à l’heure où l’humanité aurait tout intérêt à envisager des solutions durables n’engageant pas sa survie.
Car le lieu aujourd’hui, quelle que soit sa nature a un défi à relever : survivre sans pour autant détruire l’environnement qui l’alimente. Survivre surtout grâce à sa composante humaine.
Laquelle lui donnera ou ne lui donnera pas le génie qui lui est nécessaire pour attirer des visiteurs et en être apprécié.
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Prospecter des marchés et répondre à leurs attentes devrait à l’avenir aller bien au- delà d’une mise en adéquation superficielle de l’offre à la demande.
Il s’agira sans doute de repenser les lieux dès leur conception dans le cas de nouveaux lieux, afin de leur donner d’emblée la dimension nécessaire à leur spécificité.
Et, pour cela, il ne devrait pas s’agir de combiner tout simplement une dose de localisme avec une dose de mondialisation (comme le font les aéroports par exemple et bien des chaînes hôtelières).
Il ne s’agira pas non plus de multiplier les plagiats de villages dans des villes devenues trop vastes, agrémentées de verdissement, de cultures alimentaires locales destinées à combler les attentes des « locavores » !
Le passé imité et reconstruit, l’échelle humaine redécouverte ne suffisent pas. Le mini contre le maxi, la décroissance contre la croissance, le slow contre le fast, les Amaps contre le supermarché ... Tous ces schémas ne devraient rien régler sur du long terme.
Modes passagères, capables de calmer le jeu économique et social pendant un temps, ces solutions seront provisoires à l’heure où l’humanité aurait tout intérêt à envisager des solutions durables n’engageant pas sa survie.
Car le lieu aujourd’hui, quelle que soit sa nature a un défi à relever : survivre sans pour autant détruire l’environnement qui l’alimente. Survivre surtout grâce à sa composante humaine.
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Josette Sicsic - DR
Journaliste, consultante, conférencière, Josette Sicsic observe depuis plus de 25 ans, les mutations du monde afin d’en analyser les conséquences sur le secteur du tourisme.
Après avoir développé pendant plus de 20 ans le journal Touriscopie, elle est toujours sur le pont de l’actualité où elle décode le présent pour prévoir le futur. Sur le site www.tourmag.com, rubrique Futuroscopie, elle publie plusieurs fois par semaine les articles prospectifs et analytiques.
Contact : 06 14 47 99 04
Mail : touriscopie@gmail.com
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